Colloque "Le Conseil d’Etat et le droit social" organisé le 26 et 27 octobre 2009 par la Faculté de droit de l’Université de Caen avec le concours du Conseil d’Etat et de l’Association française de droit du travail et de la sécurité sociale.
Introduction de Jean-Marc Sauvé[1], Vice-président du Conseil d'Etat.
Le droit social, une œuvre collective
Mesdames et Messieurs les présidents,
Mesdames et Messieurs les membres de la Cour de cassation,
Mesdames et Messieurs les professeurs,
Mesdames et Messieurs les avocats,
Mesdames, Messieurs,
Chers collègues,
« Aucun segment du droit n'échappe au jeu croisé des influences »[2]. Ainsi s'exprimait, il y a près de 19 ans, le professeur Bernard Teyssié, à l'occasion du colloque intitulé « Droit public et droit social », organisé sous la présidence du président de la chambre sociale de la Cour de cassation, M. Jean Cochard.
Le professeur Teyssié n'exprimait alors rien d'autre que la nature profondément collective de cette œuvre qu'est la production du droit social.
Collectif, le droit social, l'est tout d'abord par son objet. Le droit du travail, le droit de la sécurité sociale, le droit de la santé et le droit de la protection et de l'aide sociales qui en sont les composantes sont unis par une même origine. Cette dernière se situe principalement dans des initiatives et des techniques issues du droit privé, au centre desquelles on trouve, notamment, le procédé contractuel : le professeur Alain Supiot ne soulignait-il pas que le droit social trouve son unité dans la « structure profonde du statut salarial »[3] ? Si le droit social a conservé cette « âme privatiste »[4], puisqu'il régit toujours des relations entre les personnes privées (l'employeur et le salarié par exemple), il n'en a pas moins été, dès l'origine, un droit dont les finalités relèvent de l'intérêt général et qui implique fortement les acteurs publics. Le projet du droit social, qui s'est affirmé à mesure de son évolution et de son déploiement, c'est en effet la cohésion sociale dont ne peuvent se désintéresser les pouvoirs publics. Le droit social est donc porteur de valeurs collectives, celles-là même que résume le « principe de solidarité nationale », fondement de l'organisation de la sécurité sociale[5]. L'objet du droit social est avant tout collectif et, j'oserai dire tautologiquement, « social ».
Mais ce caractère collectif, le droit social le tient également des conditions de son élaboration et de son application. Cela découle naturellement de cette double origine, privée et publique que je viens d'évoquer, mais aussi de l'ampleur des domaines de l'activité humaine qu'il couvre. Le droit social est une œuvre collective, parce qu'il est un « laboratoire d'hybridation » entre le droit privé et le droit public. Il l'est aussi, de manière plus générale, en raison de la place qu'occupent dans son élaboration tant l'accord collectif que le droit international, à côté des sources « classiques » du droit que sont la loi et le règlement. Cette origine collective du droit social vient encore de la multiplicité des structures en charge de son exécution, parmi lesquelles coexistent personnes publiques et personnes privées. Elle vient également de la diversité des juges en charge de son application (juge du travail, mais aussi juge civil, juge pénal, et juge administratif).
Dans cette œuvre collective, dont « des pans entiers [...] sont substantiellement de droit public »,[6] la juridiction administrative, et le Conseil d'Etat en particulier, jouent un rôle essentiel, même s'il est trop souvent méconnu. L'objet du présent colloque, et l'un de ses mérites, est de le mettre en lumière.
Dans cette introduction, je m'attacherai à mettre en lumière trois points :
1) En premier lieu, le Conseil d'Etat prend une part importante, par l'action de ses membres et son activité consultative et contentieuse, à l'élaboration et à la cohérence du droit social.
2) En deuxième lieu, il est, par conséquent, en mesure de jouer un rôle dans l'affirmation des valeurs portées par le droit social et dans leur mise en œuvre effective.
3) En troisième lieu, il contribue à l'unité du droit social, en participant au dialogue des juges ainsi qu'à l'application effective de ce droit.
I. Le rôle essentiel du Conseil d'Etat dans l'élaboration du droit social.
I. A- Le Conseil d'Etat joue un rôle fondamental dans le processus de création du droit social, qui lui permet de contribuer à la cohérence de ce droit.
1- Ce rôle fondamental, le Conseil d'Etat le doit d'abord aux hommes et aux femmes qui le composent. Il est impossible d'évoquer la construction de la sécurité sociale sans rendre hommage à l'action de son « père fondateur », Pierre Laroque. C'est lui qui a été appelé par Alexandre Parodi, alors ministre du travail du Gouvernement provisoire[7], pour occuper le poste de directeur général de la sécurité sociale et qui a élaboré et mis en œuvre les ordonnances et les lois de 1945 et 1946, qui ont posé les fondations du système actuel de sécurité sociale[8]. Le lien étroit, presque filial, entre les membres du Conseil d'Etat et le droit social n'a, depuis lors, cessé de se prolonger ; que l'on songe par exemple à la succession des directeurs généraux du travail ou de la sécurité sociale ou encore à la présidence des grandes institutions consultatives dans le champ social : commission nationale de la négociation collective, conseil supérieur de la prud'homie, conseil d'orientation des retraites...
