Avis sur un projet de loi portant mise en conformité du droit de visite douanière et modernisation de l’action douanière

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Le Gouvernement a décidé de rendre public l'avis du Conseil d'État sur un projet de loi portant mise en conformité du droit de visite douanière et modernisation de l’action douanière.

1. Le Conseil d’État a été saisi le 14 mars 2023 d’un projet de loi portant mise en conformité du droit de visite douanière et modernisation de l'action douanière. Ce projet de loi a été modifié par une saisine rectificative reçue le 18 mars 2023. L’étude d’impact a été transmise le 15 mars 2023 et a fait l’objet de deux saisines rectificatives reçues respectivement les 22 et 29 mars 2023.

2. Ce projet de loi qui comprend seize articles est organisé en quatre titres respectivement intitulés : « Maintenir la surveillance douanière sur l’ensemble du territoire », « Moderniser le cadre d’exercice des pouvoirs douaniers », « Habilitation du Gouvernement à procéder à la codification de la partie législative du code des douanes » et « Dispositions relatives à l’outre-mer ».

3. L’étude d’impact du projet répond de manière satisfaisante aux exigences de l’article 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

4. Le Conseil d’État relève que le projet de loi a fait l’objet, comme il le devait, de la consultation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés sur les dispositions relatives à l’expérimentation de l’exploitation élargie des données collectées par le biais des « lecteurs automatiques de plaques d’immatriculation ».

5. Au-delà de ces remarques liminaires, et outre de diverses améliorations de rédaction et de structuration du projet de loi, ce projet de loi appelle, de la part du Conseil d’Etat, les observations suivantes.

Maintien de la surveillance douanière sur l’ensemble du territoire : en ce qui concerne la refonte du droit de visite douanière

6. Le projet de loi tire les conséquences de la décision du 22 septembre 2022 par laquelle le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de l’article 60 du code des douanes aux termes desquelles « Pour l'application des dispositions du présent code et en vue de la recherche de la fraude, les agents des douanes peuvent procéder à la visite des marchandises et des moyens de transport et à celle des personnes. » (CC, décision n° 2022‑1010 QPC). Tout en estimant que la finalité de la lutte contre la fraude en matière douanière qui se rattache à l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infraction, « justifie que les agents des douanes puissent procéder à la fouille des marchandises, des véhicules ou des personnes », le Conseil Constitutionnel a relevé que ces dispositions « permettent, en toutes circonstances, à tout agent des douanes de procéder à ces opérations pour la recherche de toute infraction douanière, sur l’ensemble du territoire douanier et à l’encontre de toute personne se trouvant sur la voie publique ». Il a, par suite, conclu qu’en « ne précisant pas suffisamment le cadre applicable à la conduite de ces opérations, tenant compte par exemple des lieux où elles sont réalisées ou de l’existence de raisons plausibles de soupçonner la commission d’une infraction, le législateur n’a pas assuré une conciliation équilibrée entre, d’une part, la recherche des auteurs d’infractions et, d’autre part, la liberté d’aller et de venir et le droit au respect de la vie privée ». Il a reporté les effets de l’abrogation au 1er septembre 2023.

7. Le projet de loi distingue, en premier lieu, différents espaces sur le territoire d’intervention des agents des douanes dans lesquels le droit de visite sur les personnes, les marchandises et les moyens de transport est soumis à des règles différentes. 

8. Dans la zone terrestre dite du rayon des douanes, que le projet de loi ramène de 60 km à 40 km des frontières terrestres et maritimes, ainsi que dans les bureaux de douane, dans les ports, aéroports et gares ferroviaires ou routières ouverts au trafic international et dans les trains effectuant une liaison internationale, sur la portion du trajet entre la frontière et le premier arrêt qui se situe au-delà de la limite du rayon des douanes peut continuer à s’exercer un droit de visite général inconditionné à toute heure du jour et de la nuit.

9. Dans la même zone à laquelle s’ajoutent les voies publiques et les lieux attenants directement accessibles au public ainsi que les ports, aéroports, gares ferroviaires ou routières et les trains, le droit de visite est subordonné à la condition de l’existence de raisons plausibles de soupçonner la commission d’une infraction douanière. A la seule condition de l’absence d’opposition du procureur de la République préalablement informé, le droit de visite peut, en outre, dans cette zone, s’exercer pour les seules infractions douanières se rapportant à certaines marchandises particulièrement sensibles et la recherche des infractions de blanchiment douanier se rapportant à de telles marchandises.

