Conseil d'État
N° 426962
ECLI:FR:CEFSP:2021:426962.20210712
Mentionné aux tables du recueil Lebon
Formation spécialisée
M. Thomas Andrieu, rapporteur
Mme Cécile Barrois De Sarigny, rapporteur public
Lecture du lundi 12 juillet 2021
Vu la procédure suivante :
Par une requête, un mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 janvier 2019, 25 février 2019 et 15 juillet 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 30 novembre 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé l'accès aux données susceptibles de le concerner figurant dans le fichier des personnes recherchées (FPR) ;
2°) d'enjoindre au ministre de lui communiquer ces données et de procéder à leur effacement ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive 2016/680 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
- le décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 ;
- le décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 ;
- le décret n° 2019-536 du 29 mai 2019 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une séance à huis-clos, d'une part, M. A... B... et d'autre part, le ministre de l'intérieur et la Commission nationale de l'informatique et des libertés, qui ont été mis à même de prendre la parole avant les conclusions ;
Et après avoir entendu en séance :
- le rapport de M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat ;
- et, hors la présence des parties, les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. En vertu de l'article 31 de la loi du 6 janvier 1978, les traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre pour le compte de l'Etat et intéressant la sûreté de l'Etat, la défense ou la sécurité publique sont autorisés par arrêté du ou des ministres compétents, pris après avis motivé de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), publié avec l'arrêté autorisant le traitement. Ceux de ces traitements qui portent sur des données mentionnées au I de l'article 6 de la même loi doivent être autorisés par décret en Conseil d'Etat pris après avis motivé de la Commission, publié avec ce décret. Un décret en Conseil d'Etat peut dispenser de publication l'acte réglementaire autorisant la mise en oeuvre de ces traitements. Le sens de l'avis émis par la CNIL est alors publié avec ce décret.
2. L'article L. 841-2 du code de la sécurité intérieure prévoit que le Conseil d'Etat est compétent pour connaître, dans les conditions prévues au chapitre III bis du titre VII du livre VII du code de justice administrative, des requêtes concernant la mise en oeuvre de l'article 41 devenu l'article 118 de la loi du 6 janvier 1978, pour les traitements ou parties de traitements intéressant la sûreté de l'Etat dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. En vertu de l'article R. 841-2 du même code, figurent notamment au nombre de ces traitements le fichier des personnes recherchées (FPR), pour les seules données intéressant la sûreté de l'Etat mentionnées au 8° du III de l'article 2 du décret du 28 mai 2010 susvisé.
3. L'article L. 773-8 du code de justice administrative dispose que, lorsqu'elle traite des requêtes relatives à la mise en oeuvre de l'article 41 devenu l'article 118 de la loi du 6 janvier 1978 : " la formation de jugement se fonde sur les éléments contenus, le cas échéant, dans le traitement sans les révéler ni révéler si le requérant figure ou non dans le traitement. Toutefois, lorsqu'elle constate que le traitement ou la partie de traitement faisant l'objet du litige comporte des données à caractère personnel le concernant qui sont inexactes, incomplètes, équivoques ou périmées, ou dont la collecte, l'utilisation, la communication ou la conservation est interdite, elle en informe le requérant, sans faire état d'aucun élément protégé par le secret de la défense nationale. Elle peut ordonner que ces données soient, selon les cas, rectifiées, mises à jour ou effacées. Saisie de conclusions en ce sens, elle peut indemniser le requérant ". L'article R. 773-20 du même code précise que : " Le défendeur indique au Conseil d'Etat, au moment du dépôt de ses mémoires et pièces, les passages de ses productions et, le cas échéant, de celles de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, qui sont protégés par le secret de la défense nationale. / Les mémoires et les pièces jointes produits par le défendeur et, le cas échéant, par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement sont communiqués au requérant, à l'exception des passages des mémoires et des pièces qui, soit comportent des informations protégées par le secret de la défense nationale, soit confirment ou infirment la mise en oeuvre d'une technique de renseignement à l'égard du requérant, soit divulguent des éléments contenus dans le traitement de données, soit révèlent que le requérant figure ou ne figure pas dans le traitement. / Lorsqu'une intervention est formée, le président de la formation spécialisée ordonne, s'il y a lieu, que le mémoire soit communiqué aux parties, et à la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, dans les mêmes conditions et sous les mêmes réserves que celles mentionnées à l'alinéa précédent ".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a saisi le ministre de l'intérieur afin de pouvoir accéder aux données susceptibles de le concerner figurant dans le traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé FPR. M. B... demande l'annulation du refus du ministre de l'intérieur de lui donner accès aux données susceptibles de le concerner et figurant dans le fichier litigieux et d'enjoindre au ministre de les lui communiquer.
