Le Conseil d’État rejette les pourvois relatifs à l’interdiction du film Love aux moins de 18 ans.
Par une décision du 13 juillet 2015, la ministre de la culture et de la communication avait, après avis de la commission de classification des œuvres cinématographiques, accordé au film « Love » un visa d’exploitation, assorti d’une interdiction de diffusion aux moins de 16 ans et accompagné de l’avertissement selon lequel « les très nombreuses scènes de sexe sont susceptibles de heurter la sensibilité du spectateur ». L’association Promouvoir avait demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris de suspendre ce visa d’exploitation, en estimant que ce film ne pouvait pas seulement être interdit aux moins de 16 ans mais devait l'être aussi aux 16-18 ans.
La procédure du référé-suspension, régie par l’article L. 521-1 du code de justice administrative, permet en effet d’obtenir dans un bref délai la suspension d’un acte administratif en attendant que le juge se prononce définitivement sur sa légalité lorsque deux conditions sont simultanément réunies : il faut qu’il y ait une situation d’urgence justifiant la suspension et qu’il y ait un doute sérieux sur la légalité de la décision administrative contestée.
Par une ordonnance du 30 juillet 2015, le juge des référés du tribunal administratif a partiellement suspendu le visa d’exploitation : il a estimé que le film « Love » comportait de nombreuses scènes de sexe non simulées et en a déduit qu’il existait un doute sérieux sur la légalité du visa d’exploitation de ce film, qui n’interdisait sa diffusion qu’aux moins de 16 ans et non aux moins de 18 ans. La ministre de la culture, ainsi que des sociétés de production et de distribution, se sont alors pourvus en cassation devant le Conseil d’État.
Dans la décision rendue aujourd’hui, le Conseil d’État commence par préciser le cadre juridique. Il rappelle qu’en l’état actuel du droit (article R. 211-12 du code du cinéma et de l’image animée), un film qui comporte des scènes de sexe non simulées doit nécessairement être interdit aux moins de 18 ans (avec ou sans classement « X » selon les cas). Il souligne ensuite qu’il convient d’adopter le point de vue du spectateur pour déterminer si un film comporte des scènes de sexe non simulées : il faut prendre en considération la manière, plus ou moins réaliste, dont ces scènes sont filmées et l’effet qu’elles sont destinées à produire. Enfin, lorsqu’un film comporte des scènes de sexe non simulées, il faut apprécier la manière dont elles sont filmées et dont elles s’insèrent dans l’œuvre pour déterminer si le film, en plus d’être interdit aux moins de 18 ans, doit ou non être classé « X ».
Ce cadre juridique étant précisé, le Conseil d’État relève que le juge des référés du tribunal administratif n’a pas commis d’erreur en suspendant partiellement le visa d’exploitation au motif que le film Love aurait dû être interdit aux moins de 18 ans (sans classement « X »), en raison des nombreuses scènes de sexe non simulées qu’il comporte. Le Conseil d’État rejette donc les pourvois dont il était saisi.
Le tribunal administratif de Paris reste saisi du fond du litige et devra se prononcer définitivement sur la légalité du visa d’exploitation du film. En attendant qu’il rende son jugement, le film Love pourra donc être diffusé mais en étant interdit aux moins de 18 ans (sans classement « X »).