Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 16234, lecture du 10 octobre 1984, ECLI:FR:CESSR:1984:16234.19841010

Décision n° 16234
10 octobre 1984
Conseil d'État

N° 16234
ECLI:FR:CESSR:1984:16234.19841010
Publié au recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Gazier, président
M. Cheramy, rapporteur
M. Dutheillet de Lamothe, commissaire du gouvernement


Lecture du 10 octobre 1984
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Requête de la Compagnie générale de constructions téléphoniques C.G.C.T. tendant à :
1° l'annulation du jugement du 20 décembre 1978, du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande dirigée contre la décision du directeur général du centre hospitalier régional de Rennes du 30 mai 1978 déclarant infructueux l'appel d'offres lancé le 24 juin 1977, en vue de la restructuration du réseau téléphonique de cet établissement ;
2° l'annulation de la décision du directeur général du centre hospitalier régional de Rennes en date du 30 mai 1978, ensemble la décision " unanime " de la commission d'appel d'offres et l'éventuelle délibération du conseil d'administration du centre hospitalier régional qui a conduit le directeur général à reprendre entièrement la procédure ;
Vu le code des marchés publics ; le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant, d'une part, que la circonstance que la société requérante puisse réclamer au centre hospitalier de Rennes, par la voie d'un recours de plein contentieux, la réparation du préjudice qu'elle prétend avoir subi par suite du refus de cet établissement de passer avec elle un marché, à la suite de l'offre qu'elle avait présentée et qui avait été primitivement retenue, ne prive pas cette société du droit d'introduire devant la juridiction administrative un recours pour excès de pouvoir contre la décision qu'a prise le centre hospitalier régional de déclarer infructueux l'appel d'offres auquel elle avait soumissionné ; qu'il suit de là que la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, le tribunal administratif de Rennes a, en invoquant l'existence d'une autre voie de recours, rejeté sa demande comme irrecevable ;
Cons., d'autre part, que les premiers juges ont omis de statuer sur les conclusions de la Compagnie requérante dirigées contre la délibération du conseil d'administration de l'hôpital du 14 novembre 1977 et l'avis rendu par la commission d'appel d'offres le 8 mai 1978 ;
Cons. qu'il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué du tribunal administratif de Rennes en date du 20 décembre 1978 doit dans son ensemble être annulé ;
Cons. que dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la Compagnie générale de constructions téléphoniques devant le tribunal administratif de Rennes ;
Cons. qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 22 de la loi n° 70-1318 du 31 décembre 1970 portant réforme hospitalière, " Le directeur ... est compétent pour régler les affaires de l'établissement autres que celles qui sont énumérées ci-dessus ... " ; que la passation des marchés conclus en vue de l'équipement des établissements d'hospitalisation publique ne figure pas au nombre des affaires énumérées au 1er alinéa dudit article 22 qui sont de la seule compétence du conseil d'administration de l'établissement ; qu'ainsi le directeur général du centre hospitlier régional de Rennes était bien compétent pour prendre la décision attaquée déclarant infructueux l'appel d'offres ouvert le 31 mars 1977 ;
Cons. qu'il résulte des pièces du dossier que la Compagnie générale de constructions téléphoniques C.G.C.T. , qui avait soumissionné dans le cadre de l'appel d'offres lancé le 24 juin 1977 par le centre hospitalier régional de Rennes pour la restructuration des réseaux téléphoniques de cet établissement public, a été informée par celui-ci, dans une lettre du 30 septembre 1977, que le conseil d'administration du centre hospitalier, suivant les propositions de la commission prévue à l'article 299 du code des marchés publics, avait accepté son offre et qu'elle était " attributaire " du marché ;
Cons. qu'aux termes de l'article 300 du code des marchés publics, " dès que la commission a fait son choix, l'autorité habilitée à passer le marché avise tous les autres soumissionnaires du rejet de leurs offres et peut leur communiquer les motifs du rejet. Cette dernière peut, en accord avec l'entreprise retenue, procéder à une mise au point du marché sans que les modifications entraînées puissent remettre en cause les conditions de l'appel à la concurrence ayant pu avoir un effet sur les offres. Cette autorité se réserve la faculté de ne pas donner suite à un appel d'offres si elle n'a pas obtenu de propositions qui lui paraissent acceptables. Dans ce cas, l'appel d'offres est déclaré infructueux et ladite autorité en avise tous les candidats. Il est alors procédé soit par nouvel appel d'offres, soit par marché négocié en application du 2° de l'article 312 ... " ;
Cons. que, lorsque l'administration, en vertu de ces dispositions, informe un soumissionnaire que son offre est acceptée, cette décision ne crée pour l'attributaire aucun droit à la signature du marché ; que, par suite, le soumissionnaire dont l'offre a été acceptée ne peut, pour critiquer la décision par laquelle l'administration, renonçant à conclure le marché, déclare l'appel d'offres infructueux, faire valoir utilement que se trouve ainsi méconnue la règle selon laquelle une décision individuelle créatrice de droits ne peut être rapportée, si ce n'est lorsqu'elle est illégale et dans le délai du recours contentieux, ni soutenir que ladite décision aurait été prise en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 300 du code des marchés publics ou du principe de l'égalité entre les soumissionnaires ;
Cons. que, si la société requérante soutient que la décision attaquée aurait violé le secret des offres, elle n'établit ni même n'allègue que le contenu de son offre ait été porté à la connaissance de ses concurrents ni que le centre hospitalier ait utilisé des éléments de son offre pour établir le dossier du nouvel appel d'offres qu'il a lancé par la suite ;
Cons. qu'il résulte de ce qui précède que la Compagnie générale de constructions téléphoniques n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du directeur général du centre hospitalier régional de Rennes du 29 mai 1978, dont elle a été informée par lettre du 30 mai 1978, déclarant infructueux l'appel d'offres ouvert le 31 mars 1977 ; que d'autre part ses conclusions dirigées contre la délibération du conseil d'administration de l'hôpital du 14 novembre 1977 décidant de renvoyer le dossier à la commission d'appel d'offres et contre l'avis rendu le 8 mai 1978 par lequel cette dernière préconisait de déclarer l'appel d'offres infructueux, qui ne constituaient que des mesures préparatoires à la décision attaquée du directeur de l'hôpital du 30 mai 1978 insusceptibles de recours contentieux, ne sont par suite pas recevables ;
annulation du jugement ; rejet de la demande et du surplus des conclusions .


Voir aussi