2- Au-delà de l'histoire et des personnes, les missions mêmes du Conseil d'Etat font de lui un acteur primordial du processus d'élaboration du droit social. Sa fonction consultative, d'une part, le conduit à participer à l'élaboration des principaux textes en la matière. La section sociale, ainsi, n'a pas examiné moins de 165 projets de décret ou de loi au cours de l'année 2008. Les avis que cette section a émis, en particulier au cours des dernières années, ont accompagné l'élaboration de toutes les réformes importantes dans les différents domaines du droit social : je pense, par exemple, à la création du revenu de solidarité active (RSA), à la modification des régimes spéciaux de retraites, à l'approfondissement du dialogue social, à l'organisation du service public de la santé ou encore aux droits des personnes handicapées. Plus encore, les avis rendus dans ces domaines ont contribué à poser ou à préciser les fondements juridiques et les modalités d'application de ces réformes. Le Conseil d'Etat a ainsi considéré, à l'occasion de l'examen du projet de loi sur le service public de l'emploi, que la nouvelle institution créée, issue de la fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC, était bien une personne morale de droit public et même un établissement public administratif[9]. Cette fonction consultative a, de même, conduit le Conseil d'Etat à préciser les modalités d'application de l'obligation de consultation des partenaires sociaux, qui figure désormais à l'article L. 1 du code du travail. J'y reviendrai.
3- La fonction contentieuse du Conseil d'Etat lui permet également, d'autre part, de participer à l'élaboration ou à la précision des règles et des concepts qui régissent le droit social. Les exemples en la matière sont très nombreux. Je retiendrai pour ma part que, par les décisions qu'il a rendues sur la légalité d'actes règlementaires, le Conseil d'Etat a été conduit, notamment, à déterminer certaines modalités d'application du droit syndical[10], à préciser les conditions d'extension, par voie règlementaire, d'accords collectifs[11], ou encore à examiner la conformité du mécanisme des franchises au regard des exigences de la solidarité nationale figurant dans le Préambule de la Constitution de 1946[12]. Il a également défini, par exemple, à travers l'examen de la légalité de décisions individuelles, les conditions du licenciement des salariés protégés -je pense bien sûr à la décision du 5 mai 1976, SAFER d'Auvergne et Ministre de l'agriculture c/ Bernette [13]-, qui figure parmi les grandes décisions du Conseil d'Etat.
Le Conseil d'Etat est donc, par l'action de ses membres et par ses activités consultatives et contentieuses, au cœur des enjeux actuels en matière sociale : en particulier de ceux qui sont liés à la définition des règles régissant le contrat de travail, de ceux qui résultent de l'allongement de la durée de vie ou encore de ceux qui se rapportent à la maîtrise des dépenses de santé.
I. B- Ce rôle essentiel du Conseil d'Etat lui permet de concourir à la cohérence des règles du droit social. Ainsi que je l'évoquais, ce droit est en rapport étroit avec des aspects extrêmement variés de la vie et de l'activité humaines. Il se caractérise par la diversité des organismes et des juges en charge de son application. Le droit social demande, en outre, d'opérer une conciliation toujours plus délicate entre le temps long de la protection et le temps, de plus en plus court, de la relation de travail. Du fait de ces caractéristiques, le droit social est donc un droit en constant renouvellement et il présente, de manière presque intrinsèque, un risque de fragmentation[14] et de complexité[15]. Le Conseil d'Etat s'efforce de veiller à la fois à sa cohérence, son accessibilité et son intelligibilité.
1- Au service de la cohérence du travail d'élaboration du droit social, les rapports annuels du Conseil d'Etat soulignent régulièrement les lacunes de la coordination entre les différents ministères et services dans le processus d'élaboration des normes sociales. Le rapport annuel de 2008 a par exemple relevé, à propos de deux projets de décret relatifs à la durée d'assurance prise en compte pour le calcul de la pension de retraite dans deux régimes de retraite[16], que ces deux textes, présentés par deux ministères différents à cinq mois d'intervalle, tendaient à appliquer une seule et même disposition législative et contenaient des dispositions largement mais pas totalement identiques, sans que l'on puisse expliquer ces différences. Le rapport invitait par conséquent l'administration à modifier ses modes de coordination. Le rapport public de 2009, quant à lui, relève que les dispositions règlementaires nécessaires à l'application de certaines dispositions législatives [17] du code du travail n'ont jamais été édictées. Le rôle du Conseil d'Etat en pareil cas est clair : il permet de remédier aux risques de discordances injustifiées entre plusieurs règles et d'orienter le travail gouvernemental d'élaboration de la norme juridique.
2- De la même manière, le Conseil d'Etat veille à l'intelligibilité et à l'accessibilité de la règle de droit dans le domaine social. Il s'assure ainsi de la cohérence des définitions. Je pense, par exemple, à la notion de « prestations sociales » à laquelle peuvent prétendre les personnes sans domicile stable[18]. Cette notion a été regardée comme comprenant, en l'espèce, les prestations de sécurité sociale, celles qui sont prévues par le code de l'action sociale et des familles et celles qui relèvent de la protection sociale complémentaire et des régimes d'indemnisation du chômage. Le Conseil d'Etat veille également à l'accessibilité du droit social, en participant à sa codification. Plusieurs de ses membres - dont le président de cette instance - font partie de la Commission supérieure de codification. Il donne aussi son avis sur les projets de code, contenus dans des ordonnances ou des décrets en Conseil d'Etat. Je tiens à souligner à cet égard qu'à la suite de l'avis favorable rendu par la section sociale en 2007 sur le projet d'ordonnance relative à la partie législative du code du travail[19], le Conseil constitutionnel a jugé que le nouveau code du travail « loin de méconnaître les exigences résultant de l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi, [tendait] au contraire, à les mettre en œuvre »[20].
