À la Une de la Lettre de la justice administrative n° 56 : l'ouverture du cycle de conférences sur le sport au Conseil d'État
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CONTENTIEUX
Asile
Le Conseil d’État était saisi d’un pourvoi contre un arrêt de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) qui avait fait droit à une demande d’annulation d’une décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ayant retiré la qualité de réfugié à un ressortissant russe d’origine tchéchène et avait rétabli ce dernier dans sa qualité de réfugié. Pour fonder sa décision de retrait l’OFPRA avait considéré que l’intéressé s’était volontairement réclamé de la protection du pays dont il a la nationalité, ce qui constitue une clause de cessation de protection prévue au 1° du paragraphe C de l’article 1er de la Convention de Genève. La Cour quant à elle a écarté ce motif comme non fondé en jugeant que, dans les circonstances particulières de l’espèce, ni les brefs séjours en Russie ni la délivrance d’un passeport russe ne suffisait à caractériser un acte d’allégeance. Par ailleurs, elle a écarté un motif nouveau invoqué par l’OFPRA en cours d’instance tiré de ce qu’il y aurait des raisons sérieuses de considérer que la présence en France de l’intéressé constituerait une menace grave pour la sûreté de l’Etat en jugeant que la fiche « S » versée au dossier ne suffisait pas à établir une telle menace.
Le Conseil d’État rappelle tout d’abord que l’article L. 711-6 du code de l’entrée et des séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) prévoit que le statut de réfugié peut être refusé ou retiré s’il y a des raisons sérieuses de considérer que la présence en France de la personne concernée constitue une menace grave pour la sûreté de l’Etat. Par ailleurs, le décret relatif au fichier des personnes recherchées prévoit que peuvent être inscrites sous la rubrique « S » les personnes faisant l’objet de recherches pour prévenir des menaces graves pour la sécurité publique ou la sûreté de l’Etat dès lors que des informations ou des indices réels ont été recueillis à leur égard. Le Conseil d’État précise ensuite la manière dont le juge de l’asile doit former sa conviction en cas d’information relative à une inscription au fichier des personnes recherchées. Ainsi, il estime que si une telle inscription ne saurait suffire par elle-même à établir que la condition posée par les dispositions de l’article L. 711-6 est remplie, il appartient au juge de l’asile, lorsqu’il est informé d’une telle inscription, que la fiche soit ou non produite à l’instance, de se forger une conviction au vu de l’argumentation des parties sur ce point dans le cadre de la procédure contradictoire. Le juge de l’asile ne saurait dénier toute force probante à l’inscription au fichier d’une personne faisant l’objet de recherches pour prévenir des menaces graves pour la sécurité publique ou la sûreté de l’Etat sans user de ses pouvoirs d’instruction pour recueillir toutes informations pertinentes, notamment auprès du ministre de l’intérieur, qu’il peut appeler dans l’instance afin qu’il apporte au débat contradictoire tous éléments et informations sur les circonstances et les motifs de l’inscription en cause.
En l’espèce, le Conseil d’État constate que la Cour a estimé qu’il ne résultait pas de l’instruction qu’il existait des raisons sérieuses de penser que la présence en France de l’intéressé constituerait une telle menace au motif que la fiche « S » n’apportait aucune justification ni explication sur les circonstances de son inscription ni sur des velléités affirmées d’enrôlement dans un réseau terroriste. Il juge que la Cour nationale du droit d’asile a méconnu son office de juge de pleine juridiction et entaché sa décision d’erreur de droit en se fondant sur le seul contenu de cette fiche versée au dossier pour juger que la condition posée par le CESEDA n’était pas remplie, sans recueillir, pour se forger sa conviction, aucune autre information pertinente, notamment en appelant dans l’instance le ministre de l’intérieur.
> Consultez la décision n°416013
Conditions de détention
Le Conseil d’État était saisi en cassation d’une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Guyane ayant rejeté la demande tendant au versement d’une provision de 9 100 euros en réparation du préjudice qu’un détenu estimait avoir subi du fait de conditions de détention attentatoires à la dignité humaine. Le juge des référés du tribunal administratif avait estimé que la créance dont l’intéressé se prévalait était prescrite pour la période du 24 mai au 31 décembre 2011 et qu’elle ne présentait pas un caractère non sérieusement contestable pour la période de détention allant du 1er janvier 2012 au 6 août 2013.
