Conseil d’État, Lundi 6 octobre 2014 Intervention de Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d’État
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Accueil au Conseil d’État du Comité d’orientation stratégique de Sorbonne Universités
Conseil d’État, Lundi 6 octobre 2014
Intervention de Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d’État
Monsieur le président de Sorbonne Universités,
Madame la gouverneure générale,
Mesdames et Messieurs les présidents,
Mes chers collègues,
La présence du comité d’orientation stratégique de Sorbonne Universités dans les murs du Palais-Royal qui abrite le Conseil d’État n’est pas que la coïncidence entre deux œuvres du Cardinal de Richelieu, dont on sait le rôle qu’il a joué dans l’histoire de la Sorbonne et qui fut à l’origine de la création de ce palais d’abord nommé Palais-Cardinal, avant de prendre le nom de Palais-Royal, après sa donation au roi Louis XIII.
Il y a au moins trois bonnes raisons à la présence ce soir des universitaires de renom international réunis pour éclairer l’avenir de Sorbonne Universités.
Le Conseil d’État est d’abord l’un des garants dans notre pays, au titre de notre Constitution, mais aussi des engagements internationaux, notamment européens, de la France, des libertés fondamentales, parmi lesquelles figurent naturellement les grandes libertés universitaires. Il est aussi le garant de toutes celles qu’elles ont pour mission de développer : liberté de recherche, de conscience, d’opinion… Institution destinée à l’origine à rendre rationnel et efficace un État autoritaire, le Conseil d’État est en effet devenu, par l’une de ces ironies dont l’Histoire est friande, l’un des régulateurs essentiels de l’État de droit dans notre pays pour tout ce qui touche aux relations entre les citoyens et la puissance publique.
Le Conseil d’État est ensuite le creuset au sein duquel s’est élaborée en France cette notion, si essentielle à nos yeux, de service public. La mission d’enseignement et de recherche s’est historiquement organisée comme une activité d’intérêt général, comme telle régie par un principe d’égalité, mise en œuvre par des entités publiques et des agents publics, à l’abri des pressions et des intérêts. Quand la loi identifie des activités d’intérêt général et que ces activités sont prises en charge par de telles entités publiques, nous sommes alors en présence d’un service public. Le Conseil d’État veille à ce que ces entités et, plus largement, toute l’administration non seulement respectent les droits et libertés des personnes, mais encore agissent conformément à l’intérêt général, qui est la transposition dans notre culture de la notion de bien commun.
Enfin, le Conseil d’Etat a montré au long de son histoire sa disposition non seulement à accompagner l’innovation, mais aussi à en être la source. Il est par conséquent très heureux de rencontrer en vos personnes la nouvelle figure des communautés d’universités et d’établissements, qu’incarne notamment Sorbonne Universités. Ces communautés qui sont des structures très originales ont pour ambition d’innover, de façon à conserver ce que le système français a de meilleur – un enseignement accessible et de qualité, une recherche dynamique et d’ampleur internationale - et de le conjuguer avec les exigences du monde contemporain, en créant des unités de grande taille, aptes à être reconnues au niveau international par leurs pairs –dont vous êtes vous-mêmes les représentants éminents issus de plusieurs continents.
Notre rencontre est donc placée, en premier lieu, sous le signe de la reconnaissance de ce que les autres pays du monde et, en leur sein, leurs élites académiques peuvent nous apporter en permettant comparaisons, étalonnages, échanges ou, pour parler français, bench-marking.
En deuxième lieu, elle marque tout l’intérêt que des institutions comme la nôtre portent à la recherche universitaire, pas seulement dans le domaine du droit ou des sciences sociales, pour éclairer, comprendre et maîtriser les bouleversements scientifiques, techniques, économiques, et sociaux à l’œuvre dans notre pays, comme dans le reste du monde.
En troisième lieu, notre rencontre permet, comme c’est d’ailleurs la vocation de Sorbonne Universités, le dialogue entre praticiens et chercheurs, concepteurs et acteurs, gardien des normes et explorateurs de ce qui pourrait demain les changer.
L’activité de juge et de conseil du Gouvernement et du Parlement qui est la nôtre n’a de sens qu’ancrée dans la connaissance intime, non seulement de la société dont nous ne sommes pas les censeurs, mais à bien des égards à la fois l’expression et les éclaireurs, mais encore dans la connaissance et la compréhension profondes, que seul l’éventail des disciplines universitaires peut nous permettre d’acquérir, des sciences, des techniques et de l’ensemble des phénomènes à l’œuvre dans tous les compartiments de l’activité humaine.
C’est pourquoi le Conseil d’État est heureux de vous accueillir à la veille de votre première réunion dont il souhaite le plein succès – parce qu’il sait qu’il est l’un de ceux qui bénéficieront, comme la société tout entière, du renouveau de l’université française.