Conseil d'État
N° 452716
ECLI:FR:CECHR:2023:452716.20230113
Mentionné aux tables du recueil Lebon
5ème - 6ème chambres réunies
Mme Ségolène Cavaliere, rapporteur
M. Maxime Boutron, rapporteur public
SAS BOULLOCHE, COLIN, STOCLET ET ASSOCIÉS ; CABINET ROUSSEAU, TAPIE, avocats
Lecture du vendredi 13 janvier 2023
Vu la procédure suivante :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 16 juin 2016 par laquelle la commission administrative paritaire départementale a rejeté sa demande de révision de sa notation et de son appréciation au titre de l'année 2015, ainsi que les décisions des 29 juin et 6 septembre 2016 par lesquelles le directeur du centre hospitalier Victor Dupouy d'Argenteuil a rejeté ses demandes de recours gracieux contre cette notation et cette appréciation. Par un jugement n° 1610389 du 12 février 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 19VE01306 du 18 mars 2021, la cour administrative d'appel de Versailles saisie de l'appel formé par Mme B..., a donné acté du désistement d'office de sa requête en application de l'article R. 612-5 du code de justice administrative.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 18 mai et 17 août 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge du centre hospitalier Victor Dupouy la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Ségolène Cavaliere, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Rousseau, Tapie, avocat de Mme B... et à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat du centre hospitalier d'Argenteuil.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A... B..., sage-femme des hôpitaux titulaire, exerçant au centre hospitalier Victor Dupouy d'Argenteuil (Val d'Oise), a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 16 juin 2016 par laquelle la commission administrative paritaire départementale a rejeté sa demande de révision de sa notation au titre de l'année 2015, ainsi que les décisions des 29 juin et 6 septembre 2016 par lesquelles le directeur du centre hospitalier a rejeté les recours gracieux formés contre cette notation. Par un jugement du 12 février 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
2. Il ressort des pièces de la procédure devant la cour administrative d'appel que Mme B... a relevé appel de ce jugement, par une requête introductive d'instance enregistrée le 15 avril 2019 au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles, annonçant la production d'un mémoire complémentaire et dont il lui a été accusé réception le 25 juin 2019. Par un courrier du 26 juin 2019 dont la requérante a accusé réception le même jour, le président de la septième chambre de la cour administrative d'appel a mis en demeure Mme B..., sur le fondement de l'article R. 612-5 du code de justice administrative, de produire ce mémoire complémentaire dans un délai de quinze jours, en précisant qu'à défaut, elle serait réputée s'être désistée. Aucun mémoire complémentaire n'a été produit à l'expiration du délai imparti, le vendredi 12 juillet 2019 à minuit. Le 14 juillet 2019, Mme B... a, faisant état de ses contraintes professionnelles, sollicité un délai supplémentaire d'un mois pour produire le mémoire complémentaire annoncé, qui lui a été accordé le 17 juillet suivant. Le mémoire complémentaire de la requérante ayant été enregistré le 19 août 2019, au greffe, la requête et ce mémoire ont été communiqués à la défense. Par un arrêt du 18 mars 2021, contre lequel Mme B... se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Versailles, faisant application de l'article R. 612-5 du code de justice administrative, a constaté que Mme B... devait être réputée s'être désistée de sa requête en l'absence de production du mémoire complémentaire dans le délai fixé initialement.
3. Aux termes de l'article R. 612-5 du code de justice administrative : " Devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, si le demandeur, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée, n'a pas produit le mémoire complémentaire dont il avait expressément annoncé l'envoi ou, dans les cas mentionnés au second alinéa de l'article R. 611-6, n'a pas rétabli le dossier, il est réputé s'être désisté ". Il en résulte que lorsque qu'un tribunal administratif ou une cour administrative d'appel choisit d'adresser une mise en demeure en application de ces dispositions, ce tribunal ou cette cour doit, à condition que l'intéressé ait annoncé expressément la production d'un mémoire complémentaire, qu'il ait reçu la mise en demeure prévue, qu'elle lui laisse un délai suffisant pour y répondre et l'informe des conséquences d'un défaut de réponse dans ce délai, constater le désistement d'office du requérant si celui-ci ne produit pas le mémoire complémentaire à l'expiration du délai fixé.