10. Enfin, dans les lieux où se trouvent les marchandises placées sous surveillance douanière, le droit de visite ne peut s’exercer qu’entre huit heures et vingt heures ou, en dehors de ces heures, lorsque l'accès au public est autorisé ou lorsque sont en cours des activités industrielles ou commerciales et à l’exclusion de la partie de ces locaux affectée à un usage privé ou d’habitation.

11. Le projet de loi définit, en second lieu, les conditions dans lesquelles le droit de visite peut s’exercer. Elles sont relatives aux conditions de la fouille, auxquelles le Conseil d’État suggère d’ajouter une disposition prohibant toute fouille à corps, ainsi qu’aux conditions relatives à l’immobilisation des personnes, des moyens de transport et des marchandises, à l’intervention des agents des douanes dans les locaux, à la visite des bagages et des moyens de transport et au recueil des déclarations. Le Conseil d’État relève que ces dispositions codifient les garanties dégagées par la jurisprudence judiciaire, à l’exception de celle autorisant la visite de moyens de transport en l’absence de leur conducteur ou de leur propriétaire. Il estime que cette visite peut être admise dès lors que le projet de loi introduit l’obligation de requérir pour assister à cette visite et sauf cas de danger, une personne tierce ne relevant pas de l’autorité des douanes qui est signataire du procès‑verbal établi. L’ensemble de ces garanties est rendu applicable au droit de visite dans les navires, mentionné aux articles 62 et 63 du code des douanes.

12. Le Conseil d’État estime que le projet de loi définit de façon suffisamment précise et encadrée les lieux et les circonstances dans lesquelles le droit de visite douanière peut désormais s’exercer dans des conditions de nature à prévenir le risque de mise en œuvre de contrôles généralisés et arbitraires. Il assure, par suite, une conciliation équilibrée entre l’objectif de lutte contre la fraude en matière douanière, d’une part, et la liberté d’aller et de venir et le droit au respect de la vie privée, d’autre part. Pour ces mêmes motifs, le Conseil d’État considère que le projet de loi ne contrevient pas aux stipulations conventionnelles, notamment celles de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l’article 2 du protocole additionnel n° 4 à cette même convention.

Modernisation du cadre d’exercice des pouvoirs douaniers

En ce qui concerne l’autorisation de recourir à un dispositif de sonorisation et de captation d’images dans des lieux ou des véhicules publics ou privés

13. Le projet de loi donne à des agents habilités des douanes la possibilité de recourir à un dispositif technique de sonorisation ou de captation d’images dans des lieux ou des véhicules privés ou publics, pour la poursuite d’infractions douanières commises au sein de réseaux criminels organisés, concevant des schémas de fraudes complexes et qui sont punies d’une peine d’emprisonnement de dix ans. Ce recours se fait exclusivement selon les conditions et les modalités prévues pour les enquêtes judiciaires par le code de procédure pénale aux articles 706-95-11 à 706-95-19 et 706-96 à 706-98, lesquelles prévoient notamment une autorisation du juge des libertés et de la détention sur requête du procureur de la République, accordée pour une durée maximale d’un mois renouvelable.

14. Certes, une telle possibilité est déjà ouverte à certains agents des douanes à des fins de prévention de la criminalité et de la délinquance sur le fondement des articles L. 853-1 à L. 853‑3 du code de la sécurité intérieure, pour une durée de quatre mois, sur autorisation du Premier ministre, après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement et sous le contrôle de la formation spécialisée du Conseil d’État. Toutefois la procédure de captation et de sonorisation prévue par le code de la sécurité intérieure répond à une finalité de renseignement et ne peut, comme l’a relevé le Conseil constitutionnel, être mise en œuvre que pour l’exercice de missions de renseignement relevant de la police administrative, et non « pour constater des infractions à la loi pénale, en rassembler les preuves ou en rechercher les auteurs » (décision n° 2015-714 DC du 23 juillet 2015, cons. 9). Dès lors, le Conseil d’État estime possible de conférer à des agents des douanes habilités, dans le cadre de leur pouvoir de police judiciaire de poursuite des infractions douanières les plus graves et sous le contrôle initial et permanent de l’autorité judiciaire, la même possibilité que celle dont ils disposent dans le cadre de leurs fonctions de renseignement qui relèvent de la police administrative.

