Les grands défis de la juridiction administrative

Par Jean-Marc Sauvé, Vice-président du Conseil d'État
Discours
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Intervention du 13 février 2015

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Les grands défis de la juridiction administrative

Cour suprême de Hongrie, vendredi 13 février 2015

Intervention de Jean-Marc Sauvé[1], vice-président du Conseil d’État

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les juges,

Mesdames et Messieurs,

Je suis particulièrement honoré d’être invité à m’exprimer aujourd’hui devant les membres de la Cour suprême de Hongrie et les représentants de la communauté juridique hongroise. Le Conseil d’État de France est très attaché aux liens qu’il noue avec ses homologues européens. Il  y voit une occasion de mieux connaître les systèmes juridiques nationaux, d’observer les différentes formes d’organisation juridictionnelle, d’échanger sur nos pratiques, mais aussi d’aborder les grandes questions dont nous sommes saisis et les défis auxquels nous sommes ensemble confrontés.

A l’échelle de l’Europe, nous sommes en effet devenus les garants d’un même corpus de droits fondamentaux. Au sortir de la seconde guerre mondiale, après les tragédies de la Shoah et des totalitarismes nazi et soviétique, dont ont témoigné les plus grands écrivains hongrois, parmi lesquels Imre Kertész et Sándor Márai, nous avons mis en partage ce que nos traditions juridiques ont de meilleur. Sans méconnaître nos identités constitutionnelles et suivant le principe de subsidiarité, il nous revient aujourd’hui de répondre à une même exigence d’intégration des règles et garanties européennes dans nos ordres juridiques nationaux. Voilà sans doute l’un des plus grands défis de notre modernité et l’un des nouveaux vecteurs d’approfondissement de notre État de droit au sein duquel doivent toujours s’équilibrer la protection des droits individuels et la sauvegarde de l’intérêt général.

Pour y faire face, les systèmes juridiques nationaux cherchent en permanence à s’adapter et à inventer des formes d’organisation plus efficaces. Alors que le droit public s’est étendu et complexifié, certains États, comme la France, ont fait le choix d’un juge spécialisé dans le traitement des contentieux administratifs. Cette organisation présente certains avantages mais nous confronte aussi à des contraintes et des défis spécifiques, que je souhaite vous présenter.

 

I. L’existence d’une justice administrative spécialisée nécessite l’instauration de voies de dialogue souples et régulières entre ordres de juridiction.

A. Avant d’examiner les modalités d’organisation de la justice administrative en France, je souhaiterais revenir brièvement sur ses origines.

L’exigence d’un droit spécial, adapté à la gestion des affaires publiques, d’un jus publicum exorbitant du droit privé, s’est très tôt imposée au nom de l’utilité publique et de la sauvegarde du bien commun - on en trouvait déjà l’axiome dans le premier livre du Digeste de Justinien[2] et dans les regalia des juristes médiévaux[3]. Pour autant, la mise en œuvre d’un droit autonome – le droit public - sous le contrôle d’un juge spécialisé – le juge administratif – (1), intégré à un ordre juridictionnel complet (2) a été le fruit d’une lente maturation[4].

1. Si la justice administrative trouve ses origines dans les institutions royales nées à la fin du XIIIème siècle, elle vise, dans sa forme moderne, à combler le vide créé par l’interdiction faite à l’autorité judiciaire, par la loi des 16 et 24 août 1790, de s’immiscer dans le fonctionnement des administrations[5]. Si le Conseil d’État est chargé, depuis sa création en 1799, « de rédiger les projets de lois et les règlements d'administration publique et de résoudre les difficultés qui s'élèvent en matière administrative »[6], ses missions juridictionnelles se sont développées au cours d’une spécialisation progressive, dont témoigne, dès 1806, la création de la « commission du contentieux »[7]. Elles se sont définitivement affirmées avec la loi du 24 mai 1872 et l’arrêt Cadot du 13 décembre 1889[8], qui reconnaissent au Conseil d’État l’exercice souverain et indépendant de la justice. S’ouvre alors l’« âge d’or du contentieux administratif »[9] au cours duquel le Conseil d’État est devenu le garant d’une autolimitation interne de l’État. C’est en effet sous l’impulsion de sa jurisprudence que se sont développées les différentes branches du droit administratif, dans les domaines de la responsabilité, des actes unilatéraux, des contrats et du service public[10].

2. L’affirmation des missions contentieuses du Conseil d’État ne s’est pas immédiatement accompagnée de la construction d’un ordre juridictionnel autonome. Pour remédier à l’engorgement de son prétoire, une partie du contentieux administratif aurait pu être transféré aux juridictions judiciaires de première instance et d’appel et, même conduire – horresco referens – à cantonner le Conseil d’État dans des fonctions consultatives. Telle n’a pas été la voie française.  Le dualisme juridictionnel s’est, au contraire, approfondi, d’abord avec la transformation des conseils de préfecture en tribunaux administratifs par un décret du 30 septembre 1953[11], puis avec la création des cours administratives d’appel  par la loi du 31 décembre 1987[12]. L’ordre juridictionnel administratif se compose aujourd’hui d’une cour administrative suprême – le Conseil d’État -, de 8 cours administratives d’appel et de 42 tribunaux administratifs. Au sein de cet ordre, l’office suprême du Conseil d’État, consacré à l’article 61-1 de la Constitution française, n’a cessé de se renforcer avec la réduction de ses compétences de premier et dernier ressort[13]. Avec la construction de cet ordre administratif, l’indépendance[14] et les compétences propres du juge administratif ont été intégrées dans notre pacte constitutionnel. Conformément à la conception française de la séparation des pouvoirs  et en vertu d’un principe à valeur constitutionnelle, « relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l'annulation ou la réformation des décisions prises dans l'exercice des prérogatives de puissance publique (…) »[15]. Pour exercer cette compétence, le juge administratif contrôle la conformité des actes administratifs aux lois, leur compatibilité avec le droit de l’Union et les conventions internationales, mais aussi, s’agissant des actes administratifs qui ne sont pas pris en application d’une loi[16], leur conformité à la Constitution. Le contrôle de constitutionnalité des lois est, en effet, une compétence réservée au Conseil constitutionnel[17], dont les décisions et les interprétations de la Constitution s’imposent à toutes les autorités administratives et juridictionnelles[18]. Pour autant, le Conseil d’État et la Cour de Cassation participent au contrôle a posteriori de la constitutionnalité des lois, en filtrant, à l’occasion d’un litige porté devant eux, les contestations non sérieuses soulevées contre une disposition législative déjà en vigueur[19].

B. Le modèle français de justice administrative présente en Europe un haut degré de spécialisation (1), ce qui requiert des voies de dialogue souples et régulières avec les autres ordres de juridiction (2).

1. L’existence d’une juridiction administrative spécialisée n’est certes pas une spécificité française[20] : parmi les 28 États membres de l’Union européenne, 5 seulement ont opté pour l’unité de juridiction[21] avec certaines nuances[22]. Parmi les 23 autres États, deux modèles peuvent être distingués[23]. Un premier groupe de pays comporte un ordre juridictionnel spécialisé complet, « de la base au sommet », avec deux ou trois degrés de juridiction consacrés exclusivement au traitement de contentieux administratifs. C’est le cas notamment de la France, de l’Allemagne, mais aussi de l’Italie, de la Grèce, de la Suède, de la Finlande, de la Pologne, de la République Tchèque ou de la Lituanie. Dans de rares cas, la cour suprême est le juge de droit commun de premier et dernier ressort, comme en Belgique, au Luxembourg et au Pays-Bas. Dans un deuxième groupe d’États existent des formations spécialisées en matière administrative au sein de juridictions généralistes. Cette spécialisation par chambre peut concerner tous les degrés de juridiction, comme par exemple en Espagne[24], ou seulement la juridiction suprême, comme c’est le cas en Hongrie. Il existe ainsi différents degrés de spécialisation des juges, qu’elle soit seulement fonctionnelle au sein d’une même juridiction ou qu’elle soit institutionnelle, selon que la procédure et le droit applicable au fond sont plus ou moins spécialisés. Pour autant, il est possible de conclure que, « dans l’Union européenne, la dualité des juridictions – sous sa forme absolue ou relative – est la règle et l’unité juridictionnelle l’exception »[25].

