Conseil d'État
N° 427163
ECLI:FR:CECHR:2020:427163.20200722
Publié au recueil Lebon
1ère - 4ème chambres réunies
M. Thibaut Félix, rapporteur
Mme Marie Sirinelli, rapporteur public
SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET, avocats
Lecture du mercredi 22 juillet 2020
Vu la procédure suivante :
Mlle A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 octobre 2013 par lequel le maire de La Queue-les-Yvelines a opposé un sursis à statuer de deux ans à sa demande de permis de construire une maison individuelle et un garage sur un terrain situé chemin du Roy et la décision implicite rejetant son recours gracieux contre cette décision. Par un jugement n° 1402316 du 21 novembre 2016, le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 17VE00223 du 22 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur l'appel de Mlle B..., annulé ce jugement, l'arrêté du 18 octobre 2013 et la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17janvier et 17 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de la Queue-les-Yvelines demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de Mlle B... ;
3°) de mettre à la charge de Mlle B... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thibaut Félix, auditeur,
- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de la commune de la Queue-les-Yvelines ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le conseil municipal de La Queue-les-Yvelines a, par une délibération du 23 mars 2009, prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme de la commune et, par une délibération du 10 juillet 2013, tiré le bilan de la concertation et arrêté le projet de plan local d'urbanisme. Le 18 octobre 2013, le maire a opposé un sursis à statuer pour une durée de deux ans à la demande de permis de construire présentée par Mlle B... le 26 août 2013 en vue de la construction d'une maison individuelle et d'un garage sur la parcelle cadastrée ZA 274. Par un jugement du 21 novembre 2016, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de Mlle B... tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 18 octobre 2013 ainsi que de la décision implicite rejetant son recours gracieux contre cette décision. La commune de La Queue-les-Yvelines se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 22 novembre 2018 par lequel de la cour administrative d'appel de Versailles, faisant droit à l'appel de Mlle B..., a annulé ce jugement, l'arrêté du 18 octobre 2013 et le rejet implicite du recours gracieux formé contre cet arrêté.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date du sursis à statuer en litige : " A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 111-8, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan ". Les articles L 111-7 et L. 111-8 de ce code, dans leur rédaction applicable à la même date, disposent que : " Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus par les articles (...) L. 123-6 (dernier alinéa) (...) du présent code (...) " et " Le sursis à statuer doit être motivé et ne peut excéder deux ans (...) ". Aux termes de l'article A. 424-4 du même code, lorsqu'il est sursis à statuer sur la demande de permis de construire : " (...) l'arrêté précise les circonstances de droit et de fait qui motivent la décision (...) ".
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'arrêté litigieux du 18 octobre 2013 se borne à viser le code de l'urbanisme dans son ensemble ainsi que la délibération du 23 mars 2009 prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme et à mentionner dans ses motifs que " l'opération projetée est de nature à compromettre ou à rendre plus onéreux l'exécution du plan local d'urbanisme ". En jugeant que ces éléments n'étaient pas de nature à mettre la destinataire de la décision à même d'identifier le texte dont elle faisait application et que la circonstance que la délibération du 23 mars 2009 ainsi visée vise elle-même, parmi de nombreux autres articles, l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme n'était pas de nature à y remédier, la cour qui, contrairement à ce que soutient la commune, n'a pas fondé son raisonnement sur la seule insuffisance des visas de la décision administrative dont elle était saisie, a porté sur les faits une appréciation souveraine exempte de dénaturation. En accueillant en conséquence le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation en droit de cet arrêté, elle n'a pas commis d'erreur de droit.
4. En deuxième lieu, un sursis à statuer ne peut être opposé à une demande de permis de construire qu'en vertu d'orientations ou de règles que le futur plan local d'urbanisme pourrait légalement prévoir, et à la condition que la construction, l'installation ou l'opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour n'aurait pu sans erreur de droit, pour apprécier la légalité de la décision de sursis à statuer opposée à Mlle B..., examiner la légalité du futur plan local d'urbanisme ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
5. Enfin, la cour n'ayant mentionné qu'à titre surabondant que le projet de plan local d'urbanisme ne classe en zone N - " zone humide " - que le fossé relié à l'affluent du Lieutel et une seule des mares, située sur un terrain déjà construit jouxtant la parcelle d'assiette du projet, le moyen tiré par la commune de ce que cette mention serait entachée de dénaturation ne peut qu'être écarté comme inopérant.
6. Il résulte de ce qui précède que la commune de La Queue-les-Yvelines n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mlle B..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la commune de La Queue-les-Yvelines est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de La Queue-les-Yvelines et à Mlle A... B....