15. Le Conseil d’état considère, par ailleurs, que le renvoi ainsi opéré par le projet aux règles du code de procédure pénale est de nature à garantir que les restrictions apportées au droit au respect de la vie privée et à l’inviolabilité du domicile ne revêtent pas un caractère disproportionné.

En ce qui concerne la saisie probatoire en cours de retenue douanière

16. Le projet de loi autorise les agents des douanes, durant la retenue douanière, à prendre connaissance des documents et objets en possession de la personne retenue et à saisir ceux se rapportant au flagrant délit, ainsi que, dans certains cas, à procéder à la copie, à fin d’analyse, des données informatiques contenues dans les supports numériques saisis, dans un délai de trente jours à l’issue de la retenue douanière.

17. Le Conseil d’État considère que la possibilité ainsi donnée aux agents des douanes ne se heurte à aucun obstacle d’ordre constitutionnel ou conventionnel, dès lors que de telles saisies font l’objet, comme la procédure de retenue douanière elle-même, d’une information du procureur de la République qui peut s’y opposer. Il estime toutefois nécessaire de préciser que le procès-verbal retraçant les opérations de saisie intervenues en cours de retenue douanière fera l’objet d’une copie remise respectivement à la personne retenue et au procureur de la République, une telle exigence résultant de la jurisprudence du Conseil constitutionnel (décision n° 2016-600 QPC du 2 décembre 2016).

18. Le Conseil d’État est d’avis, par ailleurs, que, dans le cas où la personne retenue a été remise en liberté, qu’elle fasse ou non l’objet de poursuites judiciaires, la copie des données informatiques contenues dans les supports numériques saisis au cours de la procédure de retenue douanière ne peut être opérée que sur autorisation préalable du procureur de la République.

19. Sous les réserves précédemment énoncées, le Conseil d’État estime que la procédure prévue par le projet de loi, qui s’inscrit dans le cadre strict de la retenue douanière et de ses suites directes, à savoir en cas de flagrant délit douanier puni d’une peine d’emprisonnement, et qui est placée sous le contrôle de l’autorité judiciaire, n’opère pas une conciliation déséquilibrée entre le droit au respect de la vie privée et l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public.

En ce qui concerne l’élargissement des pouvoirs des agents des douanes dans le cadre de la visite domiciliaire

20. Le projet de loi permet aux agents des douanes, au cours d’une visite domiciliaire, de « geler » l’accès aux données informatiques stockées sur des serveurs distants et qui intéressent l’enquête douanière, dans le but de préserver l’intégrité de données informatiques dont l’accès, l’enregistrement ou la copie sont matériellement impossibles au cours de la visite, et pour lesquels le risque d’altération ou d’effacement est important.

21. Le Conseil d’État observe que le dispositif proposé, qui excède le pouvoir de saisie reconnu aux agents des douanes puisqu’il autorise le blocage des accès à des données informatiques stockées à distance, n’est pas de nature à modifier le cadre procédural de la visite domiciliaire et du droit de saisie dont disposent les agents à l’occasion d’une telle visite. Il estime qu’une mesure de blocage des accès aux serveurs distants, qui se justifie par le risque de disparition des éléments de preuve, et qui est une condition de mise en œuvre des pouvoirs de saisie par ces mêmes agents, permet, dans le strict cadre de la visite domiciliaire, et pour les besoins de l’enquête douanière, d’assurer une conciliation équilibrée entre l’objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude douanière et le droit au respect de la vie privée.

En ce qui concerne l’expérimentation d’une exploitation élargie des données collectées par le biais des « lecteurs automatiques de plaques d’immatriculation »

22. Le projet de loi autorise à titre expérimental, pendant une durée de trois ans, des agents des douanes spécialement habilités, à procéder à une exploitation élargie des données collectées par les « lecteurs automatiques de plaques d’immatriculation », aux fins de prévenir et constater des infractions de contrebande, d’importation ou d’exportation de marchandises prohibées ou dangereuses commises en bande organisée, ainsi que de constater la réalisation ou la tentative de réalisation des délits de blanchiment, lorsqu’ils portent sur les fonds provenant des délits précités. Il renvoie à un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés la définition des critères de recherche utilisés par le traitement pour détecter les mouvements pertinents des véhicules, ainsi que du cadre et du périmètre de l’expérimentation.

