Conseil d'État
N° 426811
ECLI:FR:CECHR:2021:426811.20210322
Mentionné aux tables du recueil Lebon
4ème - 1ère chambres réunies
Mme Catherine Brouard-Gallet, rapporteur
M. Raphaël Chambon, rapporteur public
SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, avocats
Lecture du lundi 22 mars 2021
Vu les procédures suivantes :
1° Sous le n° 426811, par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 janvier, 4 avril et 27 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note de service du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse n° 2018-130 du 7 novembre 2018 relative aux règles et procédures du mouvement national à gestion déconcentrée des personnels enseignants du second degré pour la rentrée scolaire de septembre 2019 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 437585, par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 13 janvier et 13 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note de service du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse n° 2019-161 du 13 novembre 2019 relative à la mobilité des personnels enseignants du second degré, des personnels d'éducation et des psychologues de l'éducation nationale (règles et procédures du mouvement national à gestion déconcentrée) pour la rentrée scolaire de septembre 2020 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 ;
- la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 ;
- la loi n° 2019-1265 du 6 août 2019 ;
- le décret n° 2016-1969 du 28 décembre 2016 ;
- le décret n° 2018-303 du 25 avril 2018 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme B... D..., conseillère d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de M. C... ;
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes enregistrées sous les n°s 426811 et 437585, présentées par M. C..., tendent à l'annulation pour excès de pouvoir, respectivement, des notes de service du 7 novembre 2018 et du 13 novembre 2019 par lesquelles le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a défini, à l'intention des recteurs d'académie, les règles et procédures relatives au mouvement national à gestion déconcentrée des personnels enseignants du second degré pour les rentrées scolaires de septembre 2019 et de septembre 2020. Il y a lieu de joindre ces requêtes pour statuer par une seule décision.
Sur le cadre juridique :
2. En premier lieu, aux termes des premier, quatrième et dernier alinéas de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique, dans sa rédaction issue de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, applicable à la note de service du 7 novembre 2018 : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires.(...) / Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, aux fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité (...), aux fonctionnaires handicapés (...) et aux fonctionnaires qui exercent leurs fonctions, pendant une durée et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ainsi qu'aux fonctionnaires qui justifient du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie. (...) / (...) l'autorité compétente peut procéder à un classement préalable des demandes de mutation à l'aide d'un barème rendu public. Le recours à un tel barème constitue une mesure préparatoire et ne se substitue pas à l'examen de la situation individuelle des agents. Ce classement est établi dans le respect des priorités figurant au quatrième alinéa du présent article. Toutefois, l'autorité compétente peut édicter des lignes directrices par lesquelles elle définit, sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, des critères supplémentaires établis à titre subsidiaire dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ".
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 60 de la même loi dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, applicable à la note de service du 13 novembre 2019 : " I. - L'autorité compétente procède aux mutations des fonctionnaires en tenant compte des besoins du service. / II. - Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service et sous réserve des priorités instituées à l'article 62 bis, les affectations prononcées tiennent compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée : / 1° Au fonctionnaire séparé de son conjoint pour des raisons professionnelles, ainsi qu'au fonctionnaire séparé pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité s'il produit la preuve qu'ils se soumettent à l'obligation d'imposition commune prévue par le code général des impôts ; / 2° Au fonctionnaire en situation de handicap (...) ; / 3° Au fonctionnaire qui exerce ses fonctions, pendant une durée et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles ; / 4° Au fonctionnaire qui justifie du centre de ses intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ou en Nouvelle-Calédonie ; / 5° Au fonctionnaire, y compris relevant d'une autre administration, dont l'emploi est supprimé et qui ne peut être réaffecté sur un emploi correspondant à son grade dans son service. (...) ".