N° 427163
ECLI:FR:CECHR:2020:427163.20200722
Publié au recueil Lebon
1ère - 4ème chambres réunies
M. Thibaut Félix, rapporteur
Mme Marie Sirinelli, rapporteur public
SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET, avocats
Lecture du mercredi 22 juillet 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Mlle A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 octobre 2013 par lequel le maire de La Queue-les-Yvelines a opposé un sursis à statuer de deux ans à sa demande de permis de construire une maison individuelle et un garage sur un terrain situé chemin du Roy et la décision implicite rejetant son recours gracieux contre cette décision. Par un jugement n° 1402316 du 21 novembre 2016, le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 17VE00223 du 22 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur l'appel de Mlle B..., annulé ce jugement, l'arrêté du 18 octobre 2013 et la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17janvier et 17 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de la Queue-les-Yvelines demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de Mlle B... ;
3°) de mettre à la charge de Mlle B... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thibaut Félix, auditeur,
- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de la commune de la Queue-les-Yvelines ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le conseil municipal de La Queue-les-Yvelines a, par une délibération du 23 mars 2009, prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme de la commune et, par une délibération du 10 juillet 2013, tiré le bilan de la concertation et arrêté le projet de plan local d'urbanisme. Le 18 octobre 2013, le maire a opposé un sursis à statuer pour une durée de deux ans à la demande de permis de construire présentée par Mlle B... le 26 août 2013 en vue de la construction d'une maison individuelle et d'un garage sur la parcelle cadastrée ZA 274. Par un jugement du 21 novembre 2016, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de Mlle B... tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 18 octobre 2013 ainsi que de la décision implicite rejetant son recours gracieux contre cette décision. La commune de La Queue-les-Yvelines se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 22 novembre 2018 par lequel de la cour administrative d'appel de Versailles, faisant droit à l'appel de Mlle B..., a annulé ce jugement, l'arrêté du 18 octobre 2013 et le rejet implicite du recours gracieux formé contre cet arrêté.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date du sursis à statuer en litige : " A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 111-8, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan ". Les articles L 111-7 et L. 111-8 de ce code, dans leur rédaction applicable à la même date, disposent que : " Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus par les articles (...) L. 123-6 (dernier alinéa) (...) du présent code (...) " et " Le sursis à statuer doit être motivé et ne peut excéder deux ans (...) ". Aux termes de l'article A. 424-4 du même code, lorsqu'il est sursis à statuer sur la demande de permis de construire : " (...) l'arrêté précise les circonstances de droit et de fait qui motivent la décision (...) ".
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'arrêté litigieux du 18 octobre 2013 se borne à viser le code de l'urbanisme dans son ensemble ainsi que la délibération du 23 mars 2009 prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme et à mentionner dans ses motifs que " l'opération projetée est de nature à compromettre ou à rendre plus onéreux l'exécution du plan local d'urbanisme ". En jugeant que ces éléments n'étaient pas de nature à mettre la destinataire de la décision à même d'identifier le texte dont elle faisait application et que la circonstance que la délibération du 23 mars 2009 ainsi visée vise elle-même, parmi de nombreux autres articles, l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme n'était pas de nature à y remédier, la cour qui, contrairement à ce que soutient la commune, n'a pas fondé son raisonnement sur la seule insuffisance des visas de la décision administrative dont elle était saisie, a porté sur les faits une appréciation souveraine exempte de dénaturation. En accueillant en conséquence le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation en droit de cet arrêté, elle n'a pas commis d'erreur de droit.
4. En deuxième lieu, un sursis à statuer ne peut être opposé à une demande de permis de construire qu'en vertu d'orientations ou de règles que le futur plan local d'urbanisme pourrait légalement prévoir, et à la condition que la construction, l'installation ou l'opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour n'aurait pu sans erreur de droit, pour apprécier la légalité de la décision de sursis à statuer opposée à Mlle B..., examiner la légalité du futur plan local d'urbanisme ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
5. Enfin, la cour n'ayant mentionné qu'à titre surabondant que le projet de plan local d'urbanisme ne classe en zone N - " zone humide " - que le fossé relié à l'affluent du Lieutel et une seule des mares, située sur un terrain déjà construit jouxtant la parcelle d'assiette du projet, le moyen tiré par la commune de ce que cette mention serait entachée de dénaturation ne peut qu'être écarté comme inopérant.
6. Il résulte de ce qui précède que la commune de La Queue-les-Yvelines n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mlle B..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la commune de La Queue-les-Yvelines est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de La Queue-les-Yvelines et à Mlle A... B....