Qu’est-ce qu’une procédure en référé ?
Le référé-liberté est une procédure qui permet de saisir en urgence le juge administratif, lorsqu’on estime que l’administration (État, collectivités territoriales, établissements publics) porte atteinte à une liberté fondamentale (liberté d’expression, droit au respect de la vie privée et familiale, droit d’asile, etc.).
Le juge des référés a des pouvoirs étendus : il peut suspendre une décision de l’administration ou lui ordonner de prendre des mesures particulières.
Pour cela, il doit pouvoir établir, d’une part, qu’il y a urgence à statuer, d’autre part, que l’administration – par ses actions ou son inaction – a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Le juge porte son appréciation sur ce point compte tenu des mesures déjà prises par l’administration et des moyens dont elle dispose.
Le juge des référés rend ses décisions en principe sous 48h.
III – Depuis le 30 octobre 2020
Interdiction temporaire des locations saisonnières à Nice – Décision en référé du 16 février
Le recours : Par un arrêté du 25 janvier 2021, le maire de Nice a interdit les locations saisonnières des particuliers durant la période du 6 au 20 février 2021, afin de prévenir la propagation du virus covid-19. Saisi par l’Union des professionnels de la location touristique (UPLT), le juge des référés du tribunal administratif de Nice a suspendu cet arrêté le 8 février 2021. La commune de Nice a fait appel devant le juge des référés du Conseil d’État.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés juge qu’en l’absence de raison impérieuse liée à des circonstances locales particulières, l’interdiction par le maire de Nice des locations saisonnières du 6 au 20 février 2021 porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit de propriété et à la liberté du commerce et de l’industrie, et en confirme la suspension en urgence.
Possibilité d’imposer la visioconférence durant les procédures pénales – Décision en référé du 12 février 2021
Le recours : Des organisations professionnelles d’avocats ont demandé au Conseil d'État de suspendre en urgence les dispositions de l’ordonnance du Gouvernement du 18 novembre 2020 permettant, au titre de l’état d’urgence sanitaire, d’imposer la visioconférence devant les juridictions pénales.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés suspend la possibilité d’imposer la visioconférence devant les juridictions pénales autres que criminelles car elle porte en l’état, une atteinte grave et manifestement illégale aux droits de la défense.
> Lire le communiqué de presse
> Lire les décisions n°448972-448975 et n°448981
Le 27 novembre dernier, le Conseil d'État avait déjà suspendu la possibilité d’imposer la vidéoconférence pour les audiences criminelles.
> Lire aussi la décision en référé du 27 novembre 2020
Vaccination contre la Covid-19 pour les personnes détenues - Décision en référé du 5 février 2021
Le recours : L’association Robin des Lois a demandé au juge des référés du Conseil d’État qu’il ordonne au Premier ministre de modifier l'instruction interministérielle du 15 décembre 2020, qui précise la première étape de la campagne de vaccination contre la Covid-19, afin d’inclure l’ensemble des personnes détenues dans les établissements pénitentiaires.
La décision du Conseil d'État : Le juge des référés observe que les détenus âgés de plus de 75 ans ou présentant des risques élevés de développer les formes graves ou mortelles de la maladie sont inclus dans la première phase de vaccination qui a commencé, à l’instar du reste de la population. Il ne retient pas d’obligation de vacciner en priorité la totalité des personnes incarcérées, car le risque de développer une forme grave de la Covid-19 n’apparait pas plus élevé pour les détenus que pour la moyenne de la population.
Le juge des référés estime que, malgré la vigilance particulière que requiert la situation dans les établissements pénitentiaires, la décision de ne pas inscrire l’ensemble des personnes détenues parmi les publics prioritaires de la première phase de la campagne vaccinale ne constitue pas une atteinte manifestement illégale à une liberté fondamentale. Le juge rejette en conséquence la demande de l’association.
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Délivrance des visas de regroupement familial - Décision en référé du 22 janvier
Le recours : Plusieurs associations représentant des étrangers et des requérants individuels ont saisi le juge des référés du Conseil d’État afin de demander la reprise de la délivrance de visas de regroupement familial aux conjoints et enfants d’étrangers non-européens résidant en France.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés suspend la décision du Gouvernement de ne plus délivrer de visas de regroupement familial pour ces personnes et d’imposer l’obtention d’un laissez-passer.
Il observe d’une part que le nombre des personnes bénéficiant du regroupement familial équivaut en temps normal à 60 personnes par jour, et que l’administration n’apporte aucun élément pouvant montrer qu’un tel flux pourrait contribuer de manière significative à augmenter le risque de propagation de la pandémie. Des mesures de dépistage et d’isolement peuvent par ailleurs s’appliquer à ces personnes, tout comme elles s’appliquent aujourd’hui aux personnes bénéficiant déjà d’une dérogation leur permettant d’entrer sur le territoire.
D’autre part, il constate que la mesure attaquée porte une atteinte grave au droit à la vie familiale normale de l’ensemble des intéressés et à l’intérêt supérieur des enfants en cause, qui perdure de manière continue depuis plus de dix mois. Si le droit de l’Union ne fait pas obstacle à la restriction provisoire des entrées sur le territoire national en raison de la pandémie, la décision contestée n’est pas proportionnée car elle ne prévoit pas de dérogations pour les bénéficiaires d’un regroupement familial.
Fermeture des lieux de culture (cinémas, théâtres, salles de spectacle) - Décision en référé du 23 décembre
Le recours : Plusieurs dizaines d’artistes, des théâtres et des représentants des secteurs du spectacle et du cinéma ont saisi le juge du référé-liberté du Conseil d’État pour obtenir la suspension de la fermeture des cinémas, théâtres et salles de spectacles, ordonnée par le Gouvernement depuis le 29 octobre.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés ne suspend pas la fermeture des cinémas, théâtres et salles de spectacles.
Il reconnaît tout d’abord que cette fermeture porte une atteinte grave aux libertés, alors que les protocoles sanitaires mis en place permettent de réduire le risque de transmission du virus. Le risque de transmission du virus dans les cinémas, théâtres et salles de spectacle est ainsi plus faible que pour d’autres événements accueillant du public, dès lors que de tels protocoles sont effectivement appliqués.
Cette fermeture ne peut se justifier que dans un contexte sanitaire particulièrement défavorable, et n’est légale que tant que demeure un niveau particulièrement élevé de diffusion du virus au sein de la population, susceptible de compromettre à court terme la prise en charge, notamment hospitalière, des personnes contaminées et des patients atteints d’autres affections.
Au vu des données à sa disposition, le juge constate une dégradation de la situation sanitaire au cours de la période récente, à partir d’un plateau épidémique déjà très élevé. Cette situation pourrait se révéler plus préoccupante dans les semaines à venir, surtout avec la détection d’un nouveau variant du virus au Royaume-Uni. Dans ces conditions et compte tenu du caractère très évolutif de cette situation, le juge estime que la mesure de fermeture ne porte pas une atteinte manifestement illégale aux libertés en cause, et rejette donc la demande des requérants.
Fermeture des remontées mécaniques - Décision en référé du 11 décembre
Le recours : Plusieurs collectivités territoriales et organisations représentant le secteur économique des sports d’hiver ont saisi le Conseil d’État en référé-liberté afin de demander la suspension de la fermeture au public des remontées mécaniques des stations de ski.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés rejette la demande des collectivités et organisations. S’il constate que la fermeture des remontées mécaniques aura des effets économiques très importants pour les zones concernées, il relève que la pandémie se maintient à un niveau élevé, créant ainsi une forte pression sur le système de santé, notamment dans les régions où se pratiquent les sports d’hiver.
Il juge en conséquence que cette fermeture, qui a pour objectif de limiter les contaminations supplémentaires occasionnées par des flux importants de déplacements, ne porte pas une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés invoquées par les requérants, et notamment à la liberté d’entreprendre.
Fermeture des bars et restaurants - Décision en référé du 8 décembre
Le recours : L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH) a demandé au Conseil d’État de suspendre la fermeture des bars et restaurants en France, décidée par le Gouvernement le 29 octobre dernier.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés ne suspend pas la fermeture des bars et restaurants.
Il observe que, selon les comités scientifiques français, les regroupements sociaux avec une forte densité de personnes constituent l’une des premières causes de transmission du covid-19, et que le risque de contamination s’aggrave lorsque les personnes restent longtemps dans un espace clos. Il note également qu’une étude scientifique publiée dans la revue Nature le mois dernier, a conclu que les restaurants et bars (comme les hôtels et les salles de sport) présentaient un risque significativement plus élevé de transmission du virus que les autres lieux de brassage de population, commerces notamment.
Le juge observe en outre que l’ensemble des hôpitaux français sont actuellement sous tension, et qu’une approche différenciée selon les territoires pour la fermeture des bars et restaurants, ne permettrait pas de casser la dynamique actuelle de progression du virus. Il en va de même de mesures moins restrictives, telles qu’un couvre-feu, qui ne seraient pas susceptibles d’aboutir à un effet sanitaire comparable à celui attendu de la fermeture.
Pour ces différentes raisons, le juge des référés estime que l’atteinte portée à la liberté du commerce et de l’industrie n’est pas excessive, compte tenu des risques encourus par la population au sein des bars et restaurants.
Limite de 30 personnes dans les établissements de culte – Décision en référé du 29 novembre
Le recours : Des associations cultuelles et un membre du clergé catholique ont saisi le Conseil d’État pour faire suspendre en urgence la limite de 30 personnes pour les rassemblements dans les établissements de culte, imposée par le Gouvernement.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés ordonne au Gouvernement de modifier cette limite sous trois jours, en l’adaptant par exemple à la superficie des établissements ou à leur capacité d’accueil, afin que celle-ci soit strictement proportionnée au risque sanitaire.
Le juge observe que les cérémonies religieuses exposent les participants à un risque de contamination d’autant plus élevé qu’elles ont lieu dans un espace clos, de taille restreinte, pendant une durée importante, avec un grand nombre de personnes, et s’accompagnent de prières récitées à haute voix ou de chants, de gestes rituels impliquant des contacts, des déplacements, ou encore des échanges entre les participants.
C’est pourquoi les conditions d’accès et de présence dans les lieux de culte doivent être réglementées pour limiter les contaminations, la liberté de culte devant être conciliée avec l'objectif de protection de la santé reconnu par la Constitution.
Toutefois, en ce début d’allègement du confinement, aucune des autres activités de nouveau autorisées (commerces « non essentiels » notamment) n’est soumise à une limite du nombre de personnes fixée indépendamment de la superficie des locaux. La particularité des cérémonies religieuses ne suffit pas à justifier le plafond de 30 personnes imposé à tous les établissements de culte quelle que soit leur taille.
Le juge a ainsi estimé que ce plafond était disproportionné au regard de l’objectif de préservation de la santé publique et que le Gouvernement avait porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale qu’est la liberté de culte.
Visio-conférence lors des audiences devant les cours d’assises et les cours criminelles – Décision en référé du 27 novembre
Le recours : Plusieurs associations, des ordres d’avocats et un syndicat de magistrats ont demandé au Conseil d’État de suspendre l’ordonnance du 18 novembre 2020 du ministère de la Justice, qui a adapté plusieurs règles de procédure pénale, et permis notamment d’étendre les possibilités de recours à la visio-conférence.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés suspend la possibilité d’utiliser la visio-conférence, pendant le réquisitoire de l’avocat général et les plaidoiries des avocats, lors des audiences devant les cours d’assises et les cours criminelles.
