Le Gouvernement a décidé de rendre public l'avis rendu par le Conseil d’État sur un projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé.
AVIS SUR UN PROJET DE LOI
relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé
1. Le Conseil d’Etat a été saisi le 10 janvier 2019 d’un projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé.
Ce projet de loi a été modifié par 4 saisines rectificatives reçues les 21 janvier, 22 janvier, 4 février et 7 février 2019.
Présentation générale
2. Ce projet de loi, qui comprend 23 articles, est organisé en cinq titres. Les trois premiers titres comportent les mesures visant à mettre en œuvre, au niveau législatif, les mesures prises dans le cadre du plan de transformation de notre système de santé : « Ma santé 2022 ».
Le titre Ier « Décloisonner les parcours de formation et les carrières des professionnels de santé » comprend trois séries de mesures relatives, d’une part, aux études et au développement des compétences des médecins, d’autre part, à l’entrée des médecins dans la carrière et, enfin, aux statuts et aux conditions de recrutement des professionnels de santé à l’hôpital.
Le titre II « Créer un collectif de soins au service des patients et mieux structurer l’offre de soins dans les territoires » est consacré, sur le fondement du principe de gradation de l’accès aux soins en ville et à l’hôpital, aux mesures relatives aux projets de santé de territoire, au développement d’établissements de santé de proximité, au régime d’autorisation des activités de soins et au renforcement de l’intégration au sein des groupements hospitaliers de territoire.
Le titre III « Développer l’ambition numérique en santé » comprend les dispositions visant à soutenir l’innovation en matière d’utilisations des données de santé, à doter chaque usager du système d’un espace numérique de santé et de poursuivre le déploiement de la télésanté.
Le titre IV « Mesures diverses » rassemble diverses mesures à caractère sanitaire et social poursuivant à la fois des objectifs de simplification, de sécurisation, notamment des conditions d’exercice des praticiens à diplôme hors de l’Union européenne, et de renforcement du dispositif ORSAN de préparation du système de santé pour faire face aux situations sanitaires exceptionnelles.
Le titre V « Ratifications et modifications d’ordonnances » présente, à nouveau, au Parlement la ratification de 34 ordonnances.
3. Dans sa version initiale, l’étude d’impact est apparue, sur certains points, lacunaire ou insuffisante au regard des prescriptions de la loi organique du 15 avril 2009.
A la suite d’observations du Conseil d’Etat, le Gouvernement a complété et approfondi l’étude d’impact initiale sur les points suivants : le développement professionnel continu, la sécurisation du bénéfice du contrat d’engagement de service public en cas d’évolution de zonage, les conditions d’emploi des personnels médicaux hospitaliers, les établissements de santé de proximité, les mesures de sécurisation des établissements hospitaliers et la simplification des conditions d’exercice des missions des agences régionales de santé.
4. Le Conseil d’Etat relève que le projet de loi a fait l’objet, ainsi qu’il le devait, de la consultation de l’Assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna, du Congrès de la Nouvelle-Calédonie, de l’Assemblée de Polynésie française, de la Collectivité de Saint-Pierre et Miquelon, de la Haute Autorité de santé, du conseil national de la Caisse d’assurance maladie, de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, du conseil central d’administration de la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole, de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, du Conseil national d’évaluation des normes, du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, du Conseil supérieur des personnels médicaux, odontologiques et pharmaceutiques, du Conseil supérieur de la Mutualité, de la section sociale du Comité national de l’organisation sanitaire et sociale et de la Mission interministérielle de l’eau.
5. Outre de nombreuses améliorations de rédaction qui s’expliquent d’elles-mêmes, ce projet de loi appelle, de la part du Conseil d’Etat, les observations suivantes.
Réforme des études en santé et renforcement de la formation tout au long de la vie.
Les dispositions du projet de loi procèdent à une triple réforme des études en santé. Il supprime le numerus clausus pour l’accès en deuxième année du premier cycle de ces études, instauré par la loi 71-557 du 12 juillet 1971 aménageant certaines dispositions de la loi n° 68-978 du 12 novembre 1968 d'orientation de l'enseignement supérieur. Il modifie les modalités d’accès aux études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques en supprimant la première année commune aux études de santé (PACES), créée par la loi n° 2009-833 du 7 juillet 2009. Enfin, il remplace les épreuves classantes nationales permettant l’accès au troisième cycle des études médicales par de nouvelles modalités d’accès et d’affectation sur les postes d’interne.
6. Le régime du numerus clausus permet la fixation chaque année du nombre d’étudiants admis en deuxième année du premier cycle des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques. Il est remplacé par une limitation des capacités d’accueil déterminées annuellement par les universités en prenant en compte les objectifs pluriannuels d’admission en première année du deuxième cycle. Ces objectifs pluriannuels, qui prennent en compte les capacités de formation de l’université et les besoins en santé du territoire, sont déterminés au regard d’objectifs nationaux pluriannuels établis par l’Etat, ayant notamment pour objectif de répondre aux besoins du système de santé et de réduire les inégalités territoriales d’accès aux soins. En conséquence de la prise en compte des besoins en santé dans la détermination des objectifs pluriannuels d’admission en première année du deuxième cycle, le projet de loi prévoit que ces objectifs soient fixés sur avis conforme de l’agence régionale de santé (ARS). Le Conseil d’Etat rappelle que le principe d’autonomie des universités, consacré par l’article L.711-1 du code de l’éducation, n’a pas de valeur constitutionnelle. Il estime que l’exigence de l’avis conforme émis par l’agence régionale de santé, qui répond à des motifs d’intérêt général, ne méconnait aucun principe de nature constitutionnelle.
