Le Gouvernement a décidé de rendre public l'avis rendu par le Conseil d’État sur un projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2019-1335 du 11 décembre 2019 portant dispositions relatives à l’outre-mer du code de la défense et l’ordonnance n° 2020-7 du 6 janvier 2020 relative à la prise en compte des besoins de la défense nationale en matière de participation et de consultation du public, d'accès à l'information et d'urbanisme
1. Le Conseil d’Etat (section des travaux publics) a été saisi, le 11 février 2020, d’un projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2019-1335 du 11 décembre 2019 portant dispositions relatives à l’outre-mer du code de la défense et n° 2020-7 du 6 janvier 2020 relative à la prise en compte des besoins de la défense nationale en matière de participation et de consultation du public, d'accès à l'information et d'urbanisme.
2. Le projet de loi, restructuré par le Conseil d’Etat (section des travaux publics), comprend trois articles.
Il a un double objet. D’une part, il ratifie les ordonnances mentionnées au point 1. D’autre part, il comporte des mesures visant à procéder à quelques rectifications d’erreurs matérielles contenues dans des dispositions du code de la défense dans leur rédaction résultant de ces deux ordonnances, ainsi que des mesures visant soit à améliorer des dispositions préexistantes du code de l’environnement, soit à y introduire des dispositions nouvelles liées aux matières abordées par l’ordonnance du 6 janvier 2020.
3. Le projet de loi, eu égard à son contenu, ne requiert pas de consultation préalable.
4. Seules les dispositions modifiant le code de l’environnement appellent des commentaires de la part du Conseil d’Etat dans le cadre du présent avis.
Ces dispositions comportent, tout d’abord, plusieurs mesures modifiant le niveau normatif de dispositions préexistantes du code de l’environnement. Ces dispositions, actuellement de niveau réglementaire, prévoient en effet des régimes dérogatoires en matière de participation du public ou encore d’accès aux informations environnementales justifiés par les besoins de la défense nationale, alors que de telles dispositions, eu égard à leur contenu, doivent être regardées comme des « limites » ou des « conditions » dans lesquelles s’exerce le droit de toute personne de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ou d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques, que l’article 7 de la Charte de l’environnement réserve à la compétence exclusive du législateur.
Le Conseil d’Etat (section des travaux publics) note avec satisfaction que le projet de loi, ce faisant, parachève la sécurisation juridique entreprise à l’occasion de l’examen du projet devenu l’ordonnance du 6 janvier 2020.
5. Il approuve ainsi la réécriture de l’article L. 125-2 du code de l’environnement à laquelle procède le projet de loi afin de rehausser au niveau législatif les dispositions relatives à l’exercice du droit du public à l’information sur les risques technologiques et naturels majeurs, actuellement prévues par l’article R. 125-11 du code. Toutefois, il estime que ce rehaussement normatif ne doit pas seulement porter sur le régime dérogatoire prévu à l’article R. 125-11, qui permet de soustraire de l’exercice de ce droit certaines informations, mais doit également concerner le contenu de l’information à donner au public et les niveaux administratifs où elle doit être disponible. Le Conseil d’Etat (section des travaux publics) complète, en conséquence, la réécriture de l’article L. 125-2 opérée par le projet de loi.
6. Le Conseil d’Etat (section des travaux publics) approuve également la réécriture de l’article L. 515-25 du même code à laquelle procède le projet de loi afin d’assurer la mise en conformité avec la Charte de l’environnement des dispositions figurant actuellement au III de l’article R. 515-50 de ce code. Ces dispositions, qui prévoient une dispense d’enquête publique applicable à la procédure d’élaboration des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) associés à certaines installations du ministère de la défense, relèvent en effet du niveau législatif. La nouvelle rédaction de l’article L. 515-25 distingue désormais, à juste titre, les installations relevant du ministère de la défense ainsi que celles nécessaires à la réalisation d’opérations de déminage, qui sont soumises à un régime de soustraction de certaines informations, d’une part, et les installations dont certains éléments sont protégés ou qui ont reçu la qualification d’opérations sensibles intéressant la défense nationale ou qui constituent des lieux de stockage de munitions anciennes qui, seules, bénéficient d’une dispense totale d’enquête publique ou de toute forme de consultation du public, d’autre part.
7. A ces mesures rectifiant le niveau normatif de dispositions réglementaires préexistantes du code de l’environnement viennent s’ajouter des mesures nouvelles, qui sont toutes liées à l’exercice des droits protégés par l’article 7 de la Charte de l’environnement.
Le projet de loi complète ainsi l’article L. 123-19-8 créé par l’ordonnance du 6 janvier 2020 afin d’appliquer aux procédures d’établissement des servitudes et des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) associés aux installations, ouvrages, travaux et aménagements (IOTA) la même dispense de toute forme de participation du public que celle applicable à ces installations en vertu du 3° de cet article, lorsque des informations relatives à ces installations ont fait l’objet d’une classification au titre du secret de la défense nationale et que le nombre ou l’importance de ces informations viderait de sa portée l’accomplissement d’une procédure de participation. Cette extension n’appelle pas de commentaire de la part du Conseil d’Etat.
8. Enfin, le projet de loi procède à la réécriture partielle de l’article L. 512-7-1 qui définit les informations devant figurer dans le dossier de demande d’enregistrement d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE). Le projet de loi prévoit deux nouveaux alinéas.
Le premier énumère les informations qui ne peuvent figurer dans le dossier d’enregistrement mis à la disposition du public et n’appelle pas d’observation.
Le second, en revanche, offre au demandeur la possibilité d’indiquer au préfet les éléments figurant dans le dossier devant être soumis au public les informations dont la divulgation serait de nature à porter atteinte aux intérêts mentionnés au II de l’article L. 124-5 du code de l’environnement. Dans la mesure où aucune disposition applicable au dossier de demande d’enregistrement d’une ICPE n’impose à l’autorité compétente pour organiser l’enquête publique de retirer du dossier des éléments pouvant nuire à la sauvegarde des intérêts mentionnés au II de l’article L. 124-5, ce nouvel alinéa est dépourvu de toute portée utile et ne peut qu’être source de confusion. Le Conseil d’Etat (section des travaux publics) estime, par suite, qu’il ne peut être maintenu dans le projet de loi.
Cet avis a été délibéré et adopté par la section des travaux publics dans sa séance du 18 février 2020.