Ce qui distingue, en réalité, le modèle français, c’est le cumul de fonctions consultatives et contentieuses au sein d’un même organisme. Seuls 5 États présentent une telle spécificité : la France, la Belgique, l’Italie, la Grèce et les Pays-Bas. L’Espagne et le Luxembourg sont, quant à eux, dotés d’un Conseil d’État aux seules fonctions consultatives. Le modèle français, hérité de l’époque napoléonienne, a su s’adapter pour répondre aux exigences contemporaines d’impartialité[26]. Le fait que des personnes exercent successivement à propos des mêmes décisions les deux types de fonctions, consultative et contentieuse, est de nature à mettre en cause l’impartialité structurelle de l’institution[27]. En revanche, le seul cumul de fonctions au sein d’une même institution ne saurait emporter par lui-même violation du principe d’impartialité, consacré notamment à l’article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l’Homme[28]. Il convient, ainsi, de s’assurer de l’absence de pré-jugement d’une affaire au contentieux grâce à des règles d’organisation claires et strictes. Consacrant une pratique coutumière, l’article R. 122-21-1 du code de justice administrative[29] dispose, à cette fin, que « les membres du Conseil d'État ne peuvent participer au jugement des recours dirigés contre les actes pris après avis du Conseil d'État, s'ils ont pris part à la délibération de cet avis ». La liste des membres ayant pris part à cette délibération est communiquée au requérant qui en fait la demande[30] et les membres des formations de jugement du Conseil d’État ne peuvent accéder ni aux avis rendus sur les actes contestés devant eux, dès lors que ces avis n’ont pas été rendus publics, ni aux dossiers de ces avis[31]. En pratique, « l’hypothèse dans laquelle la même question se pose successivement en section administrative puis en formation de jugement est peu fréquente : (…) le Conseil d’État, dans sa mission consultative, se prononce le plus souvent, non pas sur des dossiers particuliers, mais sur des textes » et « ces derniers ne sont pas, dans leur grande majorité, déférés au contentieux »[32].

2. La forte spécialisation de l’ordre administratif français nécessite des voies de dialogue souples et régulières entre le juge administratif et le juge judiciaire.

a- Le mécanisme de questions préjudicielles permet un tel dialogue. Lorsque l’appréciation de la légalité d’un acte ne relève pas de la compétence du juge saisi et conditionne toutefois la solution du litige qui lui est soumis, ce juge est tenu de surseoir à statuer et de poser une question préjudicielle au juge de l’autre ordre. Ce mécanisme, nécessaire dans un système dualiste, peut cependant allonger inutilement les procédures et être source pour le justiciable de complexité et d’incertitude. 

Par souci de simplification, ce mécanisme a par conséquent été assoupli grâce à une unification progressive du procès au bénéfice du juge saisi du principal. En premier lieu, la compétence du juge pénal a été élargie afin de lui permettre d’apprécier lui-même, à titre incident, la légalité d’actes administratifs réglementaires[33] ou individuels[34]. En deuxième lieu, le juge civil n’est pas tenu de poser une question préjudicielle, lorsqu’il constate certaines atteintes graves et manifestes à la liberté individuelle ou au droit de propriété[35]. En troisième lieu, le juge civil peut s’appuyer sur une « jurisprudence établie »[36] du juge administratif pour faire droit à une contestation dirigée, à titre incident, contre la légalité d’un acte administratif. Cet assouplissement est réciproque et permet, dans les mêmes conditions, au juge administratif de se prononcer, à titre incident, sur la validité d’un acte relevant de la compétence du juge judiciaire[37]. En quatrième lieu, lorsqu’il s’agit d’appliquer le droit de l’Union européenne, le juge judiciaire – comme le juge administratif – accomplissent pleinement leur office, sans avoir à poser de question préjudicielle à l’autre ordre de juridiction[38]. Au terme de cette évolution, si des blocs de compétences exclusives demeurent, aucun mur infranchissable ne vient plus les séparer : le juge saisi est désormais en mesure de régler le plus grand nombre des questions qui se posent devant lui, sans que cela n’entraîne de discordance jurisprudentielle. Et le nombre de questions préjudicielles entre les deux ordres de juridiction, qui était déjà très faible[39], décroît fortement.

b- En dehors de ce dialogue par voie de questions préjudicielles, un organe spécialisé, le Tribunal des conflits, est chargé de trancher les conflits de compétence entre les deux ordres de juridiction. De composition paritaire, il peut être saisi par le préfet, lorsque ce dernier a en vain demandé au juge judiciaire de décliner sa compétence – hypothèse d’un conflit positif -, mais aussi par les parties lorsque deux juridictions d’un ordre différent se sont déclarées successivement incompétentes dans un même litige -  hypothèse d’un conflit négatif - ou lorsqu’elles ont rendu, dans des litiges portant sur un même objet, des décisions contraires conduisant à un déni de justice – hypothèse d’un conflit de décisions. Enfin, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, lorsqu’une juridiction s’est déclarée incompétente, la juridiction de l’autre ordre qui est saisie du même litige est tenue de saisir le Tribunal des conflits si elle s’estime également incompétente.

Une loi adoptée le 28 janvier 2015, qui sera prochainement promulguée, reconnaît à toutes les juridictions de l’un ou l’autre ordre la faculté, qui n’était ouverte depuis 1960 qu’aux seules juridictions suprêmes, de saisir le Tribunal des conflits d’une question de compétence, sans attendre que naissent les conditions d’un conflit ou que l’affaire soit examinée par le Conseil d’État ou la Cour de Cassation. Couplée avec la faculté donnée à ce Tribunal de prendre des ordonnances, cette mesure permettra de lever plus vite les incertitudes sur la détermination du juge compétent. Au demeurant, ces cas d’incertitude sont très peu nombreux : le nombre de litiges portés devant le Tribunal des conflits n’excède pas 60 par an[40]. Cette même loi de janvier 2015 a, par ailleurs, renforcé les garanties d’indépendance du Tribunal des conflits : en cas de partage égal des voix, ce qui n’est arrivé que 11 fois depuis 1872 et en dernier lieu en 1997[41], le garde des sceaux, président du Tribunal, était appelé à se prononcer. Désormais, la présidence est assurée par l’un des membres du Tribunal et, dans le cas où, après une seconde délibération, un partage égal de voix persiste, l’affaire est réexaminée en formation élargie, toujours paritaire.

L’existence d’une justice administrative spécialisée, de la base au sommet, nous a ainsi confrontés au défi d’une régulation simple et rapide des questions de compétence. Le mécanisme des questions préjudiciel a été assoupli et fluidifié ; les modes de saisine du Tribunal des conflits ont été élargis pour les rendre plus préventifs ; les règles législatives d’attribution de compétences, qui se sont parfois stratifiées sans réelle cohérence, ont été rationalisées dans le souci de constituer et de renforcer des blocs homogènes de compétence. Ce même souci d’accessibilité et d’intelligibilité du droit, objectif à valeur constitutionnelle[42], a présidé à la codification des règles de la procédure administrative contentieuse[43], souvent d’origine jurisprudentielle. Celles-ci sont désormais rassemblées, depuis 2 000,  en un code de justice administrative, clair et constamment actualisé, qui précise notamment les modalités pratiques de mise en œuvre du débat contradictoire, les pouvoirs d’instruction du juge, les différentes formations de jugement – collégiale ou à juge unique - et les garanties d’impartialité et d’indépendance de leurs membres. Ces règles ont été élaborées en tenant compte de la spécificité du droit public et de l’organisation des juridictions administratives et elles ont servi de point d’appui à un perfectionnement continu de la procédure administrative, notamment en matière d’expertise. En complément du code de justice administrative, un projet de code de la procédure administrative non contentieuse, mise en œuvre en amont des procès administratifs dans les relations entre les administrations et les citoyens, est actuellement en cours de rédaction. Il sera achevé en 2015.

