Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 434805, lecture du 7 octobre 2021, ECLI:FR:CECHR:2021:434805.20211007

Décision n° 434805
7 octobre 2021
Conseil d'État

N° 434805
ECLI:FR:CECHR:2021:434805.20211007
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
M. Olivier Guiard, rapporteur
Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public
CABINET BRIARD, avocats


Lecture du jeudi 7 octobre 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis respectivement au titre des années 2006 et 2007 et au titre de l'année 2007, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement no 1406128 du 20 juin 2017, le tribunal a constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions formées par M. et Mme A... tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2006 et rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Par un arrêt n° 17VE02891 du 25 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Versailles a prononcé la décharge partielle des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2007 et rejeté le surplus des conclusions de l'appel formé par les contribuables contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 24 septembre et 20 décembre 2019 et le 18 décembre 2020 au secrétariat du Conseil d'Etat, M. et Mme A... demandent au Conseil d'État :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 septembre 2021 présentée pour M. et Mme A....


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Guiard, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Briard, avocat de M. et Mme A... ;


Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le 19 décembre 2007, M. A... a cédé les titres de la société en nom collectif (SNC) Sofinim Développement dont il détenait 99,9 % des parts. A la suite de la vérification, en 2008, de la comptabilité de la SNC Sofinim Développement, devenue la SNC CGPI, portant sur les exercices clos en 2006 et 2007, l'administration fiscale a rehaussé les résultats imposables de la société au titre de ces deux exercices. Par une proposition de rectification en date du 12 janvier 2010, l'administration a, d'une part, tiré les conséquences de cette vérification en rehaussant les revenus imposables de M. et Mme A... dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et, d'autre part, remis en cause l'exonération de la plus-value réalisée en 2007 par M. A... à l'occasion de la cession des titres de la SNC, dont il s'était prévalu sur le fondement de l'article 151 septies du code général des impôts. Par un jugement du 20 juin 2017, le tribunal administratif de Versailles a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions formées par M. et Mme A... tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu correspondant à la part des bénéfices rectifiés de la SNC qui avait été réintégrée dans leurs revenus imposables et rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge des suppléments d'imposition correspondant à la remise en cause de l'exonération de la plus-value de cession de titres réalisée en 2007. M. et Mme A... doivent être regardés comme demandant l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 25 juillet 2019 en tant qu'il rejette ces dernières conclusions.

2. Aux termes de l'article 151 septies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - (...) les dispositions du présent article s'appliquent aux activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales ou agricoles, exercées à titre professionnel. (...) / II. - Les plus-values de cession soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies (...) et réalisées dans le cadre d'une des activités mentionnées au I sont, à condition que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans, exonérées pour : / 1° La totalité de leur montant lorsque les recettes annuelles sont inférieures ou égales à : / a) 250 000 euros s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement ou s'il s'agit d'entreprises exerçant une activité agricole ; / b) 90 000 euros s'il s'agit d'autres entreprises ou de titulaires de bénéfices non commerciaux ; / 2° Une partie de leur montant lorsque les recettes (...) sont supérieures à 90 000 euros et inférieures à 126 000 euros, pour les entreprises mentionnées au b du 1°. (...) / IV. - Le montant des recettes annuelles s'entend de la moyenne des recettes, appréciées hors taxes, réalisées au titre des exercices clos, ramenés le cas échéant à douze mois, au cours des deux années civiles qui précèdent l'exercice de réalisation des plus-values. (...) / Lorsque le contribuable exerce plusieurs activités, il est tenu compte du montant total des recettes réalisées dans l'ensemble de ces activités. / Il est également tenu compte des recettes réalisées par les sociétés mentionnées aux articles 8 et 8 ter et les groupements non soumis à l'impôt sur les sociétés dont il est associé ou membre, à proportion de ses droits dans les bénéfices de ces sociétés et groupements. / Pour l'application des troisième et quatrième alinéas, la globalisation des recettes est effectuée par catégorie de revenus ".

3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour remettre en cause l'exonération d'impôt prévue par les dispositions précitées du b) du 1° du II de l'article 151 septies du code général des impôts, dont M. A... s'était prévalu à l'occasion de la cession des parts qu'il détenait dans la SNC Sofinim Développement, l'administration fiscale s'est fondée sur des éléments recueillis à l'occasion de la vérification de la comptabilité de cette société, dont il ressortait que, compte tenu d'honoraires non facturés au titre de l'année 2006 et de produits comptabilisés à tort au titre d'un autre exercice, la moyenne des recettes que celle-ci avait réalisées au titre des années 2005 et 2006, et par suite, la quote-part de ces recettes perçue par M. A..., excédait les seuils fixés par cet article pour bénéficier de l'exonération.

4. Après avoir relevé ces éléments, la cour a jugé que la remise en cause de l'exonération de la plus-value que M. A... avait réalisée en 2007 ne procédait pas directement du rehaussement des résultats de la société, imposable entre les mains de M. A... en sa qualité d'associé de la société soumise au régime des sociétés de personnes prévu à l'article 8 du code général des impôts, mais de l'utilisation, par l'administration fiscale, pour apprécier si la condition de seuils à laquelle était subordonnée l'exonération de plus-value dont se prévalait à titre personnel M. A... sur le fondement de l'article 151 septies du même code était satisfaite, d'informations sur le montant du chiffre d'affaires de la SNC recueillies lors de la vérification de sa comptabilité.

5. La cour a ensuite jugé que l'irrégularité de la procédure d'imposition menée à l'encontre de la SNC Sofinim Développement, qui résultait de l'absence de réponse donnée à sa demande de saisine de l'interlocuteur départemental, n'était pas de nature à rendre illégale, au regard de la garantie des droits consacrée par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'utilisation des éléments comptables recueillis par l'administration fiscale au cours des opérations de contrôle menées à l'égard de cette société et pris en compte pour remettre en cause l'avantage fiscal dont se prévalait M. A....

6. En jugeant, dans ces conditions, que l'irrégularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre de la SNC Sofinim Développement était demeurée sans incidence sur la régularité de la procédure distincte suivie à l'encontre de M. et Mme A..., lesquels ont d'ailleurs eu la possibilité, dans le cadre de la procédure qui les concernait, de contester le bien-fondé du rehaussement des résultats de la société ayant conduit à la remise en cause de l'exonération de plus-value dont ils s'étaient prévalus, la cour, qui a fait une exacte application du principe d'indépendance des procédures, n'a pas commis d'erreur de droit.

7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.


D E C I D E :
--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme A... est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.



Voir aussi