7. S’agissant de la suppression de la PACES, l’étude d’impact indique que le modèle proposé d’accès aux études de santé est inspiré des expérimentations permettant de déroger à la PACES et instaurées par la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche. Le projet de loi subordonne l’admission en 2ème ou 3ème année à la validation d’un parcours de formation antérieur dans l’enseignement supérieur et à la réussite à des épreuves. Afin de garantir la diversité des parcours des étudiants, le projet de loi prévoit des possibilités de réorientation pour des étudiants ou des diplômés qui souhaitent intégrer des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques ou de maïeutique, ainsi que pour des étudiants d’une de ces quatre filières de santé souhaitant intégrer une autre de ces quatre filières. Les modalités de validation du parcours de formation et de réussite à des épreuves, ainsi que les modalités de réorientation sont déterminées par décret en Conseil d’Etat.
Ces dispositions ont pour conséquence de permettre une diversification des modalités d’admission selon l’université. Par une décision n°2018-763 DC du 8 mars 2018, le Conseil constitutionnel a jugé que le mécanisme de départage de candidats à l’inscription à l’université lorsque leur nombre excède les capacités d’accueil des formations, prévu par la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, ne méconnait pas le principe d’égal accès à l’instruction dès lors que le législateur a retenu des critères objectifs de nature à garantir le respect de ce principe. Le Conseil d’Etat estime que les critères retenus par le projet de loi, qui reposent sur la validation d’un parcours de formation et la réussite à des épreuves, sont objectifs et que, partant, ces mesures ne méconnaissent pas le principe d’égalité.
S’agissant des élèves des écoles du service de santé pouvant être accueillis en 2ème et 3ème année de 1er cycle, leur nombre et leur répartition par université ainsi que les objectifs d’admission en 1ère année du 2ème cycle sont déterminés par décret en Conseil d’Etat. Ces objectifs sont pris en compte pour la détermination des objectifs pluriannuels d’admission en 1ère année du 2ème cycle, par les universités et les ARS. Cette mesure n’appelle pas d’observations.
Le projet de loi abroge des dispositions de la loi du 22 juillet 2013 ayant instauré des dérogations à la PACES et prévoit des dispositions transitoires afin que les étudiants ayant suivi des formations permettant d’accéder aux études de santé et qui auraient eu la possibilité de se présenter au concours de PACES ou aux épreuves d’admission aux études de santé, avant la promulgation de la loi ne soient pas privés des droits résultant du précédent régime. Le Conseil d’Etat n’émet aucune objection aux dispositions transitoires envisagées.
8. Le Conseil d’Etat observe que le projet de loi procède à une réforme d’ampleur de la procédure d’accès au troisième cycle des études de médecine ainsi que des modalités d’affectation sur un poste d’interne. Actuellement, l’accès au troisième cycle repose sur l’unique validation du deuxième cycle et l’affectation dans un centre hospitalier avec le choix d’une spécialité est subordonnée au rang de classement aux épreuves classantes nationales qui ont lieu en dernière année du deuxième cycle des études médicales. Le projet de loi subordonne l’admission dans le troisième cycle à la validation du deuxième cycle et aussi à la réussite à des épreuves de connaissances et de compétences. Ces dispositions ne se heurtent, selon le Conseil d’Etat, à aucun obstacle de nature constitutionnelle ou conventionnelle.
Le projet de loi prévoit, compte tenu de la suppression des épreuves classantes nationales, un mécanisme d’affectation sur les postes d’interne reposant sur les résultats aux épreuves de connaissances et de compétences mais aussi sur une appréciation du parcours de formation et du projet professionnel de l’étudiant. Le projet de loi renvoie à un décret en Conseil d’Etat la détermination des modalités d’affectation. Le Conseil d’Etat estime que ces dispositions ne sont contraires à aucun principe de nature constitutionnelle ou conventionnelle.
Le Conseil d’Etat relève que des dispositions transitoires sont prévues pour les étudiants engagés dans le 2ème cycle des études médicales avant l’entrée en vigueur du présent projet de loi.
Habilitations à légiférer par voie d’ordonnance sur le fondement de l’article 38 de la Constitution
9. Plusieurs habilitations sont prévues afin de permettre au Gouvernement de prendre, par ordonnance, diverses mesures relatives à la transformation du système de santé.
Il s’agit, en premier lieu, de créer un dispositif de recertification des compétences des médecins pour s’assurer du maintien et du développement de leurs compétences à échéance régulière afin de renforcer la sécurité et la qualité de l’offre de soins. Ce dispositif, qui constitue une obligation professionnelle, a vocation à se substituer au développement professionnel continu des compétences.