5. En premier lieu, les traitements ou parties de traitements intéressant la sûreté de l'Etat mentionnés par l'article L. 841-2 du code de la sécurité intérieure relèvent des seuls titres I et IV de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment de ses articles 116 à 120, et sont hors champ d'application de la directive du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d'enquêtes et de poursuites en la matière ou d'exécution de sanctions pénales, et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la décision-cadre 2008/977/JAI du Conseil. Il en résulte que les moyens tirés de la méconnaissance par le titre III de la loi du 6 janvier 1978 des dispositions de cette directive du 27 avril 2016 ne peuvent être utilement soulevés à l'appui d'une contestation relative à un des traitements ou parties de traitements intéressant la sûreté de l'Etat mentionnés à l'article L. 841-2 du code de la sécurité intérieure. Il en résulte également que les moyens tirés de la méconnaissance des droits garantis à la personne concernée par le titre III de de la loi du 6 janvier 1978 ne sont pas invocables au soutien d'une demande d'accès, de rectification ou d'effacement de données figurant dans ces traitements ou parties de traitements intéressant la sûreté de l'Etat.
6. En deuxième lieu, il résulte des termes mêmes de l'article 9 du décret du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées que le moyen tiré de ce que les restrictions d'accès aux données n'étaient pas prévues par l'acte autorisant le traitement, comme l'exige le septième alinéa du I de l'article 10 de la loi 78-17, manque en fait.
7. En troisième lieu, les dispositions de l'article 118 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés font obstacle à ce que le ministre de l'intérieur indique à la personne qui demande l'accès aux informations contenues dans les traitements relevant de l'article L. 841-2 du code de la sécurité intérieure les raisons pour lesquelles la communication des informations le concernant susceptibles de figurer au FPR compromettrait les finalités du fichier, la sûreté de l'Etat, la sécurité publique ou la défense nationale. Il appartient en revanche au Conseil d'Etat, saisi en sa formation spécialisée, d'opérer cette vérification et d'ordonner, le cas échéant, la communication des informations non susceptibles de compromettre les finalités du fichier, la sûreté de l'Etat, la sécurité publique ou la défense nationale.
8. En dernier lieu, M. B... soutient que la collecte et la conservation des données le concernant, ainsi que les restrictions qui sont portées à l'exercice de son droit à la communication des informations le concernant, portent une atteinte au droit au respect de la vie privée au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce sens qu'aucune disposition ne limite la durée de conservation des données concernant les signalement relevant du 8° de l'article 2 du décret du 28 mai 2010. Toutefois, sont applicables au traitement de données ici en cause l'ensemble des garanties offertes par l'article 4 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, au nombre desquelles figure celle selon laquelle : " Les données à caractère personnel doivent être : / (...) 5° Conservées sous une forme permettant l'identification des personnes concernées pendant une durée n'excédant pas celle nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées ". En outre, aux termes de l'article 7 du décret du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées : " Les données à caractère personnel enregistrées dans le fichier sont effacées sans délai en cas (...) d'extinction du motif de l'inscription. " Il y a lieu, par suite, d'écarter le moyen tiré de ce que les règles applicables à la durée de conservation des données en cause violent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. Le ministre de l'intérieur et la CNIL ont communiqué au Conseil d'Etat, dans les conditions prévues à l'article R. 773-20 du code de justice administrative, les éléments susceptibles d'être relatifs à la situation de l'intéressé.