II. A côté de cette responsabilité fondamentale dans l'élaboration du droit social, le Conseil d'Etat joue aussi un rôle essentiel dans l'affirmation des valeurs portées par ce droit.
II. A- La vocation collective du droit social que j'évoquais en introduction se traduit par le fait que celui-ci véhicule un corpus de valeurs communes, qui fondent en grande partie la cohésion de notre société. Ces valeurs ne sont autres que les finalités d'intérêt général qui inspirent, en particulier, les principes « particulièrement nécessaires à notre temps » du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946[21].
1- Le Conseil d'Etat met en œuvre ces finalités d'intérêt général du droit social. Il veille, en premier lieu, à ce qu'elles soient effectives. Certes, compte tenu de leur place dans la hiérarchie des normes -pour l'essentiel, le Préambule de la Constitution de 1946-, l'affirmation de ces finalités et de ces valeurs en droit positif revient, pour beaucoup, au Conseil constitutionnel. C'est ce dernier qui a ainsi reconnu valeur constitutionnelle au droit pour chacun d'obtenir un emploi[22], au principe de participation des travailleurs[23], au droit à la protection sociale[24] ou à la protection de la santé[25]. Pour autant, le Conseil d'Etat n'hésite pas, lui non plus, à se fonder directement sur les principes sociaux du Préambule en vue d'assurer leur caractère effectif. Il interprète ainsi la loi -ou même l'absence de loi- à la lumière et à l'aune de la Constitution. A titre d'exemple bien connu, par sa décision d'assemblée Dehaene du 7 juillet 1950[26], il a donné sa pleine portée, dans les services publics, à l'affirmation du droit de grève inscrit au septième alinéa du Préambule de 1946. Par sa décision d'assemblée Département de la Charente-Maritime du 14 décembre 2007[27], il a interprété, au regard du onzième alinéa du Préambule consacrant le droit à la santé, les dispositions législatives du code de l'action sociale et des familles qui déterminent le montant des ressources dont peuvent disposer librement les personnes âgées accueillies en établissement au titre de l'aide sociale, comme n'ayant pu réduire ces ressources à un montant inférieur à celui permettant d'acquérir une assurance complémentaire de santé.
2- Plus encore, en second lieu, le Conseil d'Etat met en œuvre le caractère effectif des valeurs sous-jacentes au droit social, en les étendant à des domaines dans lesquels elles n'étaient pas encore présentes. Je pense, par exemple, à la jurisprudence audacieuse issue de la décision d'assemblée Bianchi du 9 avril 1993[28], qui a reconnu, sur le terrain de la responsabilité sans faute, la possibilité d'indemniser les préjudices nés de l'aléa thérapeutique ou, plus tard, du risque sériel[29]. C'est ce courant de jurisprudence qui a mis en évidence la nécessité d'instaurer des dispositifs permettant la prise en compte du risque social sur le fondement de la solidarité nationale. Ces dispositifs ont finalement été mis en place par la loi du 4 mars 2002[30], avec la création de l'ONIAM[31] et des procédures d'indemnisation des risques hospitaliers. C'est encore le Conseil d'Etat qui, selon un processus similaire visant à la pleine mise en œuvre des valeurs portées par le droit social, a étendu aux agents des services publics, à la suite de l'arrêt fondateur Dame Peynet du 8 juin 1973, certains des principes généraux dont s'inspire le code du travail. Sa jurisprudence a ainsi qualifié de principe général du droit applicable aux agents publics l'interdiction de licencier une femme enceinte[32], le versement d'un salaire minimal qui ne saurait être inférieur au SMIC[33] ou l'interdiction de résilier ou de refuser de renouveler le contrat de travail d'un salarié en considération de son sexe ou de sa situation de famille[34].
De même, ont été qualifiés de principes généraux du droit applicables dans les établissements ou entreprises publics à statut :
- l'interdiction des sanctions pécuniaires infligées aux salariés[35] ;
- le principe de représentativité[36] ;
- l'immutabilité du contrat de travail et, par suite, l'interdiction d'en modifier les termes sans l'accord des parties[37] ;
- l'obligation de reclasser un salarié devenu définitivement inapte à l'exercice de son emploi avant d'envisager son licenciement[38].
Au-delà des seuls agents du secteur public, la génération ou la mise à jour des principes généraux du droit en matière sociale s'est étendue à bien d'autres domaines avec la reconnaissance :
- du droit de tout individu de mener une vie familiale normale[39] ;
- du principe de « faveur », selon lequel les conventions et accords collectifs de travail peuvent comporter des dispositions plus favorables aux salariés que celles des lois et règlements en vigueur[40] ;
- du principe d'indépendance des inspecteurs du travail[41].
Je terminerai ce développement, en ajoutant que c'est bien le lien entre le droit social et l'intérêt général qui justifie la large compétence contentieuse de la juridiction administrative dans ce domaine. Cette compétence couvre la totalité du champ du droit social. En matière de droit du travail, la juridiction administrative connaît ainsi du contentieux du licenciement de salariés protégés, de la régularité de certaines élections professionnelles, de la légalité des injonctions des inspecteurs du travail pour la modification du règlement d'une entreprise ou encore du contentieux des arrêtés d'extension des conventions collectives. En matière de droit de la santé, notre juridiction connaît du contentieux des règles d'organisation du service public de la santé, de celui des autorisations de mise sur le marché de produits pharmaceutiques et du contentieux de la responsabilité hospitalière. En matière d'action et d'aide sociales, la compétence de la juridiction administrative recouvre, notamment, la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, le contentieux des refus de carte européenne de stationnement, ou encore celui des décisions prises, notamment, par les départements et l'Etat en matière de prestations d'aide sociale[42]. Ces domaines ne sont, bien sûr, que des exemples, mais ils illustrent parfaitement l'étendue du rôle joué par le Conseil d'Etat et la juridiction administrative, dans la pleine mise en œuvre des finalités d'intérêt général du droit social.