Il estime que cette possibilité offerte durant les audiences porte une atteinte grave et manifestement illégale aux droits de la défense et au droit à un procès équitable. En effet, l’oralité des débats tient une place spécifique devant la cour d’assises ou la cour criminelle en raison de la gravité des peines encourues et du rôle dévolu à l’intime conviction des magistrats et des jurés. La présence physique des parties civiles et de l’accusé sont essentiels durant le réquisitoire et les plaidoiries, en particulier lorsque l’accusé prend la parole en dernier.
Dans ces conditions, les contraintes liées à l’épidémie du covid-19, les avantages de la visio-conférence et les garanties dont elle est entourée ne suffisent pas à justifier l’atteinte ainsi portée aux principes fondateurs du procès criminel et aux droits des personnes physiques parties au procès.
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Fermeture des librairies - Décision en référé du 13 novembre
Le recours : Un magistrat, un éditeur et un bouquiniste ont saisi le Conseil d’État pour demander la réouverture au public des librairies qui sont, depuis le décret du Gouvernement du 29 octobre dernier, fermées en tant que « commerce non-essentiel ».
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés ne suspend pas la fermeture des librairies au public.
Le juge relève que les librairies contribuent à l’exercice effectif de la liberté d’expression ainsi qu’à la libre communication des idées et des opinions, et que les livres – s’ils ne sont pas des biens de première nécessité comme les produits alimentaires par exemple – présentent un caractère essentiel qui doit être pris en considération par le Gouvernement dans le cadre des mesures de confinement ou de déconfinement.
Il observe que la décision de fermer au public les librairies comme d’autres commerces répond, dans le contexte sanitaire actuel, à la nécessité de limiter au maximum les interactions entre les personnes, qui constituent la principale occasion de propagation du virus. Le juge relève en outre que les librairies peuvent rester ouvertes pour procéder aux activités de livraison et de retrait sur place des commandes (plus d’un tiers des librairies indépendantes pratiquent déjà la vente en ligne) et qu’elles bénéficient de mesures financières de soutien aux entreprises et de mesures complémentaires spécifiques. Il note enfin que la vente des livres dans les grandes surfaces a été interdite et que l’administration s’est engagée à l’audience à porter une attention particulière aux librairies lors de la réévaluation régulière du confinement actuel.
Pour ces différentes raisons, le juge des référés du Conseil d’État estime que la fermeture des librairies au public ne porte pas une atteinte grave et manifestement à la liberté du commerce et de l’industrie, à la libre concurrence, au principe d’égalité et à l’interdiction des discriminations.
Exercice des cultes – Décision en référé du 7 novembre
Le recours : Des associations, fidèles et membres du clergé catholiques ont saisi le Conseil d’État pour demander la suspension des restrictions concernant le rassemblement dans les lieux de cultes, prises dans le cadre du décret du 29 octobre organisant la deuxième période de confinement.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés ne suspend pas les restrictions concernant les rassemblements dans les lieux de cultes.
Dans sa décision, le juge précise tout d’abord les règles applicables lors de ce second confinement, à savoir le maintien de l’ouverture des lieux de culte pour l’exercice à titre individuel, la possible participation aux enterrements et aux mariages dans la limite respective de 30 et 6 personnes et la possibilité pour les ministres du culte de participer aux cérémonies religieuses, notamment pour en assurer la retransmission. Il relève toutefois que les dispositions relatives aux mariages et aux justificatifs de déplacement gagneraient à être explicitées.
Le juge constate que la circulation du virus sur le territoire métropolitain s’est fortement amplifiée au cours des dernières semaines malgré les mesures déjà prises, et que le risque de contamination dans les lieux de culte n’est pas écarté. En l’état de son instruction, le juge considère ainsi l’atteinte portée par le décret à la liberté de culte, à la liberté personnelle, à la liberté d’aller et venir et à la liberté de réunion n’est pas manifestement illégale.
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II – Mai à octobre
Couvre-feux – Décision en référé du 23 octobre
Le recours : Une association et plusieurs requérants individuels ont demandé au Conseil d’État de suspendre le décret du Premier ministre qui prescrivait aux préfets de 16 départements d’instaurer un couvre-feu entre 21h et 6h, ou d’en limiter sa portée en réduisant la plage horaire et en prévoyant des nouveaux motifs de dérogation.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés rejette le recours contre les couvre-feux.
Il constate dans un premier temps que la circulation du virus sur le territoire métropolitain s’est amplifiée au cours des dernières semaines et que la situation sanitaire s’aggrave particulièrement dans les neuf métropoles des départements concernés. Par ailleurs, les connaissances scientifiques actuelles révèlent que les contaminations surviennent pour une grande part dans les lieux privés.
Il souligne aussi que cette méthode, qui semble avoir donné des résultats en Guyane en mars dernier, est moins restrictive qu’un confinement, limitée dans le temps et assortie de nombreuses dérogations.
Enfin, il prend en compte la difficulté de moduler les horaires d’interdiction selon les zones géographiques concernées, le risque que ferait courir une extension des motifs de dérogation, et l’obligation pour le Premier ministre et pour les préfets de mettre fin sans délai aux mesures dès qu’elles ne seront plus strictement nécessaires.
Le juge en déduit ainsi que la mesure prescrivant aux préfets d’instaurer un couvre-feu ne porte pas une atteinte manifestement illégale aux libertés fondamentales.
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Salles de sport – Décision en référé du 16 octobre
Le recours : Plusieurs sociétés et professionnels du secteur du sport en salle et du fitness ont demandé au Conseil d’État de suspendre la décision du préfet des Bouches-du-Rhône de fermer les établissements sportifs couverts jusqu’au 27 octobre.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rejeté la demande des professionnels du sport, confirmant la décision prise en première instance par le tribunal administratif de Marseille.
Le juge rappelle que Marseille et Aix-en-Provence ont été classées en « zone d’alerte maximale » en raison de l’intensité de la pandémie. Il note par ailleurs qu’en l’état actuel des connaissances scientifiques, la pratique d’activités physiques dans des lieux clos crée un risque plus élevé de transmission du virus.
Le juge souligne en outre la difficulté d’identifier des activités sportives pouvant être pratiquées avec un masque sans que celui-ci perde sa capacité de filtration, ou encore de s’assurer du respect d’une éventuelle différenciation des règles au sein des établissements selon les activités pratiquées.
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Chômage partiel et critères de vulnérabilité au covid-19 – Décision en référé du 15 octobre
Le recours : La Ligue nationale contre l’obésité ainsi que plusieurs requérants individuels ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre le décret du 29 août qui a restreint de 11 à 4, les critères de vulnérabilité au covid-19 permettant aux salariés de bénéficier du chômage partiel.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a suspendu les nouveaux critères de vulnérabilité. En l’absence d’une nouvelle décision du Premier ministre, les 11 critères retenus par le précédent décret du 5 mai 2020 s’appliquent à nouveau.
Le juge des référés du Conseil d’Etat rappelle que, si la loi du 25 avril 2020 laisse au Premier ministre un large pouvoir d’appréciation pour définir les critères selon lesquelles une personne doit être considérée comme vulnérable, de tels critères doivent être pertinents au regard de l’objet du dispositif et cohérents entre eux. Ainsi, le Gouvernement ne peut pas exclure des pathologies ou situations qui présentent un risque équivalent ou supérieur à celles maintenues dans le décret qui permettent toujours de bénéficier du chômage partiel.
Le juge des référés a ainsi estimé que le Gouvernement n’a pas suffisamment justifié, pendant l’instruction, de la cohérence des nouveaux critères choisis, notamment le fait que le diabète ou l’obésité n’ont été retenus que lorsqu’ils sont associés chez une personne âgée de plus de 65 ans.
En revanche, le juge relève que la loi du 25 avril 2020 permettait au Premier ministre de décider que les salariés cohabitant avec une personne vulnérable ne bénéficient plus du chômage partiel.
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Masques et dépistage à la prison de Toulouse-Seysses – Décision en référé du 8 octobre
Le recours : Des avocats et des détenus ont saisi le tribunal administratif de Toulouse afin qu’il ordonne au centre pénitentiaire de Toulouse-Seysses, d’une part, la distribution de masques aux détenus dans tous les locaux clos et partagés ainsi que dans les cours de promenade, d’autre part, la mise en place d’une campagne de dépistage de la covid-19. Le juge des référés du tribunal a fait droit à l’ensemble de ces demandes. La ministre de la justice a fait appel de cette décision devant du Conseil d’État.
La décision du Conseil d’État :
Le juge des référés du Conseil d’État observe tout d’abord qu’il existe une incertitude sur le point de savoir si, dans les faits, et comme cela est prévu depuis le mois de mai 2020, des masques sont systématiquement donnés aujourd’hui aux détenus lors de leurs contacts avec des personnes de l’extérieur (parloirs, salles d’entretien, d’activités, de visio-conférence, d’attente…). Il confirme donc l’injonction prononcée par le tribunal de fournir des masques aux détenus dans ces situations.
Concernant la mise à disposition de masques pour les activités sans contact avec l’extérieur, le juge note que plusieurs mesures ont été mises en œuvre, destinées à créer un « anneau sanitaire » autour des détenus : dépistage et isolement des nouvelles personnes incarcérées, port du masque par les personnels pénitentiaires, distanciation physique, etc. Le juge des référés observe également qu’il n’y a aucun cas de covid-19 avéré ou suspecté parmi les détenus de la prison à ce jour, et que l’établissement ne se trouve pas en zone d’alerte maximale. Pour ces raisons, il considère que l’absence de masques pour les activités sans contact avec l’extérieur ne constitue pas, à ce jour, une atteinte grave et manifestement illégale à des libertés fondamentales. Il annule donc la décision du tribunal administratif de Toulouse sur ce point.
Enfin, concernant la mise en place d’une campagne de dépistage, le juge des référés relève qu’une procédure est déjà prévue dans la prison : un détenu présentant des symptômes susceptibles d’être liés à la covid-19 est immédiatement isolé et testé, une procédure de traçage est mise en œuvre et, selon ses résultats, une campagne de dépistage est susceptible d’être organisée. Les requérants n’ayant pas apporté d’autres éléments attestant de la nécessité d’une campagne de dépistage systématique, le juge des référés du Conseil d’Etat annule également la décision du tribunal administratif de Toulouse sur ce point.
Port obligatoire du masque sur la voie publique – Décisions en référé du 6 septembre
Le recours : Une association et deux particuliers ont saisi les tribunaux administratifs de Strasbourg et de Lyon pour contester l’obligation du port du masque sur la voie publique à Lyon et Villeurbanne ainsi qu’à Strasbourg et dans 12 autres communes du département du Bas-Rhin. Par deux décisions, les tribunaux ont limité l’obligation de porter le masque dans ces villes, aux lieux et horaires caractérisés par une forte densité de population. L’État a demandé au Conseil d’État d’annuler ces décisions.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés considère que le port du masque peut être imposé sur des zones larges, afin que cette obligation soit cohérente et facile à appliquer pour les citoyens. Toutefois ces périmètres étendus doivent être délimités – et se justifier – par l’existence de plusieurs zones à fort risque de contamination. Le port du masque peut ainsi être imposé sur l’ensemble d’une ville densément peuplée comme Lyon ou Villeurbanne, mais doit être limité au centre-ville dans les communes moins denses.