Le Conseil d’État rappelle tout d’abord les critères à prendre compte afin de déterminer si des conditions de détention portent atteinte à la dignité humaine. Il précise ensuite que seules des conditions de détention qui porteraient atteinte à la dignité humaine révèlent l’existence d’une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique et que cette atteinte, si elle est caractérisée, est de nature à engendrer, par elle-même, un préjudice moral pour la personne qui en est victime qu’il incombe à l’Etat de réparer. Le Conseil d’État indique par ailleurs qu’à conditions de détention constantes, le seul écoulement du temps aggrave l’intensité du préjudice subi.
Sur la question de la prescription de la créance, le Conseil d’État rappelle que lorsque la responsabilité d'une personne publique est recherchée, les droits de créance invoqués en vue d'obtenir l'indemnisation des préjudices doivent être regardés comme acquis à la date à laquelle la réalité et l'étendue de ces préjudices ont été entièrement révélées, ces préjudices étant connus et pouvant être exactement mesurés. Par conséquent, la créance indemnitaire relative à la réparation d'un préjudice présentant un caractère continu et évolutif doit être rattachée à chacune des années au cours desquelles ce préjudice a été subi. Dans ce cas, le délai de prescription de la créance relative à une année court, sauf exception prévue par les textes, à compter du 1er janvier de l’année suivante, à la condition qu’à cette date le préjudice subi au cours de cette année puisse être mesuré. Il juge que le préjudice moral subi par un détenu à raison de conditions de détention attentatoires à la dignité humaine revêt un caractère continu et évolutif. Par ailleurs, rien ne fait obstacle à ce que ce préjudice soit mesuré dès qu’il a été subi. Il s’ensuit que la créance indemnitaire qui résulte de ce préjudice doit être rattachée, dans la mesure où il s’y rapporte, à chacune des années au cours desquelles il a été subi. Il en déduit en l’espèce que la demande présentée par M. B pour la période du 24 mai au 31 décembre2011 était prescrite.
S’agissant du caractère non sérieusement contestable de la créance, le Conseil d’État examine les conditions de détentions de M. B. au vu des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif et juge que ce dernier a inexactement qualifié les faits soumis à son examen en jugeant que les conditions de détention de M. B. ne caractérisaient pas, dans les circonstances de l’espèce, une atteinte à la dignité humaine pour en déduire que l’obligation invoquée n’était pas non sérieusement contestable.
> Consultez la décision n° 412010
Office du juge
Le Conseil d’État était saisi d’un pourvoi en cassation par la Société Eden dans le cadre d’un litige relatif à un refus du préfet du Var de procéder au renouvellement de l’agrément d’établissement de formation à la conduite des navires de plaisance à moteur dont elle était titulaire. La Société a saisi le tribunal administratif d’une demande d’annulation de ce refus et à ce qu’il soit enjoint, à titre principal, de délivrer l’agrément sollicité ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande. Le tribunal administratif a fait droit à sa demande d’annulation et a enjoint au préfet de réexaminer sa demande. La Société a saisi la Cour administrative d’appel d’un appel contre ce jugement en tant qu’il n’a pas fait droit à ses conclusions à fin d’injonction présentées à titre principal tendant à la délivrance de l’agrément sollicité. La cour administrative d’appel de Marseille s’est prononcée sur les moyens de légalité interne que la société soulevait en appel, par lesquels la société faisait valoir que le refus d’agrément pour la formation à la conduite en mer aurait été illégal sur le fond, et les a écartés. La Société Eden a alors saisi le Conseil d’État en cassation d’une demande d’annulation de cet arrêt.
