Novembre 2020 : le Conseil d’État rend une décision historique pour le climat. Désormais, les engagements pris par la France en 2015 pour réduire les émissions de gaz à effet de serre sont considérés comme des objectifs contraignants.
En signant l’Accord de Paris sur le climat, la France s’était engagée, d’ici 2030, à réduire ses émissions de 37 % par rapport à 2005. Comment s’assurer que ces objectifs se traduisent dans les actes ? Désormais, ces objectifs sont considérés comme contraignants : le Gouvernement peut être sommé de rendre des comptes sur les actions qu’il mène pour les atteindre.
Climat : l’État mis face à ses engagements
C’est une requête de la commune de Grande-Synthe (Nord) qui a conduit le Conseil d’État à se prononcer pour la première fois sur ce sujet. Soutenue par des associations et d’autres collectivités territoriales, la commune demande depuis 2018 au Gouvernement – en vain – de prendre des mesures supplémentaires pour respecter ses engagements. De façon novatrice, le Conseil d’État commence par juger que la commune, en tant qu’elle borde la mer du Nord et se trouve de ce fait particulièrement exposée aux effets du changement climatique, peut valablement attaquer le refus d’agir du Gouvernement. Revenant sur les objectifs climatiques que la France a traduits dans la loi, le Conseil d’État reconnaît ensuite leur nature contraignante – une grande première. C’est désormais clair : atteindre ces objectifs s’impose au Gouvernement, il doit rendre des comptes. Peut-il reporter après 2020 une partie significative de l’effort de réduction des émissions ? Ce report n’empêchera-t-il pas d’atteindre les objectifs d’ici 2030 ?
Agir aujourd’hui pour 2030
Car la France affiche déjà un retard important : pour la période 2015- 2018, elle devait réduire ses émissions de 2,2 % par an, mais la réduction n’a pas dépassé 1 %. Pour le Conseil d’État, la baisse de l’objectif de réduction pour la période 2019-2023 prévue dans le décret pris par le Gouvernement le 21 avril 2020 conduit à reporter à plus tard l’essentiel de l’effort, sans savoir s’il reste encore possible d’atteindre nos objectifs à l’horizon 2030. Le juge administratif donne donc trois mois au Gouvernement pour expliquer comment il entend tenir ses engagements. Les justifications apportées seront examinées lors d’une audience prévue à l’été 2021 : le Conseil d’État décidera alors si la stratégie exposée est tenable ou si des mesures supplémentaires doivent être ordonnées à l’État.
> DÉCISION n° 427301, « Grande-Synthe/Émissions de gaz à effet de serre »
> EXÉCUTION de la décision, « Pollution de l’air et gaz à effet de serre : suites données aux décisions de juillet et novembre 2020 »
> Lire « Favoriser le développement durable » dans le bilan annuel 2020 , pages 58-65