23. Le Conseil d’État relève que cette finalité correspond à celle pour laquelle les agents des douanes peuvent actuellement déjà avoir recours à l’installation de tels dispositifs sur le fondement et dans les conditions mentionnées aux articles L. 233-1 et L. 233-2 du code de la sécurité intérieure. Les données collectées dans ce cadre sont conservées pendant un délai de quinze jours à l’issue duquel, en l’absence de rapprochement positif avec les données contenues dans le traitement automatisé des données relatives aux véhicules volés ou signalés ou dans le système d'information Schengen, elles sont effacées sans avoir été consultées, et elles ne sont conservées pendant un délai d’un mois qu’en cas d’un tel rapprochement.

24. L’expérimentation permet de prolonger à quatre mois la conservation des données à caractère personnel ainsi collectées et d’autoriser les agents des douanes à procéder à des détections de véhicules par l’application de recherches multicritères à l’ensemble des données collectées par les lecteurs automatisés, aux seules fins de détecter des mouvements de véhicules susceptibles de révéler les infractions mentionnées au point 23.

25. Le Conseil d’État observe, en premier lieu, que l’expérimentation envisagée est conforme aux recommandations relatives au bon usage des expérimentations qu’il a émises dans son étude « Les expérimentations : comment innover dans la conduite des politiques publiques ? », s’agissant en particulier des nécessités de son pilotage et de son évaluation par une autorité distincte de l’autorité pilote.

26. Il note, en deuxième lieu, que dès lors que le cadre législatif de l’expérimentation détermine les caractéristiques essentielles et les conditions de mise en œuvre d’un traitement de données à caractère personnel, il appartenait au Gouvernement, ainsi qu’il l’a fait, de consulter la Commission nationale de l’informatique et des libertés sur ces dispositions conformément aux dispositions figurant au a du 4° du I de l’article 8 de la loi du 6 janvier 1978.

27. En outre, si les données à caractère personnel collectées dans ce cadre ne relèvent pas, a priori, de la catégorie des données sensibles au sens du I de l’article 6 de cette même loi, dès lors que toute exploitation de la photographie des occupants des véhicules est proscrite, ce traitement instaure, en raison du nombre très important de données relatives à des itinéraires empruntés par des véhicules, qui seront conservées sur une période plus longue, une forme de surveillance susceptible d’engendrer un risque élevé pour les droits et les libertés des personnes physiques. Il appartiendra donc au Gouvernement, en vertu de l’article 90 de la loi du 6 janvier 1978, de transmettre à la Commission nationale de l’informatique et des libertés une analyse d’impact relative à la protection des données au moment où il saisira cette dernière de l’acte réglementaire instaurant le traitement en cause, comme le prévoit au demeurant le projet de loi.

29. Le Conseil d’État relève, en dernier lieu, que l’expérimentation d’une exploitation élargie des données collectées sera réservée à des agents spécialement habilités par le ministre chargé des douanes, qu’elle exclut toute exploitation de la photographie des occupants des véhicules, toute interconnexion ou mise en relation automatisée avec d’autres traitements de données à caractère personnel et toute possibilité de sous-traitance, à l’exception de la conception des outils de traitement des données. Le traitement ne pourra, en outre, procéder qu’à un signalement sans pouvoir fonder par lui-même aucune décision individuelle ou acte de poursuite.

30. Compte tenu enfin des conditions strictement définies dans lesquelles les données à caractère personnel seront exploitées, aux seules fins de détection des mouvements de véhicules susceptibles de révéler les infractions en cause, et alors que le traitement expérimental proposé ne comportera la mise en œuvre d’aucun système d’intelligence artificielle, lequel aurait nécessité des garanties supplémentaires, le Conseil d’État estime que les dispositions du projet de loi relatives à ce traitement n’opèrent pas une conciliation déséquilibrée entre le droit au respect de la vie privée et l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public. Par suite, l’expérimentation ne méconnaît aucune exigence d’ordre constitutionnel ou conventionnel.

En ce qui concerne la prévention des infractions commises par l’intermédiaire d’internet

31. Afin de prévenir l’utilisation d’Internet pour commettre certaines infractions douanières et notamment la vente à distance depuis l’étranger de tabac ou de marchandises illégales, le projet autorise l’administration des douanes à enjoindre aux opérateurs de plateformes et aux hébergeurs de site Internet de faire cesser le référencement de contenus manifestement illicites pour une durée de trois mois renouvelable une fois, de demander à tout opérateur de registre, bureau d’enregistrement de domaines la suspension pour la même durée d’un nom de domaine, enfin de demander au tribunal judiciaire d’ordonner la suppression, en raison du caractère illicite de leurs contenus, d’un ou de plusieurs noms de domaine ou comptes de réseaux sociaux.