10. Il appartient à la formation spécialisée, créée par l'article L. 773-2 du code de justice administrative précité, saisie de conclusions dirigées contre le refus de communiquer les données relatives à une personne qui allègue être mentionnée dans un fichier figurant à l'article R. 841-2 du code de la sécurité intérieure, de vérifier, au vu des éléments qui lui ont été communiqués hors la procédure contradictoire, si le requérant figure ou non dans le fichier litigieux. Dans l'affirmative, il lui appartient d'apprécier si les données y figurant sont pertinentes au regard des finalités poursuivies par ce fichier, adéquates et proportionnées. Pour ce faire, elle peut relever d'office tout moyen ainsi que le prévoit l'article L. 773-5 du code de justice administrative. Lorsqu'il apparaît soit que le requérant n'est pas mentionné dans le fichier litigieux soit que les données à caractère personnel le concernant qui y figurent ne sont entachées d'aucune illégalité, la formation de jugement rejette les conclusions du requérant sans autre précision. Dans le cas où des informations relatives au requérant figurent dans le fichier litigieux et apparaissent entachées d'illégalité soit que les données à caractère personnel le concernant sont inexactes, incomplètes, équivoques ou périmées soit que leur collecte, leur utilisation, leur communication ou leur consultation est interdite, elle en informe le requérant sans faire état d'aucun élément protégé par le secret de la défense nationale. Cette circonstance, le cas échéant relevée d'office par le juge dans les conditions prévues à l'article R. 773-21 du code de justice administrative, implique nécessairement que l'autorité gestionnaire du fichier rétablisse la légalité en effaçant ou en rectifiant, dans la mesure du nécessaire, les données illégales. Dans pareil cas, doit être annulée la décision implicite refusant de procéder à un tel effacement ou à une telle rectification.
11. La formation spécialisée a procédé à l'examen des éléments fournis par le ministre et par la CNIL, laquelle a effectué les diligences qui lui incombent dans le respect des règles de compétence et de procédure applicables. Il résulte de cet examen, lequel s'est déroulé selon les modalités décrites au point précédent, qu'aucune illégalité n'a été révélée, Il s'ensuit que les conclusions de M. B..., y compris ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
N° 426962
ECLI:FR:CEFSP:2021:426962.20210712
Mentionné aux tables du recueil Lebon
Formation spécialisée
M. Thomas Andrieu, rapporteur
Mme Cécile Barrois De Sarigny, rapporteur public
Lecture du lundi 12 juillet 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête, un mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 janvier 2019, 25 février 2019 et 15 juillet 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 30 novembre 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé l'accès aux données susceptibles de le concerner figurant dans le fichier des personnes recherchées (FPR) ;
2°) d'enjoindre au ministre de lui communiquer ces données et de procéder à leur effacement ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive 2016/680 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
- le décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 ;
- le décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 ;
- le décret n° 2019-536 du 29 mai 2019 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une séance à huis-clos, d'une part, M. A... B... et d'autre part, le ministre de l'intérieur et la Commission nationale de l'informatique et des libertés, qui ont été mis à même de prendre la parole avant les conclusions ;
Et après avoir entendu en séance :
- le rapport de M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat ;
- et, hors la présence des parties, les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. En vertu de l'article 31 de la loi du 6 janvier 1978, les traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre pour le compte de l'Etat et intéressant la sûreté de l'Etat, la défense ou la sécurité publique sont autorisés par arrêté du ou des ministres compétents, pris après avis motivé de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), publié avec l'arrêté autorisant le traitement. Ceux de ces traitements qui portent sur des données mentionnées au I de l'article 6 de la même loi doivent être autorisés par décret en Conseil d'Etat pris après avis motivé de la Commission, publié avec ce décret. Un décret en Conseil d'Etat peut dispenser de publication l'acte réglementaire autorisant la mise en oeuvre de ces traitements. Le sens de l'avis émis par la CNIL est alors publié avec ce décret.