Il est proposé, en deuxième lieu, de moderniser les conditions d’emploi médical hospitalier, statutaires ou contractuelles, afin de permettre la diversification des activités médicales, favoriser un décloisonnement des parcours professionnels entre la ville et l’hôpital, et simplifier les modalités de recrutement.
Le développement d’établissements de santé accomplissant des missions de proximité, dans le cadre de la gradation de l’accès aux soins, est visé en troisième lieu. L’habilitation demandée par le Gouvernement a pour objet de fixer les missions de ces établissements, ainsi que leurs modalités de définition, de fonctionnement et de gouvernance.
Le Gouvernement poursuit, en quatrième lieu, un objectif de réforme du régime des autorisations des activités de soins pour organiser la transformation du système de santé dans le respect du principe de gradation des soins et dans un souci de simplification.
Il s’agit, en cinquième lieu, de préparer la généralisation de la prescription et de la dispensation de soins, de produits ou de prestations par voie électronique.
Le Gouvernement souhaite, en sixième lieu, permettre aux groupements hospitaliers de territoire (GHT) volontaires de pouvoir transformer et regrouper leurs instances représentatives ou consultatives remplissant des missions équivalentes. L’habilitation permet, dans cette matière qui relève de la loi, de procéder à des adaptations de compétences ou à des fusions ou substitutions de ces instances.
En septième lieu, le Gouvernement souhaite engager une simplification et un allègement des modalités d’exercices des missions des agences régionales de santé, ainsi que créer une nouvelle agence compétente pour Mayotte.
En huitième et dernier lieu, une habilitation permet au Gouvernement de corriger les erreurs matérielles ou assurer la cohérence des textes issus du présent projet de loi.
10. Le Conseil d’Etat veille, dans la rédaction de ces dispositions, à définir avec une précision suffisante les finalités et le domaine d’intervention des mesures envisagées au stade de l’habilitation, sans cependant les détailler de manière excessivement contraignante au regard des finalités poursuivies, comme le rappelle la jurisprudence dégagée par le Conseil constitutionnel à propos des exigences de l’article 38 de la Constitution. Au surplus, l’étude d’impact, qui a été complété à cette fin, éclaire utilement les objectifs que le Gouvernement souhaite atteindre.
Contrat d’engagement de service public
11. Le projet de loi aménage le dispositif de contrat d’engagement de service public institué par les articles L. 632-6 et L. 634-2 du code de l’éducation, en vertu desquels les étudiants en médecine et ceux engagés dans des études d’odontologie signataires d’un tel contrat avec le Centre national de gestion perçoivent une allocation au cours de leurs études en contrepartie de l’engagement d’exercer, pendant une durée équivalente et au moins égale à deux ans, dans des lieux d’exercice situés dans des zones faiblement dotées en ressource médicale et inscrits sur une liste nationale. Afin d’atténuer les effets d’une révision de la définition de ces zones, des lieux d’exercice pourront être maintenus sur la liste deux ans après qu’ils ne relèvent plus d’une telle zone. De plus, le projet de loi élargit le bénéfice du contrat d’engagement de service public aux médecins et chirurgiens-dentistes titulaires d’un diplôme, certificat ou autre titre obtenu dans un Etat non membre de l’Union européenne ou non partie à l’accord sur l’Espace économique européen et permettant l’exercice de ces professions dans le pays d’obtention de ce diplôme, certificat ou titre qui sont autorisés à effectuer un parcours de consolidation des compétences.
12. Le Conseil d’Etat souligne l’intérêt du dispositif de contrat d’engagement de service public pour renforcer l’offre de soins dans les zones caractérisées par de faibles ressources médicales. Toutefois, il estime que les dispositions des articles L. 632-6 et L. 634-2 du code de l’éducation ne relèvent ni des principes fondamentaux de l’enseignement, ni des principes fondamentaux du code de la sécurité sociale, ni des principes fondamentaux des obligations civiles et commerciales, ni d’aucune autre règle ou d’aucun autre principe que la Constitution place dans le domaine de la loi. Il considère en particulier que si l’institution d’une dotation versée par les régimes obligatoires d’assurance maladie au Centre national de gestion aux fins de financer les contrats, relève de la loi (article 116 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986), elle n’a pas pour effet de conférer à l’attribution de ces contrats le caractère d’une aide financière à la charge directe des organismes de sécurité sociale dont les conditions d’attribution relèvent des principes fondamentaux de la sécurité sociale et, partant, de la compétence du législateur (Conseil d’Etat, 21 novembre 2008, 306152).
En outre, la circonstance que l’étendue de la liberté d’installation d’un médecin soit restreinte lorsqu’il est lié par un contrat d’engagement de service public ne méconnaît pas le principe de la liberté d’installation affirmé par l’article L. 162-2 du code de la sécurité sociale dès lors que la signature d’un tel contrat résulte d’une démarche uniquement volontaire et facultative des étudiants en médecine.