Le Conseil d’État précise tout d’abord l’office du juge de l’excès de pouvoir en indiquant que le motif par lequel le juge de l'excès de pouvoir juge fondé l'un quelconque des moyens de légalité soulevés devant lui ou des moyens d'ordre public qu'il relève d'office suffit à justifier l'annulation de la décision administrative contestée. Il s'ensuit que, sauf dispositions législatives contraires, le juge de l'excès de pouvoir n'est en principe pas tenu, pour faire droit aux conclusions à fin d'annulation dont il est saisi, de se prononcer sur d'autres moyens que celui qu'il retient explicitement comme étant fondé. Il précise que la portée de la chose jugée et les conséquences qui s'attachent à l'annulation prononcée par le juge de l'excès de pouvoir diffèrent toutefois selon la substance du motif qui est le support nécessaire de l'annulation. C'est en particulier le cas selon que le motif retenu implique ou non que l'autorité administrative prenne, en exécution de la chose jugée et sous réserve d'un changement des circonstances, une décision dans un sens déterminé. Lorsque le juge de l'excès de pouvoir annule une décision administrative alors que plusieurs moyens sont de nature à justifier l'annulation, il lui revient, en principe, de choisir de fonder l'annulation sur le moyen qui lui paraît le mieux à même de régler le litige, au vu de l'ensemble des circonstances de l'affaire. Mais, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions à fin d'annulation, des conclusions à fin d'injonction tendant à ce que le juge enjoigne à l'autorité administrative de prendre une décision dans un sens déterminé, il incombe au juge de l'excès de pouvoir d'examiner prioritairement les moyens qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de l'injonction demandée. Il en va également ainsi lorsque des conclusions à fin d'injonction sont présentées à titre principal sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, qui implique nécessairement qu’une personne publique prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminée, et à titre subsidiaire sur le fondement de l'article L. 911-2, qui implique que la personne publique prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction. Lorsque le requérant choisit de hiérarchiser, avant l'expiration du délai de recours, les prétentions qu'il soumet au juge de l'excès de pouvoir en fonction de la cause juridique sur laquelle reposent, à titre principal, ses conclusions à fin d'annulation, il incombe au juge de l'excès de pouvoir de statuer en respectant cette hiérarchisation, c'est-à-dire en examinant prioritairement les moyens qui se rattachent à la cause juridique correspondant à la demande principale du requérant. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens assortissant la demande principale du requérant mais retient un moyen assortissant sa demande subsidiaire, le juge de l'excès de pouvoir n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler la décision attaquée : statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande principale.
En l’espèce, le Conseil d’État constate que la cour administrative d’appel de Marseille a statué sur les moyens, soulevés par la société Eden devant elle, susceptibles de conduire, au delà de l’annulation prononcée par le tribunal administratif pour un vice de légalité externe, au prononcé de l’injonction demandée à titre principal par la société Eden et les a écartés. En statuant ainsi sur l’appel, sans le rejeter comme irrecevable, et en jugeant que le tribunal administratif avait retenu le motif le mieux à même de régler le litige, qu’il n’était pas tenu de se prononcer sur les autres moyens de la requête et qu’il avait à bon droit rejeté les conclusions à fin d’injonction dont il était saisi à titre principal, la cour administrative d’appel n’a pas méconnu l’office du juge de l’excès de pouvoir et n’a pas commis d’erreur de droit.
> Consultez la décision n° 409678
Procédure - Délais de recours
Le Conseil d’État était saisi pour avis par le tribunal administratif de Pau de la question de savoir quel est le délai de recours applicable aux décisions implicites de rejet d’une demande indemnitaire préalable, suite à la modification des articles R. 421-1 et R. 421-3 du code de justice administrative par le décret du 2 novembre 2016 portant modification du code de justice administrative.
L’article R. 421-1 du code de justice administrative prévoit la règle de la décision préalable selon laquelle la juridiction ne peut être saisie d’un litige qui n’aurait donné lieu à aucune décision de l’administration ainsi que le délai de droit commun dans lequel peut être introduit un tel recours. L’article R. 421-2 du même code précise quant à lui le délai de recours contre les décisions implicites de rejet qui est actuellement de deux mois à compter de la date à laquelle est née cette décision. Le décret du 2 novembre 2016 a supprimé l’exception qui prévoyait que le délai de recours de deux mois ne courait qu’à compter d’une décision expresse en matière de plein contentieux.
Le Conseil précise que la question qui lui est soumise est relative aux conditions d’entrée en vigueur de cette suppression, qui a pour effet de soumettre au droit commun, pour la naissance du délai de recours, les décisions implicites dont la contestation relève du plein contentieux, en particulier les refus tacitement opposés par l’administration à une demande indemnitaire.