2. L'article L. 841-2 du code de la sécurité intérieure prévoit que le Conseil d'Etat est compétent pour connaître, dans les conditions prévues au chapitre III bis du titre VII du livre VII du code de justice administrative, des requêtes concernant la mise en oeuvre de l'article 41 devenu l'article 118 de la loi du 6 janvier 1978, pour les traitements ou parties de traitements intéressant la sûreté de l'Etat dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. En vertu de l'article R. 841-2 du même code, figurent notamment au nombre de ces traitements le fichier des personnes recherchées (FPR), pour les seules données intéressant la sûreté de l'Etat mentionnées au 8° du III de l'article 2 du décret du 28 mai 2010 susvisé.
3. L'article L. 773-8 du code de justice administrative dispose que, lorsqu'elle traite des requêtes relatives à la mise en oeuvre de l'article 41 devenu l'article 118 de la loi du 6 janvier 1978 : " la formation de jugement se fonde sur les éléments contenus, le cas échéant, dans le traitement sans les révéler ni révéler si le requérant figure ou non dans le traitement. Toutefois, lorsqu'elle constate que le traitement ou la partie de traitement faisant l'objet du litige comporte des données à caractère personnel le concernant qui sont inexactes, incomplètes, équivoques ou périmées, ou dont la collecte, l'utilisation, la communication ou la conservation est interdite, elle en informe le requérant, sans faire état d'aucun élément protégé par le secret de la défense nationale. Elle peut ordonner que ces données soient, selon les cas, rectifiées, mises à jour ou effacées. Saisie de conclusions en ce sens, elle peut indemniser le requérant ". L'article R. 773-20 du même code précise que : " Le défendeur indique au Conseil d'Etat, au moment du dépôt de ses mémoires et pièces, les passages de ses productions et, le cas échéant, de celles de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, qui sont protégés par le secret de la défense nationale. / Les mémoires et les pièces jointes produits par le défendeur et, le cas échéant, par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement sont communiqués au requérant, à l'exception des passages des mémoires et des pièces qui, soit comportent des informations protégées par le secret de la défense nationale, soit confirment ou infirment la mise en oeuvre d'une technique de renseignement à l'égard du requérant, soit divulguent des éléments contenus dans le traitement de données, soit révèlent que le requérant figure ou ne figure pas dans le traitement. / Lorsqu'une intervention est formée, le président de la formation spécialisée ordonne, s'il y a lieu, que le mémoire soit communiqué aux parties, et à la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, dans les mêmes conditions et sous les mêmes réserves que celles mentionnées à l'alinéa précédent ".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a saisi le ministre de l'intérieur afin de pouvoir accéder aux données susceptibles de le concerner figurant dans le traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé FPR. M. B... demande l'annulation du refus du ministre de l'intérieur de lui donner accès aux données susceptibles de le concerner et figurant dans le fichier litigieux et d'enjoindre au ministre de les lui communiquer.
5. En premier lieu, les traitements ou parties de traitements intéressant la sûreté de l'Etat mentionnés par l'article L. 841-2 du code de la sécurité intérieure relèvent des seuls titres I et IV de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment de ses articles 116 à 120, et sont hors champ d'application de la directive du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d'enquêtes et de poursuites en la matière ou d'exécution de sanctions pénales, et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la décision-cadre 2008/977/JAI du Conseil. Il en résulte que les moyens tirés de la méconnaissance par le titre III de la loi du 6 janvier 1978 des dispositions de cette directive du 27 avril 2016 ne peuvent être utilement soulevés à l'appui d'une contestation relative à un des traitements ou parties de traitements intéressant la sûreté de l'Etat mentionnés à l'article L. 841-2 du code de la sécurité intérieure. Il en résulte également que les moyens tirés de la méconnaissance des droits garantis à la personne concernée par le titre III de de la loi du 6 janvier 1978 ne sont pas invocables au soutien d'une demande d'accès, de rectification ou d'effacement de données figurant dans ces traitements ou parties de traitements intéressant la sûreté de l'Etat.
6. En deuxième lieu, il résulte des termes mêmes de l'article 9 du décret du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées que le moyen tiré de ce que les restrictions d'accès aux données n'étaient pas prévues par l'acte autorisant le traitement, comme l'exige le septième alinéa du I de l'article 10 de la loi 78-17, manque en fait.