> Lire le communiqué de presse
> Lire les décisions en référé : Port du masque à Lyon et Villeurbanne, Port du masque dans 13 communes du Bas-Rhin
Fermeture des discothèques – Décision en référé du 13 juillet
Le recours : Le Syndicat national des discothèques et lieux de loisirs (SNDLL) et plusieurs établissements de nuit ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre les décrets des 21 juin et 10 juillet 2020 qui maintiennent fermées les discothèques et salles de danse.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rejeté le recours du Syndicat et des établissements, estimant que la fermeture de ces lieux n’est pas une mesure disproportionnée dans le cadre de la lutte contre la pandémie, et qu’elle se justifie par le caractère clos des établissements, la nature de l’activité physique de la danse et la difficulté de garantir le respect des gestes barrières ou du port du masque dans un contexte festif.
Dans leur recours, les requérants demandaient aussi au juge des référés de pouvoir a minima exercer leur activité dans les conditions fixées pour les restaurants et débits de boissons. Le juge a rappelé qu’en raison des horaires d’ouverture étendus et de la configuration des lieux en cause, qui ne sont pas directement ouverts sur l’espace public, il n’apparaît pas possible d’assurer, par des contrôles effectifs, le respect d’une telle limitation d’activité.
Il a ainsi estimé que l’atteinte que porte cette mesure aux libertés d’entreprendre, du commerce et de l’industrie ne revêt pas un caractère manifestement illégal.
Relégation d’Orléans et du Mans en National 1 de football - Décision en référé du 7 juillet
Le recours : Les clubs de football d'Orléans et du Mans ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre la décision par laquelle le comité exécutif de la Fédération française de football (FFF) a décidé que seraient rétrogradés en National 1 les clubs classés en 19e et 20e de la Ligue 2.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés du Conseil d’État juge qu’il n’y a pas de doute sérieux sur la légalité de la décision de la FFF.
Le juge rappelle que la Ligue de football professionnel, confrontée à l’impossibilité de poursuivre les championnats, a retenu pour la saison 2019-2020 une méthode de classement identique pour la Ligue 1 et la Ligue 2. Concernant les accessions et relégations des clubs entre ligues, elle a toutefois prévu une exception pour la Ligue 2, en élargissant de 20 à 22 le nombre d’équipes, afin qu’aucune équipe ne soit reléguée en National 1 (3èmedivision). Le comité exécutif de la Fédération est toutefois revenu sur la décision de la Ligue, estimant que le système des accessions et relégations était la solution la plus conforme à la prise en compte du mérite sportif et devait s’appliquer de façon uniforme et sans exception à l’intégralité des compétitions.
Le juge des référés estime qu’en revenant sur la décision de la Ligue, la Fédération n’a pas commis d’erreur de droit ou d’appréciation, dès lors que la solution des promotions et des relégations a été adoptée pour l’ensemble des compétitions de football.
Obtention d’une autorisation avant d’organiser une manifestation – Décision en référé du 6 juillet
Le recours : Plusieurs associations ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre la nouvelle version du décret du 31 mai 2020 prise par le Premier ministre, consacrée aux mesures générales pour faire face à l'épidémie de covid-19. Modifiée à la suite d’une injonction du Conseil d’État, cette nouvelle version du décret prévoit que l’organisation de manifestations doit être autorisée au préalable par le préfet, qui vérifie que les « mesures barrières » peuvent être respectées.
La décision du Conseil d’Etat : Le juge des référés du Conseil d’État estime que l’obligation d’obtenir une autorisation avant d’organiser une manifestation sur la voie publique ainsi créée est excessive.
Le juge rappelle que la situation sanitaire continue de justifier des mesures de prévention et que l’organisation de manifestations sur la voie publique dans le respect des « mesures barrières » présente une complexité particulière.
Toutefois, le juge des référés relève qu’en temps normal, les manifestations sur la voie publique sont soumises à une obligation de déclaration auprès des autorités. Le préfet peut alors interdire les rassemblements qui risquent de troubler l’ordre public, par exemple s’il estime que les précautions sanitaires prévues sont insuffisantes.
La nouvelle version du décret du 31 mai 2020 conduit à inverser cette logique, puisque toute manifestation demeure interdite tant que le préfet ne l’a pas autorisée. En outre, le décret ne prévoit pas de délai pour que le préfet rende une décision, ce qui peut empêcher les organisateurs de saisir le juge en temps utile.
Le juge des référés estime donc qu’il existe un doute sérieux sur le fait que cette nouvelle procédure ne porte pas une atteinte disproportionnée à la liberté de manifester. Il suspend les dispositions du décret du 31 mai qui prévoient cette procédure.
En revanche, le juge des référés du Conseil d’État estime que l’interdiction des rassemblements de plus de 5 000 personnes, qui demeure inchangée dans le décret du 31 mai, reste justifiée au regard de la situation sanitaire à ce jour.
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Caméras thermiques à Lisses – Décision en référé du 26 juin
Le recours : La Ligue des droits de l’Homme a saisi le tribunal administratif de Versailles pour demander la suspension de la caméra thermique fixe placée à l’entrée d’un bâtiment municipal de Lisses et des caméras thermiques portables dans les bâtiments scolaires et périscolaires de la commune. À la suite du rejet de sa requête, l’association a saisi le juge des référés du Conseil d’Etat.
La décision du Conseil d’Etat : Le juge des référés ordonne à la commune de mettre fin à l’usage des caméras thermiques portables utilisées dans les écoles.
Le juge constate que les élèves, les enseignants et les personnels doivent obligatoirement se soumettre à cette prise de température pour accéder à l’établissement et qu’un résultat anormal entraine l’obligation pour eux de quitter l’établissement.
Le juge des référés en déduit que cette collecte de données de santé constitue un traitement automatisé de données personnelles au sens du règlement général sur la protection des données (RGPD). En l’absence notamment de texte justifiant l’utilisation de ces caméras pour des raisons de santé publique et en l’absence de consentement des élèves et du personnel, les conditions ne sont pas remplies pour permettre un tel traitement des données.
Le juge des référés estime ainsi que la commune de Lisses porte une atteinte manifestement illégale au droit au respect de la vie privée des élèves et du personnel, qui comprend le droit à la protection des données personnelles et la liberté d’aller et venir.
En revanche s’agissant de la caméra fixe dans les locaux municipaux, le juge des référés relève que les personnes entrant dans ces locaux ont le choix de se placer ou non dans l’espace permettant la prise de température et qu’un refus n’empêche pas l’accès aux locaux. Il note également qu’en cas de prise de température, celle-ci ne donne lieu à aucun enregistrement, et aucun agent de la commune ne manipule la caméra ni a accès aux résultats.
En conséquence, le juge des référés estime qu’on ne peut considérer que cette caméra donne lieu à un traitement de données à caractère personnel au sens du RGPD et rejette la demande tendant à ce qu’il soit mis fin à leur utilisation.
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Plateforme Health Data Hub - Décision en référé du 19 juin
Le recours : Plusieurs organisations, syndicats et associations ont demandé au juge des référés de suspendre l’arrêté du 21 avril 2020 du Gouvernement qui autorise la plateforme « Health Data Hub » à récolter différentes données de santé pour la gestion de l'urgence sanitaire et l'amélioration des connaissances sur le covid-19. Les requérants contestaient la mise en œuvre de cet arrêté notamment au regard des modalités d’hébergement des données, de leur anonymisation, de leur possible transfert vers des pays tiers et de la sécurité de la Plateforme.
La décision du Conseil d’État :
Le juge des référés a rappelé que le ministre chargé de la santé a autorisé la Plateforme à collecter et traiter les données de santé pseudonymisées nécessaires à la poursuite de projets ayant un intérêt public, en lien avec l’épidémie de covid-19 et seulement durant l’état d’urgence sanitaire. Le recours à la Plateforme doit être justifié par l’urgence s’attachant à la conduite du projet et par l’absence de solution technique alternative satisfaisante permettant d’y procéder dans les délais utiles, et les projets sont, le cas échéant, soumis à l’autorisation de la Commission nationale de l’informatique et libertés (CNIL). Dans ces conditions, le juge des référés a estimé que la collecte des données prévue par l’arrêté poursuivait des finalités légitimes et était proportionnée pour les atteindre.
Concernant la sécurité de la Plateforme, le juge des référés a relevé qu’elle a été homologuée conformément au référentiel en vigueur. Elle a fait l’objet d’un contrôle externe par une société en novembre 2019, et sera à nouveau auditée par un prestataire qualifié par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information. L’hébergeur des données, Microsoft, héberge les données en Europe – actuellement aux Pays-Bas et prochainement en France - dans des centres qui bénéficient de la certification « hébergeur de données de santé » conformément au code de la santé publique. Le juge a observé que Microsoft est soumis aux exigences de la réglementation française en matière d’hébergement des données de santé conformément au contrat qu’il a signé, et doit respecter le règlement général sur la protection des données (RGPD) en ce qui concerne le transfert de données à caractère personnel vers un pays tiers. En particulier, s’agissant de possibles transferts de données aux Etats-Unis pour des besoins de maintenance, ils s’inscrivent dans le cadre autorisé par une décision de la Commission européenne de 2016, ainsi que le permet le RGPD.
S’agissant de la pseudonymisation des données, le juge des référés a estimé que les modalités prévues par l’arrêté étaient appropriées. Il a néanmoins relevé que la Commission nationale de l’informatique et libertés (CNIL), lorsqu’elle avait été consultée sur le projet d’arrêté, n’avait pas eu le temps de vérifier que les mesures concrètes adoptées par la Plateforme étaient suffisantes. C’est pourquoi, le juge a ordonné à la Plateforme de communiquer sous cinq jours à la CNIL tous les éléments relatifs aux procédés de pseudonymisation utilisés afin qu’elle les vérifie.
Enfin, le juge des référés a relevé que l’information fournie par la Plateforme sur les données collectées était incomplète. Il a donc enjoint à la Plateforme de mentionner sur son site internet certaines précisions, tenant au possible transfert des données hors de l’Union européenne et aux informations relatives aux droits des personnes concernées.
Manifestations dans l’espace public – Décision en référé du 13 juin
Le recours : Divers associations et syndicats ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre l’application de l’interdiction des rassemblements, réunions ou activités réunissant plus de dix personnes dans l’espace public (article 3 du décret du 31 mai 2020) pour les manifestations.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés du Conseil d’État suspend l’interdiction générale et absolue de manifester sur la voie publique.
Il relève que le Haut Conseil de la santé publique ne préconise, dans ses recommandations du 24 avril 2020, aucune restriction à la circulation dans l’espace public tant que les « mesures barrières » sont respectées (distanciation d’un mètre ou port du masque notamment), et qu’une reprise de l’épidémie n’est pas constatée. Alors que la liberté de manifester est une liberté fondamentale, le juge des référés en déduit que, sauf circonstances particulières, l’interdiction des manifestations sur la voie publique n’est justifiée par les risques sanitaires que lorsque les « mesures barrières » ne peuvent être respectées ou que l’événement risque de réunir plus de 5 000 personnes.
Le juge rappelle par ailleurs que, conformément à la loi, toute manifestation sur la voie publique doit faire l’objet d’une déclaration préalable à la mairie ou la préfecture, et qu’elle peut être interdite par les autorités de police ou le préfet, s’ils estiment qu’elle est de nature à troubler l’ordre public, y compris pour des motifs sanitaires, ou lorsque les circonstances locales l’exigent.
Championnats de football amateurs – Décision en référé du 11 juin
Le recours : Plusieurs clubs de football amateur ont demandé au Conseil d’État de suspendre la décision de la Fédération française de football (FFF) du 6 avril dernier, qui a mis fin aux championnats amateurs et défini des règles de classements pour les relégations et les accessions.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rejeté cette demande.
Il a d’abord rappelé qu’il revient à la Fédération d’adopter les règlements des compétitions et de statuer sur tous les cas non prévus par ses statuts ou règlements. Il a relevé que la Fédération avait décidé l’arrêt du championnat car la perspective de reprise était irréaliste, et que la FFF avait cherché à donner le plus rapidement possible la visibilité nécessaire aux clubs pour gérer l’intersaison et organiser la saison prochaine.