Le Conseil d’Etat relève que, par une décision n° 2014-249 L du 18 juillet 2014, le Conseil constitutionnel a jugé que le dispositif contractuel institué par l’article L. 632-7 du code de l’éducation, en vertu duquel les internes en psychiatrie peuvent signer avec le Centre national de gestion un contrat d’engagement relatif à la prise en charge psychiatrique des personnes placées sous main de justice au titre duquel il perçoivent une allocation jusqu’à la fin de leurs études médicales en contrepartie de l’engagement de suivre certaines formations, d’exercer dans certaines régions et de demander leur inscription sur la liste des experts près la cour d’appel ainsi que sur la liste des médecins coordonnateurs, a le caractère réglementaire.
Pour l’ensemble de ces raisons, le Conseil d’Etat est d’avis que les articles L. 632-6 et L. 634-2 du code de l’éducation ont le caractère réglementaire.
13. Le Conseil d’Etat tire les conséquences de ce qui précède en proposant de substituer au projet de loi sur ce point une disposition d’abrogation de ces articles du code de l’éducation, ce qui ouvre la voie à la prise par décret des dispositions envisagées par le Gouvernement.
Elargissement de la possibilité d’exercer comme adjoint d’un médecin
14. Le projet élargit les hypothèses dans lesquelles les conseils départementaux de l’ordre des médecins peuvent autoriser un étudiant en médecine à exercer, pour une durée limitée, comme adjoint d’un médecin, aujourd’hui restreintes aux cas d’afflux exceptionnel de population constaté par un arrêté du représentant de l’Etat dans le département. Le Conseil d’Etat estime que cet élargissement, principalement destiné à autoriser l’exercice d’étudiants en médecine comme adjoint d’un médecin dans des zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins, répond à un besoin de santé publique et ne se heurte à aucun obstacle de nature constitutionnelle ou conventionnelle.
Projets territoriaux de santé
15. Le projet vise à développer les démarches de coordination des acteurs du système de santé et de rationalisation des parcours de santé des patients, tout en veillant à favoriser les initiatives locales. Il pose le principe de l'établissement de « projets territoriaux de santé » à l’initiative des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) instituées par la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation du système de santé, en lien avec au moins un établissement ou un service de santé, social ou médico-social. Le projet territorial de santé définit le territoire de santé adapté à la mise en œuvre, par les professionnels et organismes constituant la CPTS, de l'organisation des parcours de santé qu’il prévoit. Ce projet est soumis à l'approbation du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS), qui se prononce au regard des objectifs du projet régional de santé et de la pertinence de son territoire d'action, après avis du conseil territorial de santé. Par ailleurs, le projet prévoit également de soumettre les projets de santé des CPTS à l’approbation du directeur général de l’ARS.
16. Si le Conseil d’Etat partage le souci de rationalisation du fonctionnement du système de santé, il s’est interrogé sur l’intérêt d’ajouter aux dispositifs existants la procédure d'approbation et de formalisation accrue du projet de santé des communautés professionnelles territoriales de santé et l’introduction de la notion de projet territorial de santé. Il souligne en effet que l’organisation sanitaire repose, d’ores et déjà, sur des projets régionaux de santé incluant des schémas régionaux de santé, sur des projets territoriaux de santé mentale, des projets d’établissement, des projets médicaux partagés et des projets de santé des équipes de soins. En outre, leur mise en œuvre conduit à l’élaboration et à la conclusion de contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, de contrats territoriaux de santé, de contrats territoriaux de santé mentale et de contrats locaux de santé. Le Conseil d’Etat admet cependant l’utilité du dispositif supplémentaire envisagé en prenant en compte l'intérêt qui s'attache à donner au directeur général d’ARS un double levier lui permettant, d’une part, de renforcer la cohérence des initiatives territoriales en approuvant les projets de santé des CTPS, et, d’autre part, de favoriser la convergence des projets de santé des CPTS avec ceux d’autres acteurs, en lien avec les objectifs fixés par le projet régional de santé. Il note que cette disposition est cohérente avec les dispositions de l’article 42 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 prévoyant notamment l'ouverture, par le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance-maladie, de négociations conventionnelles avec les organisations représentatives des professionnels de santé « en vue de déterminer, dans le cadre d'un accord conventionnel interprofessionnel, les mesures visant à accompagner le déploiement sur l'ensemble du territoire des communautés professionnelles territoriales de santé ».
Il appelle toutefois l’attention du Gouvernement sur la nécessité de conduire une réflexion sur la multiplication de ces dispositifs et les évolutions envisageables pour les simplifier et les rationaliser.
Groupements hospitaliers de territoire
17. Les groupements hospitaliers de territoire (GHT), issus de l’article 107 de la loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, ont pour objet de favoriser l’accès à des soins sécurisés et de qualité, en promouvant une meilleure complémentarité entre les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux.
Le projet de loi entend renforcer la dynamique de coopération et d’intégration en prévoyant l’établissement d’une stratégie médicale des groupements, en mutualisant la gestion des ressources humaines médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques, et en rendant possible une intégration plus poussée, pour les groupements volontaires et disposant des capacités suffisantes, dans les domaines de la trésorerie, de l’investissement, du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens. Il institue une commission médicale de groupement dans chaque GHT.