 

II. Grâce à cette organisation rendue plus performante, nous avons pu affronter un second défi : rénover l’office et les procédures du juge administratif pour lui permettre de trancher, dans les meilleurs délais et d’une manière approfondie, les litiges dont il est saisi.

A. L’office du juge administratif s’est progressivement enrichi afin de le mettre en capacité de trancher des litiges objectifs, mais aussi de réparer des droits subjectifs lésés.

1. Selon une distinction traditionnelle[44], les pouvoirs du juge diffèrent, selon qu’il est saisi d’un recours pour excès de pouvoir ou d’un recours de plein contentieux. Dans le premier cas, le juge ne peut qu’annuler l’acte illégal, sans pouvoir le réformer ou lui substituer sa propre décision, alors que, dans le second cas, le juge dispose d’un pouvoir de réformation et il peut infliger une sanction à l’administration ou octroyer une indemnité. Une image résume cette distinction : « le juge de l’excès de pouvoir ne dispose que d’une gomme pour annuler l’acte qui lui est déféré, alors que le juge de plein contentieux peut également utiliser le crayon pour le corriger ou le compléter »[45].

Historiquement, le recours pour excès de pouvoir, « procès fait à un acte »[46], s’est imposé comme « l’arme la plus efficace, la plus pratique, la plus économique qui existe (…) pour défendre les libertés individuelles »[47]. D’une part, l’intérêt pour agir des requérants, qui ne saurait se confondre avec un droit lésé, est apprécié d’une manière libérale par le juge de l’excès de pouvoir, qu’il s’agisse d’une personne morale, comme un syndicat[48] ou une collectivité territoriale[49], ou d’une personne physique, comme un contribuable local[50], un usager du service public[51] ou un agent public[52]. D’autre part, le périmètre des actes susceptibles d’être contestés par la voie de l’excès de pouvoir a été étendu. En principe, un tel recours peut être formé contre tout acte administratif, même si aucun texte ne le prévoit[53] ou même si cet acte est implicite, qu’il soit né du silence persistant de l’administration[54] ou qu’il soit révélé par ses agissements matériels[55]. La liste des actes  non susceptibles de recours a, en effet, été considérablement réduite, qu’il s’agisse d’ « actes de gouvernement »[56] portant sur les rapports entre les pouvoirs publics constitutionnels[57] ou sur la conduite des relations internationales[58], de décisions ne faisant pas grief, comme des « mesures d’ordre intérieur » prises, notamment, dans les établissements pénitentiaires[59] ou, enfin, d’actes non décisoires, comme des circulaires[60] ou des directives administratives[61]. Au terme de cette évolution, « on peut estimer que le recours pour excès de pouvoir est devenu un recours ouvert à à peu près n’importe qui (…), pour attaquer à peu près n’importe quel acte administratif unilatéral et en obtenir l’annulation »[62].

Cette ouverture des conditions d’accès au juge s’est accompagnée d’un élargissement de la gamme des moyens invocables. Outre les moyens de légalité externe, tirés d’un vice d’incompétence, de procédure ou de forme, le requérant peut, en effet, invoquer un détournement de pouvoir[63], une erreur de droit, de fait[64] ou de qualification juridique[65]. Dans ce dernier cas, le degré de contrôle qu’opère le juge varie selon les marges d’appréciation dont dispose l’administration. Dans de très rares cas, cette appréciation étant totalement discrétionnaire, le juge réalise un contrôle minimum, limité aux autres moyens de légalité interne[66]. Dans d’autres cas, le juge ne censure que les erreurs manifestes d’appréciation, opérant ainsi un contrôle restreint sur certains actes dans les domaines de la fonction publique[67], du droit économique[68] ou de certaines atteintes  aux libertés, décidées aux fins de protéger l’ordre public[69]. Ce contrôle restreint a cependant été progressivement abandonné, par exemple, en matière de contrôle des publications étrangères,[70]  d’éloignement des étrangers du territoire français et, dans le domaine de la fonction publique, en ce qui concerne les sanctions disciplinaires infligées à un agent public[71]. Le juge exerce alors ce qu’on appelle un contrôle normal, qui est aussi pratiqué en matière de police administrative[72], c’est-à-dire lorsque l’autorité administrative restreint l’exercice d’une liberté pour assurer la protection de l’ordre public. Il contrôle, ce faisant, l’adaptation et la nécessité de la mesure administrative, mais aussi son adéquation au but poursuivi au regard des moyens dont dispose l’administration : autrement dit, le juge contrôle pleinement la proportionnalité de l’acte attaqué. C’est ce type de contrôle de proportionnalité qu’il exerce, d’une manière encore plus approfondie, lorsque l’utilité publique d’un projet d’infrastructure est contestée. Réalisant un contrôle dit du « bilan », il met alors en balance les avantages et les inconvénients d’un tel projet au regard de l’ensemble des intérêts publics et privés en présence[73].

2. Le recours pour excès de pouvoir se distingue du recours de plein contentieux. Saisi d’un tel recours, le juge dispose, en effet, de la plénitude de ses pouvoirs : si le recours tend à engager la responsabilité de l’administration (« plein contentieux subjectif »), le juge peut octroyer au requérant une indemnité ; si le recours est dirigé contre un acte (« plein contentieux objectif »), le juge peut l’annuler et le réformer. Depuis la fin du XIXe siècle[74], le champ de la responsabilité pour faute des personnes publiques s’est quasiment généralisé (a), alors qu’est apparu un régime étendu de responsabilité sans faute (b). Par ailleurs, les recours de plein contentieux objectifs se sont développés pour offrir des garanties nouvelles aux justiciables (c).

a- En premier lieu, les cas d’irresponsabilité des autorités administratives ont presque disparu[75] et ne concernent plus que de rares hypothèses, comme la conduite d’opérations militaires[76]. En outre, les cas dans lesquels la responsabilité de l’administration ne peut être engagée que pour une faute lourde ont été progressivement réduits, ce qui permet, par exemple, d’engager pour faute simple la responsabilité des services hospitaliers[77], pénitentiaire[78], fiscaux[79], de police[80] ou encore la responsabilité des services de justice pour durée déraisonnable de jugement[81]. La faute, quel que soit son degré, peut résulter d’un agissement matériel, y compris d’une simple carence, d’un manquement à une obligation contractuelle ou, d’une manière plus générale, de la commission d’une illégalité. A ce titre, la responsabilité de l’État peut même être engagée, lorsqu’une décision de justice est entachée d’une violation manifeste d’une norme du droit de l’Union européenne ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers[82]. Pour autant, si toute illégalité, même de procédure, est fautive[83], toute illégalité n’ouvre pas droit à réparation, soit que le lien de causalité ne soit pas établi, soit qu’aucun préjudice n’ait été subi. C’est le cas, par exemple, lorsque le licenciement d’un agent public est entaché d’un vice de procédure, mais se trouve justifié au fond[84].

b- En deuxième lieu, même si l’administration ne commet aucune faute, sa responsabilité peut être engagée, si un préjudice anormal et spécial est subi par des tiers. Ce préjudice peut être causé par des risques liés à l’utilisation de choses ou de méthodes dangereuses, comme des armes à feu par les services de police[85]. Il peut aussi résulter d’une rupture d’égalité devant les charges publiques, provoquée par une décision individuelle légale[86], un acte réglementaire légal[87], une loi[88] ou une convention internationale[89]. Avant d’engager la responsabilité de l’État du fait des lois, le juge administratif recherche si le législateur n’a pas entendu exclure toute indemnisation et, dans le silence de la loi, il n’hésite pas à reconnaître un droit à réparation[90]. En outre, le législateur ne saurait, sans méconnaître la Constitution française, exclure toute indemnisation en cas de rupture caractérisée d’égalité devant les charges publiques[91]. Enfin, sous l’impulsion du droit de l’Union européenne[92], le juge administratif a reconnu par ailleurs que la responsabilité de l’État est susceptible d’être engagée, même en l’absence de préjudice anormal et spécial, à raison des obligations qui sont les siennes pour assurer le respect du droit de l’Union et des conventions internationales par les autorités publiques et, par suite, pour réparer l’ensemble des préjudices qui résulterait d’une loi adoptée en méconnaissance des engagements internationaux de la France[93], au nombre desquels figure, notamment, le respect des principes de sécurité juridique et de confiance légitime reconnus par le droit de l’Union européenne[94].