II. B- Ce rôle trouve son achèvement dans le fait que le Conseil d'Etat accompagne de manière constante les évolutions de ce droit, jusqu'à adapter lui-même l'étendue de son office à ces évolutions.
1- L'une de ces évolutions réside dans l'importance croissante des sources d'origine contractuelle. Après de nombreux auteurs[43], les considérations générales de notre rapport annuel de 2008[44] l'ont mis en évidence. Le Conseil d'Etat est au cœur de cette évolution. Dans ses fonctions consultatives, c'est lui qui veille au respect, par le Gouvernement, de l'obligation, inscrite aujourd'hui à l'article L. 1 du code du travail[45], d'inviter les partenaires sociaux à négocier avant d'engager une réforme relative au droit du travail. En 2007, trois projets de texte ont ainsi fait l'objet d'un avis sur ce point[46]. D'autres textes ont également été examinés au regard de cette exigence en 2008. Au contentieux, de même, le Conseil d'Etat a précisé les conditions dans lesquelles un règlement pouvait renvoyer à une convention collective le soin de prévoir les mesures d'application de dispositions législatives[47].
Le Conseil d'Etat accompagne également les évolutions institutionnelles que connaît le droit social. Je pense à cet égard, par exemple, aux très nombreux avis rendus par la section sociale sur des projets de textes créant de nouveaux organismes dans le champ social ou modifiant de manière substantielle les statuts d'organismes existants[48]. Je ne puis bien évidemment omettre à cet égard de mentionner la décision d'assemblée du 13 mai 1938[49] qui, à propos des caisses primaires, a affirmé de manière claire leur caractère d'organismes privés chargés d'une mission de service public.
2- Ce dernier arrêt illustre l'influence du droit social sur l'évolution du droit public et de ses catégories, influence que l'on retrouve de manière caractéristique dans certaines évolutions de l'office et du contrôle du juge administratif, qui procèdent du droit social. La décision d'assemblée SAFER d'Auvergne et ministre de l'agriculture c/ Bernette [50] que j'ai citée en est une illustration. Elle a en effet conduit à une extension du contrôle du juge : ce contrôle porte désormais sur les faits justifiant le licenciement qui doivent, en matière disciplinaire, être d'une gravité suffisante et il réserve l'hypothèse d'un refus d'autorisation de licenciement pour des motifs d'intérêt général, alors même que les conditions légales de cette autorisation seraient remplies. Le Conseil d'Etat exerce sur les motifs du licenciement son entier contrôle de la qualification juridique des faits et, s'agissant des motifs d'intérêt général pouvant fonder un refus, un contrôle de proportionnalité entre ces motifs et l'un ou l'autre des intérêts en présence -qu'il s'agisse de celui de l'employeur ou des salariés-, en veillant à ce qu'il ne leur soit pas porté une atteinte excessive[51].
De la même manière, la décision d'assemblée Société des peintures Corona du 1er février 1980[52] sur le contrôle des règlements intérieurs des entreprises a introduit l'idée fondamentale du contrôle de la nécessité et de la proportionnalité des atteintes portées dans l'entreprise aux droits des personnes et aux libertés individuelles. Ces principes ont d'ailleurs été repris dans le code du travail[53] et ils ont, de l'avis de la doctrine comme du doyen Waquet, irrigué la jurisprudence sociale.
L'évolution du contrôle du juge administratif sous l'influence du droit social peut encore être illustrée par les arrêts qui ont reconnu la carence fautive de l'Etat dans la prévention des risques liés à l'exposition des travailleurs aux poussières d'amiante[54] ou par les arrêts rendus en matière d'autorisation de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques[55]. Dans ces deux cas, le Conseil d'Etat a mis en œuvre des démarches originales, inspirées des notions de prévention ou de précaution, afin d'évaluer l'impact, notamment sur la santé humaine, de l'action ou de l'abstention d'action des pouvoirs publics.
Il existe ainsi une relation infrangible entre le Conseil d'Etat et le droit social : tout comme le premier accompagne l'évolution du second, le droit social est aussi, pour la juridiction administrative, un laboratoire d'évolutions contentieuses.
III. Le lien entre le droit social et le Conseil d'Etat explique que ce dernier, en participant au dialogue des juges, contribue à l'unité de ce droit et qu'il veille à son application effective.
III. A- La contribution du droit social à la cohésion de notre société implique que les juges en charge de son application harmonisent leur action, dans le respect du rôle et de la spécificité de chacun. En assumant son rôle, le Conseil d'Etat contribue par là même à l'unité du droit social.
