Rapport public 2001

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Rapport public 2001

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L'activité juridictionnelle

1. Au cours de l'année 2001, l'activité contentieuse du Conseil d'Etat s'est caractérisée, si l'on fait abstraction des séries et des affaires réglées par ordonnances du Président de la Section du Contentieux, par un accroissement à la fois du nombre des affaires enregistrées et du nombre des affaires jugées. Les entrées sont passées de 8 703 à 9 425, soit une augmentation de 9 % et les affaires jugées sont passées de 8 504 à 9 240, soit une augmentation de 8,6 % [1] ; il y a donc un léger déficit des décisions rendues par rapport aux affaires entrées. Le stock a dès lors lui-même légèrement augmenté en valeur absolue, mais l'augmentation des affaires jugées fait que ce stock a diminué en valeur relative : il représente 110 % du nombre des affaires jugées au cours de l'année écoulée, contre 117 % en 2000 et 124 % en 1999. 

2. Le contentieux des élections municipales et cantonales s'est traduit par l'introduction devant le Conseil d'Etat, juge d'appel de ces élections, de 698 affaires, ce qui explique en large partie l'accroissement de 9 % des entrées nettes en 2001. Sur ces 698 affaires, 147 avaient été jugées avant le 31 décembre 2000 et 355 avant le 1er mars 2001. Compte tenu des affaires en cours de jugement, il devrait rester 290 affaires à juger au 18 mars, date limite retenue pour la lecture de décisions, compte tenu du contexte électoral. La quasi-totalité des affaires à juger ont trait à des élections correspondant à des circonscriptions de plus de 9.000 habitants, pour lesquelles, étant donné le délai de quatre mois correspondant à l'intervention de la commission des comptes de campagne, les tribunaux administratifs n'ont pu se prononcer qu'en septembre ou en octobre. 

3. Tout comme les années précédentes, il convient de signaler que l'activité juridictionnelle du Conseil d'Etat est déséquilibrée par la part prise par le contentieux des étrangers et plus précisément par les trois masses que constituent les requêtes dirigées contre les refus de visa, les appels contre des jugements des tribunaux administratifs statuant en matière de reconduite à la frontière et les pourvois en cassation contre les décisions de la Commission de recours des réfugiés. Ce contentieux représente plus de la moitié des affaires jugées par le Conseil d'Etat en 2001 (4 733 affaires sur 9 240). Certes, la mise en oeuvre du décret du 10 novembre 2000, selon lequel les recours contentieux contre les refus de visa doivent désormais être précédés d'un recours administratif préalable devant une commission spécialement créée à cet effet, a entraîné une sensible diminution de ce contentieux (575 affaires enregistrées en 2001 contre 1 383 en 2000), mais le contentieux de la reconduite à la frontière a continué à augmenter : 2 173 affaires enregistrées en 2001, contre 2 120 en 2000 et 631 en 1997.

4. L'année 2001 a été marquée par l'entrée en vigueur des dispositions issues de la loi du 30 juin 2000 relative aux référés administratifs. Le juge des référés du Conseil d'Etat a été saisi de 355 requêtes ; il en avait jugé 349 au 31 décembre 2001. Toutes demandes confondues, la durée moyenne de l'instance, y compris l'instruction, a été de neuf jours ; ce chiffre s'est abaissé à trois jours pour le référé liberté de l'article L. 521-2 du Code de justice administrative. Dans le même temps, le Conseil d'Etat a été saisi de 660 pourvois en cassation contre des ordonnances émanant des juges des référés des tribunaux administratifs. Rapproché du nombre total des ordonnances rendues par ces derniers, ce chiffre correspond à un taux de pourvois en cassation d'environ 8 % qui est satisfaisant ; au 31 décembre 2000, 443 de ces pourvois en cassation avaient été jugés. 

5. S'agissant des tribunaux administratifs, l'année 2001 a été marquée par une reprise, forte, de l'augmentation des entrées, après cinq années de diminution continue, à l'exception du pic de l'année 1998 lié à l'opération de régularisation des titres de séjour des étrangers : 118 726 entrées en 2001 contre 109 443 en 2000 ; cette augmentation de 8 283 du nombre des requêtes n'est qu'en partie explicable par les requêtes liées aux élections locales, au nombre de 4 500. Le nombre des affaires jugées qui avait augmenté de 24 % au cours des quatre dernières années, continue de progresser, mais dans une moindre proportion (1,5 %). Cette légère progression a permis de maintenir à 98 % le ratio des affaires traitées sur les affaires enregistrées. Comme pour le Conseil d'Etat, l'année 2001 a été marquée par l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000 relative aux référés. Les résultats statistiques témoignent du succès de cette réforme. S'agissant des référés prévus par l'article L. 521-1 du Code de justice administrative, des référés suspension, les tribunaux administratifs ont enregistré 7 389 requêtes en 2001. Ces requêtes ont été jugées dans un délai moyen de 26 jours. La procédure dite «du référé-injonction», instituée par l'article L. 521-2 du même code a fait l'objet de 781 requêtes pour lesquelles le délai moyen de jugement s'est établi, délai de notification compris, à cinq jours. 