c- En troisième lieu, la distinction traditionnelle entre recours pour excès de pouvoir et recours de plein contentieux s’est progressivement atténuée et ne recoupe plus exactement celle entre recours objectifs et recours subjectifs. Se sont en effet développés les recours de plein contentieux objectifs pour offrir de nouvelles garanties aux justiciables. Lorsqu’il statue, le juge de plein contentieux examine, en effet, les éléments de droit et de fait existant à la date de son jugement, et non à la date de l’acte attaqué comme le fait le juge de l’excès de pouvoir. Il peut ainsi, le cas échéant, faire bénéficier les requérants d’une législation postérieure qui leur serait plus favorable. C’est pourquoi, au delà des domaines fiscal, électoral et de certaines réglementations spéciales[95], un recours de plein contentieux est désormais ouvert contre toute sanction administrative prise à l’égard des administrés[96] et, notamment, des décisions de retrait de points sur un permis de conduire[97].

B. Cette modernisation des voies de recours nous a permis de nous mettre à la hauteur des nouvelles exigences de la justice. Nos décisions doivent, en effet, être pleinement effectives et intervenir au moment opportun, parfois en urgence (1). Elles ne sauraient, en outre, devenir une source d’insécurité juridique en raison d’éventuels effets déstabilisateurs (2).

1. Une justice administrative efficace est une justice qui veille à l’effectivité de ses décisions (a), mais aussi qui est en capacité de traiter utilement des contentieux, même urgents (b). Après le premier jalon qu’a constitué la loi du 16 juillet 1980 relative aux astreintes prononcées en matière administrative, la loi du 8 février 1995 a étendu les pouvoirs d’astreinte du juge administratif et l’a doté de pouvoirs d’injonction à l’encontre des personnes publiques. Cette loi apparaît rétrospectivement, avec la loi du 30 juin 2000 relative aux référés, comme un moment fondateur dans l’histoire de la justice administrative française.

a. Vingt ans après le vote de la loi du 8 février 1995, le bilan de son application apparaît comme remarquable du point de vue des justiciables, mais aussi des juges. La pratique des injonctions à l’encontre des personnes publiques s’est approfondie et s’est banalisée[98], au point de devenir quasi-systématique dans certains contentieux comme ceux des étrangers et de la fonction publique. Cette réussite tient sans nul doute à l’appropriation par les juges d’un pouvoir d’exécution, qui ne s’est cependant pas traduit par un dessaisissement abusif du pouvoir d’appréciation de l’administration. Le juge n’a, en effet, conquis que le pouvoir d’ordonner les mesures strictement nécessaires au respect de la chose jugée. Il cherche à prévenir, par des directives didactiques et pragmatiques, moins l’inertie de l’administration, que les difficultés techniques et juridiques que soulève parfois l’exécution de la chose jugée. La loi du 8 février 1995 a, en effet, institué un double dispositif : à la demande du requérant, le juge administratif peut soit ordonner une mesure d’exécution dans un sens déterminé[99], soit faire obligation à l’administration de procéder à une nouvelle instruction de la demande litigieuse[100]. Le choix de la mesure d’exécution dépend alors, d’une part, de la nature du motif d’annulation retenu – s’agit-il d’un vice de forme ou de procédure régularisable ou d’un vice de fond ? – et, d’autre part, des conditions légales que doit prendre en considération l’administration. Par exemple, l’annulation d’un refus de titre de séjour au motif que le préfet a méconnu l’article 8 de la convention européenne des droits de l’Homme implique nécessairement la délivrance d’une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale », mais la seule annulation d’une obligation de quitter le territoire français n’implique que le réexamen de la situation de l’étranger et la délivrance d’une autorisation provisoire de séjour pendant le délai nécessaire à ce réexamen[101]. En outre, lorsque des mesures d’exécution lourdes, coûteuses et parfois irréversibles sont envisagées, le juge veille au préalable à prévenir les atteintes excessives à l’intérêt général. Il examine les différentes solutions au terme d’une pesée, parfois délicate, des avantages et inconvénients affectant les intérêts publics et privés en présence. Ainsi, confronté au cas d’un ouvrage public implanté de façon irrégulière, il examine l’ensemble des mesures alternatives à sa démolition totale ou partielle[102].

b- Répondant à une attente forte des justiciables, le législateur français a, par ailleurs, rénové les procédures d’urgence, il y a maintenant près de quinze ans. Le dispositif actuel, issu de la loi du 30 juin 2000[103], repose sur trois procédures de référé urgent, soit que le requérant demande la suspension d’une décision administrative – le référé-suspension[104] -, soit qu’il invoque une atteinte à l’une de ses libertés fondamentales – le référé-liberté[105] -, soit qu’il demande au juge toute mesure utile ne faisant pas obstacle à l’exécution d’une décision administrative – le référé-mesures utiles[106]. Il existe aussi des référés spécifiques, en particulier pour assurer le respect des règles de publicité et de mise en concurrence pour l’attribution des contrats de la commande publique[107].

Saisi en urgence, le juge du référé est un juge de l’évidence. Un doute sérieux sur la légalité d’une décision administrative suffit pour en suspendre l’exécution, de même qu’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale justifie une intervention du juge du référé-liberté. Bien qu’il demeure le juge de l’évidence, le juge du référé n’en a pas moins étendu le périmètre de son contrôle. Dans le cadre d’un référé-liberté, la gamme des « libertés fondamentales » invocables a été constamment élargie au-delà des seules libertés constitutionnelles[108] et en y intégrant plusieurs « droits-créances », par exemple dans les domaines de l’asile[109] et même du handicap[110]. Appréciée in concreto, l’urgence est le résultat d’une double pesée, à la fois subjective et objective, des circonstances de l’espèce. Elle suppose d’abord un examen de la situation concrète du demandeur, qui doit démontrer la nécessité pour lui de bénéficier à bref délai d’une mesure provisoire. Le risque encouru est ensuite mis en balance, « objectivement et globalement »[111], avec l’ensemble des intérêts privés et publics en présence, qu’il s’agisse de l’intérêt de tiers ou de la protection de l’ordre public, et notamment de la salubrité et de la santé[112] publiques, de la continuité d’un service public[113], ou encore de la préservation de l’environnement[114]. L’urgence est enfin appréciée, selon un critère finaliste, au regard des conditions de saisine du juge, c’est-à-dire du délai qui lui est imparti pour statuer, et de l’obligation ou de la simple faculté pour le requérant d’introduire un recours au fond. C’est pourquoi, l’appréciation de l’urgence est, en principe, plus rigoureuse[115] dans le cadre d’un référé-liberté, le juge statuant en quarante-huit heures et, parfois, en l’absence de recours au fond. Il peut, à ce titre, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, faire cesser certaines atteintes graves et manifestement illégales au droit de propriété ou à une liberté individuelle[116], alors même que ce contentieux relèverait en principe[117] de la compétence du juge judiciaire. En outre,  afin de préserver l’effet utile du droit de l’Union européenne, le juge du référé-liberté peut mettre fin à une méconnaissance manifeste de ce droit[118], alors même qu’il n’exerce pas en principe[119] de contrôle des lois au regard des engagements internationaux. Une nouvelle exception a récemment été consacrée, lorsque la décision litigieuse est susceptible de porter de manière irréversible une atteinte à la vie[120].

