Avis sur un projet de loi portant création de l’AFB-ONCFS, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l’environnement, et sur un projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.
CONSEIL D’ETAT
Section des travaux publics
Séances des 6 et 13 novembre 2018
N°s 396007 / 396008
EXTRAIT DU REGISTRE DES DÉLIBÉRATIONS
Avis sur un projet de loi portant création de l’AFB-ONCFS, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l’environnement, et sur un projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution
1. Le Conseil d’Etat a été saisi le 12 octobre 2018 d’un projet de loi portant création de l’AFB-ONCFS et d’un projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.
Ce projet de loi a été complété par une saisine rectificative, reçue le 23 octobre 2018, ajoutant au projet de loi initial un article qui modifie les dispositions du chapitre II du titre VII du livre Ier du code de l’environnement relatives à la recherche et à la constatation des infractions aux dispositions du code de l’environnement et des textes pris pour leur application, et comportant diverses mesures en matière de police judiciaire.
Sur la création de l’AFB-ONCFS
2. L’objet principal du projet de loi est la création d’un nouvel établissement public administratif de l’Etat, regroupant l’Agence française pour la biodiversité et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), auxquels il se substituera.
Il abroge les dispositions législatives actuelles fixant les caractéristiques essentielles de la catégorie d’établissement public que constituait l’Agence française pour la biodiversité. Il est, dès lors, nécessaire de fixer à nouveau dans la loi les règles constitutives de la catégorie d’établissement public à laquelle appartiendra l’établissement public AFB-ONCFS. Sont ainsi prévues dans le projet de loi les règles relatives à la spécialité de l’établissement ou au cadre général des missions qui lui sont confiées, à la détermination des organes dirigeants, leur rôle, les conditions de leur désignation et les catégories de personnes représentées en leur sein, aux catégories de ressources dont peut bénéficier l’établissement, ainsi qu’à la détermination de la collectivité de rattachement.
Les dispositions du projet de loi organisent, classiquement, la transmission des droits, biens et obligations des deux établissements publics qui vont être supprimés au nouvel établissement public, ainsi que la situation des personnels et des représentants du personnel au conseil d’administration, au comité technique et au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
Le projet de loi procède à des modifications de coordination (notamment la substitution du nom du nouvel établissement public à celui des anciens) dans le code de l’environnement, le code général des collectivités territoriales, le code général des impôts, le code rural et de la pêche maritime, le code civil, et dans le tableau annexé à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010.
Ces dispositions n’appellent pas de remarque particulière du Conseil d’Etat.
Sur les dispositions adaptant le cadre procédural dans lequel les fonctionnaires et agents habilités à rechercher et constater les infractions aux dispositions du code de l’environnement exercent des missions de police judiciaire
3. L’article du projet de loi issu de la saisine rectificative procède à des adaptations du cadre procédural dans lequel les fonctionnaires et agents habilités à rechercher et constater les infractions aux dispositions du code de l’environnement exercent des missions de police judiciaire, notamment en leur donnant la possibilité de procéder aux réquisitions prévues par les articles 77-1, 77-1-1 et 77-1-2 du code de procédure pénale.
Cet article modifie également les dispositions des articles L. 172-12 et L. 172-13 du code de l’environnement pour les adapter à la gestion des saisies d’animaux et de végétaux.
Il permet également au procureur de la République de confier aux inspecteurs de l’environnement la mise en œuvre des mesures alternatives aux poursuites pénales prévues par l’article 41-1 du code de procédure pénale.
Ces dispositions, qui respectent le principe résultant de l'article 66 de la Constitution selon lequel la police judiciaire doit être placée sous la direction et le contrôle de l'autorité judiciaire, n’appellent pas de remarque particulière du Conseil d’Etat.
Sur les dispositions relatives aux fédérations des chasseurs
4. Le projet de loi modifie des dispositions relatives à la chasse.
Il confie aux fédérations, nationale et départementales, des chasseurs la conduite d’actions qui concourent directement à la protection de la biodiversité, et leur impose une obligation de dépenses minimales au titre de ces actions.