Concernant la méthode de classement retenue (un quotient de points gagnés par matchs joués), le juge a relevé que rien n’était prévu en cas d’interruption des compétitions de façon définitive et qu’il revenait à la Fédération d’en fixer les règles. Le juge a notamment observé qu’une règle homogène applicable à tous pouvait se justifier, des règles différenciées pouvant être particulièrement complexes à appliquer du fait de l’interdépendance entre les différents niveaux de championnat organisés selon une architecture pyramidale.
Championnat de football professionnel - Décision en référé du 8 juin
Le recours : Trois clubs de football (Olympique Lyonnais, Amiens Sporting Club et Toulouse Football Club) ont demandé au Conseil d’État de suspendre la décision de la Ligue de football professionnel du 30 avril, qui a acté l’arrêt de la saison 2019-2020 ainsi que le classement des équipes de Ligue 1 et de Ligue 2 selon les points obtenus et le nombre de rencontres disputées.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés estime qu’il n’y a pas de doute sérieux sur la légalité de la décision de la Ligue de football professionnel de mettre fin à la saison qui pourrait justifier sa suspension. Cette décision avait été prise en tenant compte des déclarations du Gouvernement et de l’UEFA, en pesant les avantages et les inconvénients d’un arrêt immédiat du championnat, et dans un contexte de grande incertitude sur la possibilité de reprendre les compétitions en temps utile.
Concernant le classement des équipes, le juge valide la méthode retenue car il observe que la Ligue a tiré les conséquences de l’interruption des championnats et pris notamment en compte le fait que tous les matchs de la 28ème journée n’avaient pu être joués.
En revanche, le juge des référés estime que la Ligue ne pouvait reléguer les deux derniers du classement de la Ligue 1 (Amiens et Toulouse) sur la base de la convention conclue avec la Fédération française de football (FFF) qui prévoit une limite de vingt clubs mais qui se termine le 30 juin.
Le juge ordonne donc à la Ligue de football professionnel de réexaminer, en lien avec la FFF lors de l’élaboration de la prochaine convention, la question du format de la Ligue 1 pour la saison 2020-2021, en tenant compte des conditions dans lesquelles cette saison est susceptible de se dérouler et d’en tirer les conséquences avant le 30 juin quant au principe des relégations.
Recommandations d’utilisation des masques FFP2 – Décision en référé du 8 juin
Le recours : Un syndicat de professionnels de santé hospitaliers a demandé au juge des référés du Conseil d’État d'ordonner au Gouvernement de modifier les recommandations d’emploi des masques FFP2 édictées par le ministère chargé de la Santé afin que le port de ces masques soit prescrit pour tous les personnels soignants intervenant au niveau des voies respiratoires ou entrant dans la chambre d’un patient atteint ou suspecté d’être atteint par le covid-19.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a relevé que selon un avis du Haut Conseil de Santé publique, le covid-19 se transmet par des personnes déjà infectées, principalement par l’émission de gouttelettes de 5 à 10 microns en toussant, en éternuant ou en parlant, et peut également se transmettre par aérosols, composés de particules de plus petite taille, à l’occasion d’actes spécifiques réalisés sur le patient au niveau des voies respiratoires. Pour la protection des professionnels de santé, l’État distribue deux types de masques : les masques chirurgicaux qui filtrent 95 à 98 % des gouttelettes de 3 microns et les masques FFP2 qui filtrent 94 % des particules de 0,6 microns.
Le juge des référés a observé que les recommandations du ministère de la Santé indiquent déjà que l’ensemble du personnel médical et paramédical intervenant sur les voies respiratoires doit bénéficier en priorité de masques FFP2.
Concernant l'extension du port de masque FFP2 à tous les soignants entrant dans la chambre d’un patient atteint par le covid-19 ou suspecté de l’être, le juge a relevé qu'il existe un consensus sur le fait que le virus se propage principalement par larges gouttelettes et par contact, mais qu'il n’existe pas de données au niveau international établissant la possibilité que le virus présent dans l’air en très petite quantité provoque une infection en dehors des actes médicaux générant des aérosols.
Enfin, le juge des référés a rappelé que l’État dote chaque établissement de santé d’un nombre de masques FFP2 qui équivaut à 10 masques par semaine pour 40 % du personnel, et que les recommandations du ministre se bornent à fixer des priorités tout en permettant aux établissements de distribuer ces masques à d’autres soignants que ceux identifiés comme prioritaires.
Pour ces différentes raisons, le juge des référés a estimé que l’État n'avait pas porté une atteinte grave et manifestement illégales au droit au respect de la vie et au droit ne pas subir des traitements inhumains et dégradants.
Jugement des demandes d’asile par un juge statuant seul et recours à la visioconférence pour les juges - Décision en référé du 8 juin
Le recours : Plusieurs associations d’avocats et de défense des droits des étrangers ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre les dispositions de l'ordonnance du 13 mai 2020 qui prévoient, jusqu'à la fin de l'état d'urgence sanitaire – soit, en principe, jusqu’au 10 juillet –, d’une part, que l'ensemble des recours devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) sont jugés par un juge unique sauf renvoi par ce dernier à une formation collégiale s’il estime que l’affaire soulève une difficulté sérieuse, d’autre part, que les membres des juridictions administratives peuvent siéger depuis un lieu distinct de la salle d'audience en utilisant un moyen de télécommunication audiovisuelle.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a fait droit à la demande concernant le juge unique à la CNDA et a rejeté les conclusions dirigées contre le recours à la visioconférence par les juges administratifs.
Il a relevé que si la loi du 23 mars 2020 a autorisé le Gouvernement à modifier certaines procédures de justice durant l’état d’urgence sanitaire, les mesures prises doivent être proportionnées et justifiées par la situation sanitaire du pays. Or, il a estimé qu’il existait un doute sérieux sur le caractère proportionné et justifié de la généralisation du jugement par juge unique à la CNDA pendant la période de l’état d’urgence sanitaire, dès lors qu’elle n’était pas limitée à des hypothèses pouvant être justifiées par les caractéristiques des affaires. Il a donc prononcé la suspension de cette mesure. Il convient de noter que la CNDA n’avait encore tenu aucune audience faisant application des dispositions suspendues qui resteront donc inappliquées. Le juge des référés a en revanche estimé que les requêtes n’avançaient aucun argument de nature à faire naître un doute sur la légalité des dispositions permettant aux juges administratifs de participer à l’audience au moyen d’un dispositif de visioconférence.
Matériel de protection pour les professionnels de santé – Décision en référé du 22 mai
Le recours : Le syndicat Jeunes Médecins a demandé au juge des référés d’ordonner à l’État de prendre des mesures (réquisitions, achats massifs, soutien à la production) pour assurer la fourniture de masques, sur-blouses et lunettes de protection aux professionnels de santé.
La décision du Conseil d’État : Le juge a relevé que l’ensemble des mesures prises par l’État permettent aujourd’hui d’assurer la distribution de 100 millions de masques par semaine aux professionnels exerçant notamment dans les hôpitaux et cliniques, en ville et en établissement ou service médico-social. Même s’il peut subsister des difficultés encore localement, il n’apparaît pas que cette quantité de masques soit insuffisante pour couvrir de façon globale les besoins des professionnels.
Concernant les masques FFP2 plus spécifiquement, 12 millions sont distribués chaque semaine, alors que 16 à 17 millions de masques seraient nécessaires. En raison de tension sur les approvisionnement de ces masques qui pourraient durer jusqu’à début juin, ils sont prioritairement distribués aux personnels hospitaliers et de ville qui réalisent des gestes invasifs et des manœuvres sur les voies respiratoires. Toutefois, il n’apparaît pas que l’État néglige de prendre des mesures qui permettrait d'améliorer l'approvisionnement. En effet, l’État a déjà pu réquisitionner des stocks présents sur le territoire en mars et une nouvelle réquisition de masques FFP2 en France ne permettrait qu’une augmentation marginale des stocks. En outre, des réquisitions sur les importations risqueraient de ralentir l’entrée en France de l'intégralité des masques commandés, à l'inverse du résultat recherché.
Concernant les sur-blouses, un contexte de très forte tension de l’approvisionnement est également observé, qui empêche de fournir le nombre nécessaire aux professionnels de santé. Le juge a observé que l’État s’était toutefois efforcé d’identifier des fournisseurs et avait pu procéder à une commandé de 16 millions de blouses. Il a également recherché des alternatives au modèle à usage unique, et validé un modèle lavable que 117 entreprises se sont déclarées être en mesure de produire à raison de 700 000 blouses par semaine. Si ces mesures ne suffisent pas encore à ce jour pour résorber la pénurie, les stocks devraient être suffisants à partir du mois de juin. Compte tenu de ces différents éléments, le juge relève ainsi qu’il n’est pas possible de reprocher à l’État une carence portant une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.
IVG médicamenteuse à domicile durant l’état d’urgence sanitaire – Décision en référé du 22 mai
Le recours : Les associations Alliance Vita, Juristes pour l’enfance et Pharmac’éthique ont demandé au Conseil d’État de suspendre l’arrêté du 14 avril 2020 du ministre chargé de la santé. Cet arrêté permet, durant l’état d’urgence sanitaire, de réaliser une interruption volontaire de grossesse (IVG) par voie médicamenteuse, à domicile et par téléconsultation, et ce, jusqu’à 7 semaines de grossesse.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rejeté cette demande.
Le juge a rappelé que le ministre chargé de la santé est habilité à adapter, de façon temporaire, l’organisation et le fonctionnement du dispositif de santé pour répondre à l'épidémie de covid-19, y compris en matière de médicaments (sauf ceux destinés à éradiquer l’épidémie de Covid-19 qui relèvent du Premier ministre). Il a également observé que le recours à des téléconsultations en matière d’IVG vise à contribuer à la diminution de la circulation du virus.
Les associations requérantes considéraient notamment que les femmes étaient exposées à des risques pour leur santé en l’absence d’une prise en charge de leur IVG par un hôpital ou une clinique. Le juge a toutefois relevé que le médecin ou la sage-femme conventionné qui prescrit une IVG médicamenteuse informe la femme sur les mesures à prendre en cas d’effets secondaires, lui prescrit un traitement antidouleur approprié et l’informe qu’elle peut se rendre en cas de difficulté dans un établissement de santé dont il lui communique les coordonnées. Le juge des référés a également observé que l’autorisation de réaliser une IVG à domicile après 5 semaines et jusqu’à 7 semaines s’appuie sur un protocole validé par la Haute Autorité de Santé, qui est conforme aux recommandations nationales et internationales des sociétés savantes de gynécologues et obstétriciens.
Rassemblements dans les lieux de culte – Décision en référé du 18 mai
Le recours : Plusieurs associations et requérants individuels ont saisi le juge des référés du Conseil d’État pour faire suspendre l’interdiction de tout rassemblement ou réunion au sein des lieux de culte, qui a été maintenue comme durant le confinement par le décret n°2020-548 du 11 mai 2020.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a ordonné au Premier ministre de modifier, dans un délai de huit jours, le décret du 11 mai 2020 en prenant les mesures strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu applicables en ce début de « déconfinement », pour encadrer les rassemblements et réunions dans les établissements de culte.
La juge a rappelé que la liberté de culte, qui est une liberté fondamentale, comporte également parmi ses composantes essentielles le droit de participer collectivement à des cérémonies, en particulier dans les lieux de culte. Elle doit, cependant, être conciliée avec l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé.