2. L’efficacité de la justice administrative se mesure, enfin, à la capacité du juge à prévenir les effets potentiellement déstabilisateurs de ses décisions (a) et, en particulier, à préserver la loyauté et la stabilité des relations contractuelles (b).

a- Avant d’annuler un acte administratif, c’est-à-dire de le faire disparaître d’une manière rétroactive, le juge de l’excès de pouvoir s’assure de la gravité des irrégularités qui l’affectent. Ainsi, le juge ne peut-il annuler une décision administrative entachée d’un vice de procédure que si ce vice a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise ou s’il a privé les intéressés d'une garantie[121]. En outre, le juge de l’excès de pouvoir ne vise pas seulement « d’une façon négative, à effacer une illégalité, mais aussi, d’une façon positive, à rétablir la légalité »[122] et à sécuriser les situations qui doivent l’être. A cet égard, l’effet rétroactif d’une annulation contentieuse peut parfois emporter des conséquences manifestement excessives, en raison tant des effets que l’acte annulé a produits, que de l’intérêt général pouvant s’attacher à un maintien temporaire de ses effets. C’est pourquoi, le juge administratif peut moduler dans le temps cet effet rétroactif, c’est-à-dire valider certains des effets de l’acte annulé ou faire entrer en vigueur l’annulation à une date postérieure à sa décision[123]. Cette modulation, conçue originellement à « titre exceptionnel »[124], s’est désormais banalisée[125]. Elle trouve, notamment, à s’appliquer pour des raisons impérieuses, lorsque l’effet rétroactif d’une annulation entraînerait une méconnaissance encore plus grave du droit de l’Union que celle résultant du maintien temporaire des effets de l’acte annulé[126].

b- La même exigence de sécurité juridique a justifié une transformation de l’office du juge du contrat. L’examen des irrégularités invoquées par les parties contre le contrat qui les lie prend désormais mieux en compte l’exigence de loyauté des relations contractuelles. Seules les irrégularités les plus graves sont, en effet, susceptibles d’entraîner l’annulation d’un contrat administratif. Il s’agit des irrégularités tenant au caractère illicite du contrat, celles portant sur les conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement et, enfin, de tout vice d’une particulière gravité que le juge doit relever d’office. L’exigence de loyauté des relations contractuelles implique dès lors une appréciation plus fine des moyens invoqués et, en principe, de régler les différends entre parties sur le terrain contractuel[127]. Elle vient par suite au soutien d’un objectif de stabilisation des relations contractuelles, dont désormais le cocontractant peut demander la reprise en cas de résiliation[128]. A chaque irrégularité doit, en effet, correspondre, selon leur gravité, une réponse proportionnée du juge qui peut, par exemple, ordonner la modification d’une clause du contrat ou le versement d’une indemnité. Les irrégularités vénielles ou régularisables ne doivent pas faire obstacle à la poursuite des relations contractuelles. Dans les autres cas, le juge doit envisager qu’il soit mis un terme à ces relations sans effet rétroactif. Enfin, sa décision, dont les effets peuvent être différés, ne saurait porter une atteinte excessive à l’intérêt général. Ces exigences sont désormais les mêmes que le juge soit saisi par les parties ou par des tiers, c’est-à-dire par toute personne susceptible d’être lésée dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par la passation d’un contrat administratif ou par ses clauses[129].

Vous le voyez, les défis auxquels nous sommes confrontés sont considérables, ils touchent à notre organisation juridictionnelle, aux pouvoirs du juge administratif et, en dernier lieu, à la nature et à l’identité de notre droit public. En intégrant les garanties constitutionnelles et européennes, le juge administratif prend mieux en compte les intérêts subjectifs des justiciables, tout en veillant aux exigences de sécurité juridique et à la sauvegarde des intérêts publics. L’équilibre constitutif du droit public, entre le droit des individus et les exigences d’intérêt général, en ressort renouvelé et ce renouvellement affecte, d’une manière transversale, l’ensemble des traditions juridiques nationales. Je voudrais, en terminant mon propos, exprimer un message de confiance dans notre capacité à incarner cet équilibre et à faire vivre en Europe nos garanties communes en matière de droit fondamentaux.

 

[1]Texte écrit en collaboration avec Stéphane Eustache, conseiller de tribunal administratif et de cour administrative d’appel, chargé de mission auprès du vice-président du Conseil d’État.

[2]« Hujus studii duae sunt positiones publicum et privatum. Publicum jus est quod ad statum rei romanae spectat. Privatum quod ad singulorum utilitatem. Sunt enim quaedam publice utilia quaedam privatim. Publicum jus in sacris, in sacerdotibus, in magistratibus consistit », « Le droit se divise en droit public et en droit privé. Le droit public regarde l’administration de l’État ; le droit particulier concerne les intérêts de chacun. En effet, il y a des choses utiles au public, et d’autres utiles aux particuliers. Le droit public consiste dans les choses sacrées, les ministres de la religion, les magistrats. » Digeste, première partie, livre premier, trad. Hulot, Berthelot, Tissot et Béranger, Behmert et Lamort ed, Metz 1803.

[3]Voir, not. G. Chevrier, « Remarques sur la distinction et les vicissitudes de la distinction du jus privatum et du jus publicum dans les œuvres des anciens juristes français », Archives de philosophie du droit, 1952, p. 5-77.

[4] Sous l’Ancien régime, malgré une première spécialisation (voir, not. l’Edit de Saint-Germain-en-Laye de 1641, K. Weidenfeld, Histoire du droit administratif, du XIVe siècle à nos jours, éd. Economica, 2013, p. 15), les juges règlent les litiges « administratifs » à l’aide du droit civil et ils participent en outre à la fonction législative par leur droit d’enregistrement et de remontrance, et à la fonction exécutive en rendant des arrêts de règlement (J. Chevallier, « Du principe de séparation au principe de dualité », RFDA, 1990, p. 712).

[5] L’art. 13 de la loi des 16-24 août 1790 sur l’organisation judiciaire interdit aux juges, « à peine de forfaiture, de troubler, en quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs, ou de citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions ».

[6]Art. 52 de la Constitution du 22 Frimaire An VIII (13 décembre 1799).

[7] K. Weidenfeld, Histoire du droit administratif, du XIVe siècle à nos jours, éd. Economica, 2013, p. 50. Cette commission devait être, selon Napoléon, « un corps demi-administratif, demi-judiciaire, qui réglera l’emploi de cette portion d’arbitraire nécessaire dans l’administration de l’État ».

[8] CE 13 décembre 1889, Cadot, Rec. 1148, GAJA, n°5, éd. Dalloz, 19ème éd., p. 36.

[9] B. Stirn, Le Conseil d’État, son rôle, sa jurisprudence, éd. Hachette, coll. Les fondamentaux, 1994.

[10]Comme le relève le Professeur Pierre Delvolvé, « Le droit administratif s’est développé par l’exercice de la justice administrative. Pour la rendre, le juge administratif a sécrété le droit spécifiquement applicable à sa matière », P. Delvolvé, Droit administratif, éd. Dalloz, coll. Connaissance du droit, 6ème éd., 82.

[11]cret n°53-934 du 30 septembre 1953 portant réforme du contentieux administratif.

[12] Loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif.

[13] Article 1er du décret n° 2010-164 du 22 février 2010 relatif aux compétences et au fonctionnement des juridictions administratives ; ont notamment été supprimées les compétences en premier et dernier ressort du Conseil d’État pour connaître des litiges nés hors des territoires soumis à la juridiction d’un tribunal administratif  - a ainsi été attribuée au tribunal administratif de Nantes la compétence pour connaître du contentieux des visas et des naturalisations, voir art. R. 312-18 du code de justice administrative – ainsi que pour connaître des recours contre les actes administratifs dont le champ d’application s’étend au-delà du ressort d’un seul tribunal administratif. Désormais, « les litiges qui ne relèvent de la compétence d'aucun tribunal administratif par application des dispositions des articles R. 312-1 et R. 312-6 à R. 312-18 sont attribués au tribunal administratif de Paris » (art. R. 312-19 du code de justice administrative).