Le Conseil d’Etat constate que ces dispositions ne se heurtent à aucun obstacle de nature constitutionnelle ou conventionnelle.
Réforme du Système National des Données de Santé (SNDS)
18. Les dispositions du projet procèdent à une réforme d’ampleur du Système National des Données de Santé (SNDS). Ce système regroupe actuellement les données issues de grands fichiers nationaux, comme le système national d’information interrégimes de l’assurance maladie (SNIIRAM) ou le programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI). Son accès est autorisé, à titre permanent, pour les services de l’Etat, les établissements publics et les organismes chargés d’une mission de service public figurant sur une liste fixée par décret en Conseil d’Etat, et, après autorisation délivrée par la CNIL, pour les traitements mis en œuvre par les autres acteurs, publics ou privés, poursuivant des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation, contribuant à l’une des finalités énoncées au III de l’article L. 1461-1 du code de la santé publique et répondant à un motif d’intérêt public. Le Conseil d’Etat rappelle que le SNDS, par les possibilités qu’il offre en matière d’analyse et de suivi du système de santé et des dispositifs d’assurance maladie, contribue à la protection de la santé, qui est une exigence constitutionnelle depuis la décision n° 80-117 DC du 22 juillet 1980 du Conseil Constitutionnel.
19. Le projet de loi modifie d’abord le périmètre des données incluses dans le SNDS, en y ajoutant des données cliniques qui seront recueillies par les praticiens, en secteur hospitalier comme en médecine de ville, lors de la réalisation d’actes pris en charge par l’assurance maladie au titre de la maladie, la maternité, les accidents du travail et les maladies professionnelles. Le Conseil d’Etat observe que si cet ajout modifie significativement le champ du SNDS, il ne présente pas de difficultés juridiques particulières dès lors que ces données s’inscrivent dans la mission du SNDS qui comporte déjà des données médicales, notamment dans le cadre du PMSI.
20. Le projet de loi modifie également l’accès aux données contenues dans le SNDS en supprimant la condition tenant à la poursuite d’une finalité de recherche, d’étude ou d’évaluation. Le Conseil d’Etat s’est interrogé sur le respect par la disposition envisagée de l’exigence constitutionnelle selon laquelle les atteintes portées à la confidentialité des données personnelles de santé, qui est l’une des composantes du respect de la vie privée, doivent être justifiées par l’objectif d’intérêt général de protection de la santé et mises en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif (décision n° 99-416 DC du 23 juillet 1999, décision n° 2004-504 DC du 12 août 2004). Il estime que le projet de loi ne méconnaît aucune exigence de valeur constitutionnelle ou conventionnelle dès lors que le SNDS apporte des garanties suffisantes pour l’utilisation des données auxquelles il donne accès. Celles-ci doivent en effet être entièrement pseudonymisées, en vertu de l’article L. 1461-4 du code de la santé publique, c'est-à-dire qu’elles ne doivent jamais pouvoir être rattachées à une personne donnée. En outre, le projet de loi prévoit de rendre irréversible la pseudonymisation en supprimant les dispositions du code de la santé publique autorisant la conservation séparée des données permettant une réidentification des personnes. Par ailleurs, l’accès à ces données est soit soumis à une autorisation de la CNIL, après avis du comité éthique et scientifique pour les recherches, les études et les évaluations sur le caractère d’intérêt public de la demande, soit encadré pour les traitements-types par des référentiels et méthodologies de référence définis en amont. En cas de non-conformité de ces traitements-types à ces référentiels et méthodologies de référence, une autorisation de la CNIL est nécessaire en vertu de l’article 66 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés dans sa rédaction résultant de la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles et de l’ordonnance n° 2018-1125 du 12 décembre 2018, qui entrera en vigueur au plus tard le 1er juin prochain. En outre, en application de l’article 35 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 et de l’article 62 de la loi du 6 janvier 1978 précitée dans sa version à venir, chaque traitement susceptible d’engendrer un risque élevé pour les droits et les libertés des personnes physiques devra donner lieu à une analyse d’impact effectuée par le responsable de traitement. Le Conseil d’Etat considère que ces garanties, combinées à l’exigence d’un intérêt public et à la démonstration de l’une des finalités limitativement énoncées au III de l’article L. 1461-1 du code de la santé publique sont de nature à garantir le droit au respect de la vie privée.
21. Le projet de loi modifie, en outre, la procédure d’accès et de mise à disposition des données incluses dans le SNDS afin d’en réduire la longueur et la complexité. Il crée une plateforme dite Plateforme des Données de Santé, groupement d’intérêt public qui succède à un autre groupement d’intérêt public, l’Institut national des données de santé. Son rôle est accru, puisque cette plateforme devient le guichet unique d’accès à l’intégralité des données, contribue en lien avec la CNIL à l’élaboration des référentiels et méthodologies de référence permettant d’encadrer les traitements et peut procéder, à la demande de tiers, à des opérations techniques de traitement de données telles que des appariements. Ces dispositions n’appellent pas d’observations particulières de la part du Conseil d’Etat.