1- J'en veux pour preuve, tout d'abord, les relations fécondes qu'entretiennent la justice administrative et la justice judiciaire. Ces relations se prolongent en outre avec les représentants de la doctrine en matière sociale. Elles se traduisent par des chroniques ou même des ouvrages communs, régulièrement publiés, de manière conjointe par des membres du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation. Ces relations se sont également manifestées par la création d'un groupe de travail commun, le 4 juillet 2009, à l'initiative du président de la section du contentieux et de la présidente de la chambre sociale de la Cour de cassation. Ce groupe réunit de manière régulière, sur les sujets de droit du travail d'intérêt commun, des membres du Conseil et de la Cour. Son but est de permettre, dans un cadre officialisé et pérenne, une meilleure compréhension des jurisprudences respectives des deux ordres de juridictions et de contribuer à un règlement plus efficace des litiges. Je serais incomplet sur ce point, si je n'évoquais pas également le présent colloque, organisé par la Faculté de droit de l'Université de Caen, avec le concours du Conseil d'Etat et de l'Association française de droit du travail et de la sécurité sociale. Ce colloque est un bel exemple d'ouverture réciproque, attestée par les origines variées des intervenants. J'ai ainsi pu constater, parmi eux, la présence de membres du Conseil constitutionnel, du Conseil d'Etat, de la Cour de cassation, de professeurs d'université et d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation.
Ces travaux en commun auxquels il convient d'ajouter les mécanismes juridictionnels plus « classiques », comme celui des questions préjudicielles, permettent d'harmoniser « en continu » les jurisprudences en matière sociale de nos deux ordres de juridictions. Cette harmonisation est certes ancienne[56], mais elle trouve aujourd'hui son plein épanouissement. En atteste, par exemple, dans le domaine du licenciement des salariés protégés, l'articulation aujourd'hui renforcée entre la notion de « faute d'une gravité suffisante », issue de la jurisprudence administrative, et la notion de « cause réelle et sérieuse », telle qu'interprétée par la Cour de cassation[57]. Le contentieux des arrêtés d'extension des accords collectifs illustre, quant à lui, la nécessité de poursuivre notre travail en commun. Le contrôle de la légalité de tels arrêtés relève en effet de la compétence du Conseil d'Etat mais, corrélativement, les questions relatives à la validité ou à l'interprétation des conventions collectives, lorsqu'elles posent une difficulté sérieuse, relèvent, elles, de la compétence de l'autorité judiciaire[58]. Le dialogue fécond avec l'autorité judiciaire que j'évoquais à l'instant est donc une nécessité : il va dans le sens d'une plus grande unité du droit social.
2- Le sens du mouvement est clair, même si les étapes pendant lesquelles demeurent des divergences peuvent être longues. Il en va particulièrement ainsi, lorsque le Conseil d'Etat -tout comme la Cour de cassation- étend ou prolonge ce dialogue avec le juge constitutionnel, le juge communautaire et le juge européen des droits de l'homme. Ce dialogue peut alors connaître des phases de construction, mais aussi de décalages, voire de failles, comme on a pu le voir récemment à propos de la majoration de durée d'assurance vieillesse pour les mères de famille prévue à l'article L 351-4 du code de la sécurité sociale, lorsque les positions prises par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 14 août 2003[59] au regard du principe constitutionnel d'égalité, et par la Cour de cassation dans son arrêt du 19 février 2009[60], au regard de l'article 14 de la convention européenne des droits de l'homme et de l'article 1er de son protocole n° 1, sont apparues à première vue irréconciliables. Ces échanges vont nécessairement se poursuivre à propos de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 dont le Conseil d'Etat a récemment examiné pour avis le projet. Le Conseil a assumé sa mission en la matière, à la lumière bien sûr de la jurisprudence nationale, mais aussi en revisitant la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme et celle de la Cour de justice des Communautés européennes et en s'attachant à bien analyser leur portée et leur champ d'application respectif. Ce faisant, il participe lui aussi au dialogue des juges et il contribue encore de la sorte à l'élaboration, à l'unité et à la cohérence du droit social.
III.B- Afin de donner toute sa portée au rôle de cohésion de ce droit, le Conseil d'Etat veille également à son application effective.
1- Il le fait, d'une part, en donnant leur pleine portée à l'ensemble des normes qui composent le droit social. J'ai déjà évoqué sur ce point la prise en compte par le Conseil d'Etat de l'une des particularités de ce droit, issue de la place qu'occupent dans ses sources les normes d'origine conventionnelle. Je me bornerai à ajouter que le Conseil d'Etat a aussi pris la mesure de l'importance des normes d'origine internationale dans la formation du droit social. L'exercice de sa fonction consultative le conduit ainsi, régulièrement, à examiner la compatibilité des projets de texte qui lui sont soumis au regard, notamment, du droit communautaire. L'avis rendu par la section sociale en 2007 sur les projets de décret relatifs aux régimes spéciaux de retraite, s'agissant de la suppression des « âges couperet », s'appuyait par exemple sur l'interprétation donnée par la Cour de justice des Communautés européennes du principe d'interdiction des discriminations fondées sur l'âge, tel qu'il est prévu par la directive européenne relative à la mise en œuvre de l'égalité des chances. Quant à l'exercice de sa fonction contentieuse, elle a conduit le Conseil d'Etat, non seulement à censurer la méconnaissance par le législateur ou le pouvoir règlementaire de normes communautaires[61], mais encore à reconnaître un effet direct aux stipulations de plusieurs conventions de l'Organisation internationale du travail et à en faire par conséquent application[62].
