Rapport public 1999
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L'activité juridictionnelle
Au cours de l'année 1999, l'activité contentieuse du Conseil d'Etat a été marquée par un très fort accroissement du nombre des affaires enregistrées : 12747 contre 10232 en 1998. Ces chiffres bruts doivent être nuancés pour mesurer l'activité contentieuse réelle : si l'on enlève les "séries" et affaires réglées par ordonnance du Président de la Section du contentieux, notamment pour régler les questions de compétence l'intérieur de la juridiction administrative, il reste 8817 affaires enregistrées en 1999 contre 5520 en 1998. Les "sorties" restent nettement plus nombreuses que les "entrées"( en chiffres bruts : 13551 au lieu de 10481 en 1998), mais ceci est dû à un nombre d'affaires de "séries" très important jugé en 1999. Le stock , cette année, a cessé de se résorber. En chiffres nets, il a même augmenté. Cette forte augmentation des affaires enregistrées en 1999 s'explique entièrement par la nouvelle croissance du contentieux des étrangers ( recours directs contre les refus de visas, appels de reconduite à la frontière, pourvois en cassation contre les décisions de la commission de recours des réfugiés...). Ce contentieux représente 57% des affaires nouvelles enregistrées en 1999, ce qui n'est évidemment pas satisfaisant, et appelle certainement un réexamen des dispositions qui régissent, en la matière, la compétence et la procédure.
Devant les tribunaux administratifs, le nombre des recours enregistrés a nettement diminué : 117429, en données nettes, contre 123834 en 1998. Mais l'an dernier, l'augmentation des entrées était due en particulier au contentieux des étrangers ( plus de 20 000 dossiers) et, vraisemblablement, liée en grande partie à l'opération de régularisation des immigrés clandestins décidée par le Gouvernement. La baisse constatée en 1999 n'est qu'un retour à la normale : on observe en effet que ces dix dernières années, le taux annuel moyen d'augmentation se situe autour de 5 à 6%. Le nombre d'affaires jugées a augmenté de 7,3% d'une année sur l'autre, passant de 96 367 à 104 615. De 1992 à 1999, il a augmenté de près de 55,5%. L'effort a été considérable, et a permis de régler en 1999, 96 % des affaires enregistrées.
Enfin, l'engorgement des Cours administratives d'appel continue à être préoccupant. Le nombre d'affaires enregistrées a encore augmenté : 16 056 en données nettes, contre 14 330 en 1998, soit une augmentation de 12,04 %, plus faible toutefois que l'augmentation constatée en 1998 par rapport à 1997. Le nombre d'affaires réglées, soit 12390, est en hausse de 23,8% par rapport à l'an dernier, mais le volume des stocks s'est encore alourdi, même si le délai théorique de son élimination demeure stable (2 ans et 6 mois).
La nouvelle Cour administrative de Marseille a atteint en fin d'année 1998 sa pleine capacité de jugement. La Cour administrative d'appel de Douai a été créée et a commencé son activité en 1999. Mais un effort important reste nécessaire pour donner aux Cours les moyens de faire face à leur mission.
L'activité consultative
L'activité consultative du Conseil d'Etat a connu en 1999 un rythme comparable à celui de l'an dernier. Si la Section des travaux publics a été moins souvent saisie, tel n'a pas été le cas de la Section sociale qui a examiné une série d'importants projets. Outre celui du financement de la sécurité sociale, cette section s'est prononcée sur la couverture maladie universelle, les textes d'application de la loi relative à la lutte contre les exclusions, la prestation spécifique dépendance et la réduction du temps de travail.
Il est à noter que les questions constitutionnelles et les questions communautaires et internationales occupent une place de plus en plus importante dans l'activité consultative. Les premières se rencontrent non seulement à l'occasion de l'examen des projets de loi constitutionnelle - au nombre de 4 en 1999 - mais aussi lors de celui des projets de loi ordinaire. Le Conseil d'Etat doit en effet éclairer le gouvernement sur les problèmes constitutionnels que soulèvent ces projets préalablement à leur examen par les parlementaires et le cas échéant, à la saisine du Conseil constitutionnel. Les secondes se posent, par exemple, lors de la transposition des directives communautaires, de l'interprétation des normes européennes ou du respect de la chose jugée par la Cour de Justice des Communautés Européennes. Le Conseil d'Etat veille ainsi à la conformité des textes de droit interne avec les règles de procédures communautaires et plus généralement avec les stipulations des conventions internationales auxquelles de France est partie.
Cette activité consultative a été complétée par les travaux de la Section du rapport et des études, qui a publié quatre études en 1999 consacrées à l'aide sociale(1), au cumul de rémunérations des fonctionnaires(2), à la réforme de la déclaration d'utilité publique(3) et à la réforme des lois de bioéthique adoptées en 1994(4). Commandée par le Premier ministre, cette dernière étude fait apparaître les évolutions nécessaires de la loi du 29 juillet 1994 relative à l'assistance médicale à la procréation et aux greffes. Elle propose d'autoriser, dans des conditions très strictes, certaines recherches sur l'embryon susceptibles de développements thérapeutiques considérables, mais recommande en revanche, en l'état actuel des connaissances, de refuser le clonage humain à des fins reproductives. Le Conseil d'Etat insiste sur la nécessaire révision périodique des dispositions législatives en ce domaine et leur éventuelle modification chaque fois que les avancées scientifiques le rendront nécessaire. Enfin, l'étude sur "l'utilité publique aujourd'hui" trace les grandes lignes d'une nouvelle méthode de consultation du public plus précise et plus transparente avant de déclarer les grands travaux d'utilité publique.
1. - "Aide sociale, obligation alimentaire et patrimoine", étude adoptée par la Section du rapport et des études du Conseil d'Etat, le 16 mars 1999 - Collection "les études du Conseil d'Etat", la Documentation Française, 1999.
2. - "Le cumul d'activités et de rémunérations des agents publics", étude adoptée par L'Assemblée générale du Conseil d'Etat, le 27 mai 1999. Collection "Les études du Conseil d'Etat", la Documentation Française, 1999.
3. - "L'utilité publique aujourd'hui", étude adoptée par l'Assemblée générale du Conseil d'Etat, le 25 novembre 1999. Collection "Les études du Conseil d'Etat", la Documentation Française, 1999.
4. - "Les lois de bioéthique : cinq ans après", étude adoptée par l'Assemblée générale du Conseil d'Etat, le 25 novembre 1999. Collection "Les études du Conseil d'Etat", la Documentation Française, 1999.