Le juge des référés a relevé que des mesures d’encadrement moins strictes que l’interdiction de tout rassemblement dans les lieux de culte prévue par le décret sont possibles, notamment compte tenu de la tolérance des rassemblements de moins de 10 personnes dans d’autres lieux ouverts au public dans le même décret. Il juge donc que l’interdiction générale et absolue présente un caractère disproportionné au regard de l’objectif de préservation de la santé publique et constitue ainsi, eu égard au caractère essentiel de cette composante de la liberté de culte, une atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté.
Surveillance par drones du respect des mesures de l’état d’urgence à Paris – Décision en référé du 18 mai
Le recours : La Quadrature du Net et la Ligue des droits de l’homme ont demandé au tribunal administratif de Paris d’ordonner l’arrêt de la surveillance par drones mis en place par la préfecture de police afin de faire respecter les mesures de confinement. Leur requête ayant été rejetée par le tribunal, les associations ont fait appel devant le Conseil d’État.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés du Conseil d’État a ordonné à l’État de cesser immédiatement la surveillance par drone du respect des règles sanitaires en vigueur lors de la période de déconfinement.
La préfecture de police de Paris avait indiqué que les drones n’étaient pas utilisés pour identifier des personnes, mais uniquement pour détecter des rassemblements du public à Paris contraires aux mesures sanitaires en vigueur et pouvoir ainsi procéder à la dispersion du rassemblement ou l’évacuation des lieux (les drones survolant la ville à une hauteur de 80 à 100 mètres, en utilisant un grand angle et sans capturer d’images en l’absence de carte mémoire).
Le juge des référés a toutefois relevé que les drones utilisés sont dotés d’un zoom optique et peuvent voler en dessous de 80 mètres, ce qui permet de collecter des données identifiantes. Il a observé que les drones ne sont dotés d’aucun dispositif technique permettant de s’assurer que les informations collectées ne puissent conduire à identifier des personnes filmées, et ce, pour un autre usage que l’identification de rassemblements publics.
Dès lors, le juge des référés a estimé que l’utilisation de ces drones relève d’un traitement de données à caractère personnel et doit respecter le cadre de la loi informatiques et libertés du 6 janvier 1978. Constatant que ce cadre n’avait pas été respecté, il a par conséquent ordonné à l’État de cesser sans délai la surveillance par drone, tant qu’un arrêté ou décret ministériel n’aura pas été pris sur le sujet après avis de la CNIL, ou tant que les drones ne seront sont pas dotés d’un dispositif de nature à rendre impossible l’identification des personnes filmées.
Distances d’épandage de pesticides à proximité des habitations – Décisions en référé du 15 mai
Les recours : Le collectif des maires antipesticides a demandé au juge des référés de suspendre l'exécution du décret et de l’arrêté du 27 décembre 2019 précisant les distances minimales de sécurité pour l’épandage des pesticides près des habitations.
Plusieurs associations dont Générations futures et l’UFC - Que Choisir ont par ailleurs demandé la suspension d'une instruction du 3 février 2020 ainsi que d'un communiqué de presse et d'une note du 30 mars 2020 du ministre chargé de l'agriculture qui autorisent dans certaines conditions les agriculteurs à réduire les distances minimales fixées par ces deux textes.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rappelé qu’il avait déjà rejeté la même demande du collectif des maires antipesticides le 14 février dernier. Si les risques pour la santé de l’utilisation des pesticides sont connus, aucun élément apporté par le collectif ne permettait de démontrer que les distances minimales de sécurité fixées par le Gouvernement – sur la base d’un avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) – étaient insuffisantes.
Selon le juge, les nouvelles pièces soumises par le collectif lors de ce second recours ne permettent toujours pas de remettre en cause les distances retenues. L'urgence justifiant l’intervention du juge des référés n’étant pas donc pas avérée, le recours du collectif des maires a été rejeté.
Le Conseil d’État se prononcera sur le fond de ce dossier dans les prochains mois.
Concernant la demande des associations, le juge a rappelé que l'arrêté du 27 décembre 2019 permettait une réduction des distances minimales de sécurité à condition que des mesures apportant des garanties équivalentes soient mises en œuvre conformément à des chartes d'engagement approuvées par le préfet. Il a relevé que l'instruction contestée du 3 février permet aux agriculteurs d'appliquer les distances minimales réduites lorsqu'un projet de charte a été élaboré sans attendre son approbation par le préfet. Le juge des référés a estimé que cette instruction – dont les effets prennent fin le mois prochain – ne présentait pas un risque imminent pour la santé et n'avait pas pour effet de compromettre la concertation publique. Il a ainsi rejeté la requête des neufs associations pour défaut d'urgence.
Les associations contestaient également le communiqué de presse et la note du 30 mars 2020 qui permettaient, dans le contexte lié à l’épidémie de covid-19, de procéder à un épandage selon des distances minimales réduites avant même que le projet de charte soit approuvé par le préfet et même soumis à concertation publique. Le juge a relevé que cette dérogation a pris fin avec la levée du confinement le 11 mai 2020 et que la demande des associations n’avait donc plus d’objet sur ce point.
I – Mars à mai
Étrangers atteints du covid-19 au CRA de Vincennes - Décision en référé du 7 mai
Le recours : À la suite d’un recours de l’association « Avocats pour la défense des droits des étrangers », du Syndicat des avocats de France, du Groupe d'information et de soutien des immigrés et de quarante-sept autres requérants, le tribunal administratif de Paris a notamment ordonné à l’administration de lever la rétention des étrangers retenus au centre de rétention (CRA) de Vincennes testés positifs au covid-19 et de les orienter vers un centre de l’Agence régionale de santé (ARS). Le ministère de l’intérieur a demandé l’annulation de cette injonction auprès du Conseil d’État.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a tout d’abord noté que des réaménagements avaient été effectués au CRA de Vincennes à la suite de la décision du tribunal administratif. Désormais, seuls deux bâtiments restent ouverts et fonctionnent de manière étanche et autonome, un des bâtiments étant désormais dédié à l’accueil des étrangers contaminés par le covid-19. Au sein de celui-ci, les personnels et les étrangers testés positifs sont dotés de matériels de protection (masques, gants, etc.) et des prestations de ménage et de désinfection sont réalisées 6 jours sur 7 (7 jours 7 jours si le nombre de personnes retenues atteint 4). À ce jour, un seul étranger testé positif y demeure en rétention. Pour le juge des référés, le maintien en nombre très réduit d’étrangers contaminés ne présente pas, pour eux, pour les personnels ou les étrangers retenus dans l’autre bâtiment, un risque supérieur de contamination à celui encouru en cas de transfert vers un centre de l’ARS.
Le juge des référés a ensuite relevé que si aucun étranger contaminé par le covid-19 ne saurait faire l'objet d'un éloignement tant qu'il demeure malade et contagieux, les prescriptives d'éloignement, une fois guéri, ne sont pas inexistantes. Il a dès lors estimé, contrairement à ce que soutenaient les requérants, que le maintien en rétention des étrangers testés positifs n'était pas dépourvu de toute justification.
Enfin, alors qu’elle n’avait pas été interrogée lors du jugement au tribunal administratif, l’ARS a indiqué qu’elle n’était pas en mesure d’accueillir des personnes susceptibles de présenter un risque de trouble à l’ordre public, en l’absence de dispositif adapté et compte tenu du risque de compromettre le bon fonctionnement des établissements existants.
Pour ces différentes raisons, le juge des référés du Conseil d'État a annulé l'injonction prononcée par le tribunal administratif de Paris.
Masques et tests de dépistage à la prison de Ducos (Martinique) - Décision en référé du 7 mai
Le recours : À la suite d’un recours de l'ordre des avocats du barreau de Martinique et d’une vingtaine de détenus, le tribunal administratif de la Martinique a ordonné le 4 avril à l’administration de distribuer des masques aux détenus de la prison de Ducos en cas de contact avec d’autres détenus ou s’ils sont employés à la distribution des repas en tant qu'auxiliaires. Le tribunal a également enjoint à l’établissement de se doter d’une quantité suffisante de tests pour y réaliser des dépistages ciblés du covid-19. Le ministère de la justice et le centre pénitentiaire ont demandé au Conseil d’État d’annuler cette décision.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés du Conseil d'État a ordonné à l’administration de fournir un masque de protection aux détenus à l’occasion de leurs contacts avec l’extérieur afin de les protéger du risque de contamination. Il a relevé en effet qu’à partir du 11 mai, les détenus seront les seuls à ne pas avoir de masque de protection lors des « parloirs avocats », de la commission de discipline ou des entretiens avec les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation. En revanche, il a estimé que compte tenu des mesures mises en œuvre par le chef d’établissement du centre pénitentiaire de Ducos pour limiter les risques de propagation du virus (limitation des contacts avec l’extérieur, réduction les mouvements à l’intérieur de l'établissement, entretien et nettoyage des locaux, respect des règles de sécurité sanitaire, etc.), l’absence de distribution de masques de protection à l’ensemble des personnes détenues ne révélait pas une carence de l'administration, et a donc annulé sur ce point l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de la Martinique.
Le juge des référés du Conseil d'État a en outre relevé que le centre pénitentiaire prévoyait de doter, à compter du 11 mai, l'ensemble des détenus dits "auxiliaires" (chargés de la distribution des repas, des produits de cantine ou de l'entretien des coursives) d'un masque et d'une paire de gants jetables. Il donc estimé que la demande de l'Ordre des avocats au barreau de Martinique sur ce point était satisfaite.
Enfin, au sujet des tests de dépistage, le juge a observé que la situation avait également évolué depuis l’intervention du juge des référés du tribunal administratif. Les détenus et personnels pénitentiaires sont désormais identifiés comme personnes prioritaires pour des tests en cas de symptômes du Covid-19. Dans les prisons sans cas connu de covid-19 comme c’est le cas à Ducos, le premier détenu symptomatique est automatique testé. En cas de résultat positif, il fait l’objet d’un confinement sanitaire s’il ne nécessite pas d’hospitalisation, tout comme l’ensemble des personnes ayant été en contact avec lui. Le juge des référés du Conseil d'État a estimé que cette stratégie, qui ne prévoit pas de dépistage systématique de tous les détenus en cas de symptôme, ne révèle pas de carence de l'administration. Il a donc annulé sur ce point également l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de la Martinique.
Enregistrement des demandes d'asile en Ile-de-France - Décision en référé du 30 avril
Le recours : À la suite d’un recours de sept associations dont la Ligue des droits de l’Homme et le Groupe d'information et de soutien des immigrés (Gisti) et de sept particuliers, le tribunal administratif de Paris a ordonné à l’administration le rétablissement du dispositif d'enregistrement des demandes d'asile en Ile-de-France, supprimé en mars dernier. Le ministère de l'intérieur et de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ont demandé l’annulation de cette décision au Conseil d’État.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a ordonné au ministre de l’intérieur et à l’OFII de rétablir dans un délai de cinq jours et dans les conditions sanitaires imposées par le covid-19, l’enregistrement des demandes d’asile, en priorité de celles émanant des personnes présentant une vulnérabilité particulière, et de rouvrir la plateforme téléphonique de prise de rendez-vous.
Le juge des référés a rappelé qu’il s’était déjà prononcé le 9 avril dernier sur la question du droit d’asile durant le confinement. Il avait alors considéré qu’il ne lui était pas porté d’atteinte grave et manifestement illégale, car l’administration s’était engagée à poursuivre l’enregistrement des demandes des personnes vulnérables et à recenser les personnes qui avaient l’intention de déposer une demande. Toutefois le juge observe à présent, selon les différents éléments qui lui ont été présentés ou qu’il a demandés, que les permanences assurées dans les préfectures pour les demandes des personnes vulnérables sont insuffisantes et que le recensement annoncé n’a pas été mis en œuvre.