[14] CC n°80-119 DC du 22 juillet 1980, Loi portant validation d’actes administratifs, cons. 6.

[15] CC n°86-224 DC du 23 janvier 1987, Loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence, cons. 15.

[16] CE, Sect., 6 novembre 1936, Arrighi, Rec. 966.

[17] CE 5 janvier 2005, Deprez et Baillard, n°257341

[18] Art. 62 de la Constitution. Voir, en ce qui concerne l’autorité absolue de chose jugée des réserves d’interprétation du Conseil constitutionnel : CE, Ass., 20 décembre 1985, SA Etablissements Outters, n°31927 ; en ce qui concerne l’absence d’autorité de chose jugée par « ricochet » des décisions du Conseil constitutionnel : CE, Sect., 22 juin 2007, Lesourd, n°288206 ; en ce qui concerne l’extension d’une déclaration d’inconstitutionnalité prononcée par le Conseil constitutionnel à des dispositions identiques, dans leur substance et dans leur rédaction, qui figuraient auparavant au sein d’un autre article législatif : CE 16 janvier 2015, Société Métropole Télévision, n°386031.

[19] Voir art. 61-1 de la Constitution et la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution.

[20] Y. Aguila, « La justice administrative, un modèle majoritaire en Europe, le mythe de l’exception française à l’épreuve des faits », AJDA, 2007, p. 290.

[21] Royaume-Uni, Irlande, Danemark, Malte, Chypre.

[22] Ce constat est encore renforcé par les mutations récentes des modèles de common law, qui tendent à une certaine spécialisation. En atteste la création au Royaume-Uni de l’Administrative Justice and Tribunals Council, qui régule l’activité des Administrative Tribunals.

[23] T. Olson, « Justice administrative et Constitution en Europe : état des lieux », Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, n°37, octobre 2012.

[24] Il existe des formations spécialisées au sein du Tribunal suprême et des Tribunaux supérieurs de justice des communautés autonomes et de l’audience nationale, voir G. Marcou « Une cour administrative suprême : particularité française ou modèle en expansion ? », Pouvoirs, 123, 2007.

[25] T. Olson, « Justice administrative et Constitution en Europe : état des lieux », Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, n°37, octobre 2012.

[26] G. Marcou, « Une cour administrative suprême : particularité française ou modèle en expansion ? », Pouvoirs, 123, 2007 ; A. Gaillet, « Le Conseil d’État français : histoire d’une exportation difficile en Europe », RFDA, 2013, p. 793.

[27] CEDH 28 septembre 2005, Procola c/ Luxembourg, Série A, n°326.

[28] CEDH, Grande Chambre, 6 mai 2003, Kleyn c/ Pays-Bas, n°39343/98 ; CEDH 9 novembre 2006, Sacilor Lormines c/ France, n°65411/01. Confirmé récemment par CEDH 8 mars 2011, Escoffier c/ France, n°8615/08.

[29] Cet article a été créé par le décret n°2008-225 du 6 mars 2008, qui est une reprise presque littérale de l’art. 20 de la loi du 24 mai 1872, abrogé par l’art. 84 de la loi du 18 décembre 1940. Cette règle d’incompatibilité était cependant observée dans la pratique avant l’adoption de ce décret et avait déjà été consacrée par la jurisprudence (CE 11 juillet 2007, USMA). Le 5e aliéna de l’art. R. 122-21 du code de justice administrative dispose également que « Lorsque l'assemblée du contentieux est saisie d'un recours contre un acte pris après avis du Conseil d'État, le président de la section administrative qui a eu à délibérer de cet avis ne siège pas. Il est suppléé par le plus ancien dans l'ordre du tableau des présidents adjoints des autres sections administratives, à l'exception de ceux siégeant en application du premier et du troisième alinéas. »

[30]Art. R. 122-21-2 du code de justice administrative.

[31] Art. R. 122-21-3 du code de justice administrative.

[32] B. Stirn et Y. Aguila, Droit public français et européen, éd. Dalloz, coll. Amphi, 2014,  p. 558.

[33] TC 5 juillet 1951, Avranches et Desmarets, Rec. p. 638.

[34] Art. 111-5 du code pénal.

[35] Il est ici fait référence à l’hypothèse d’une « voie de fait », voir TC 17 juin 2013, M. Bergoend c/ Société ERDF Annecy Léman, n°3911.

[36] TC 17 octobre 2011, SCEA du Chéneau, n°3828 et 3829.

[37] CE 23 mars 2012, Fédération Sud Santé Sociaux, n°331805.

[38] TC 17 octobre 2011, SCEA du Chéneau, n°3828 et 3829.

[39] Entre 2010 et 2014, le Conseil d’État a adressé au juge judiciaire moins de 2 questions préjudicielles par an en moyenne ; sur la même période, le juge judiciaire a adressé au Conseil d’État 10 questions préjudicielles par an en moyenne (après neutralisation des séries).

[40] En 2013, 47 affaires ont été jugées par le Tribunal des conflits, contre 57 en 2012. Voir rapport annuel 2013 : http://www.tribunal-conflits.fr/documents/rapports-annuels/rapport-annuel-activite-tc-2013.pdf

[41] TC 12 mai 1997, Préfet de police c/ tribunal de grande instance de Paris.

[42] CC n°99-421 DC du 16 décembre 1999, Loi portant habilitation du Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l’adoption de la partie législative du certains codes.

[43]Ordonnance n° 2000-387 du 4 mai 2000 relative à la partie Législative du code de justice administrative.

[44] Cette distinction a été opérée par Léon Aucoc puis approfondie par Edouard Laferrière, Voir sur les origines de cette distinction et, en particulier, sur l’apport de Léon Aucoc : P. Gonod, F. Melleray et P. Yolka, Traité de droit administratif, éd. Dalloz, tome 2, p. 522.

[45] B. Stirn et Y. Aguila, Droit public français et européen, éd. Dalloz, coll. Amphi, 2014,  p. 582.

[46] E. Laferrière, Traité de la juridiction administrative et des recours contentieux, éd. Berger-Levrault, 1887-1888, 1ière éd., tome 1, p. 15.

[47] G. Jèze, « Les libertés individuelles », Annuaire de l’Institut international de droit public, 1929, p.180.

[48] CE 28 décembre 1906, Syndicat des patrons-coiffeurs de Limoges, Rec. 977.

[49] CE 18 avril 1902, Commune de Néris-les-Bains, Rec. 275.

[50] CE 29 mars 1901 Casanova, Rec. 333.

[51] CE 21 décembre 1906, Syndicat des propriétaires et contribuables du quartier Croix-de-Seguey-Tivoli, Rec. 962.

[52]CE 11 décembre 1903, Lot, Rec. 780.

[53] CE, Ass., 17 février 1950, Dame Lamotte, Rec. 110.

[54] Le silence gardé pendant deux mois par l’autorité administrative sur une demande vaut en principe acceptation, depuis la loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l'administration et les citoyens. Un tableau des procédures concernées par ce principe est publié sur le site internet Légifrance et une circulaire n°5749/SG du 12 novembre 2014 précise les modalités d’entrée en vigueur de ce nouveau principe. Par dérogation à ce principe, « le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet : / 1° Lorsque la demande ne tend pas à l'adoption d'une décision présentant le caractère d'une décision individuelle ; / 2° Lorsque la demande ne s'inscrit pas dans une procédure prévue par un texte législatif ou réglementaire ou présente le caractère d'une réclamation ou d'un recours administratif ; / 3° Si la demande présente un caractère financier sauf, en matière de sécurité sociale, dans les cas prévus par décret ; / 4° Dans les cas, précisés par décret en Conseil d'État, où une acceptation implicite ne serait pas compatible avec le respect des engagements internationaux et européens de la France, la protection de la sécurité nationale, la protection des libertés et des principes à valeur constitutionnelle et la sauvegarde de l'ordre public ; / 5° Dans les relations entre les autorités administratives et leurs agents. » En outre, « des décrets en Conseil d'État et en conseil des ministres peuvent, pour certaines décisions, écarter l'application du premier alinéa du I eu égard à l'objet de la décision ou pour des motifs de bonne administration. Des décrets en Conseil d'État peuvent fixer un délai différent de celui que prévoient les premier et troisième alinéas du I, lorsque l'urgence ou la complexité de la procédure le justifie. »

[55] Voir, par ex. CE 12 mars 1986, Mme Cusenier, n°76147.