4. En troisième lieu, aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article 10 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction issue de l'article 28 de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires : " Pour répondre aux besoins propres à l'organisation de la gestion des corps enseignants, des corps de personnels d'éducation, de psychologues de l'éducation nationale, de personnels de direction des établissements d'enseignement et de personnels d'inspection relevant du ministère de l'éducation nationale et des corps relevant de statuts spéciaux, les statuts particuliers ajoutent aux priorités mentionnées au quatrième alinéa de l'article 60 des priorités liées notamment à la situation personnelle des fonctionnaires justifiant du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie. / Les conditions et modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". Le décret du 25 avril 2018, relatif aux priorités d'affectation des membres de certains corps mentionnés à l'article 10 de la loi du 11 janvier 1984, a inséré dans les statuts particuliers de plusieurs corps de personnels enseignants du second degré, les dispositions suivantes : " Pour prononcer les affectations, il est tenu compte, dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, des priorités prévues par l'article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat et, en outre, des critères de priorité suivants : / 1° La situation de l'agent qui sollicite un rapprochement avec le détenteur de l'autorité parentale conjointe dans l'intérêt de l'enfant ; / 2° La situation de l'agent affecté dans un territoire ou une zone rencontrant des difficultés particulières de recrutement ; / 3° La situation de l'agent affecté dans un emploi supprimé en raison d'une modification de la carte scolaire ; / 4° Le caractère répété d'une même demande de mutation ainsi que son ancienneté ; / 5° L'expérience et le parcours professionnel de l'agent. / Les demandes de mutation sont classées préalablement à l'aide d'un barème rendu public ". Ces dispositions sont applicables aux deux notes de service attaquées.
5. Enfin, aux termes de l'article 1er du décret du 28 décembre 2016 relatif à la procédure d'édiction des lignes directrices permettant le classement par l'administration des demandes de mutation des fonctionnaires de l'Etat, applicable aux deux notes de service attaquées : " Lorsque l'autorité compétente d'une administration ou d'un service mentionné au deuxième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée procède à un classement préalable des demandes de mutation à l'aide d'un barème, les lignes directrices mentionnées au sixième alinéa de ce même article peuvent fixer des critères supplémentaires qui ont un caractère subsidiaire par rapport aux priorités prévues au quatrième alinéa de ce même article (...) ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " Les lignes directrices mentionnées à l'article 1er précisent les modalités de prise en compte de chacune des priorités de mutation prévues au quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. / Elles peuvent également fixer des critères supplémentaires à caractère subsidiaire et déterminer les modalités de prise en compte de chacun de ces critères. / Lors du classement préalable des demandes de mutation, la prise en compte de l'un ou de plusieurs des critères subsidiaires mentionnés au deuxième alinéa ne peut conduire, à durée d'ancienneté inférieure ou égale, au dépassement d'une ou de plusieurs priorités prévues au quatrième alinéa de l'article 60 précité ".
6. Les critères supplémentaires que l'autorité administrative est habilitée à établir à titre subsidiaire en application des dispositions citées au point 5, en vue du classement préalable des demandes de mutation, ont pour objet de permettre le départage de demandes ayant obtenu un classement identique par application d'une ou plusieurs priorités de mutation fixées par l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et par le décret du 25 avril 2018, ainsi que le classement des demandes émanant d'agents ne pouvant se prévaloir d'aucune de ces priorités. Toutefois, dans ce dernier cas, en raison du caractère subsidiaire de ces critères supplémentaires, l'autorité administrative ne saurait légalement prévoir un système de cumul des points ayant pour effet que les demandes de ces agents précèdent, dans le classement établi en vue de l'examen des demandes de mutation, celles des agents relevant d'au moins une des priorités définies au quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et par le décret du 25 avril 2018.
Sur la requête n° 426811 :
7. En premier lieu, l'article 10 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction issue de l'article 28 de la loi du 20 avril 2016, a prévu que les statuts particuliers des corps de fonctionnaires qu'il mentionne, dont les enseignants de second degré, peuvent ajouter aux priorités de mutation fixées par le quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 d'autres critères de priorité de même niveau. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de ce que le décret du 25 avril 2018 aurait illégalement ajouté aux priorités de mutation fixées par l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 des critères de priorité de même niveau pour les corps enseignants auxquels il s'applique ne peut qu'être écarté.
8. En deuxième lieu, le critère tenant à l'expérience et au parcours professionnel de l'agent, fixé par le 5° des dispositions introduites dans les statuts particuliers de ces corps par le décret du 25 avril 2018, n'a ni pour objet ni pour effet de conférer un pouvoir d'appréciation discrétionnaire à l'administration, contrairement à ce que soutient M. C..., qui n'est ainsi pas fondé à soutenir que la note de service attaquée aurait été prise sur le fondement de dispositions entachées d'illégalité.