Contrairement à ce qu'avançait l’administration, le juge note que la mobilisation d’un minimum d’agents est possible malgré le contexte pour rouvrir les guichets d’enregistrement en nombre suffisant. L’impossibilité d’appliquer les mesures de protection et de distanciation sociale ne peut pas non plus être invoquée selon le juge, qui observe que d’autres préfectures, notamment dans des départements particulièrement touchés par l’épidémie, peuvent les appliquer.
Pour ces différentes raisons, la carence de l’État à mettre en œuvre l’enregistrement des demandes d’asile constitue une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile et justifie l’intervention du juge des référés.
Usage du vélo durant l'état d'urgence sanitaire - Décision en référé du 30 avril
Le recours : La Fédération Française des Usagers de la Bicyclette a demandé au juge des référés du Conseil d'État d'ordonner au Gouvernement d’indiquer expressément que le vélo pouvait être utilisé durant le confinement, de rouvrir les pistes cyclables fermées et d'enjoindre au ministère public de cesser de poursuivre les verbalisations ayant pour motif l'usage du vélo.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a ordonné au Gouvernement d’indiquer publiquement et largement que le vélo peut être utilisé pour les déplacements autorisés durant le confinement.
Il a relevé que si le Gouvernement avait bien interprété le décret du 23 mars 2020 comme réglementant uniquement les motifs (achats de première nécessité, accès aux soins, activité physique individuelle…) et non les moyens de déplacements, plusieurs autorités publiques avaient néanmoins indiqué par différents moyens de communication que l’usage du vélo était interdit.
Le juge des référés a estimé que l’utilisation du vélo relève de la liberté d’aller et venir et du droit de chacun au respect de sa liberté personnelle, et que l'absence de clarté des positions du Gouvernement y portait une atteinte grave et manifestement illégale.
Le juge des référés du Conseil d’État a en revanche jugé qu’il n’avait pas le pouvoir de satisfaire les autres demandes de la Fédération. S'agissant en particulier de la demande d’ interrompre les poursuites engagées contre les cyclistes, le juge des référés a rappelé qu'il n’était pas habilité à ordonner des mesures à l’autorité judiciaire.
Protection des avocats - Décision en référé du 20 avril
Le recours : Les ordre des avocats des barreaux de Paris et Marseille ont demandé au Conseil d’État d’enjoindre au Gouvernement de fournir notamment des masques de protection et du gel hydro-alcoolique aux avocats dans l’exercice de leurs missions.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rappelé que les juridictions judiciaires ont été fermées le 15 mars dernier, le service ayant été uniquement maintenu pour les contentieux prioritaires en matière civile et pénale. Les règles de fonctionnement ont été adaptées pour être compatibles avec les impératifs de distanciation sociale et de limitation de la contamination : recours à des moyens de communication électronique pendant les gardes à vue, tenue possible d’audiences à distance ou à huis clos, procédures contradictoires intégralement écrites ou dispenses d’audience. Des instruction sont également été données pour que les audiences soient réalisées dans des salles suffisamment grandes et avec un renforcement des prestations de nettoyage.
Le juge des référés a également relevé que le Gouvernement, face à l’insuffisance des stocks, a décidé d’assurer en priorité la distribution des masques disponibles aux professionnels de santé ou à ceux intervenant en contact avec des personnes âgées, tout en procédant à une importation massive et une incitation de la production nationale.
Le juge des référés affirme toutefois qu’il appartient à l’État d’assurer le bon fonctionnement des services publics, et qu’il doit, lorsque les lieux ou la nature des missions conduisent inévitablement à des contacts étroits et prolongés, mettre à disposition des équipements de protection. Face à un contexte de pénurie persistante de masques, le Gouvernement doit aider les avocats, qui concourent au service public de la justice en tant qu’auxiliaires de justice, à s’en procurer en facilitant l’accès des barreaux et institutions représentatives de la profession aux circuits d’approvisionnement. Concernant le gel hydro-alcoolique, même si les avocats peuvent s’en procurer, l’État doit malgré tout en mettre à disposition lorsque l’organisation des lieux ou la nature même des missions ne permettent pas de respecter les règles de distanciation sociale.
Néanmoins, compte tenu des différentes mesures déjà prises par le Gouvernement, des moyens dont dispose l'administration et des pouvoirs du juge des référés, qui ne peut ordonner que des mesures susceptibles d’être prises à très brefs délais, le juge des référés du Conseil d’État a estimé que l’absence de distribution de matériels de protection aux avocats ne révélait pas une carence de l’État portant, de manière caractérisée, une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées.
Restriction des épandages agricoles - Décision en référé du 20 avril
Le recours : L’association Respire a demandé au Conseil d’État d’enjoindre au Gouvernement d’appliquer immédiatement et jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire, les mesures de restriction des épandages agricoles prévues en cas de pics de pollution, par l’arrêté du 7 avril 2016.
La décision du Conseil d’État :
L’association requérante soutenait que la pollution de l'air par les particules PM10 et PM2,5 constitue un facteur aggravant de la propagation du covid-19 ou, tout au moins, de ses conséquences notamment sur les personnes souffrant par ailleurs de certaines affections respiratoires. Elle réclamait en conséquence que le juge des référés enjoigne au Gouvernement de prendre en urgence des mesures limitant les épandages agricoles pour réduire les émissions de ces particules.
Le juge des référés a tout d’abord relevé, se fondant sur les éléments qui lui ont été remis et les précisions réclamées à l’administration lors de l’audience, que, contrairement à 2019, aucun dépassement du seuil d’alerte de pollution n’a été observé entre le 15 mars et le 14 avril 2020, période marquée par une forte réduction des pollutions issue de l’activité industrielle et des transports en raison des mesures de confinement, et que les dépassements du seuil d’information-recommandation avaient été moins importants qu’en 2019.
Le juge des référés a estimé que les trois principales études sur lesquelles l'association requérante fondait sa requête et les éléments apportés lors de l’audience ne permettaient pas de conclure à la nécessité de prendre des mesures complémentaires. L’étude chinoise, publiée en 2003 et portant sur le SRAS, portait sur la pollution de l’air en général, notamment au dioxyde de carbone, qui est actuellement fortement réduite en raison de la diminution des transports, et pas seulement sur la pollution aux particules PM10 et PM2,5. L’étude américaine, datant d’avril 2020, porte bien sur l’exposition aux particules PM2,5, mais se fonde sur une exposition de long terme (plusieurs années minimum), ce qui ne permet pas d’apprécier les conséquences d’une exposition limitée à quelques semaines, délais correspondant aux mesures urgentes et provisoires que le juge des référés a le seul pouvoir d’ordonner. Enfin, l’étude italienne datant également d’avril 2020, qui s’intéresse à l’exposition aux particules PM10, porte sur des dépassements des seuils de pollution qui, lorsqu’ils surviennent en France, donnent lieu à des mesures de restriction des activités polluantes conformément à ce que prévoit l’arrêté du 7 avril 2016.
Le juge des référés a toutefois rappelé qu’il incombe à l’administration de faire preuve d’une vigilance particulière dans le contexte actuel d’état d’urgence sanitaire, en veillant à prendre, au besoin de façon préventive, des mesures pour éviter la survenance de pic de pollution ou au minimum d’en limiter la durée. C’est sous la réserve que l’État assure strictement ses obligations, au besoin de manière préventive, que le juge des référés a rejeté la demande de l’association.
Fermeture des entreprises de la métallurgie - Décision en référé du 18 avril
Le recours : La Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT (FTM-CGT) a demandé au Conseil d’État d’ordonner au Gouvernement de dresser la liste des entreprises de la métallurgie « essentielles à la Nation », de fermer les autres et de prendre des mesures particulières de protection au sein des entreprises poursuivant leurs activités.
La décision du Conseil d’État :
Le juge a observé que le choix du Gouvernement de ne pas procéder à la fermeture des entreprises du pays (sauf celles accueillant du public), accompagné de l’obligation pour les employeurs de prendre toutes les mesures d’hygiène et de distanciation nécessaires, était fondé sur l'analyse de ce qu'une telle mesure était suffisante pour combattre l’épidémie, le confinement dans sa forme actuelle commençant à produire des effets positifs.
Le juge a en outre relevé que la démarche de l’administration était motivée par l’extrême difficulté de distinguer les entreprises indispensables de celles qui ne le sont pas, dans un tissu industriel où les activités sont étroitement intriquées.
Le juge des référés a également rappelé l’obligation générale de sécurité qui incombe aux employeurs en vertu du code du travail, et relevé que, pour prendre en compte les risques spécifiques pour les travailleurs des entreprises, notamment de la métallurgie, l’administration avait déjà adopté un ensemble de mesures. Ces mesures ont notamment permis aux services déconcentrés de l’État (DIRECCTE) d’adresser une vingtaine de mises en demeure à des entreprises, aux services d’inspection du travail de saisir le juge judiciaire en référé, aux élus du personnel et délégués syndicaux d’utiliser leur pouvoir d’alerte et aux services de santé au travail d’accroître leurs prérogatives.
Enfin, s’agissant enfin de la demande du syndicat de mettre à disposition vingt masques de protection par salarié et par semaine, le juge a rappelé la stratégie du Gouvernement d’assurer en priorité la fourniture des masques disponibles aux professions les plus exposées. Il a en outre relevé que deux nouvelles catégories de masques à usage non sanitaire ont été créées et notamment pour les professionnels ayant des contacts avec d’autres personnes dans le cadre professionnel, dont il a été précisé à l’audience que la production avait commencé, afin qu’ils soient mis le plus rapidement possible sur le marché.
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Port d’un masque de protection à Sceaux - Décision en référé du 17 avril
Le recours : Saisi par la Ligue des droits de l’Homme, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a suspendu l’arrêté du maire de Sceaux imposant le port d’une « protection couvrant la bouche et le nez » pour les déplacements dans la commune. Le maire de Sceaux a fait appel de cette décision au Conseil d’État.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés du Conseil d’État a confirmé que le maire de Sceaux ne pouvait prendre une telle décision.
La loi d’urgence du 23 mars 2020 a confié à l’État la responsabilité d’édicter les mesures générales ou individuelles de lutte contre le covid-19, en vue, notamment, d’assurer leur cohérence et leur efficacité sur l’ensemble du territoire. Dès lors, si les maires peuvent contribuer à leur bonne application, ils ne peuvent pas prendre d’autres mesures spécifiques, à moins, d’une part, que des raisons impérieuses liées à des circonstances locales les rendent indispensables et à condition, d’autre part, de ne pas compromettre la cohérence et l’efficacité des mesures décidées par l’État.
Le juge des référés estime que la démographie de la commune de Sceaux et la concentration de ses commerces de première nécessité dans un espace réduit ne constituent pas de telles raisons impérieuses.
Le juge des référés estime également que la décision du maire de Sceaux nuit à la cohérence des mesures prises par les autorités sanitaires, dans un contexte où les masques chirurgicaux et FFP2 disponibles sont réservés aux professions les plus exposées et où le port d’autres types de masques de protection n’est pas imposé de manière générale.
Enfin, le juge relève qu’en laissant entendre qu’une protection couvrant la bouche et le nez peut constituer une protection efficace, quel que soit le procédé utilisé, l’arrêté du maire de Sceaux est de nature à induire en erreur la population.