[56] CE 19 février 1875, Prince Napoléon, Rec. 155.

[57] Voir, par ex. en ce qui concerne le refus d’engager la procédure de délégalisation d’une disposition législative sur le fondement de l’art. 37 al. 2 de la Constitution : CE, Sect., 3 décembre 1999, Association ornithologique et mammalogique de Saône-et-Loire, n°164789.

[58] Voir, par ex. en ce qui concerne un décret extradition : CE, Ass., 28 mai 1937, Decerf, Rec. 534 ; en ce qui concerne les modalités d’introduction dans l’ordre interne d’une convention internationale : CE, Ass., 18 décembre 1998, SARL Parc d’activités de Blotzheim, Rec. 483.

[59]Voir, sur ce point : en ce qui concerne un changement d’affectation d’un détenu d’une maison centrale à une maison d’arrêt : CE, Ass., 14 décembre 2007, Boussouar, n°310100 ; en ce qui concerne un déclassement d’emploi : CE, Ass., 14 décembre 2007, Planchenault, n°290420 ; en ce qui concerne le placement d’un détenu sous le régime des "rotations de sécurité" (c'est-à-dire le changement périodique et systématique d’établissement pénitentiaire pour un détenu, afin de prévenir les tentatives d’évasion) : CE, Ass., 14 décembre 2007, Payet, n°306432 ; en ce qui concerne une mesure de placement d’un détenu à l’isolement : CE 17 décembre 2008, Section française de l’observatoire international des prisons, n°293786 ; en ce qui concerne une décision de changement d’affectation entre des établissements pénitentiaires de même nature, sous réserve que soient en cause des libertés et des droits fondamentaux des détenus : CE 27 mai 2009, Miloudi, n°322148 et CE 13 novembre 2013, Puci, n°355742 ; en ce qui concerne une demande d’un détenu de changement d’établissement, sous réserve que soient en cause ses libertés et ses droits fondamentaux : CE 13 novembre 2013, Agamemnon, n°3378720 ; en ce qui concerne le droit de visite des détenus : CE 26 novembre 2010, Ministre d’État, Garde des sceaux, ministre de la justice c/ Bompard, n°329564 ; en ce qui concerne la décision de placer un détenu du régime différencié dans un secteur de détention dit « portes fermées » : CE 28 mars 2011, Garde des sceaux, ministre de la justice c/ Bennay, n°316977.

[60] Voir en ce qui concerne l’invocation des circulaires à caractère réglementaire : CE, Ass., 29 janvier 1954, Institution Notre-Dame du Kreisker, Rec. 64 ; en ce qui concerne les modalités de contrôle des circulaires à caractère impératif : CE, Sect., 18 décembre 2002, Duvignières, Rec. 463.

[61] CE, Sect., 11 décembre 1970, Crédit foncier de France, Rec. 750 ; voir en part. en ce qui concerne les « lignes directrices » : CE 19 septembre 2014, Jousselin, n°364385 ; CE, Sect., 4 février 2015, Ministère de l’intérieur c/ M. Cortez Ortiz, n°383267.

[62] P. Gonod, F. Melleray et P. Yolka, Traité de droit administratif, éd. Dalloz, tome 2, p. 533. G. Renard a pu ainsi écrire en 1922 : « c’est un procès fait à l’acte émané de l’administration par un particulier agissant au nom de l’administration et tranché par une cour de justice qui n’est autre que l’administration se jugeant elle-même : un examen de conscience suivi d’un acte de contrition » (G. Renard, Cours élémentaire de droit public, éd. Sirey, 1922, p.112).

[63] CE 26 novembre 1875, Pariset, Rec. 934.

[64] CE 14 janvier 1916, Camino, Rec. 15.

[65] CE 4 avril 1914, Gomel, Rec. 488.

[66] Voir, par ex. en ce qui concerne l’appréciation des mérites d’un postulant à une décoration : CE 10 décembre 1986, Loredon, n°78376.

[67] Voir, le premier arrêt mentionnant une erreur « manifeste » d’appréciation : CE 15 février 1961, Lagrange, Rec.121.

[68] Voir par ex. en ce qui concerne la fixation de tarifs d’électricité : CE 1er juillet 2010, Société Poweo, Rec. 229.

[69] CE, Ass., 2 novembre 1973, SA Libraire François Maspero, Rec. 611. Dans ses conclusions, le commissaire du Gouvernement, G. Braibant, relevait que « le pouvoir discrétionnaire comporte le droit de se tromper, mais non celui de commettre un erreur manifeste, c’est-à-dire à la fois apparente et grave ».

[70] CE, Sect., 9 juillet 1997, Association Ekin, Rec. 300, revenant sur l’arrêt SA Librairie Maspero précité.

[71] CE, Ass., 13 novembre 2013, Dahan, n°347704, revenant sur CE, Sect., 9 juin 1978, Lebon, n°5911. Voir aussi en ce qui concerne le contrôle normal d’une sanction infligée au membre d'une profession réglementée : CE Section, 22 juin 2007, Arfi, n° 272650, Rec. p. 263 ; à un magistrat du parquet : CE 27 mai 2009, Hontang, n° 310493, Rec. p. 207 ; à un magistrat du siège : CE 30 juin 2010, Mme Ponsard, n°s 325319 326415, T. p. 934 ; à un conseiller de prud'hommes : CE 20 mai 2011, Lecat, n° 332451, T. pp. 1100-1177 ; par une fédération sportive : CE 2 mars 2010, Fédération française d'athlétisme, n° 324439, T. p. 925 ; s'agissant des motifs d'un décret du président de la République révoquant un maire ou des adjoints : CE, 2 mars 2010, Dalongeville, n° 328843, Rec. p. 65.

[72]CE 19 mai 1933, Benjamin, Rec. 541.

[73] CE, Ass., 28 mai 1971, « Ville Nouvelle Est », Rec. 409 ; CE, Ass., 12 avril 2012, Association coordination interrégionale Stop THT et autres, n°342409.

[74] TC 8 février 1873, Blanco, Rec. 1er supplt. 61.

[75] Voir, par ex. en ce qui concerne les mesures de police : CE 10 février 1905, Tomaso Grecco, Rec. 139.

[76] CE 23 juillet 2010, Société Touax, Rec. 344.

[77] CE 10 avril 1992, Epoux V, Rec. 171.

[78] Voir, not. en ce qui concerne les atteintes aux personnes : CE 23 mai 2003, Chabba, n°244663 ; en ce qui concerne les atteintes au bien : CE 9 juillet 2008, Boussouar, n°306666.

[79] CE, Sect., 21 mars 2011, Krupa, n°306225.

[80] Voir,  not. en ce qui concerne les mesures juridiques de police : CE, Ass., 13 février 1942, Ville de Dôle, Rec. 48 ; en ce qui concerne la conduite d’activités matérielles de police : CE 30 mars 1979, Moisan, Rec. 143 ; CE, Sect., 13 mars 1998, Améon, Rec. 82 ; CE 29 avril 1998, Commune de Hannapes, Rec. 185. Voir sur la progressive généralisation du régime de faute simple en matière d’activités de police : P.-L. Frier et J. Petit, Droit administratif, 8e éd., éd. Dalloz, p. 566.

[81] CE, Ass., 28 juin 2002, Magiera, n°239575.