2- Pour veiller à l'application effective du droit social, le Conseil d'Etat s'assure également, d'autre part, du respect des droits des justiciables dans le domaine social. Le rapport concernant l'avenir des juridictions spécialisées dans le domaine social, qu'il a remis au Premier ministre en 2003, a ainsi illustré l'attention portée aux difficultés de ces juridictions. Ce rapport a en effet souligné les questions posées par la composition de certaines d'entre elles au regard du principe d'impartialité[63]. Il a mis en évidence l' « écartèlement des compétences » ou l'absence de précision et d'harmonisation des textes relatifs aux règles de procédure. Ce rapport a aussi appelé l'attention sur l'insuffisance de moyens dont disposent ces juridictions, au regard de l'importance des contentieux dont elles ont à connaître. Les suites qui y ont été données n'ont sans doute pas été à la hauteur de l'urgence des réformes proposées, mais elles n'ont pas non plus été inexistantes. La composition des commissions départementales d'aide sociale a ainsi été modifiée[64]. Les commissions départementales des travailleurs handicapés des mutilés de guerre et assimilés ont été supprimées et leur compétence en matière de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé a été transférée aux juridictions administratives de droit commun[65]. L'ordonnance du 1er septembre 2005 a enfin réformé la composition des juridictions du tarif en vue d'en garantir l'impartialité[66].
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Pour le professeur Yves Gaudemet, « le droit public est social, au moins depuis la Constitution de 1946, et [...] le droit social est du droit public, au moins pour une large part des questions qu'il regroupe »[67]. Le Conseil d'Etat est donc naturellement l'un des piliers de l'élaboration, de l'affirmation et de la pleine application du droit social, même s'il partage fort logiquement ce rôle avec d'autres juges, en particulier le juge judiciaire. Sans son intervention, du fait de ses fonctions consultatives ou contentieuses, le droit social perdrait sans aucun doute en cohérence, en lisibilité et peut-être aussi en consistance. Mais ce droit essentiel pour la cohésion sociale est aussi un droit fragile, tant cette cohésion rencontre aujourd'hui et se heurte même à de nombreux défis. Toutes les institutions, à leur place, doivent jouer pleinement leur rôle pour que ce droit, dans le monde global qui est le nôtre, poursuive son adaptation pour mieux répondre à ses finalités essentielles, sans jamais les perdre de vue. Je salue donc les organisateurs de ce colloque et les personnes qui ont accepté d'y participer, qui ont tous à cœur, je n'en doute pas, de contribuer à la construction d'un droit social à la mesure des exigences de notre temps. Vous allez pendant ces deux journées réfléchir aux sources du droit social, au rôle joué en la matière par le Conseil d'Etat, à son articulation et ses interactions avec les autres juridictions nationales et européennes. Comment le Conseil assume-t-il son rôle ? Comment s'organise le dialogue des juges en matière sociale ? A quels défis doit-il répondre ? Et comment l'améliorer ? Voilà les questions auxquelles vous devez répondre. Je me félicite sincèrement de l'initiative de la Faculté de droit de Caen et je forme pour votre colloque tous mes vœux de réussite.
[1] Texte écrit en collaboration avec M. Timothée Paris, conseiller de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, chargé de mission auprès du vice-président du Conseil d'Etat.
[2]Droit public et droit social : variations autour d'un thème, par Bernard Teyssié, professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Montpellier. Introduction au colloque intitulé « Droit public et droit social », organisé par la faculté de droit et des sciences économiques de Montpellier le 14 décembre 1990, in Droit social n°3, mars 1991.
[3] Alain Supiot, L'avenir d'un vieux couple : travail et sécurité sociale, in Droit social n° 9/10, septembre-octobre 1995.
[4] Yves Gaudemet, Droit public et droit social, rapport de synthèse, ibid.
[5] Article L. 111-1 du code de la sécurité sociale.
[6] Yves Gaudemet, op. cit. idem.
[7] et futur vice-président du Conseil d'Etat de 1960 à 1971.
[8] En particulier : l'ordonnance n° 45-2250 du 4 octobre 1945 portant organisation de la sécurité sociale, l'ordonnance n° 45-2454 du 19 octobre 1945 fixant le régime des assurances sociales applicables aux assurés des professions non-agricoles, l'ordonnance n°45-2453 du 19 octobre 1945 modifiant et codifiant la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et adaptant cette législation à l'organisation de la sécurité sociale, la loi n°46-2425 du 30 octobre 1946 modifiant l'ordonnance n°45-2250 du 4 octobre 1945, la loi n°46-2426 du 30 octobre 1946 relative à la prévention et à la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles.
[9] Conseil d'Etat, rapport public 2008, pp. 142-143.
[10] Par exemple, CE, 15 mai 2009, Fédération CNT PTT, n°299205, à mentionner aux tables du Recueil Lebon : il résulte des articles 29 à 31 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 que le code du travail n'est pas applicable à la représentation collective et individuelle du personnel de La Poste. Ainsi, en l'absence de dispositions législatives spéciales contraires, le code du travail et, notamment, son article L. 412-4 dans sa version alors en vigueur (désormais repris aux articles L. 2122-1, L. 2141-9 et L. 2141-12 du même code) réservant l'exercice des droits syndicaux aux seuls syndicats représentatifs dans l'entreprise, ne s'applique pas à l'exercice du droit syndical à La Poste. Cet exercice reste régi par la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
[11] Par exemple, CE, 21 novembre 2008, Syndicat national des cabinets de recouvrement de créances et de renseignements commerciaux et autres, n° 300135, à publier au rec. : le ministre chargé du travail n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant d'étendre un accord autorisant la mise à la retraite, sur l'initiative de l'employeur, de salariés âgés de moins de 65 ans, sur le fondement de l'article L. 133-8, désormais repris à l'article L. 2261-25 du code du travail, pour un motif d'intérêt général tiré de la nécessité de favoriser le maintien dans l'emploi des "seniors".