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Dépistage systématique et régulier des personnes résidant en EHPAD - Décision en référé du 15 avril
Le recours : Plusieurs organisations syndicales du secteur sanitaire ont demandé au Conseil d’État d’ordonner au Gouvernement de prendre des mesures pour dépister de façon systématique et régulière les résidents et personnels des EHPAD, même en l’absence de symptômes du covid-19. Les requérants demandaient également la distribution et l’utilisation systématique de matériels de protection (masques, gants, blouses, gel hydro-alcoolique) ainsi que la mise à disposition de matériels d’oxygénation pour les résidents qui ne nécessitent pas une hospitalisation.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a tout d’abord noté que le ministre chargé de la santé, allant au-delà des recommandations du Haut Conseil de santé publique (HCSP), a annoncé une campagne de dépistage systématique des personnels et résidents des EHPAD dans lesquels un cas de contamination au covid-19 a été constaté. Certaines collectivités territoriales des zones particulièrement touchées par le virus ont également annoncé des campagnes de dépistage au sein de tous les EHPAD de leur ressort. Le juge a rappelé que la capacité de test par jour ouvré s’élève à 21 000 tests en France au 11 avril, et que des achats ont été effectués pour l’augmenter à 48 000 tests par automates et 40 000 tests PCR à la fin du mois d’avril et 60 000 dans les semaines suivantes.
Concernant les masques de protection, il a été rappelé que les personnels des EHPAD faisaient partie des professionnels prioritaires pour en disposer, avec un objectif de 500 000 masques chirurgicaux par jour. Lors de l’audience, le ministère a détaillé les mesures prises pour augmenter le nombre de masques disponibles en France (importation massive et encouragement de la production nationale).
Enfin, le juge a relevé que le ministre chargé de la santé avait défini une stratégie de gestion de l’oxygène médical en EHPAD, et qu’il l'avait complétée par de nouvelles consignes compte tenue des tensions d’approvisionnement en concentrateurs individuels afin d’assouplir les conditions l’accès à des solutions alternatives d’oxygénation.
Compte tenu des moyens dont dispose l’État et des mesures qu’il a déjà prises, le juge n’a pas relevé de carence portant une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale justifiant qu’il ordonne les mesures demandées par les syndicats.
Accès aux soins des personnes résidant en EHPAD - Décision en référé du 15 avril
Le recours : Les associations Coronavictimes et Comité anti-amiante Jussieu ont demandé au Conseil d’État d’enjoindre au Gouvernement de prendre des mesures générales pour assurer un accès égal aux soins hospitaliers et aux soins palliatifs pour les résidents en EHPAD présentant des symptômes du covid-19. Les requérants demandaient également que l'État prenne des mesures pour permettre aux personnes en fin de vie la présence de leurs proches et pour imposer de réaliser des tests systématiques pour connaître la cause de leur décès.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a tout d’abord observé qu’il n’était pas établi que de manière générale les hôpitaux refusaient l’admission dans leurs services des personnes résidant en EHPAD. Plusieurs recommandations (comité scientifique, ministère, société savante de gériatres) préconisent au contraire d’admettre ces patients dans les hôpitaux lorsque leur état de santé le justifie, et les chiffres communiqués par le ministère des solidarités et de la santé attestent que leur admission se poursuit. De la même façon, le juge a observé que les critères médicaux de l'admission en réanimation ne sont pas devenus plus stricts, en particulier pour les personnes âgées, par crainte d’une saturation des services. Plusieurs recommandations de sociétés savantes destinées aux professionnels de santé ont rappelé que l’admission en réanimation ne pouvait se fonder uniquement sur le critère de l’âge ou sur tout autre critère pris isolément.
Le juge des référés a également relevé que, afin de garantir à chacun une fin de vie digne et la plus apaisée possible, des mesures avaient été prises pour faciliter les interventions en soins palliatifs, aussi bien pour les personnes à domicile que pour les personnes résidant dans les EHPAD. Concernant le droit de ces derniers à recevoir la visite d’un de leurs proches, le juge des référés a observé que si les visites sont bien suspendues dans les EHPAD, des autorisations exceptionnelles de visite peuvent être accordées par les directeurs d’établissement, à condition que des mesures soient prises pour protéger la santé de tous.
Enfin, le juge a relevé qu’une opération générale de dépistage dans les EHPAD avait été annoncée et que le Haut Conseil de santé publique (HCSP) ne recommandait pas à ce stade de l’épidémie, et en l'état des capacités de diagnostic virologique, de réaliser un test de dépistage du covid-19 chez les personnes décédées.
Fonctionnement des juridictions judiciaires et administratives - Décisions en référé du 10 avril
Le recours : Plusieurs organisations, syndicats et associations – dont le Conseil national des barreaux, le syndicat des avocats de France ou le syndicat de la magistrature – ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre plusieurs règles d’adaptation du fonctionnement des juridictions administratives et judiciaires (hors pénal) durant l’état d’urgence sanitaire. Ils contestaient notamment la possibilité de recourir à la visioconférence lors des audiences, de mener des procédures sans audience ou de rejeter sans procédure contradictoire certaines demandes en référé.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rejeté ces demandes. Il a rappelé que le Gouvernement avait été habilité, par la loi d’urgence votée par le Parlement le 23 mars, à adapter les règles de fonctionnement des juridictions administratives et judiciaires afin de limiter la propagation de l’épidémie de Covid-19.
Concernant la possibilité de recourir à des moyens de télécommunication audiovisuelle durant les audiences, le juge des référés du Conseil d’État relève qu’elle vise à respecter les impératifs de distanciation sociale et que le juge doit s’assurer du bon déroulement des échanges entre les parties en veillant au respect des droits de la défense et au caractère contradictoire des débats.
Le juge des référés a ensuite observé que la procédure écrite sans audience pouvait être refusée par les parties dans les juridictions judiciaires, dans un délai de quinze jours, sauf dans le cas d’un procédure d’urgence ou accélérée. Même s’il s’agit d’une procédure écrite, le juge des référés a rappelé que le caractère contradictoire est assuré. Le juge a noté en outre que concernant les juridictions administratives, les jugements sans audience ne seront, dans les faits, possibles que dans un nombre limité de cas.
Les requérants contestaient également la possibilité offerte aux juges judiciaires de rejeter sans procédure contradictoire des recours en référé. Le juge des référés du Conseil d’État a précisé que cela ne pouvait concerner que les demandes qui apparaissent avec évidence irrecevables ou qui ne remplissent pas les conditions du référé. Ces rejets doivent en outre être motivés et le requérant peut faire appel de ce rejet selon les modalités habituelles.
> Lire la décision en référé n°439903
> Lire la décision en référé n°439883, 439892
Mesures pour les personnes en situation de précarité - Décision en référé du 9 avril
Le recours : Les associations Mouvement citoyen Tous Migrants, Soutien Réseau Hospitalité, Chemins Pluriels et Utopia 56 ont demandé au Conseil d’État d’ordonner au Gouvernement de prendre différentes mesures pour assurer la protection des personnes en situation de précarité. Les associations lui ont également demandé de transmettre au Conseil constitutionnel, la question de la constitutionnalité des dispositions de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 du 23 mars, qui limitent les déplacements en dehors du domicile, au motif qu'elles ne traitaient pas spécifiquement de la situation des personnes en situation de précarité.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a observé que des instructions ont été adressées aux préfets pour la poursuite des actions en faveur des personnes en situation de précarité (distribution de produits alimentaires, accès à l’eau, aux installations sanitaires, aux biens essentiels à l’hygiène), que l’État a créé un dispositif de distribution de « chèques services » pour les personnes n’ayant pas accès à une offre alimentaire, dont 60 000 personnes bénéficient déjà, et qu’il a prolongé le bénéfice des droits sociaux pendant la période actuelle.
S’agissant des restrictions de déplacements et leur impact sur les personnes sans-abris, il a noté qu’à l’issue d’une précédente audience le 30 mars au Conseil d’État (recours de la Fédération nationale droit au logement et autres, cf. ci-dessous), la consigne avait été donnée par l’administration de ne procéder à aucune verbalisation des personnes sans domicile fixe.
S'agissant des demandes tendant à garantir l’hébergement des sans-abris, leur dépistage systématique et la mise à disposition de masques pour eux ainsi que pour les personnels accompagnants, le juge des référés a rappelé les différentes mesures déjà prises par le Gouvernement, comme il l’avait fait à la suite du recours de la Fédération nationale droit au logement (ordonnance du 2 avril, recours de la Fédération nationale droit au logement et autres, cf. ci-dessous).
Au sujet de l’accès actuellement réduit aux guichets des préfectures dédiés aux demandes d’asile, le juge a relevé que le gouvernement faisait valoir qu’une procédure entièrement dématérialisée n’était pas possible, notamment pour le relevé d’empreintes digitales, mais qu’aucun migrant ne pouvait faire l’objet d’une mesure d’éloignement s’il n’avait pas été en mesure de déposer sa demande d’asile, et que l’enregistrement des demandes d’asile restait possible lorsqu’une urgence particulière existe.
Sur l’ensemble de ces questions, le juge des référés a estimé qu’il n’apparaissait pas de carence grave et manifestement illégale des autorités justifiant que soient ordonnées les mesures sollicitées par les associations requérantes.
Enfin, le Conseil d’État n’a pas transmis la question prioritaire de constitutionnalité. Il a jugé que le législateur, en habilitant le Premier ministre à prendre des mesures limitant les déplacements, n'était pas tenu de prévoir des mesures spécifiques à certaines catégories de la population.
Mesures pour les personnels pénitentiaires - Décision en référé du 8 avril
Le recours : Le Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière a demandé au Conseil d'État d'enjoindre au Gouvernement de mettre à disposition des personnels des prisons, des masques, gants et gel hydro-alcoolique, et de prendre certaines mesures restrictives sur l'organisation de la détention jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire (par exemple, la suspension du régime « Portes ouvertes »).
La décision du Conseil d’État : Concernant les gants et le gel hydro-alcoolique, le ministère de la Justice s’est engagé durant l’audience qui s’est tenue le 1er avril à satisfaire la demande des personnels avec une dotation suffisante de gants à usage unique pour les contacts directs avec les détenus et une nouvelle livraison de 2 500 litres de gel hydro-alcoolique par semaine. En outre, le juge des référés a rappelé que le ministère avait décidé d’imposer le port d’un masque chirurgical à l’ensemble des agents se trouvant en contact à la fois direct et prolongé avec les personnes détenues. Un stock de 260 000 masques chirurgicaux a déjà été alloué à l’administration pénitentiaire à cet effet et la ministre s’est engagée à assurer, sans rupture, l’approvisionnement de façon à satisfaire l’ensemble des besoins journaliers (2 masques par agent pour chaque jour de présence, soit 17 600 masques).
Le juge des référés a également estimé que le maintien du régime de détention « Portes ouvertes » et de promenades adaptées permettait de ménager l’équilibre entre la sécurité sanitaire des personnes au sein des établissements pénitentiaires et l’obligation d’y garantir l’ordre et la sécurité. Le régime « Portes ouvertes », qui consiste à laisser les portes des cellules ouvertes pour permettre la circulation des détenus, est en effet de nature à éviter des tensions et des risques de troubles au sein des établissements.