9. En troisième lieu, toutefois, la note attaquée prévoit, en son point II.5.1.D, qu'une bonification de cent cinquante points est attribuée au parent isolé et, en son point II.5.3.J, que les sportifs de haut niveau affectés à titre provisoire dans l'académie de leur intérêt sportif bénéficient d'une bonification de cinquante points par année successive d'affectation à titre provisoire pendant quatre ans. Ces dispositions ont pour effet, compte tenu du niveau de la bonification afférente à ces deux critères de priorités qui ne relèvent ni du quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ni du décret du 25 avril 2018, que les candidatures à la mutation de ces agents sont susceptibles de précéder dans le classement celle d'un candidat bénéficiant d'au moins l'une de ces dernières priorités. Dès lors, ces critères supplémentaires ne revêtent pas un caractère subsidiaire et méconnaissent, par suite, les dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et du décret du 25 avril 2018.
Sur la requête n° 437585 :
10. La note de service du 13 novembre 2019 prévoit, en ses points II.5.1.D et II.5.3.J, l'attribution des mêmes bonifications que la note de service du 7 novembre 2018 aux parents isolés et aux sportifs de haut niveau affectés à titre provisoire dans l'académie de leur intérêt sportif. Il en résulte également que les candidatures de ces agents sont susceptibles de précéder dans le classement la candidature d'agents bénéficiant d'au moins l'une des priorités fixées par l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et le décret du 25 avril 2018. Elle est, dès lors, entachée d'illégalité, pour les mêmes motifs.
11. Il résulte de tout ce qui précède que les règles et le barème fixés par les notes de service du 7 novembre 2018 et 13 novembre 2019 et mentionnés aux points 9 et 10 sont entachés d'illégalité. Ces dispositions n'étant pas divisibles des autres dispositions de ces notes de service, celles-ci doivent, pour ce motif et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des requêtes, être annulées dans leur ensemble.
12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : La note de service n° 2018-130 du 7 novembre 2018 et la note de service n° 2019-161 du 13 novembre 2019 du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sont annulées.
Article 2 : L'Etat versera à M. C... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
N° 426811
ECLI:FR:CECHR:2021:426811.20210322
Mentionné aux tables du recueil Lebon
4ème - 1ère chambres réunies
Mme Catherine Brouard-Gallet, rapporteur
M. Raphaël Chambon, rapporteur public
SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, avocats
Lecture du lundi 22 mars 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu les procédures suivantes :
1° Sous le n° 426811, par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 janvier, 4 avril et 27 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note de service du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse n° 2018-130 du 7 novembre 2018 relative aux règles et procédures du mouvement national à gestion déconcentrée des personnels enseignants du second degré pour la rentrée scolaire de septembre 2019 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 437585, par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 13 janvier et 13 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note de service du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse n° 2019-161 du 13 novembre 2019 relative à la mobilité des personnels enseignants du second degré, des personnels d'éducation et des psychologues de l'éducation nationale (règles et procédures du mouvement national à gestion déconcentrée) pour la rentrée scolaire de septembre 2020 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 ;
- la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 ;
- la loi n° 2019-1265 du 6 août 2019 ;
- le décret n° 2016-1969 du 28 décembre 2016 ;
- le décret n° 2018-303 du 25 avril 2018 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme B... D..., conseillère d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de M. C... ;
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes enregistrées sous les n°s 426811 et 437585, présentées par M. C..., tendent à l'annulation pour excès de pouvoir, respectivement, des notes de service du 7 novembre 2018 et du 13 novembre 2019 par lesquelles le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a défini, à l'intention des recteurs d'académie, les règles et procédures relatives au mouvement national à gestion déconcentrée des personnels enseignants du second degré pour les rentrées scolaires de septembre 2019 et de septembre 2020. Il y a lieu de joindre ces requêtes pour statuer par une seule décision.