Il confie aussi aux fédérations des chasseurs la mission de délivrance des autorisations de chasser accompagné, dévolue antérieurement à l’ONFCS, et rend obligatoire dans le même temps pour les accompagnateurs une formation à la sécurité à la chasse, adaptée à la mission d’accompagnement.
Il attribue au nouvel établissement public AFB-ONCFS la gestion du fichier central des permis de chasser délivrés, des validations et des autorisations de chasser. Cette mission, jusqu’alors dévolue à la Fédération nationale des chasseurs, doit permettre de mettre en œuvre une gestion adaptative de certaines espèces animales ou végétales.
Il crée également une obligation pour les fédérations départementales et interdépartementales des chasseurs de transmettre sans délai au gestionnaire de ce fichier central toute modification de la liste de leurs adhérents, et donne à la Fédération nationale des chasseurs un accès permanent à ces informations.
Il crée une section 6, au chapitre V du titre II du livre IV, intitulée « Obligation de transmission des prélèvements des spécimens de certaines espèces ». Il instaure, pour les chasseurs, une obligation de communication à la fédération de chasseurs dont ils relèvent des données de prélèvements qu’ils ont réalisés pour les espèces soumises à gestion adaptative, dont les catégories sont fixées par décret. Les fédérations de chasseurs devront, à leur tour, communiquer, au fur et à mesure qu’elles leur parviennent, ces données à l’établissement public AFB-ONCFS. Cette disposition donne également à la Fédération nationale des chasseurs un accès permanent à ces informations. Un décret en Conseil d’Etat précisera les modalités d'application de la section 6 ainsi créée.
L’omission de communication par les chasseurs des prélèvements qu’ils ont réalisés sur certaines espèces au cours d’une campagne cynégétique entraîne pour eux l’interdiction de prélever des spécimens de l’espèce en cause pour une durée d’une campagne cynégétique, et, en cas de réitération de manquement à cette obligation, pour une durée de cinq campagnes.
Le Conseil d’Etat a vérifié que les dispositions de la section 6 nouvelle respectaient celles, nationales et du droit de l’Union européenne, relatives à la protection des données personnelles.
Le Conseil d’Etat a également vérifié que la loi épuisait sa compétence en ce qui concerne la détermination des rôles respectifs de l’Etat et du nouvel établissement public dans la définition et la mise en œuvre de la gestion adaptative de certaines espèces animales ou végétales.
Pour le surplus, ces dispositions n’appellent pas de remarque particulière du Conseil d’Etat.
Sur l’habilitation en matière de contrôle administratif
5. Une habilitation est prévue par le projet de loi, afin de permettre au Gouvernement de prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi, pour, en premier lieu, harmoniser les procédures de contrôle administratif relatives à la police sanitaire figurant dans le code rural et de la pêche maritime avec celles définies au code de l’environnement, en deuxième lieu, créer, dans le code de l’environnement et le code rural et de la pêche maritime, un cadre applicable aux prélèvements d’échantillons réalisés à des fins d’analyse lors de contrôles administratifs, en troisième lieu, préciser les modalités de recouvrement des amendes, astreintes et consignations administratives prononcées par l’autorité administrative compétente en application de l’article L. 171-8 du code de l’environnement, et, en quatrième lieu, modifier dans le code de l'environnement les procédures de contravention de grande voirie affectant certains espaces naturels.
Cette habilitation, qui définit les différentes finalités avec une précision suffisante et ne conduit à remettre en cause aucune règle constitutionnelle, ni conventionnelle, n’appelle pas de remarque particulière de la part du Conseil d’Etat.
Sur le projet de loi organique
6. L’article unique du projet de loi organique modifie le tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, pour en supprimer la mention de la présidence du conseil d’administration de l’établissement public Agence française pour la biodiversité, et y inscrire la direction générale du nouvel établissement public AFB-ONCFS.
Ces dispositions n’appellent pas de remarque particulière du Conseil d’Etat.
Cet avis a été délibéré et adopté par la section des travaux publics dans ses séances des 6 et 13 novembre 2018.