7. En troisième lieu, les dispositions de l'article 118 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés font obstacle à ce que le ministre de l'intérieur indique à la personne qui demande l'accès aux informations contenues dans les traitements relevant de l'article L. 841-2 du code de la sécurité intérieure les raisons pour lesquelles la communication des informations le concernant susceptibles de figurer au FPR compromettrait les finalités du fichier, la sûreté de l'Etat, la sécurité publique ou la défense nationale. Il appartient en revanche au Conseil d'Etat, saisi en sa formation spécialisée, d'opérer cette vérification et d'ordonner, le cas échéant, la communication des informations non susceptibles de compromettre les finalités du fichier, la sûreté de l'Etat, la sécurité publique ou la défense nationale.
8. En dernier lieu, M. B... soutient que la collecte et la conservation des données le concernant, ainsi que les restrictions qui sont portées à l'exercice de son droit à la communication des informations le concernant, portent une atteinte au droit au respect de la vie privée au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce sens qu'aucune disposition ne limite la durée de conservation des données concernant les signalement relevant du 8° de l'article 2 du décret du 28 mai 2010. Toutefois, sont applicables au traitement de données ici en cause l'ensemble des garanties offertes par l'article 4 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, au nombre desquelles figure celle selon laquelle : " Les données à caractère personnel doivent être : / (...) 5° Conservées sous une forme permettant l'identification des personnes concernées pendant une durée n'excédant pas celle nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées ". En outre, aux termes de l'article 7 du décret du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées : " Les données à caractère personnel enregistrées dans le fichier sont effacées sans délai en cas (...) d'extinction du motif de l'inscription. " Il y a lieu, par suite, d'écarter le moyen tiré de ce que les règles applicables à la durée de conservation des données en cause violent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. Le ministre de l'intérieur et la CNIL ont communiqué au Conseil d'Etat, dans les conditions prévues à l'article R. 773-20 du code de justice administrative, les éléments susceptibles d'être relatifs à la situation de l'intéressé.
10. Il appartient à la formation spécialisée, créée par l'article L. 773-2 du code de justice administrative précité, saisie de conclusions dirigées contre le refus de communiquer les données relatives à une personne qui allègue être mentionnée dans un fichier figurant à l'article R. 841-2 du code de la sécurité intérieure, de vérifier, au vu des éléments qui lui ont été communiqués hors la procédure contradictoire, si le requérant figure ou non dans le fichier litigieux. Dans l'affirmative, il lui appartient d'apprécier si les données y figurant sont pertinentes au regard des finalités poursuivies par ce fichier, adéquates et proportionnées. Pour ce faire, elle peut relever d'office tout moyen ainsi que le prévoit l'article L. 773-5 du code de justice administrative. Lorsqu'il apparaît soit que le requérant n'est pas mentionné dans le fichier litigieux soit que les données à caractère personnel le concernant qui y figurent ne sont entachées d'aucune illégalité, la formation de jugement rejette les conclusions du requérant sans autre précision. Dans le cas où des informations relatives au requérant figurent dans le fichier litigieux et apparaissent entachées d'illégalité soit que les données à caractère personnel le concernant sont inexactes, incomplètes, équivoques ou périmées soit que leur collecte, leur utilisation, leur communication ou leur consultation est interdite, elle en informe le requérant sans faire état d'aucun élément protégé par le secret de la défense nationale. Cette circonstance, le cas échéant relevée d'office par le juge dans les conditions prévues à l'article R. 773-21 du code de justice administrative, implique nécessairement que l'autorité gestionnaire du fichier rétablisse la légalité en effaçant ou en rectifiant, dans la mesure du nécessaire, les données illégales. Dans pareil cas, doit être annulée la décision implicite refusant de procéder à un tel effacement ou à une telle rectification.
11. La formation spécialisée a procédé à l'examen des éléments fournis par le ministre et par la CNIL, laquelle a effectué les diligences qui lui incombent dans le respect des règles de compétence et de procédure applicables. Il résulte de cet examen, lequel s'est déroulé selon les modalités décrites au point précédent, qu'aucune illégalité n'a été révélée, Il s'ensuit que les conclusions de M. B..., y compris ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la Commission nationale de l'informatique et des libertés.