Sur le cadre juridique :
2. En premier lieu, aux termes des premier, quatrième et dernier alinéas de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique, dans sa rédaction issue de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, applicable à la note de service du 7 novembre 2018 : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires.(...) / Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, aux fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité (...), aux fonctionnaires handicapés (...) et aux fonctionnaires qui exercent leurs fonctions, pendant une durée et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ainsi qu'aux fonctionnaires qui justifient du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie. (...) / (...) l'autorité compétente peut procéder à un classement préalable des demandes de mutation à l'aide d'un barème rendu public. Le recours à un tel barème constitue une mesure préparatoire et ne se substitue pas à l'examen de la situation individuelle des agents. Ce classement est établi dans le respect des priorités figurant au quatrième alinéa du présent article. Toutefois, l'autorité compétente peut édicter des lignes directrices par lesquelles elle définit, sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, des critères supplémentaires établis à titre subsidiaire dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ".
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 60 de la même loi dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, applicable à la note de service du 13 novembre 2019 : " I. - L'autorité compétente procède aux mutations des fonctionnaires en tenant compte des besoins du service. / II. - Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service et sous réserve des priorités instituées à l'article 62 bis, les affectations prononcées tiennent compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée : / 1° Au fonctionnaire séparé de son conjoint pour des raisons professionnelles, ainsi qu'au fonctionnaire séparé pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité s'il produit la preuve qu'ils se soumettent à l'obligation d'imposition commune prévue par le code général des impôts ; / 2° Au fonctionnaire en situation de handicap (...) ; / 3° Au fonctionnaire qui exerce ses fonctions, pendant une durée et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles ; / 4° Au fonctionnaire qui justifie du centre de ses intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ou en Nouvelle-Calédonie ; / 5° Au fonctionnaire, y compris relevant d'une autre administration, dont l'emploi est supprimé et qui ne peut être réaffecté sur un emploi correspondant à son grade dans son service. (...) ".
4. En troisième lieu, aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article 10 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction issue de l'article 28 de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires : " Pour répondre aux besoins propres à l'organisation de la gestion des corps enseignants, des corps de personnels d'éducation, de psychologues de l'éducation nationale, de personnels de direction des établissements d'enseignement et de personnels d'inspection relevant du ministère de l'éducation nationale et des corps relevant de statuts spéciaux, les statuts particuliers ajoutent aux priorités mentionnées au quatrième alinéa de l'article 60 des priorités liées notamment à la situation personnelle des fonctionnaires justifiant du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie. / Les conditions et modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". Le décret du 25 avril 2018, relatif aux priorités d'affectation des membres de certains corps mentionnés à l'article 10 de la loi du 11 janvier 1984, a inséré dans les statuts particuliers de plusieurs corps de personnels enseignants du second degré, les dispositions suivantes : " Pour prononcer les affectations, il est tenu compte, dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, des priorités prévues par l'article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat et, en outre, des critères de priorité suivants : / 1° La situation de l'agent qui sollicite un rapprochement avec le détenteur de l'autorité parentale conjointe dans l'intérêt de l'enfant ; / 2° La situation de l'agent affecté dans un territoire ou une zone rencontrant des difficultés particulières de recrutement ; / 3° La situation de l'agent affecté dans un emploi supprimé en raison d'une modification de la carte scolaire ; / 4° Le caractère répété d'une même demande de mutation ainsi que son ancienneté ; / 5° L'expérience et le parcours professionnel de l'agent. / Les demandes de mutation sont classées préalablement à l'aide d'un barème rendu public ". Ces dispositions sont applicables aux deux notes de service attaquées.
5. Enfin, aux termes de l'article 1er du décret du 28 décembre 2016 relatif à la procédure d'édiction des lignes directrices permettant le classement par l'administration des demandes de mutation des fonctionnaires de l'Etat, applicable aux deux notes de service attaquées : " Lorsque l'autorité compétente d'une administration ou d'un service mentionné au deuxième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée procède à un classement préalable des demandes de mutation à l'aide d'un barème, les lignes directrices mentionnées au sixième alinéa de ce même article peuvent fixer des critères supplémentaires qui ont un caractère subsidiaire par rapport aux priorités prévues au quatrième alinéa de ce même article (...) ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " Les lignes directrices mentionnées à l'article 1er précisent les modalités de prise en compte de chacune des priorités de mutation prévues au quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. / Elles peuvent également fixer des critères supplémentaires à caractère subsidiaire et déterminer les modalités de prise en compte de chacun de ces critères. / Lors du classement préalable des demandes de mutation, la prise en compte de l'un ou de plusieurs des critères subsidiaires mentionnés au deuxième alinéa ne peut conduire, à durée d'ancienneté inférieure ou égale, au dépassement d'une ou de plusieurs priorités prévues au quatrième alinéa de l'article 60 précité ".