22. Enfin, le projet de loi substitue à l’actuel responsable de traitement unique du SNDS, la CNAM, le principe d’une pluralité de responsables de traitement qui seront définis et désignés par des dispositions règlementaires. Le Conseil d’Etat estime que ce changement est cohérent avec les modifications profondes apportées au SNDS par le projet de loi et conforme à la logique de responsabilisation qui résulte du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, modifiée par la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles et l’ordonnance n° 2018-1125 du 12 décembre 2018.
Création d’espaces numériques personnalisés
23. Le projet prévoit, dans le cadre du plan « Ma santé 2022 », d’offrir à chaque personne un espace de santé numérique et personnalisé lui permettant d’avoir accès à ses données personnelles de santé et de disposer d’une messagerie sécurisée, d’un agenda, d’un portail d’accès à des applications référencées et des outils de télésanté.
24. Le Conseil d’Etat observe que ce dispositif d’espace numérique est exclusivement basé sur la volonté de son titulaire. Il revient à ce dernier de décider de sa création, de la gestion de son contenu, des droits d’accès proposés des professionnels de santé et aux équipes de soins, des possibilités d’extraction de données et de sa clôture, ce qui garantit sa conformité aux principes juridiques issus du nouveau droit relatif au traitement et à la protection des données.
25. Le Conseil d’Etat adapte le projet afin que les possibilités d’accès aux données contenues dans cet espace, postérieurement au décès de son titulaire, par les ayants droit, le concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité soient cohérentes avec les dispositions régissant l’accès aux données couvertes par le secret médical d’une personne décédée, figurant au V de l’article L. 1110-4 du même code.
Dans ces conditions, le Conseil d’Etat estime que ces dispositions législatives innovantes et ambitieuses, qui sont susceptibles de contribuer à la protection de la santé et à la qualité du système de santé, ne se heurtent, par elles-mêmes, à aucune règle ni aucun principe de nature constitutionnelle ou conventionnelle. Le Conseil d’Etat attire l’attention du Gouvernement sur la nécessaire réflexion à mener sur le cadre juridique et technique dans lequel cet espace numérique aura vocation à se développer.
Développement de la télésanté
26. Le projet de loi introduit dans le code de santé publique un nouveau chapitre intitulé « télésanté » composé de deux sections, la section « télémédecine » qui constituait précédemment un chapitre au même intitulé et une nouvelle section intitulée « télésoin ».
Le télésoin est défini comme une forme de pratique de soins à distance entre un patient et un ou plusieurs pharmaciens ou auxiliaires médicaux, par l’article L. 6316-2 créé à cet effet. Le Conseil d’Etat admet que, compte tenu de la grande diversité et du caractère évolutif des activités de télésoin susceptibles d’être exercées par les professionnels concernés, ces activités soient définies par arrêté du ministre chargé de la santé, après un avis de la Haute Autorité de santé relatif à leurs conditions de qualité et de sécurité à la différence des actes de télémédecine qui sont définis par décret.
Les conditions de mise en œuvre de ces activités, qui doivent garantir la protection des données personnelles et la bonne information du patient, sont fixées par un décret en Conseil d’Etat. Quant aux conditions de prise en charge, le Conseil d’Etat admet que le décret qui les fixe prenne en compte notamment les déficiences de l’offre de soins dues à l’insularité et à l’enclavement géographique.
Enfin, le projet de loi introduit dans le code de la sécurité sociale des dispositions prévoyant la possibilité pour les conventions d’exercice professionnel de définir les tarifs et les modes de rémunération ainsi que les modalités de réalisation des actes de télésoin.
Mesures de simplification
27. Le projet de loi comporte plusieurs mesures de simplification.
28. Cinq de ces mesures ont pour objet d’abroger des dispositions législatives obsolètes ou dont les dispositions d’application n’ont jamais été prises et que le Gouvernement ne souhaite pas mettre en œuvre. Ces dispositions ne se heurtent à aucune objection d’ordre juridique et n’appellent pas d’observation de la part du Conseil d’Etat.
29. Trois autres de ces mesures simplifient certaines procédures administratives relatives à l’autorisation de projets de transformation d’établissements sociaux et médico-sociaux et au cadre budgétaire applicable à d’autres de ces établissements ainsi qu’à la définition et la mise en œuvre de la protection sanitaire des eaux des piscines et des eaux de baignades.
Le Conseil d’Etat estime que ces dispositions ne se heurtent à aucun obstacle, de nature conventionnelle ou constitutionnelle. En particulier, le respect du principe d’égalité ne fait pas obstacle à ce que les projets de création ou d’extension d’établissements sociaux et médico-sociaux soient soumis à une procédure d’appel à projet en vue d’être autorisés par l’autorité administrative compétente là où les projets de transformation en sont exonérés. Le respect du principe d’égalité ne fait pas non plus obstacle à ce que le cadre budgétaire applicable aux établissements sociaux et médico-sociaux mentionnés au 9° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles diffère selon que leurs gestionnaires sont ou non signataires d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens conclu avec les autorités chargées de la tarification, ni à ce que les règles sanitaires, de conception et d’hygiène ainsi que les modalités de mise en œuvre du contrôle sanitaire soient adaptées selon les différents types de piscines collectives.