[82] CE 18 juin 2008, Gestas, n°295831 ; cet arrêt a été rendu dans le sillage de CJCE 30 septembre 2003, Köbler, C-224/01.

[83] CE, Sect., 26 janvier 1973, Driancourt, Rec. 78.

[84] CE 18 juin 1986, Krier, Rec. 166.

[85] CE 24 juin 1949, Consorts Lecomte, Rec. 307.

[86] CE 30 novembre 1923, Couitéas, Rec. 789.

[87] CE, Sect., 22 février 1963, Commune de Gavarnie, Rec. 113.

[88] CE, Ass., 14 janvier 1938, SA des produits laitiers « La Fleurette », Rec. 25 ; voir not. en ce qui concerne des dommages causés à des tiers par des mesures de protection de la faune : CE, Sect., 30 juillet 2003, Association pour le développement de l’acquaculture en région Centre, Rec. 367.

[89] CE, Ass., 30 mars 1966, Compagnie Générale Radioélectrique, Rec. 257.

[90] CE 2 novembre 2005, Société coopérative agricole Ax’ion, Rec. 468.

[91] Voir par ex. en ce qui concerne la suppression du monopole des avoués devant les cours d’appel : CC n°2010-624 DC du 20 janvier 2011, Rec. 66.

[92] CJCE 19 novembre 1991, Frankovich, Rec. 5357 ; CJCE 5 mars 1996, Brasseries du Pêcheur, Rec. 1029.

[93] CE, Ass., 8 février 2007, Gardedieu, Rec. 78 ; CE 3 août 2011, Société CRT France International et Celestrano, n°304838. Selon la doctrine, ce régime de responsabilité serait fondé sur la faute commise par le législateur (R. Chapus, Droit administratif général, tome 1, 15e éd., n°1519 ; P.-L. Frier et J. Petit, Droit administratif, 8e éd., éd. Dalloz, p. 586.

[94] CE 23 juillet 2014, Société d’éditions et de protection route, n°354365 : dans ce cas d’espèce, le requérant a fait valoir qu'il n'a pas été en mesure d'anticiper l'interprétation donnée des dispositions législatives litigieuses par la Cour de cassation ; il critique ainsi non pas la loi elle-même mais la portée qui lui a été ultérieurement conférée par la jurisprudence et n'est, par suite, pas fondé à mettre en cause la responsabilité de l'État au motif que la loi aurait été adoptée en méconnaissance des principes de sécurité juridique et de confiance légitime reconnus par le droit de l’Union européenne.</ANA>

[95]Voir par ex. en ce qui concerne la police des immeubles menaçant ruine : art. L. 511-1 du code de la construction et de l’habitation ; en ce qui concerne la police des installations classées pour la protection de l’environnement : art. L. 511-1 du code de l’environnement.

[96] CE, Ass., 16 février 2009, Société Atom, Rec. 25.

[97] CE, Avis, 9 juillet 2010, Berthaud, Rec. 287.

[98] Voir, pour un état des lieux jurisprudentiel approfondi : A. Béal, « Injonction », Jurisclasseur, fasc. 1115.

[99] Art. L. 911-1 du code de justice administrative.

[100] Art. L. 911-2 du code de justice administrative.

[101] CE, Sect., 22 février 2002, Dieng, n°224496.

[102] CE, Sect., 14 octobre 2011, Commune de Valmeinier, n°320371 ; voir pour un raisonnement similaire sur le fondement de l’art. L. 911-4 du code de justice administrative : CE, Sect., 29 janvier 2003, Syndicat départemental de l’électricité et du gaz des Alpes-maritimes et commune de Clans, n°245239.

[103] Loi n°2000-597 du 30 juin 2000 relative au référé devant les juridictions administratives.

[104] Art. L. 521-1 du code de justice administrative.

[105] Art. L. 521-2 du code de justice administrative.

[106] Art. L. 521-3 du code de justice administrative.

[107] Voir, en ce qui concerne le référé précontractuel : art. L. 551-1 et suivants  du code de justice administrative ; en ce qui concerne le référé contractuel : art. L. 551-13 et suivants du code de justice administrative.

[108] Voir, en ce qui concerne le droit pour un patient à donner son consentement : CE, ord., 16 août 2002, Mme Feuillatey, n°249552 ; en ce qui concerne le respect des règles relatives à l’extradition : CE, ord., 29 juillet 2003, M. Peqini, n°258900.

[109] CE, ord., 23 mars 2009, Ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire contre M. Gaghiev et Mme Gaghieva, n°325884 ; CE 19 novembre 2010, Ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration contre M. Panokheel, n°344286 ; CE, ord., 22 novembre 2010, Ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration contre M. Sidy Sonko, n°344373.

[110] CE 15 décembre 2010, Ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative contre époux Peyrilhe, n°344729.

[111] CE, Sect., 28 février 2001, Préfet des Alpes-Maritimes – société Sud-Est Assainissement, n°229562.

[112] Voir, par ex. en ce qui concerne un arrêté tendant à limiter l’expansion d’une épidémie de tuberculose bovine : CE 15 mars 2006, Ministre de l’agriculture et de la pêche contre GAEC de Beauplat, n°286648.

[113] Voir, par ex. en ce qui concerne la continuité des enseignements dispensés aux élèves de seconde, première et terminale : CE, ord., 28 août 2002, Société des agrégés de l’Université, n°249769.

[114] Voir, par ex. en ce qui concerne la préservation d’une zone naturelle : CE 5 novembre 2001, Commune du Cannet-des-Maures, n°234396.

[115] CE, ord. 28 février 2003, Commune de Pertuis contre Pellenc, n°254411 ; voir également : CE 23 janvier 2004, Koffi, n°257106.

[116] CE, ord., 23 janvier 2013, Commune de Chirongui, n°365262.

[117] TC 17 juin 2013, M. Bergoend contre société ERDF Annecy Léman, n°3911.

[118] CE, ord., 16 juin 2010, Mme Diakité, n°340250.

[119] CE 30 décembre 2002, Carminati, n°240430.

[120] CE, Ass., 24 juin 2014, Mme Lambert, n°375081, pt. 12.

[121] CE, Sect., 23 décembre 2011, Danthony, Rec. 649. Le juge doit procéder à cet examen de lui même si aucune partie ne le lui demande (CE 17 février 2012, Société Chiesi SA, n°332509).

[122] B. Stirn et Y. Aguila, Droit public français et européen, éd. Dalloz, coll. Amphi, 2014,  p. 584.

[123] Voir, s’agissant d’acte réglementaire : CE, Ass., Association AC ! et autres, n°255886 ; s’agissant d’une décision individuelle : CE 12 décembre 2007, Sire, n°296072.

[124] L’arrêt Association AC ! précité soulignait que la dérogation au principe de l’effet rétroactif des annulations contentieuses ne pouvait être justifiée qu’ « à titre exceptionnel ». Sans remettre en cause ce principe, l’arrêt CE, Ass., Société Métropole Télévision (M6) et société Télévision française 1 (TF1), n°363702, est revenue sur cette mention.

[125] Voir, sur ce point, O. Mamoudy, « D’AC ! à M6 en passant par Danthony, 10 ans d’application de la jurisprudence AC ! – bilan et perspectives », AJDA, 2014, p. 501 ; A.-C. Bezzina, « 2004-2014 : les dix ans de la jurisprudence AC ! », RFDA, 2014, p. 735.

[126] Voir, par ex. CE 28 mai 2014, Association Vent de colère ! et autres, n°324852 ; CE 17 juin 2011, Canal + Distribution et autres, n°324816 ; CE 23 juillet 2014, Société Octapharma France, n°349717.

[127] CE, Ass., 28 décembre 2009, Commune de Béziers précité.

[128] CE, Sect., 21 mars 2011, Commune de Béziers, Rec. p. 117.

[129] CE, Ass., 4 avril 2014, Département de Tarn-et-Garonne, n°358994.