6. Les critères supplémentaires que l'autorité administrative est habilitée à établir à titre subsidiaire en application des dispositions citées au point 5, en vue du classement préalable des demandes de mutation, ont pour objet de permettre le départage de demandes ayant obtenu un classement identique par application d'une ou plusieurs priorités de mutation fixées par l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et par le décret du 25 avril 2018, ainsi que le classement des demandes émanant d'agents ne pouvant se prévaloir d'aucune de ces priorités. Toutefois, dans ce dernier cas, en raison du caractère subsidiaire de ces critères supplémentaires, l'autorité administrative ne saurait légalement prévoir un système de cumul des points ayant pour effet que les demandes de ces agents précèdent, dans le classement établi en vue de l'examen des demandes de mutation, celles des agents relevant d'au moins une des priorités définies au quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et par le décret du 25 avril 2018.
Sur la requête n° 426811 :
7. En premier lieu, l'article 10 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction issue de l'article 28 de la loi du 20 avril 2016, a prévu que les statuts particuliers des corps de fonctionnaires qu'il mentionne, dont les enseignants de second degré, peuvent ajouter aux priorités de mutation fixées par le quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 d'autres critères de priorité de même niveau. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de ce que le décret du 25 avril 2018 aurait illégalement ajouté aux priorités de mutation fixées par l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 des critères de priorité de même niveau pour les corps enseignants auxquels il s'applique ne peut qu'être écarté.
8. En deuxième lieu, le critère tenant à l'expérience et au parcours professionnel de l'agent, fixé par le 5° des dispositions introduites dans les statuts particuliers de ces corps par le décret du 25 avril 2018, n'a ni pour objet ni pour effet de conférer un pouvoir d'appréciation discrétionnaire à l'administration, contrairement à ce que soutient M. C..., qui n'est ainsi pas fondé à soutenir que la note de service attaquée aurait été prise sur le fondement de dispositions entachées d'illégalité.
9. En troisième lieu, toutefois, la note attaquée prévoit, en son point II.5.1.D, qu'une bonification de cent cinquante points est attribuée au parent isolé et, en son point II.5.3.J, que les sportifs de haut niveau affectés à titre provisoire dans l'académie de leur intérêt sportif bénéficient d'une bonification de cinquante points par année successive d'affectation à titre provisoire pendant quatre ans. Ces dispositions ont pour effet, compte tenu du niveau de la bonification afférente à ces deux critères de priorités qui ne relèvent ni du quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ni du décret du 25 avril 2018, que les candidatures à la mutation de ces agents sont susceptibles de précéder dans le classement celle d'un candidat bénéficiant d'au moins l'une de ces dernières priorités. Dès lors, ces critères supplémentaires ne revêtent pas un caractère subsidiaire et méconnaissent, par suite, les dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et du décret du 25 avril 2018.
Sur la requête n° 437585 :
10. La note de service du 13 novembre 2019 prévoit, en ses points II.5.1.D et II.5.3.J, l'attribution des mêmes bonifications que la note de service du 7 novembre 2018 aux parents isolés et aux sportifs de haut niveau affectés à titre provisoire dans l'académie de leur intérêt sportif. Il en résulte également que les candidatures de ces agents sont susceptibles de précéder dans le classement la candidature d'agents bénéficiant d'au moins l'une des priorités fixées par l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et le décret du 25 avril 2018. Elle est, dès lors, entachée d'illégalité, pour les mêmes motifs.
11. Il résulte de tout ce qui précède que les règles et le barème fixés par les notes de service du 7 novembre 2018 et 13 novembre 2019 et mentionnés aux points 9 et 10 sont entachés d'illégalité. Ces dispositions n'étant pas divisibles des autres dispositions de ces notes de service, celles-ci doivent, pour ce motif et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des requêtes, être annulées dans leur ensemble.
12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : La note de service n° 2018-130 du 7 novembre 2018 et la note de service n° 2019-161 du 13 novembre 2019 du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sont annulées.
Article 2 : L'Etat versera à M. C... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.