6. Enfin, la situation des cours administratives d'appel demeure extrêmement préoccupante. Certes, pour la première fois, le nombre des affaires enregistrées a diminué, passant de 16 540 à 15 400. Ce chiffre reste toutefois bien supérieur au nombre des affaires réglées qui s'est stabilisé à 13 000, après l'augmentation de 13,3 % en 2000. L'impact de la création des nouvelles cours administratives d'appel de Marseille en 1997, puis de Douai en 1999, qui avait permis le doublement en cinq ans du nombre des dossiers réglés, tend donc naturellement à s'atténuer. De ce fait, le stock global des affaires en instance devant ces cours s'est encore accru de 6,1 %, pour atteindre 40 000 affaires, soit plus du triple de la capacité de jugement annuelle des cours.

 

L'activité consultative et d'études

L'activité consultative du Conseil d'Etat a connu en 2001, dans l'ensemble et sauf en ce qui concerne la Section sociale, un rythme apparemment moins soutenu que l'année précédente, qu'il s'agisse du nombre total de textes examinés ou du nombre de demandes d'avis traitées. Toutefois, le nombre de projets de loi examinés est passé de 74 en 2000 à 85 en 2001, ceux des projets de loi autorisant la ratification ou l'approbation de conventions internationales passant de 34 à 43. Plus globalement, les projets de loi, d'ordonnance et de lois de pays examinés, au nombre de 117 ont été plus nombreux qu'en 1999 et en 2000. Au-delà de ces chiffres, il faut souligner le volume parfois démesuré, l'hétérogénéité de contenu et la complexité juridique d'un grand nombre de projets de loi. En outre, on doit constater que certains de ces projets n'auront pas pu être débattus, même en première lecture, par le Parlement, au cours de l'actuelle législature. Il en sera ainsi, notamment, du projet de loi portant réforme des autorités financières et du projet de loi sur la société de l'information que le Conseil d'Etat avait été amené à examiner, dans des délais inhabituellement brefs, au premier semestre 2001. L'expérience a montré les inconvénients de la technique des projets de loi portant diverses mesures d'ordre financier, social ou autre. Cette technique, qui pousse à une accumulation de dispositions disparates, ne favorise pas l'examen approfondi de leur effet réel sur l'ordonnancement juridique. 

S'agissant des transpositions de directives européennes, il convient de signaler leur caractère souvent problématique en raison de l'utilisation dans le texte des directives de concepts étrangers aux notions les mieux établies du droit interne. Ainsi que l'a recommandé le Conseil d'Etat dans ses études qui seront évoquées plus loin, sur « la norme internationale en droit français » et sur « L'influence internationale du droit français », il convient donc, dès le stade des premières négociations sur les projets de directive, de veiller à ce que la discussion s'engage sur la base de concepts ayant la même portée juridique dans tous les Etats membres et à ce que la formulation retenue par les juristes linguistes des institutions communautaires soit dépourvue d'ambiguïté. Par ailleurs, notamment à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la protection des personnes à l'égard des traitements de données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, il a été constaté que la transposition de directives peut poser des problèmes délicats dans le cas où le corpus législatif préexistant est, en fait, plus exigeant quant au mode de protection des intérêts en cause. 

L'activité consultative du Conseil d'Etat a été complétée par les travaux de la Section du rapport et des études, en charge, outre le rapport et les études, de l'exécution des décisions de la juridiction administrative. 

Le volume d'activité de la Section, en matière d'exécution des décisions de la juridiction administrative, est resté stable en 2001. L'excédent des affaires réglées sur les affaires enregistrées ne doit toutefois pas dissimuler le fait que, pour avoir sensiblement diminué en 2001, ces dernières ne révèlent pas moins la persistance de difficultés pratiques à obtenir l'exacte exécution de la chose jugée, notamment en matière de fonction publique, de remembrement et de tarifications sanitaires et sociales. 

S'agissant des études, la Section a entrepris et achevé à la demande du Premier Ministre, deux études publiées par la Documentation française. La première étude, portant sur « L'influence internationale du droit français », a conduit la Section à réunir autour d'elle non seulement des fonctionnaires des administrations compétentes, mais des membres de diverses institutions ou professions. Elle a abouti à une analyse à même d'inspirer des initiatives concertées dans un domaine où, par l'accueil de nombreuses délégations de Cours suprêmes étrangères, de parlementaires et de fonctionnaires, par la formation de stagiaires étrangers et par la participation de ses membres à diverses missions de coopération à travers le monde, le Conseil d'Etat a une expérience concrète et une réflexion. La seconde étude porte sur les conditions de publicité et d'entrée en vigueur des lois et de certains actes administratifs. Elle contient des propositions précises de clarification ou de simplification du droit en vigueur sur ce point, que le comité interministériel à la réforme de l'Etat a, le 15 novembre 2001, décidé de mettre en oeuvre dans un projet de loi.

 

[1] En chiffres bruts, c'est-à-dire en prenant en compte les séries et les affaires réglées par ordonnances du Président de la Section du Contentieux, les entrées sont restées au même niveau qu'en 1999 et 2000, soit 12 700 à 12 800 affaires.