Mesures pour les détenus - Décision en référé du 8 avril
Le recours : L’Observatoire international des prisons, l’association Avocats pour la défense des droits des détenus, le Syndicat de la magistrature et le Syndicat des avocats de France ont demandé au Conseil d'État d'enjoindre au Gouvernement de prendre des mesures sanitaires supplémentaires pour les détenus et de procéder à la libération de certains d’entre eux afin de réduire la population carcérale.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a observé que des consignes ont été transmises aux établissements afin de faire respecter les « gestes barrières », et qu’il a été demandé de procéder à un nettoyage renforcé et une aération régulière des locaux ainsi qu’à l’organisation des douches collectives de manière appropriée. Le juge note également que les détenus ayant contracté le covid-19 ou en présentant des symptômes doivent faire l’objet d’un confinement sanitaire, et que des mesures ont été prises pour réduire les contacts avec l’extérieur et limiter les mouvements à l’intérieur des établissements. L'ordonnance du juge relève qu’il revient aux chefs d’établissements de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’assurer le respect de ces consignes.
A la demande du juge des référés et à l’issue de l’audience du 3 avril, l’administration pénitentiaire a en outre défini des mesures d’hygiène devant être appliquées dans les cuisines des établissements. Toujours à l’issue de l’audience, l’administration a aussi clairement défini la conduite à tenir afin que puissent être détectées, dans les meilleurs délais, les personnes détenues présentant les symptômes du covid-19.
À la lumière de ces éléments et compte tenu du nombre de masques et tests disponibles sur le territoire et de la stratégie de gestion maitrisée mise en place, le juge des référés a estimé qu’il ne pouvait pas être ordonné de distribuer des masques et des tests de dépistage à chaque détenu.
Enfin, le juge des référés a indiqué qu’il n’avait pas le pouvoir d’accroître la portée des dispositifs de libération de détenus, une telle mesure relevant de la loi.
Doses d’hydroxychloroquine et tests de dépistage au CHU de Guadeloupe - Décision en référé du 4 avril 2020
Le recours : Saisi par l’Union générale des travailleurs de Guadeloupe (UGTG), le tribunal administratif de Guadeloupe a enjoint, le 27 mars dernier, au centre hospitalier universitaire (CHU) de Guadeloupe et à l’Agence régionale de santé (ARS) de commander des doses d’hydroxychloroquine et d'azythromycine, ainsi que des tests de dépistage en nombre suffisant pour couvrir les besoins présents et à venir de la population de Guadeloupe. Le CHU et le ministre des Solidarités et de la Santé ont fait appel de l'ordonnance du tribunal administratif devant le Conseil d’État.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés du Conseil d’État a annulé ces deux injonctions. Il a rappelé que la prescription de l'hydroxychloroquine, dont l’efficacité contre le Covid-19 n’est pas avérée, est permise, après décision collégiale de professionnels de santé et dans le respect des recommandations du Haut Conseil de la santé publique. Le juge a observé que le CHU disposait d’un stock suffisant pour la vingtaine de patients bénéficiant déjà de ce traitement, et qu’il avait commandé des doses suffisantes d’hydroxychloroquine et d’azythromycine pour traiter de 200 à 400 éventuels nouveaux patients. Le juge des référés a ainsi estimé qu’il ne pouvait être reproché au CHU et à l’ARS de n’avoir commandé davantage de ces traitements, car ils ne peuvent être administrés qu’à un nombre limité de patients et que plusieurs autres molécules font l’objet d’essais cliniques dont les résultats sont attendus prochainement.
Concernant les tests de dépistage, le juge a relevé que le CHU réalise chaque jour une centaine de « tests PCR », une capacité bientôt augmentée de 180 tests quotidiens, et qu’il dispose d’un stock de 1 500 tests, qui sera complété par 4 000 autres prochainement. En outre, le juge a noté que le CHU, l’institut Pasteur de Guadeloupe et le centre hospitalier Maurice Selbonne avaient commandé 200 tests sérologiques chacun, pour en évaluer la fiabilité dans la perspective de la fin du confinement.
Hébergement des personnes sans abri ou en habitat de fortune - Décision en référé du 2 avril 2020
Le recours : La Fédération nationale droit au logement, la Ligue des droits de l’homme, l’association Élu/es contre les violences faites aux femmes et l’association KÂLÎ ont demandé au Conseil d’État d’ordonner au Gouvernement de mettre à l’abri toutes les personnes sans abri ou en habitat de fortune en réquisitionnant des logements si besoin, d’instaurer des mesures sanitaires pour protéger les personnels accompagnants, et de dépister systématiquement les personnes hébergées dans les hébergements collectifs.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rejeté cette requête, en observant tout d’abord que les capacités d’hébergement mobilisées par l’État n’ont jamais été aussi importantes (170 000 places contre 157 000 auparavant, ainsi que 200 000 places en logement adapté). Il a relevé que l’administration poursuit ses efforts pour les accroître encore à brève échéance, notamment en négociant avec les secteurs de l’hôtellerie et les centres de vacances afin d’identifier le plus rapidement possible des places supplémentaires, sans exclure de recourir à des réquisitions si cela s’avérait nécessaire.
Concernant les personnels accompagnants, le juge des référés a notamment rappelé qu’une distribution de masques était prévue dans les centres d’hébergement spécialisés pour personnes atteintes de symptômes ne nécessitant pas une hospitalisation, et qu’il a été permis aux opérateurs du champ social et aux collectivités territoriales d’importer, avec l'appui de l’État, les masques nécessaires, et de les distribuer par leurs propres réseaux.
Au sujet du dépistage, le juge des référés a relevé que les autorités ont pris les dispositions nécessaires pour augmenter les capacités de test dans les meilleurs délais, et que, en attendant, les tests sont pratiqués selon des critères de priorité constamment ajustés et fixés, en tenant compte de l’avis du haut Conseil de la santé publique.
Fermeture des marchés - Décision en référé du 1er avril
Le recours : La Fédération nationale des marchés de France a demandé au Conseil d’État d’enjoindre au Gouvernement de ré-autoriser la tenue des marchés alimentaires, couverts et de plein air.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés du Conseil d’État a rejeté cette requête. Il a rappelé que l’objectif d’interdiction des marchés se justifiait par la difficulté voire l’impossibilité d’y faire respecter les règles de sécurité sanitaire, en particulier les distances minimales à maintenir entre les personnes. Le juge a relevé que les marchés se trouvent dans une situation différente des autres magasins alimentaires comme les supermarchés, du fait des spécificités de leur topographie, de leurs jours et heures d’ouverture et de la densité de leur personnel. Il a également rappelé que cette interdiction pouvait faire l'objet de dérogations, décidées par le préfet, dans le cas où il y avait un besoin d’approvisionnement de la population et qu’une organisation spécifique pouvait être mise en place et contrôlée pour faire respecter les règles sanitaires.
Mise à disposition de matériel de protection aux personnels de santé - Décision en référé du 28 mars 2020
Le recours : Des infirmiers libéraux et le syndicat Infin’idels ont demandé au Conseil d’État d’enjoindre au Gouvernement de prendre des mesures pour assurer un approvisionnement et une distribution de matériels de protection suffisants pour les professionnels de santé (masques, gel hydroalcoolique, surblouses, charlottes, gants, surchaussures et lunettes de protection)
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rejeté cette requête. Il a observé que le Gouvernement avait ordonné des réquisitions et commandé plusieurs centaines de millions de masques qui devraient être livrés prochainement. Concernant les matériels de protection autres que les masques, il n’a pas été démontré qu’il existait de difficultés d’approvisionnement qui justifieraient des mesures autres que celles actuellement mises en œuvre.
Production de masques et de tests dépistage, administration d’hydroxychloroquine - Décision en référé du 28 mars 2020
Le recours : Le Syndicat des Médecins Aix et Région (SMAER) et des professionnels de santé, soutenus par la fédération des médecins de France, ont demandé au Conseil d’État d’enjoindre au Gouvernement de prendre des mesures pour fournir aux professionnels de santé des masques (mesures de réquisitions, interdictions d’exportation), des moyens de dépistage massifs et pour les autoriser à prescrire et administrer aux patients des traitements à base d’hydroxychloroquine.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rejeté cette requête. Il a rappelé que le Gouvernement avait ordonné des réquisitions et commandé plusieurs centaines de millions de masques qui devraient être livrés prochainement. Il a en outre constaté que la limitation des tests de dépistage résultait uniquement d’une insuffisante disponibilité des matériels. Enfin, le juge a rappelé qu’aucun traitement n’est à ce jour connu pour soigner les patients atteints du covid-19 et a relevé que le Gouvernement avait permis, par décret, la prescription de l'hydroxychloroquine après décision collégiale de professionnels de santé et dans le respect des recommandations du Haut Conseil de la santé publique.
Prescription de l’hydroxychloroquine, à l’hôpital et en ville - Décision en référé du 28 mars 2020
Le recours : Plusieurs particuliers ont demandé au Conseil d’État d’enjoindre au Gouvernement de saisir l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) pour élaborer une recommandation temporaire d’utilisation pour permettre la prescription, à l’hôpital ou en ambulatoire, de l’hydroxychloroquine.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rejeté cette requête. Il a rappelé qu’aucun traitement n’est à ce jour connu pour soigner les patients atteints du covid-19 et que les études cliniques disponibles à ce jour, souffrent d’insuffisances méthodologiques. Il a en outre relevé que le Gouvernement avait permis, par décret, la prescription de l'hydroxychloroquine après décision collégiale de professionnels de santé et dans le respect des recommandations du Haut Conseil de la santé publique.
Fermeture temporaire des centres de rétention administrative - Décision en référé du 27 mars 2020
Le recours : Plusieurs associations (Groupe d’information et de soutien des immigré.e.s, GISTI, Cimade, Avocats pour la Défense des Droits des Étrangers, ADDE) et organisations professionnelles (Syndicat des avocats de France, Conseil national des barreaux) ont demandé au Conseil d’État d’enjoindre au Gouvernement de fermer temporairement les centres de rétention administrative où sont retenus des étrangers en situation irrégulière en attente de leur éloignement.
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés a rejeté cette requête, observant tout d’abord que seulement 152 personnes étaient encore retenues dans ces centres, qui sont en capacité d’accueillir 1 800 personnes. Il a rappelé que des instructions spécifiques à la prévention à la lutte contre l’épidémie de covid-19 y avait été transmises et a estimé qu’il n’y avait pas de preuves de carence dans l’accès aux soins des personnes retenues, ou dans la mise à disposition de produits d’hygiène. Le Conseil d’État a en outre rappelé que les étrangers concernés ne peuvent être placés ou maintenus en rétention que pour le temps strictement nécessaire à leur départ.
Confinement total de la population - Décision en référé du 22 mars 2020
Le recours : Le syndicat Jeunes Médecins, soutenu par l’InterSyndicale Nationale des Internes et le Conseil National de l’Ordre des médecins, a notamment demandé au Conseil d’État d’enjoindre au Gouvernement de prononcer un confinement total de la population (sorties interdites sauf urgence de santé, arrêt des transports en commun, ravitaillement de la population).
La décision du Conseil d’État : Le juge des référés du Conseil d’État a rejeté la demande de confinement total, estimant qu’il pourrait avoir des implications graves pour la santé de la population, que le ravitaillement à domicile ne peut être organisé logistiquement sur l’ensemble du territoire et que les transports en commun sont essentiels pour le déplacement des personnels de santé ou des personnes participant à la production et à la distribution de l’alimentation.
Le Conseil d’État a toutefois enjoint au Gouvernement de prendre dans les 48 heures les mesures suivantes :
- préciser la portée de la dérogation au confinement pour raison de santé ;
- réexaminer le maintien de la dérogation pour « déplacements brefs, à proximité du domicile » compte tenu des enjeux majeurs de santé publique et de la consigne de confinement ;
- évaluer les risques pour la santé publique du maintien en fonctionnement des marchés ouverts, compte tenu de leur taille et de leur niveau de fréquentation.