Voie de fait
Les faits
M. Bergoend a acquis en 1990 une parcelle sur laquelle Electricité de France avait implanté un poteau en 1983, sans se conformer à une procédure prévue par un décret, ni conclure une convention avec lui. Après que les juridictions judiciaires du fond se sont déclarées incompétentes pour connaitre de cette affaire, la Cour de cassation a renvoyé au Tribunal des conflits le soin de répondre à la question de compétence soulevée.
Le sens et la portée de la décision
Le Tribunal des conflits a redéfini la notion de voie de fait en abandonnant la jurisprudence née de sa décision Action française du 8 avril 1935. En vertu de la jurisprudence précédente, existait une voie de fait, justifiant la compétence du juge judiciaire, en cas d'atteinte grave à une liberté fondamentale ou à la propriété privée provoquée soit par une décision administrative manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l'administration, soit par l'exécution forcée d'une décision, même légale, lorsque l'administration n'avait manifestement pas le pouvoir d'y procéder.
Désormais, il n’y a voie de fait de la part de l’administration que dans deux hypothèses : lorsqu’elle a procédé à l’exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d’une décision même régulière, portant atteinte à la liberté individuelle ou aboutissant à l’extinction d’un droit de propriété ; et lorsqu’elle a pris une décision qui a les mêmes effets d’atteinte à la liberté individuelle ou d’extinction d’un droit de propriété et qui est manifestement insusceptible d’être rattachée à un pouvoir appartenant à l’autorité administrative.
Pour chacun de ces deux aspects, le champ de la voie de fait a été sensiblement réduit. Seuls ces cas justifient, par exception au principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire pour ordonner la cessation ou la réparation des atteintes subies.