[12] CE, 6 mai 2009, Association FNATH, Association des accidentés de la vie, Association nationale de défense des victimes de l'amiante, n° 312462, à publier au rec. : Les sommes susceptibles d'être laissées à la charge des assurés du fait du décret n° 2007-1937 du 26 décembre 2007, pris pour l'application du III de l'article de l'art. L. 322-2 du code de la sécurité sociale, n'excèdent pas la part des revenus des assurés au-delà de laquelle les exigences du onzième alinéa du Préambule seraient méconnues.
[13] Rec p. 232
[14] La « fragmentation » du statut salarial, sa « décomposition » et celle, subséquente, du droit social, sont les thèmes abordés par Alain Supiot dans son article de 1995, L'avenir d'un vieux couple : travail et sécurité sociale, op. cit. idem.
[15] dénoncée de manière récurrente dans les rapports annuels du Conseil d'Etat.
[16] Projet de décret relatif à la durée maximale d'assurance et au revenu annuel moyen pris en compte pour le calcul de la pension de retraite des salariés et des travailleurs non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales; projet de décret relatif à la durée d'assurance prise en compte pour le calcul de la pension de retraite des personnes non salariées des professions agricoles et modifiant le code rural, rapport public 2008 p. 132.
[17] A propos de l'examen du projet de décret de recodification du droit du travail, rapport public 2009, p. 164.
[18] Article L. 264-1 du code de l'action sociale et des familles, rapport public 2008, p. 139.
[19] Rapport public 2008, p. 140-142.
[20] CC, décision n° 2007-561 DC du 17 janvier 2008, loi ratifiant l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative).
[21] Le cinquième alinéa du Préambule, par exemple, dispose que « Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi », les sixième et septième alinéas reconnaissent la liberté syndicale et le droit de grève, et le huitième alinéa instaure le principe de participation des travailleurs « à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises ». Quant aux alinéas 10 et11, ils prévoient respectivement que « La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement », et qu' « elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ».
[22] CC, décision n° 98-401 DC du 10 juin 1998, loi d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail.
[23] CC, décision n° 77-83 DC du 20 juillet 1977, Loi modifiant l'article 4 de la loi de finances rectificative pour 1961 (obligation de service des fonctionnaires)
[24] CC, décision n° 86-225 DC du 23 janvier 1987, Loi portant diverses mesures d'ordre social
[25] CC, décision n°80-117 DC du 22 juillet 1980, Loi sur la protection et le contrôle des matières nucléaires.
[26] Rec. p. 426
[27] Rec. p. 472
[28] Rec. p. 127 avec les conclusions de S. Daël.
[29] Notamment CE, Ass, 26 mai 1995, consorts N'Guyen, n°143238, Rec. p 221, à propos des transfusions sanguines.
[30] Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.
[31] Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales
[32] CE, ass., 8 juin 1973, Dame Peynet, Rec. p. 406 avec les conclusions de Mme Grévisse.
[33] CE, sect., 23 avril 1982, Ville de Toulouse c/Mme Aragnou, Rec. p. 151.
[34] CE, 27 mars 2000, Mme Brodbeck, n°155831, Rec. p. 129
[35] CE, ass, 1er juillet 1988, Billard et Volle, Rec. p. 268.
[36] CE, 18 juin 1997, Fédération syndicale S.U.D. des P.T.T., n°148727, Rec. p. 244
[37] CE, ass, 29 juin 2001, Berton, n° 222600, Rec. p. 296.
[38] CE, 2 octobre 2002, Chambre de commerce et d'industrie de Meurthe-et-Moselle, Rec. p. 319.
[39] CE, ass, 8 décembre 1978, Groupe d'information et de soutien des travailleurs immigrés, Rec. p. 493.
[40] CE, ass, 8 juillet 1994, Confédération générale du travail, Rec. p. 356.
[41] CE, 9 octobre 1996, Union nationale CGT des affaires sociales, Rec. p. 383
[42] Par exemple : aide sociale à l'enfance ou aide médicale d'Etat.
[43] Voir notamment Alain Supiot, L'avenir d'un vieux couple : travail et sécurité sociale, op. cit. idem.
[44] Conseil d'Etat, Le contrat, mode d'action publique et de production de normes, rapport public 2008.
[45] Code du travail, article L. 1 : « Tout projet de réforme envisagé par le Gouvernement qui porte sur les relations individuelles et collectives du travail, l'emploi et la formation professionnelle et qui relève du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle fait l'objet d'une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel en vue de l'ouverture éventuelle d'une telle négociation ».
[46] Conseil d'Etat, rapport public 2008, op. cit. idem, p. 135.
[47] CE, 11 mars 2009, Fédération des syndicats solidaires, unitaires et démocratiques - PTT, n°303396, à publier au rec., à propos des dispositions d'un décret renvoyant à une convention ou à un accord collectif le choix de recourir à un mode de décompte de la durée du travail effectué par les salariés entrant dans son champ d'application et de déterminer les modalités de contrôle des heures de travail, mais qui ne précisait pas les conditions dans lesquelles cette détermination devait intervenir. A rapprocher, par exemple, de la décision du Conseil constitutionnel n° 98-402 DC du 25 juin 1998, loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier : en renvoyant à un accord collectif le soin de déterminer le niveau et les modalités des réductions de salaires, sans en fixer le montant maximal, le législateur n'a pas méconnu la compétence qu'il tient de l'article 34 de la Constitution, s'agissant de la détermination des principes fondamentaux du droit du travail.