30. Le projet prévoit également que la modification de l’acte portant déclaration d’utilité publique des travaux de prélèvement d’eau destinée à l’alimentation des collectivités humaines qui n’implique pas de transfert de propriété est effectuée selon une procédure simplifiée. Afin de prévenir tout grief d’incompétence négative du législateur, le Conseil d’Etat complète le projet de loi et précise que, lorsqu’il est nécessaire de procéder à une modification mineure d’un périmètre de protection d’un captage d’eau potable ou des servitudes afférentes à un tel périmètre et sauf dans le cas où cette modification étend le périmètre de protection immédiate dans lequel les terrains sont à acquérir en pleine propriété, une procédure simplifiée au regard du droit commun issu des dispositions du livre I du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ainsi qu’à celles du chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement est appliquée. Cette procédure simplifie est établie par décret en Conseil d’Etat. Il est en outre ajouté que la simplification porte sur la mise en œuvre de l’enquête publique et que sa teneur est adaptée selon le type de modification envisagé
31. Enfin, le projet de loi comprend une disposition de suppression d’une mesure de sur-transposition de la directive 2001/82/CE du 6 novembre 2001 du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments vétérinaires, dont le Conseil d’Etat observe qu’elle figurait à l’identique dans le projet de loi portant suppression des sur-transpositions des directives européennes en droit français auquel il a donné un avis favorable le 27 septembre 2018.
Comptes des établissements publics de santé
32. Les établissements publics de santé sont devenus des établissements publics à ressort national en vertu de la loin° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. Ils sont, depuis cette date, soumis à l’obligation de consolidation des comptes résultant de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière. La loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé prévoit au VII de son article 107 une date d’effet spécifique pour les établissements publics de santé, qui seront soumis à l’obligation de la consolidation des comptes à compter de l’exercice 2020.
Le projet de loi remplace, pour les établissements publics de santé, l’obligation de présentation de comptes consolidés par une obligation de présentation de comptes agrégés. Le Conseil d’Etat attire l’attention du Gouvernement sur le fait que cette notion ne renvoie, à ce stade, à aucun dispositif normalisé et rappelle la nécessité de définir rapidement, en lien avec les instances consultatives comptables nationales, des règles précises, le périmètre d’action et le degré de formalisme de tels comptes agrégés, pour une application prévue à compter de l’année 2022.
33. Dérogation accordée à certains établissements en matière d’honoraires
L’article 99 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a donné trois ans aux établissements de santé privés d’intérêt collectif (ESPIC) pour se conformer aux dispositions de l’article L. 6112-2 du code de la santé publique interdisant la pratique des dépassements d’honoraires dans le cadre du service public hospitalier, qui leur sont applicables en vertu des articles L. 6112-3 et L. 6161-9, du même code. Toutefois, pour des raisons territoriales ou historiques, certains ESPIC sont signataires de contrats passés précédemment avec des praticiens libéraux, qui autorisaient de telles pratiques.
34. Le projet de loi introduit une nouvelle prolongation de trois ans pour cette dérogation.
Le Conseil d’Etat appelle l’attention du Gouvernement sur la nécessité de maintenir un caractère temporaire à une telle dérogation : les trois années supplémentaires accordées doivent permettre de régler de manière définitive les difficultés rencontrées.
Régime de déclaration obligatoire des interruptions de grossesse par les praticiens
35. Le projet de loi supprime le régime des déclarations obligatoires des interruptions volontaires de grossesse (IVG) établi pour les médecins ou sages-femmes par la loi n° 75-17 du 17 janvier 1975 relative à l’interruption volontaire de grossesse (article L. 2212-10 du code de la santé publique). Ces déclarations s’avèrent redondantes avec celles issues du projet de médicalisation du système d’information et moins exhaustives. Le Gouvernement entend parallèlement maintenir le principe de la publication des statistiques relatives aux IVG par l’Institut national des études démographiques. Ces dispositions n’appellent pas d’observations du Conseil d’Etat.
Renforcement de la préparation du système de santé face aux situations sanitaires exceptionnelles
36. En cas de situation sanitaire exceptionnelle, la réponse de notre système de santé repose sur le dispositif ORSAN qui permet d'organiser et de mobiliser les établissements et les professionnels de santé à l'échelle de la région.
Le projet de loi a pour objet de renforcer ce dispositif en clarifiant les différents niveaux de planification ainsi qu'en simplifiant et en sécurisant les conditions d'intervention des professionnels de santé hors de leur établissement d'affectation habituel. Le projet de loi vise également à permettre, en dehors de l'activation du dispositif ORSAN, l'utilisation du système d'information d'identification unique des victimes (SI-VIC) lorsqu'il y a un accident grave ou collectif afin de faciliter le suivi des victimes et mieux réguler l'activité des établissements.