32. Le Conseil d’État relève que les dispositions proposées ne trouvent à s’appliquer qu’afin de prévenir la commission d’infractions graves pour lesquelles les peines d’emprisonnement maximum prévues sont de trois ans. Elles sont mises en œuvre à l’issue d’une procédure contradictoire conduite avec l’intermédiaire et au cours de laquelle ce dernier est invité à prendre lui-même les mesures propres à rendre les contenus litigieux inaccessibles.

33. Il note également que le délai fixé par l'autorité administrative pour procéder au déréférencement et à la suspension du nom de domaine, d’au moins quarante-huit heures, permet aux personnes intéressées de contester utilement cette décision par la voie d'un recours en référé sur le fondement des articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative. Enfin, les mesures de suppression de noms de domaine ou de comptes de réseaux sociaux ne peuvent être prises que sur décision du tribunal judiciaire.

34. Le Conseil d’État observe enfin que ce dispositif est étroitement inspiré par celui de l’article L. 521-3-1 du code de la consommation, dont les dispositions relatives au déréférencement des adresses électroniques des interfaces en ligne dont les contenus sont manifestement illicites ont été jugées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2022‑1016 QPC du 21 octobre 2022.

 35. Par suite, le Conseil d’État considère que l’atteinte portée par le projet de loi à l'exercice de la liberté d'expression et de communication garantie par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, est nécessaire, adaptée et proportionnée à l'objectif poursuivi.

Pour les mêmes motifs, le Conseil d’État estime que les dispositions proposées n’emportent pas d'atteinte disproportionnée au droit au respect des biens garantis par l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne l’habilitation donnée au Gouvernement de procéder par ordonnance à la codification de la partie législative du code des douanes et à procéder aux extensions et adaptations nécessaires en résultant dans les collectivités relevant de l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie

36. Le Conseil d’État se félicite de la décision du Gouvernement de procéder à la refonte du code des douanes préconisée de longue date par la Commission supérieure de codification. Il constate que la rédaction de cet article d’habilitation, conforme à celles des précédentes habilitations à des opérations de recodification répond aux exigences découlant de l’article 38 de la Constitution. Il estime que la durée de trente- six mois, bien que longue, est nécessaire eu égard à l’ampleur du travail à mener.

Autres dispositions

37. Le projet de loi comporte d’autres dispositions qui ont pour objet :

- de créer une procédure de remise de personne à officier de police ou de douane judiciaire, inspirée des dispositions de l’article 73 du code de procédure pénale ;

- de renvoyer, pour les pouvoirs des douanes en matière de vérification aux frontières, aux dispositions applicables du code frontières Schengen ;

- de créer une procédure de remise de personne à officier de police ou de douane judiciaire, inspirée des dispositions de l’article 73 du code de procédure pénale ;

- de créer une procédure de retenue temporaire d’argent liquide lorsqu’il existe des indices que cet argent est lié à la commission de certaines infractions graves, similaire à celle prévue par l’article L. 152-4-1 du code monétaire et financier pour les mouvements d’argent liquide transfrontaliers ;

- de créer une réserve opérationnelle de l’administration des douanes dans des conditions et selon des modalités identiques à celles fixées pour la réserve de la police nationale par les articles L. 411-7 et suivants du code de la sécurité intérieure ;

- d’autoriser un officier de douane judiciaire à se substituer à l’officier de police judiciaire pour assister les agents des douanes pour la réalisation d’une visite domiciliaire ;

- d’étendre le périmètre du délit de blanchiment douanier et de rendre applicable à ce délit la notion d’intéressement à la fraude ;

- d’étendre le champ des biens confisqués dans le cadre du délit douanier de trafic de marchandises prohibées ;

- d’instaurer une pleine complémentaire d’interdiction du territoire pour les étrangers se rendant coupables de délit de contrebande de tabac ou de trafic de stupéfiants et d’alourdir les peines encourues en matière de trafic de tabac ;

Ces dispositions n’appellent pas d’observations particulières de la part du Conseil d’État, sous réserve d’améliorations de rédaction qu’il suggère au Gouvernement de retenir.

 

Cet avis a été délibéré et adopté par le Conseil d’État dans sa séance du jeudi 31 mars 2023.