[48] Parmi de nombreux exemples, peuvent être cités les organismes créés en 2005 et mentionnés au rapport public de 2006 (pp. 107-108) : modification des pouvoirs de la HALDE, création de l'Agence de biomédecine, de l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire, transformation en société anonyme du « Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies », création de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, du Comité national de santé publique, et transformation du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, érigé en autorité administrative indépendante. Ou encore : création de la Caisse de retraite du personnel de la RATP et de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
[49] CE, ass., 13 mai 1938, Caisse primaire aide et protection, Rec. p. 417.
[50] 5 mai 1976, rec. p. 232, précité.
[51] Sur ce point, voir notamment le commentaire de la décision aux Grands arrêts de la jurisprudence administrative. Dalloz, 17ème édition, n°87, p. 592 et suivantes.
[52] CE ass, 1er février 1980, Ministre du travail c/ Société des peintures Corona, Rec p. 59.
[53] Loi du 4 août 1982 (article L 1321-3-2° du code du travail sur le contrôle du règlement intérieur des entreprises) et loi du 31 décembre 1992 (article L 1121-1 du code du travail).
[54] CE, ass., 3 mars 2004, consorts Thomas et consorts Botella, n°s 241151 et 241152, Rec. p. 127.
[55] Voir, par exemple, CE, 24 juillet 2009, Société BASF Agro, n° 316013, à mentionner aux tables du Recueil.
[56] L'abandon, par la Cour de cassation, de la possibilité de résiliation judiciaire du contrat de travail des salariés protégés du fait des arrêts dits « Perrier » de 1974 n'est ainsi pas étranger à l'évolution du contrôle du juge administratif issu l'arrêt du Conseil d'Etat de 1976 SAFER d'Auvergne.
[57] Sur ces points, voir Laurence Pécaut-Rivolier et Yves Struillou, Le licenciement pour motif disciplinaire des salariés protégés, Une partition à quatre mains, in Semaine sociale Lamy, n° 1329, 19 novembre 2007.
[58] CE section, 4 mars 1960, Société anonyme Le Peignage de Reims, rec. p. 168. Sur ce point, voir les conclusions d'Anne Courrèges sur CE, 21 mai 2008, Société nouvelle de remorquage du havre et Société de remorquage maritime de Rouen, n°s 291115,291210 et 291247, à mentionner aux tables du Recueil.
[59] CC, décision n°2003-483 DC du 14 août 2003, Loi portant réforme des retraites.
[60] C. Cass, Civ. 2e , 19 février 2009, n° 07-20.668
[61] Par exemple CE 16 juin 2008, Association La Cimade, Rec. p. 218 : incompatibilité du second alinéa du I de l'article L. 351-9 du code du travail excluant certains demandeurs d'asile du bénéfice de l'allocation temporaire d'attente avec les articles 2 et 13 de la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003, prévoyant que les demandeurs d'asile ont droit, dès le dépôt de leur demande, à une allocation journalière et à des conditions matérielles d'accueil et incompatibilité des dispositions de l'article R. 351-7 du code du travail limitant, pour les bénéficiaires de la protection subsidiaire, l'allocation temporaire d'attente à une durée maximale de douze avec l'article 28 de la directive 2004/83/CE du 29 avril 2004 prévoyant que les Etats membres peuvent limiter l'assistance sociale aux bénéficiaires de la protection subsidiaire aux « prestations essentielles ». Voir également CE 28 avril 2006, Dellas et autres, Rec. p. 206 : annulation partielle du décret du 31 décembre 2001 instituant une durée d'équivalence de la durée légale du travail dans les établissements sociaux et médico-sociaux gérés par des personnes privées à but non lucratif, en tant qu'il ne fixe pas les limites dans lesquelles doit être mis en œuvre le régime pour garantir le respect des seuils et plafonds communautaires prévus par la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993. Ou encore CE sect 8 novembre 1996, Fédération française des sociétés d'assurance, Rec. p. 441 : annulation du décret du 26 novembre 1990 confiant à la Caisse nationale d'assurance vieillesse agricole la gestion du régime complémentaire d'assurance vieillesse institué par l'article 42 de la loi du 30 décembre 1988, au motif que la désignation d'un gestionnaire unique pour la gestion de ce régime complémentaire facultatif, regardé comme une activité d'entreprise au sens des dispositions des article 85 et suivants du traité instituant la Communauté européenne, confère à celui-ci un droit exclusif qui le conduit nécessairement à abuser de la position dominante qu'il détient de ce fait sur le marché considéré.
[62] CE sect., 23 avril 1997, GISTI, Rec. p. 142 avec les conclusions de R. Abraham, à propos des stipulations de l'article 4-1 de la convention n° 118 de l'OIT, ou encore CE 11 janvier 2002, Union nationale des affaires sociales CGT et autres, Rec. p. 2, à propos de l'article 6 de la convention n°81 de l'OIT.
[63] Notamment, tel qu'il est rappelé par le paragraphe 1 de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
[64] Loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
[65] Loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, article 86.
[66] Ordonnance n° 2005-1088 du 1er septembre 2005 relative à la composition et aux compétences de la Cour nationale et des tribunaux interrégionaux de la tarification sanitaire et sociale.
[67]Droit public et droit social, rapport de synthèse, op. cit.