Le Conseil d’État juge que les documents de portée générale émanant d’autorités publiques, matérialisés ou non, tels que les circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif peuvent être déférés au juge de l’excès de pouvoir lorsqu’ils sont susceptibles d’avoir des effets notables sur les droits ou la situation d’autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en œuvre. Ont notamment de tels effets ceux de ces documents qui ont un caractère impératif ou présentent le caractère de lignes directrices.
Le Conseil d’État était saisi d’une demande d’annulation pour excès de pouvoir de la note d'actualité de la division de l’expertise en fraude documentaire et à l’identité de la direction centrale de la police aux frontières du 1er décembre 2017 relative aux « fraudes documentaires organisées en Guinée (Conakry) sur les actes d’état civil ». Cette note d’actualité vise à diffuser une information relative à l’existence d’une « fraude documentaire généralisée en Guinée (Conakry) sur les actes d’état civil et les jugements supplétifs » et préconise en conséquence, en particulier aux agents devant se prononcer sur la validité d’actes d’état civil étrangers, de formuler un avis défavorable pour toute analyse d’un acte de naissance guinéen. Aussi, constatant les effets notables de la note d’actualité sur les droits ou la situation d’autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de la mettre en œuvre, le Conseil d’État affirme qu’un tel document de portée générale émanant d’autorités publiques doit pouvoir faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir dans le cadre duquel les vices susceptibles d’affecter sa légalité doivent être examinés.
Ainsi, le Conseil d’État écarte tout d’abord le grief tendant à contester la signature des décisions ainsi que les mentions relatives aux auteurs de ces décisions prévues à l’article L.212-1 du code des relations entre le public et l’administration, considérant que la note contestée ne revêt pas le caractère d’une décision.
Le Conseil d’État, se référant à l’article 47 du code civil, précise ensuite que si la note contestée préconise l’émission d’un avis défavorable pour toute analyse d’acte de naissance guinéen et en suggère à ses destinataires la formulation, elle ne saurait toutefois être regardée comme interdisant à ceux-ci comme aux autres autorités administratives compétentes de procéder, comme elles y sont tenues, à l’examen au cas par cas des demandes émanant de ressortissants guinéens et d’y faire droit, le cas échéant, au regard des différentes pièces produites à leur soutien.
En conclusion, reconnaissant la possibilité de déférer une telle note au juge de l’excès de pouvoir et à l’issue de l’examen des griefs mettant en cause sa légalité, le Conseil d’État juge que le GISTI n’est pas fondé à demander l’annulation de ladite note d’actualité.