Il relève tout d’abord que le décret du 2 novembre 2016 qui fixe les conditions de son entrée en vigueur (entrée en vigueur le 1er janvier 2017 et applicable aux requêtes enregistrées à compter de cette date) conduit à distinguer entre les décisions implicites relevant du plein contentieux qui sont nées à compter du 1er janvier 2017 et celles qui sont nées avant cette date. En conséquence, le Conseil d’État indique que, pour les décisions implicites relevant du plein contentieux qui sont nées à compter du 1er janvier 2017, le délai de recours de deux mois court à compter de la date où elles sont nées. S’agissant, en revanche, des décisions nées avant le 1er janvier 2017, le Conseil d’État indique que les dispositions du décret ne peuvent avoir légalement pour effet de déroger au principe général du droit selon lequel, en matière de délai de procédure, il ne peut être rétroactivement porté atteinte aux droits acquis par les parties sous l’empire des textes en vigueur à la date à laquelle le délai a commencé à courir. Il s’ensuit que, s’agissant des refus implicites nés avant le 1er janvier 2017 relevant du plein contentieux, le décret du 2 novembre 2016 n’a pas fait – et n’aurait pu légalement faire - courir le délai de recours contre ces décisions à compter de la date à laquelle elles sont nées. Toutefois, le Conseil relève que les dispositions du décret prévoyant que ce délai doit s’appliquer à toute requête enregistrée à compter du 1er janvier 2017 ont entendu permettre la suppression immédiate, pour toutes les situations qui n’étaient pas constituées à cette date, de l’exception à la règle de l’article R. 421-2 du code de justice administrative dont bénéficiaient les matières de plein contentieux. Il en résulte qu’un délai de recours de deux mois court, par suite, à compter du 1er janvier 2017, contre toute décision implicite relevant du plein contentieux qui serait née antérieurement à cette date.
Le Conseil d’État rappelle toutefois que cette règle doit être combinée avec les dispositions de l’article L. 122-6 du code des relations entre le public et l’administration aux termes desquelles, sauf en ce qui concerne les relations entre l’administration et ses agents, les délais de recours contre une décision tacite de rejet ne sont pas opposables à l’auteur d’une demande lorsque l’accusé de réception prévu par ce code ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas notamment la mention des voies et délais de recours.
> Consultez la décision n° 420797
Protection fonctionnelle
Le Conseil d’État était saisi en cassation d’une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Paris ayant rejeté une requête tendant à la suspension de l’exécution de la décision implicite du ministre des armées refusant de lui accorder la protection fonctionnelle jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de cette décision.
Cette demande de protection fonctionnelle a été formée par M. I., ressortissant afghan ayant exercé les fonctions d’interprète entre les mois de septembre 2011 et septembre 2012 auprès des forces armées françaises déployées en Afghanistan. Suite au retrait des forces armées françaises dans ce pays à partir du mois de juillet 2012, M. I. a sollicité auprès des autorités consulaires françaises la délivrance d’un visa de long séjour dans le cadre du dispositif de réinstallation des personnels civils de recrutement local employés par l’armée française en Afghanistan, en raison des menaces dont il a fait l’objet en raison de sa qualité d’ancien auxiliaire de l’armée française. Cette demande a été rejetée et son recours préalable obligatoire auprès de la commission de recours contre les décisions de refus de visa en France a fait l’objet d’un rejet implicite. Le tribunal administratif de Nantes, saisi d’une demande d’annulation de cette décision a fait droit à la demande de l’intéressé et a enjoint au ministre de l’Intérieur de réexaminer la situation de M. I.. Par une lettre du 22 septembre 2017, M. I., qui séjourne en France sans titre de séjour depuis mai 2017, a demandé le bénéfice de la protection fonctionnelle, sous la forme notamment de la délivrance d’un titre de séjour. Cette demande a fait l’objet d’un refus implicite. M. I a alors saisi le tribunal administratif de Paris d’un recours en annulation contre ce refus et d’un référé suspension. Par une ordonnance du 7 juin 2018 le juge des référés a rejeté cette demande au motif qu’eu égard à l’indépendance des législations, la décision de refus d’octroi de la protection fonctionnelle était sans lien avec l’examen de la possibilité d’octroyer un titre de séjour en France au requérant.
