Conseil d'État
N° 440013
ECLI:FR:CECHR:2021:440013.20210716
Mentionné aux tables du recueil Lebon
8ème - 3ème chambres réunies
M. Jean-Marc Vié, rapporteur
Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public
SCP WAQUET, FARGE, HAZAN, avocats
Lecture du vendredi 16 juillet 2021
Vu la procédure suivante :
M. D... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge de l'amende infligée à la SAS Bati A... sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, pour le paiement solidaire de laquelle il est poursuivi en sa qualité de gérant de cette société. Par un jugement n° 1704172 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 18VE03996 du 5 mars 2020, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur l'appel de M. A..., annulé ce jugement et prononcé la décharge de la pénalité en litige.
Par un pourvoi, enregistré le 8 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A... ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 juillet 2021, présentée par M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la société par actions simplifiée Bati A... qui a porté, pour ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, sur l'exercice clos en 2010 et, pour ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 30 octobre 2009 au 31 décembre 2010, l'administration fiscale a rehaussé les bénéfice de cette société à concurrence de 89 215 euros et a estimé que ce supplément de bénéfice constituait un revenu réputé distribué, taxable à l'impôt sur le revenu entre les mains de son bénéficiaire dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Faute d'avoir révélé l'identité du bénéficiaire de cette somme, comme l'y avait invitée l'administration en application de l'article 117 du code général des impôts, la société Bati A... s'est vue infliger l'amende prévue à l'article 1759 du même code par un avis de mise en recouvrement émis le 10 avril 2012. En l'absence de paiement de cette amende, l'administration a émis, le 5 février 2016, un second avis de mise en recouvrement au nom de M. A..., en sa qualité de gérant tenu solidairement au paiement de cette pénalité en vertu du 3 du V de l'article 1754 du code général des impôts. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 mars 2020 par lequel la cour administrative de Versailles a, sur l'appel de M. A..., annulé le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 2 octobre 2018 et prononcé la décharge de cette amende.
2. Aux termes de l'article L. 252 du livre des procédures fiscales : " Le recouvrement des impôts est confié aux comptables publics compétents par arrêté du ministre chargé du budget (...) ". Selon les dispositions de l'article L. 256 du même livre : " (...) L'avis de mise en recouvrement est individuel. Il est signé et rendu exécutoire par l'autorité administrative désignée par décret. Les pouvoirs de l'autorité administrative susmentionnée sont également exercés par le comptable public compétent. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article L. 257 A du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " Les avis de mises en recouvrement peuvent être signés et rendus exécutoires et les mises en demeure de payer peuvent être signées, sous l'autorité et la responsabilité du comptable public compétent, par les agents du service ayant reçu délégation. "
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme C... B..., contrôleuse des finances publiques, a signé l'avis de mise en recouvrement du 10 avril 2012 adressé à la société Bati A... en vertu d'une délégation de signature qui lui a été donnée par un arrêté du chef du service comptable du service des impôts des entreprises de Bobigny du 1er mars 2012, dont l'article 2 précisait qu'il ferait l'objet d'un affichage dans les locaux de ce service. Cette disposition de l'arrêté relative à ses modalités de publication permettait de présumer de ce que l'affichage qu'il prescrivait avait été effectivement mis en oeuvre. Par suite, en jugeant que l'administration ne pouvait être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombait, de ce que la signataire de l'avis de mise en recouvrement en litige disposait d'une délégation de signature régulièrement publiée, alors que M. A... s'était borné, devant les juges du fond, à contester la réalité de l'affichage de cet acte sans assortir ses allégations d'aucun élément de nature à renverser cette présomption, la cour a commis une erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 5 mars 2020 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à M. D... A....
N° 440013
ECLI:FR:CECHR:2021:440013.20210716
Mentionné aux tables du recueil Lebon
8ème - 3ème chambres réunies
M. Jean-Marc Vié, rapporteur
Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public
SCP WAQUET, FARGE, HAZAN, avocats
Lecture du vendredi 16 juillet 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. D... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge de l'amende infligée à la SAS Bati A... sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, pour le paiement solidaire de laquelle il est poursuivi en sa qualité de gérant de cette société. Par un jugement n° 1704172 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 18VE03996 du 5 mars 2020, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur l'appel de M. A..., annulé ce jugement et prononcé la décharge de la pénalité en litige.
Par un pourvoi, enregistré le 8 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A... ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 juillet 2021, présentée par M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la société par actions simplifiée Bati A... qui a porté, pour ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, sur l'exercice clos en 2010 et, pour ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 30 octobre 2009 au 31 décembre 2010, l'administration fiscale a rehaussé les bénéfice de cette société à concurrence de 89 215 euros et a estimé que ce supplément de bénéfice constituait un revenu réputé distribué, taxable à l'impôt sur le revenu entre les mains de son bénéficiaire dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Faute d'avoir révélé l'identité du bénéficiaire de cette somme, comme l'y avait invitée l'administration en application de l'article 117 du code général des impôts, la société Bati A... s'est vue infliger l'amende prévue à l'article 1759 du même code par un avis de mise en recouvrement émis le 10 avril 2012. En l'absence de paiement de cette amende, l'administration a émis, le 5 février 2016, un second avis de mise en recouvrement au nom de M. A..., en sa qualité de gérant tenu solidairement au paiement de cette pénalité en vertu du 3 du V de l'article 1754 du code général des impôts. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 mars 2020 par lequel la cour administrative de Versailles a, sur l'appel de M. A..., annulé le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 2 octobre 2018 et prononcé la décharge de cette amende.
2. Aux termes de l'article L. 252 du livre des procédures fiscales : " Le recouvrement des impôts est confié aux comptables publics compétents par arrêté du ministre chargé du budget (...) ". Selon les dispositions de l'article L. 256 du même livre : " (...) L'avis de mise en recouvrement est individuel. Il est signé et rendu exécutoire par l'autorité administrative désignée par décret. Les pouvoirs de l'autorité administrative susmentionnée sont également exercés par le comptable public compétent. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article L. 257 A du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " Les avis de mises en recouvrement peuvent être signés et rendus exécutoires et les mises en demeure de payer peuvent être signées, sous l'autorité et la responsabilité du comptable public compétent, par les agents du service ayant reçu délégation. "
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme C... B..., contrôleuse des finances publiques, a signé l'avis de mise en recouvrement du 10 avril 2012 adressé à la société Bati A... en vertu d'une délégation de signature qui lui a été donnée par un arrêté du chef du service comptable du service des impôts des entreprises de Bobigny du 1er mars 2012, dont l'article 2 précisait qu'il ferait l'objet d'un affichage dans les locaux de ce service. Cette disposition de l'arrêté relative à ses modalités de publication permettait de présumer de ce que l'affichage qu'il prescrivait avait été effectivement mis en oeuvre. Par suite, en jugeant que l'administration ne pouvait être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombait, de ce que la signataire de l'avis de mise en recouvrement en litige disposait d'une délégation de signature régulièrement publiée, alors que M. A... s'était borné, devant les juges du fond, à contester la réalité de l'affichage de cet acte sans assortir ses allégations d'aucun élément de nature à renverser cette présomption, la cour a commis une erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 5 mars 2020 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à M. D... A....