Théorie de l’imprévision
Les faits
La compagnie générale d’éclairage de Bordeaux cherchait à obtenir de la ville de Bordeaux qu’elle supporte le surcoût résultant pour elle de la très forte augmentation du prix du charbon, multiplié par cinq entre la signature de la concession d’éclairage et l’année 1916.
Le sens et la portée de la décision
À cette occasion, le Conseil d’État jugea qu’en principe, le contrat de concession règle de façon définitive les obligations du concessionnaire et du concédant et que la variation du prix des matières premières du fait des circonstances économiques constitue un aléa du marché que doit assumer le concessionnaire.
Toutefois, lorsque l’économie du contrat se trouve bouleversée du fait d’évènements que les parties ne pouvaient prévoir [en l’espèce la 1ère Guerre Mondiale], le concessionnaire ne peut être tenu d’assurer le fonctionnement du service dans les conditions prévues à l’origine.
Aussi, le Conseil d’État décida que la compagnie restait tenue d’assurer le service mais qu’elle avait droit d’être indemnisée de la part des conséquences pécuniaires de la situation de force majeure qui excédait l’aléa économique normal.
Théorie de l’imprévision
La jurisprudence ultérieure précisa les conditions d’application de la théorie de l’imprévision : les événements affectant l’exécution du contrat doivent être imprévisibles, extérieurs aux parties et doivent entraîner un bouleversement de l’économie du contrat.
L’imprévision n’étant pas un cas de force majeure, le cocontractant doit poursuivre l’exécution du contrat ; il commettrait une faute en interrompant ses prestations. En contrepartie, il a le droit d’être indemnisé, sinon de la totalité, du moins de la plus grande partie de la charge extracontractuelle.
Deux cas de figure peuvent ensuite se produire : soit l’équilibre contractuel se rétablit, soit le bouleversement de l’économie du contrat se révèle définitif, et l’imprévision se transforme alors en cas de force majeure justifiant la résiliation du contrat.