Le Conseil d’État rappelle tout d’abord qu’il résulte d'un principe général du droit que, lorsqu'un agent public est mis en cause par un tiers à raison de ses fonctions, il incombe à la collectivité dont il dépend de le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui, dans la mesure où une faute personnelle détachable du service ne lui est pas imputable, de lui accorder sa protection dans le cas où il fait l'objet de poursuites pénales, sauf s'il a commis une faute personnelle, et, à moins qu'un motif d'intérêt général ne s'y oppose, de le protéger contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont il est l'objet. Il précise ensuite que ce principe général du droit s'étend aux agents non-titulaires de l'Etat recrutés à l'étranger, alors même que leur contrat est soumis au droit local. La juridiction administrative est compétente pour connaître des recours contre les décisions des autorités de l'Etat refusant aux intéressés le bénéfice de cette protection. En l’espèce, il constate que si le contrat dont bénéficiait M. I. en tant qu’interprète est soumis au droit afghan, la juridiction administrative française est compétente pour connaître du recours de l’intéressé contre la décision de refus d’octroi de la protection fonctionnelle compte-tenu de l’extension de la protection fonctionnelle aux agents non-titulaires de l’Etat recrutés à l’étranger. Le Conseil d’État précise en outre que, compte-tenu des circonstances très particulières de l’espèce, la protection fonctionnelle peut exceptionnellement conduire à la délivrance d’un visa ou d’un titre de séjour à l’intéressé et à sa famille. En conséquence, il annule l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Paris pour erreur de droit.
Le Conseil statue ensuite sur la demande de suspension. Il constate que M. I s’est vu délivré le 9 janvier 2019 une attestation de demande d’asile. Le Conseil d’État rappelle que le dépôt d’une demande auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides donne à l’intéressé le droit de se maintenir sur le territoire français jusqu’à la notification de la décision de l’office et, en cas de refus de cette demande, jusqu’à la date de la lecture en audience publique de la cour nationale du droit d’asile si elle est saisi d’un recours. Le Conseil d’État en conclut qu’à la date à laquelle il se prononce, la condition d’urgence n’est pas remplie. En conséquence, il rejette la demande de suspension de M. I. sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’existence d’un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la législative de la décision contestée.
> Consultez la décision n° 421694
BRÈVES
Transfert du contentieux des juridictions des pensions militaires d'invalidité
L’article 51 de la loi n°2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 transfère, en flux et en stock, le contentieux des pensions militaires d’invalidité de première instance et d’appel des juridictions des pensions (tribunaux et cours) aux juridictions administratives de droit commun. Il prévoit aussi un recours administratif obligatoire préalable à toute saisine du tribunal administratif. Deux décrets du 28 décembre 2018, respectivement n°2018-1291 et 2018-1292, organisent ce transfert et le nouveau recours administratif préalable obligatoire. Ils entrent en vigueur le 1er novembre 2019, date à laquelle le transfert sera donc effectif.
États généraux du droit
Le 19 juin prochain aura lieu, à la Maison de la Chimie, la 9ème édition des états généraux du droit administratif. Ils se dérouleront en présence du Vice-président du Conseil d’Etat, du président de la section du contentieux du Conseil d’Etat et de la présidente du Conseil national des barreaux. Le thème qui y sera débattu cette année, « Le juge administratif face aux enjeux du numérique », fera l’objet d’exposés et de discussions s’adressant à un public composé d’avocats et de magistrats. Les échanges seront animés par des magistrats des juridictions françaises et européennes, des avocats, des universitaires, et des représentants de l’administration. Les participants seront amenés à réfléchir et débattre sur des problématiques telles que la dématérialisation, l’intelligence artificielle ou la conservation des données, dans des perspectives à la fois actuelles et prospectives.
Décret portant modification du code de justice administrative
Le décret n° 2019-82 du 7 février 2019 modifie la partie réglementaire du code de justice administrative pour y apporter des nouveautés, notamment procédurales (notamment : modification de l’article R. 421-1 pour prévoir que les décisions prises pour l’exécution d’un contrat ne sont pas soumises au délai de 2 mois qu’il prévoit ; modification de l’article R. 613-5 pour permettre au président de la chambre chargée de l’instruction, au Conseil d’Etat, de clore l’instruction avec un préavis de 15 jours). Ce décret modifie le code de justice administrative également pour supprimer certaines dispositions devenues obsolètes, corriger des références erronées et apporter des clarifications rédactionnelles. Il est entré en vigueur le 10 février 2019.