4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B... n'a pas produit le mémoire complémentaire, explicitement annoncé dans sa requête d'appel, à l'expiration du délai qui lui était imparti par la mise en demeure dont son conseil a reçu notification et qui l'informait des conséquences s'attachant au dépassement du délai. S'il a été accusé réception avec retard de cette requête par le greffe et si la mise en demeure, adressée le jour même de l'accusé de réception, ne comportait qu'un délai de quinze jours, cette mise en demeure ne peut être regardée, en l'espèce, comme ayant laissé à la requérante un délai insuffisant. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la cour aurait, par méconnaissance des dispositions de l'article R. 612-5 du code de justice administrative, entaché d'irrégularité son ordonnance.
5. En deuxième lieu, si, il est vrai que, saisie par le conseil de Mme B..., d'une demande de prolongation du délai initial de quinze jours pour produire le mémoire complémentaire, la cour y a fait droit en accordant un nouveau délai d'un mois puis a communiqué l'ensemble de la procédure à la partie adverse dans le cadre de l'instruction, il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que cette demande de prolongation a été présentée après l'expiration du délai fixé initialement par la mise en demeure de telle sorte qu'à cette date, la requérante était déjà réputée s'être désistée d'office de sa requête du seul fait de l'expiration de ce premier délai. Dès lors, la requérante ne peut utilement invoquer cette prolongation du délai intervenue après l'expiration du délai qui lui était imparti pour contester l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel a constaté que Mme B... devait être réputée s'être désistée de sa requête.
7. En troisième lieu, n'ayant pas été, comme elle l'allègue, privée d'un accès au juge, Mme B... n'est pas, en tout état de cause, davantage pas fondée à soutenir que la cour aurait méconnu les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge du centre hospitalier Victor Dupouy qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme que demande le centre hospitalier Victor Dupouy, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de Mme B... est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier Victor Dupouy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et au centre hospitalier Victor Dupouy.
Délibéré à l'issue de la séance du 14 décembre 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva présidente de chambre, M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, conseillères d'Etat ; M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Ségolène Cavaliere, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.
Rendu le 13 janvier 2023.
Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
La rapporteure :
Signé : Mme Ségolène Cavaliere
Le secrétaire :
Signé : M. Bernard Longieras
N° 452716
ECLI:FR:CECHR:2023:452716.20230113
Mentionné aux tables du recueil Lebon
5ème - 6ème chambres réunies
Mme Ségolène Cavaliere, rapporteur
M. Maxime Boutron, rapporteur public
SAS BOULLOCHE, COLIN, STOCLET ET ASSOCIÉS ; CABINET ROUSSEAU, TAPIE, avocats
Lecture du vendredi 13 janvier 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 16 juin 2016 par laquelle la commission administrative paritaire départementale a rejeté sa demande de révision de sa notation et de son appréciation au titre de l'année 2015, ainsi que les décisions des 29 juin et 6 septembre 2016 par lesquelles le directeur du centre hospitalier Victor Dupouy d'Argenteuil a rejeté ses demandes de recours gracieux contre cette notation et cette appréciation. Par un jugement n° 1610389 du 12 février 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 19VE01306 du 18 mars 2021, la cour administrative d'appel de Versailles saisie de l'appel formé par Mme B..., a donné acté du désistement d'office de sa requête en application de l'article R. 612-5 du code de justice administrative.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 18 mai et 17 août 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge du centre hospitalier Victor Dupouy la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Ségolène Cavaliere, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Rousseau, Tapie, avocat de Mme B... et à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat du centre hospitalier d'Argenteuil.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A... B..., sage-femme des hôpitaux titulaire, exerçant au centre hospitalier Victor Dupouy d'Argenteuil (Val d'Oise), a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 16 juin 2016 par laquelle la commission administrative paritaire départementale a rejeté sa demande de révision de sa notation au titre de l'année 2015, ainsi que les décisions des 29 juin et 6 septembre 2016 par lesquelles le directeur du centre hospitalier a rejeté les recours gracieux formés contre cette notation. Par un jugement du 12 février 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
2. Il ressort des pièces de la procédure devant la cour administrative d'appel que Mme B... a relevé appel de ce jugement, par une requête introductive d'instance enregistrée le 15 avril 2019 au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles, annonçant la production d'un mémoire complémentaire et dont il lui a été accusé réception le 25 juin 2019. Par un courrier du 26 juin 2019 dont la requérante a accusé réception le même jour, le président de la septième chambre de la cour administrative d'appel a mis en demeure Mme B..., sur le fondement de l'article R. 612-5 du code de justice administrative, de produire ce mémoire complémentaire dans un délai de quinze jours, en précisant qu'à défaut, elle serait réputée s'être désistée. Aucun mémoire complémentaire n'a été produit à l'expiration du délai imparti, le vendredi 12 juillet 2019 à minuit. Le 14 juillet 2019, Mme B... a, faisant état de ses contraintes professionnelles, sollicité un délai supplémentaire d'un mois pour produire le mémoire complémentaire annoncé, qui lui a été accordé le 17 juillet suivant. Le mémoire complémentaire de la requérante ayant été enregistré le 19 août 2019, au greffe, la requête et ce mémoire ont été communiqués à la défense. Par un arrêt du 18 mars 2021, contre lequel Mme B... se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Versailles, faisant application de l'article R. 612-5 du code de justice administrative, a constaté que Mme B... devait être réputée s'être désistée de sa requête en l'absence de production du mémoire complémentaire dans le délai fixé initialement.
