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Ariane Web: Conseil d'État 356976, lecture du 21 octobre 2013, ECLI:FR:CESSR:2013:356976.20131021

Décision n° 356976
21 octobre 2013
Conseil d'État

N° 356976
ECLI:FR:CESSR:2013:356976.20131021
Inédit au recueil Lebon
2ème et 7ème sous-sections réunies
Mme Airelle Niepce, rapporteur
Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public
SCP GATINEAU, FATTACCINI, avocats


Lecture du lundi 21 octobre 2013
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 février et 21 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour les sociétés Numéricâble SAS et NC Numéricâble, dont le siège est situé 10 rue Albert Einstein, à Champs-sur-Marne (77420) ; les sociétés Numéricâble SAS et NC Numéricâble demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 2011-1469 du 20 décembre 2011 par laquelle l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes a infligé une sanction pécuniaire d'un montant de 1 860 000 euros à la société NC Numéricâble et une sanction pécuniaire d'un montant de 3 140 000 euros à la société Numéricâble SAS sur le fondement de l'article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques ;

2°) de mettre à la charge de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes la somme de 6 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 61-1 et 62 ;

Vu le code des postes et des communications électroniques ;

Vu la loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 ;

Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;

Vu l'ordonnance n° 2011-1012 du 24 août 2011 ;

Vu la décision du 29 avril 2013 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par les sociétés Numéricâble SAS et NC Numéricâble portant sur la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 36-8 et L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques ;

Vu la décision n° 2013-331 QPC du 5 juillet 2013 du Conseil constitutionnel statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par les sociétés Numéricâble SAS et NC Numéricâble ;

Vu le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Airelle Niepce, Maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, Rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccin, avocat de la société Numéricâble SAS et de la société NC Numéricable ;




1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation (...) " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de son article 62 : " Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause " ; qu'enfin, aux termes du troisième alinéa du même article : " Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles " ;

2. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 62 de la Constitution que lorsque le Conseil constitutionnel, saisi sur le fondement de l'article 61-1, use du pouvoir que lui confèrent les dispositions de l'article 62 en déterminant, après avoir déclaré inconstitutionnelle une disposition législative, les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause, il appartient au juge administratif, saisi d'un litige relatif aux effets produits par la disposition déclarée inconstitutionnelle, de les remettre en cause en écartant, pour la solution de ce litige, le cas échéant d'office, cette disposition, dans les conditions et limites fixées par le Conseil constitutionnel ;

3. Considérant que, par sa décision n° 2013-331 QPC du 5 juillet 2013, le Conseil constitutionnel, saisi par le Conseil d'Etat de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par les sociétés Numéricâble SAS et NC Numéricâble à l'appui du présent recours, a déclaré contraires à la Constitution les douze premiers alinéas de l'article L. 36 11 du code des postes et communications électroniques, dans leur rédaction modifiée en dernier lieu par l'ordonnance du 24 août 2011 relative aux communications électroniques, à l'exception des mots et phrases insérés dans l'article par cette ordonnance ; qu'il a jugé que cette déclaration d'inconstitutionnalité prenait effet à compter de la publication au Journal officiel de sa décision et qu'elle était applicable à toutes les instances non définitivement jugées à cette date ;

4. Considérant que cette décision du Conseil constitutionnel implique ainsi que le Conseil d'Etat écarte l'application de ces alinéas de l'article L. 36-11 du code des postes et communications électroniques pour régler tout litige, régulièrement engagé devant lui, dirigé contre une décision de sanction prononcée par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes prononcée sur leur fondement ;

5. Considérant que les sociétés Numéricâble SAS et NC Numéricâble ont saisi le Conseil d'Etat d'une requête tendant à l'annulation de la décision n° 2011-1469 du 20 décembre 2011 par laquelle l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes leur a infligé des sanctions pécuniaires d'un montant, respectivement, de 3 140 000 euros et de 1 860 000 euros ; que cette décision a été prise sur le fondement du 2° de l'article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques ; qu'il revient, par suite, au Conseil d'Etat d'en prononcer l'annulation ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que les sociétés requérantes sont fondées à demander l'annulation de la décision du 20 décembre 2011 par laquelle l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes leur a infligé une sanction pécuniaire, respectivement, de 1 860 000 euros pour la société NC Numéricâble et de 3 140 000 euros pour la société Numéricâble SAS ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à chacune des sociétés NC Numéricâble et Numéricâble SAS en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge des sociétés requérantes qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes ;


D E C I D E :
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Article 1er : La décision n° 2011-1469 du 20 décembre 2011 de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes est annulée.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 3 000 euros à la société Numéricâble SAS et une même somme à la société NC Numéricâble au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code des postes et des communications électroniques sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée aux sociétés Numéricâble SAS et NC Numéricâble et à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. Copie en sera adressée au ministre du redressement productif.