Les 16 et 17 décembre 2019, en salle d'assemblée générale, le Comité d'histoire du Conseil d'État accueillera le colloque « Dommages de guerre et responsabilité de l'Etat pendant la Grande Guerre », organisé par l'Institut d'histoire du droit EA 2515 de l'Université Paris-Descartes et le CESICE (Centre d'études sur la sécurité internationale et les coopérations européennes) de l'Université de Grenoble-Alpes. Il questionnera la responsabilité de l'État au cours de la Première Guerre mondiale.
Le centenaire de la loi du 17 avril 1919 sur la réparation des dommages matériels causés par les faits de guerre dites « Chartes des sinistrés » permet de réfléchir, à l'époque contemporaine, aux relations entre les phénomènes de guerre et de violence collective et la responsabilité de l'État.
La Première Guerre mondiale marque, en effet, la reconnaissance générale d'une obligation de l'État vis-à-vis des sinistrés ayant subi des dommages physiques ou matériels à cause de la guerre. Deux lois, celles du 31 mars 1919 et du 17 avril 1919, indemnisent respectivement les dommages matériels et les dommages physiques subis par les Français, qu'ils soient civils ou militaires. Pendant longtemps, l'État avait été tenu irresponsable des faits de guerre : on estimait qu'ils résultaient d'un état de nécessité ou correspondaient à des cas de force majeure exonérant de toute responsabilité. Depuis le début du XXe siècle, à l'inverse, un processus continu étend les cas d'indemnisation par l'État des situations de crise ou de violence (guerre, attentats terroristes, émeutes) au nom de la solidarité nationale.
L'indemnisation, un champ d'étude riche mais peu exploité
Le colloque s'attachera à questionner l'apparition de la responsabilité de l'État dans la guerre ou les faits liés à une situation de guerre au sens large, au cours de la période 1914-1918, et ses conséquences ou les formes de sa mise en œuvre. Le colloque entend s'inscrire dans un champ d'études devenu important sur la Première Guerre mondiale : celui de la transition entre la guerre et la paix et du retour à la paix. Les recherches se sont multipliées sur les aspects humains de la démobilisation ou de la reconnaissance accordée aux soldats, comme aux victimes civiles ou aux réfugiés. La dimension architecturale ou économique de la reconstruction ou les conférences internationales préparatoires à la signature des traités de paix font aussi l'objet d'investigations nombreuses. Mais l'indemnisation des dommages de guerre reste, quant à elle, un domaine d'étude riche et peu exploité sur le plan juridique.
Il s'agit ainsi d'explorer selon quels principes, avec quels effets juridiques et selon quelles modalités d'indemnisation l'État est tenu responsable des violences de guerre au moment de la Première Guerre mondiale. Le développement de ces mécanismes révèle une tension entre enjeux individuels et collectifs. D'un côté, ils s'inscrivent dans une logique de juridicisation des réparations qui emprunte largement aux mécanismes du droit civil de la responsabilité et reconnaît (en France, mais aussi en Italie ou en Belgique) un droit individuel à réparation ; de l'autre, l'indemnisation est envisagée d'emblée comme la mise en œuvre d'une politique aux effets collectifs, qui engage l'ensemble de la communauté, déterminant par là même des modalités en partie distinctes de la responsabilité civile.
Informations pratiques :
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Le conseiller Collignon porte-drapeau du 46e régiment d’Infanterie, hiver 1914-1915.
Crédit photo : L’Illustration, édition du 27 mars 1915