3. Aux termes de l'article R. 612-5 du code de justice administrative : " Devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, si le demandeur, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée, n'a pas produit le mémoire complémentaire dont il avait expressément annoncé l'envoi ou, dans les cas mentionnés au second alinéa de l'article R. 611-6, n'a pas rétabli le dossier, il est réputé s'être désisté ". Il en résulte que lorsque qu'un tribunal administratif ou une cour administrative d'appel choisit d'adresser une mise en demeure en application de ces dispositions, ce tribunal ou cette cour doit, à condition que l'intéressé ait annoncé expressément la production d'un mémoire complémentaire, qu'il ait reçu la mise en demeure prévue, qu'elle lui laisse un délai suffisant pour y répondre et l'informe des conséquences d'un défaut de réponse dans ce délai, constater le désistement d'office du requérant si celui-ci ne produit pas le mémoire complémentaire à l'expiration du délai fixé.
4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B... n'a pas produit le mémoire complémentaire, explicitement annoncé dans sa requête d'appel, à l'expiration du délai qui lui était imparti par la mise en demeure dont son conseil a reçu notification et qui l'informait des conséquences s'attachant au dépassement du délai. S'il a été accusé réception avec retard de cette requête par le greffe et si la mise en demeure, adressée le jour même de l'accusé de réception, ne comportait qu'un délai de quinze jours, cette mise en demeure ne peut être regardée, en l'espèce, comme ayant laissé à la requérante un délai insuffisant. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la cour aurait, par méconnaissance des dispositions de l'article R. 612-5 du code de justice administrative, entaché d'irrégularité son ordonnance.
5. En deuxième lieu, si, il est vrai que, saisie par le conseil de Mme B..., d'une demande de prolongation du délai initial de quinze jours pour produire le mémoire complémentaire, la cour y a fait droit en accordant un nouveau délai d'un mois puis a communiqué l'ensemble de la procédure à la partie adverse dans le cadre de l'instruction, il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que cette demande de prolongation a été présentée après l'expiration du délai fixé initialement par la mise en demeure de telle sorte qu'à cette date, la requérante était déjà réputée s'être désistée d'office de sa requête du seul fait de l'expiration de ce premier délai. Dès lors, la requérante ne peut utilement invoquer cette prolongation du délai intervenue après l'expiration du délai qui lui était imparti pour contester l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel a constaté que Mme B... devait être réputée s'être désistée de sa requête.
7. En troisième lieu, n'ayant pas été, comme elle l'allègue, privée d'un accès au juge, Mme B... n'est pas, en tout état de cause, davantage pas fondée à soutenir que la cour aurait méconnu les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge du centre hospitalier Victor Dupouy qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme que demande le centre hospitalier Victor Dupouy, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de Mme B... est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier Victor Dupouy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et au centre hospitalier Victor Dupouy.
Délibéré à l'issue de la séance du 14 décembre 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva présidente de chambre, M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, conseillères d'Etat ; M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Ségolène Cavaliere, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.
Rendu le 13 janvier 2023.
Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
La rapporteure :
Signé : Mme Ségolène Cavaliere
Le secrétaire :
Signé : M. Bernard Longieras