37. Le Conseil d’Etat constate que ces dispositions, qui visent à améliorer les conditions dans lesquelles le système de santé peut faire face à des évènements perturbant l’organisation des soins, notamment en cas de situation sanitaire exceptionnelle, sont opportunes et ne se heurtent pas à des objections juridiques.
38. Le Conseil d'Etat considère que l'élargissement des conditions d'utilisation de SI-VIC ne concerne pas, dans leurs caractéristiques essentielles, les conditions de création ou de mise en œuvre d'un traitement ou une catégorie de traitements de données à caractère personnel, au sens de la décision n°s 408185-408192 du 20 juin 2018 du Conseil d'Etat statuant au contentieux, et estime par conséquent que la consultation préalable de la CNIL sur ce point ne revêtait pas un caractère obligatoire.
Mesures relatives aux praticiens titulaires d'un diplôme hors Union européenne
39. Le projet de loi rénove les modalités de recrutement des praticiens à diplôme étranger hors Union Européenne en mettant fin à leur recrutement par contrat, en modifiant les modalités de contrôle de leurs compétences et en améliorant les conditions de leur intégration dans le système de santé français. Les praticiens qui ont été présents dans un établissement public ou privé d'intérêt collectif au 31 décembre 2018, et qui justifient d’au moins deux ans équivalent temps plein depuis le 1er janvier 2015 sans avoir satisfait aux épreuves de vérification des connaissances obtiendront une autorisation temporaire d’exercice sous réserve du dépôt d’une demande visant à obtenir cette autorisation. Ces demandes sont instruites par une commission nationale, après avis par une commission régionale pour les médecins, et transmises au ministre en charge de la santé qui prend la décision d’autorisation définitive d’exercice, de rejet de la demande ou de prescription d’un parcours de consolidation des compétences. Les conditions de fin de l’autorisation temporaire d’exercice sont précisées.
Le Conseil d’Etat considère que ces dispositions, qui visent à répondre tant aux besoins du système de santé qu’à la nécessité de clarifier les conditions d’exercice de nombreux praticiens, ne se heurtent à aucun obstacle de nature constitutionnelle ou conventionnelle.
Le projet de loi prévoit l’affectation et la nomination des praticiens sur un statut de praticien associé, et non de praticien contractuel associé, et instaure une affectation spécifique pour la réalisation des fonctions probatoires, en réduisant la durée de ces dernières pour les médecins et les pharmaciens. Le Conseil d’Etat estime que ces mesures n’appellent pas d’observations.
Ratifications d'ordonnance et diverses mesures d'ordre social
40. Le projet de loi propose de ratifier 34 ordonnances. Ces ordonnances ont déjà fait l'objet de projets de loi de ratification déposés dans les délais prévus par l'habilitation sur le bureau des assemblées. Les ratifications envisagées n’appellent pas d’observations de la part du Conseil d’Etat.
41. Le projet de loi comprend également diverses mesures d'ordre social visant à compléter l'état du droit tel qu'il résulte de trois ordonnances qu'il ratifie
En premier lieu, les missions de la Haute Autorité de santé, telles qu'elles résultent de l'ordonnance n° 2017-84 du 26 janvier 2017, sont complétées pour lui permettre de répondre à des sollicitations internationales et procéder à la certification de l'agence de santé des îles de Wallis et Futuna dans les conditions prévues par les articles L. 6113-3 et L. 6113-4 du code de santé publique.
En deuxième lieu, sont reprises les mesures nouvelles d'extension et d'adaptation prévus dans le projet de loi de ratification de l'ordonnance n° 2017-1179 du 19 juillet 2017. Ainsi, le présent projet de loi étend et adapte, d'une part, pour la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, les conditions de pratique d'une interruption volontaire de grossesse par voie médicamenteuse et, d'autre part, pour les îles Wallis et Futuna, la possibilité de prescrire des activités sportives aux patients atteints de maladies chroniques.
En troisième lieu, sont modifiés des dispositions issues de l'ordonnance n° 2017-192 du 16 février 2017 afin de clarifier l’âge limite d'exercice des fonctions de président, président adjoint ou assesseur d'une chambre disciplinaire au sein d'un ordre des professions médicales ou paramédicales. Ces fonctions cessent lorsque la personne concernée est âgée de 77 ans. Le projet de loi reprend également les dispositions relatives aux conditions d'âge pour se porter candidat au sein d'un conseil ou d'une chambre disciplinaire d'un de ces ordres. Ces dispositions figuraient dans l'ordonnance du 16 février 2017 précitée et ont été annulées par trois décisions n° 409412, n°s 409869-409874 et n°s 409871-409875 du 25 mai 2018 du Conseil d’Etat statuant au contentieux au motif qu’elles n'entraient pas dans le champ de l'habilitation adoptée par le Parlement. Elles prévoient que les candidats ne doivent pas avoir atteint l'âge de 71 ans.
Ces dispositions n’appellent pas d’observations du Conseil d’Etat.
Cet avis a été délibéré et adopté par l’Assemblée générale du Conseil d’Etat dans sa séance du jeudi 7 février 2019.