Le juge des référés du Conseil d’État rejette les demandes de suspension de la plateforme « Parcoursup »
L’essentiel :
• Par un arrêté du 19 janvier 2018, la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation a autorisé la mise en œuvre de la plateforme numérique « Parcoursup » destinée à enregistrer les demandes d’accès à l’enseignement supérieur des lycéens.
• Le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste (CRCE) au Sénat et plusieurs syndicats étudiants et lycéens, d’une part, et deux syndicats de personnels de l’enseignement supérieur, d’autre part, ont demandé l’annulation de cet arrêté. A l’appui de leurs recours, ils ont saisi le juge des référés du Conseil d’État d’une demande de suspension provisoire de son exécution.
• Par deux ordonnances de ce jour, le juge des référés du Conseil d’État rejette ces recours. Il estime que la condition d’urgence à laquelle est notamment subordonné le prononcé d’une mesure de suspension n’est pas remplie.
Faits et procédure :
Par un arrêté du 19 janvier 2018, la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation a autorisé la mise en œuvre d’un traitement automatisé de données à caractères personnel dénommé « Parcoursup ». Cette plateforme numérique succède au dispositif antérieur d’accès à l’enseignement supérieur, dénommé « Admission post-bac ».
Par deux recours distincts, le groupe CRCE du Sénat et plusieurs syndicats étudiants et lycéens, d’une part, et deux syndicats de personnels de l’enseignement supérieur, d’autre part, ont demandé notamment l’annulation de cet arrêté. En plus de ces recours, ils ont saisi le juge des référés du Conseil d’État, selon la procédure d’urgence dénommée référé-suspension, prévue à l’article L. 521-1 du code de justice administrative, afin qu’il suspende l’exécution de cet arrêté à titre provisoire.
Les requérants faisaient notamment valoir que le fichier « Parcoursup », autorisé par cet arrêté, permettrait de procéder à une sélection des futurs étudiants, les privant d’accéder à une formation de premier cycle de l’enseignement supérieur dans l’établissement de leur choix, en méconnaissance du principe de libre accès à l’université énoncé à l’article L. 612-3 du code de l’éducation, alors même que les conditions d’accès à l’enseignement supérieur font l’objet d’une discussion parlementaire. Ils critiquaient également la surcharge de travail provoquée par la procédure prévue par ce texte pour les équipes pédagogiques et universitaires.
La décision de ce jour :
Par l’ordonnance de ce jour, le juge des référés du Conseil d’État rejette ces recours.
Il constate d’abord que le traitement de données à caractère personnel autorisé par l’arrêté du 19 janvier 2018 a pour seule finalité le recueil des vœux des étudiants dans le cadre de la procédure nationale de préinscription dans une formation du premier cycle de l’enseignement supérieur pour l’année universitaire 2018/2019. De plus, les informations et données relatives aux étudiants ne seront conservées que jusqu’au 2 avril 2018 et supprimées après cette date, conformément aux exigences édictées par la CNIL dans une délibération du 18 janvier 2018. Ce traitement revêt un caractère temporaire et limité.
Il relève ensuite que l’article L. 612-3 du code de l’éducation subordonne l’inscription dans un établissement d’enseignement supérieur à une préinscription. La plateforme « Parcoursup » a ainsi été ouverte à compter du 22 janvier 2018 afin que les étudiants procèdent à l’enregistrement et à la saisie de leurs vœux.
Le juge des référés estime que la suspension de l’exécution de l’arrêté demandée par les requérants aurait pour effet d’interrompre cette procédure nationale de préinscription, ce qui entraînerait de graves perturbations, tant pour les futurs étudiants que pour les autorités académiques. Compte tenu du caractère extrêmement contraint du calendrier, il juge que de telles perturbations pourraient compromettre le bon déroulement de la rentrée universitaire 2018/2019 dans le premier cycle de l’enseignement supérieur.
Il déduit de ces éléments qu’il existe un intérêt public à ce que l’arrêté du 19 janvier 2018 ne soit pas suspendu, et juge que cet intérêt excède les inconvénients pointés par les requérants, dont la gravité n’est pas établie.
Dans ces conditions, le juge des référés du Conseil d’État estime que la condition d’urgence à laquelle est notamment subordonné le prononcé d’une mesure de suspension sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative n’est pas remplie. Il rejette donc les recours présentés devant lui.
L’appréciation portée par le juge des référés sur la condition d’urgence ne préjuge pas de l’appréciation que portera le Conseil d’État sur la légalité de l’arrêté à l’occasion du recours en annulation de ce texte, dont il demeure saisi.
Procédure de référé-suspension :
La procédure de référé-suspension, prévue à l’article L. 521-1 du code de justice administrative, permet à un requérant d’obtenir dans un bref délai la suspension d’un acte administratif en attendant que le juge se prononce définitivement sur sa légalité. Il faut pour cela qu’une situation d’urgence justifiant la suspension soit caractérisée et qu’il existe doute sérieux sur la légalité de la décision administrative contestée.