Les néonicotinoïdes sont interdits par le droit européen et une loi française, mais des dérogations sont possibles. En 2021, le Conseil d’État arbitre à trois reprises ce sujet.
C’est une mesure phare en matière de protection de la biodiversité : la loi du 8 août 2016 et le droit européen interdisent l’utilisation de pesticides contenant des néonicotinoïdes. Saisi à trois reprises en 2021 sur ce sujet, le Conseil d’État a vérifié la légalité des textes qui en assurent l’application au quotidien.
L’interdiction est la règle
En juillet 2021, il valide le décret du 30 juillet 2018, dans lequel le Gouvernement fixe la liste des substances concernées par l’interdiction. Le texte était contesté par l’Union des industries de la protection des plantes et par des organisations de producteurs. Pour éclairer sa décision, le Conseil d’État interroge la Cour de justice de l’Union européenne, qui confirme la légalité de l’interdiction au regard du droit européen. S’appuyant sur la recherche scientifique, les juges rappellent que les néonicotinoïdes sont un danger pour la santé animale et humaine. Le fait que d’autres États membres de l’UE n’aient pas adopté de législation comparable ne justifie pas de remettre en cause l’interdiction française.
Une exception pour les betteraves sucrières…
Bien qu’exceptionnelles, certaines dérogations à la règle demeurent possibles. Alors que les cultures de betteraves sucrières sont menacées par des infestations massives de pucerons en décembre 2020, une loi autorise temporairement l’utilisation des néonicotinoïdes. Saisi début 2021 par des associations environnementales et des représentants des apiculteurs et agriculteurs, le Conseil d’État confirme que cette dérogation pour l’année 2021 est légale. Il rappelle que le Conseil constitutionnel a jugé la loi permettant de prendre cette dérogation conforme à la Charte de l’environnement et au droit de propriété des apiculteurs. Le droit européen prévoit lui-même des dérogations temporaires lorsque de graves risques pour l’agriculture sont avérés et en l’absence d’autre solution. Ici, la dérogation est bien une mesure d’exception – elle ne peut être prolongée que jusqu’à 2023, le temps que des solutions alternatives soient mises au point.
… mais pas pour le maïs
Pour autant, l’exception ne doit pas devenir la règle. En juillet 2021, le Conseil d’État confirme notamment que le Gouvernement n’a pas le droit de l’étendre aux producteurs de maïs. Et qu’il est impossible pour ces derniers de se prévaloir de la dérogation accordée spécifiquement pour protéger la betterave sucrière.
En savoir plus :
> DÉCISION n° 450194 du 15 mars 2021, « Néonicotinoïdes pour les betteraves sucrières »
> DÉCISION n° 424617 du 12 juillet 2021, « Interdiction des néonicotinoïdes »
> DÉCISION n° 427387 du 12 juillet 2021, « Refus de dérogation pour les cultures de maïs »