Les 10 et 11 mars 2025, le vice-président du Conseil d’État, Didier-Roland Tabuteau s’est rendu à Versailles dans le cadre de ses rencontres mensuelles en juridiction administrative. À cette occasion, découvrez l’activité du tribunal administratif et de la cour administrative d’appel, et notamment quelques affaires marquantes jugées récemment par ces deux juridictions.
Le tribunal administratif de Versailles
Le tribunal administratif de Versailles, présidé par Jenny Grand d’Esnon, a jugé 9 412 affaires au cours de l’année 2024, dont 2 173 en urgence « référé », dans un délai moyen de 8 mois et 3 jours. Il se compose de 41 magistrats et 60 agents de greffe et aides à la décision.
Il a récemment jugé des affaires concernant notamment les libertés fondamentales (aides aux familles de mineurs ayant troublé l’ordre public), le logement (salubrité de logements mis en location), de grands événements (sécurisation par drone du sommet « Choose France » au Château de Versailles), la responsabilité des administrations (indemnisation d’un piéton pour une chute), la vie démocratique locale (pavoisement de l’hôtel de ville de Saint-Germain-en-Laye dans les Yvelines) avec un drapeau ukrainien), ou encore la construction de logements (plan local d’urbanisme intercommunal de la communauté urbaine du Grand Paris Seine et Oise, projet de lotissement à Versailles sur la parcelle de la « maison Cassandre »).
La cour administrative d’appel de Versailles
Juge d’appel des affaires en provenance des tribunaux administratifs de Versailles, de Cergy-Pontoise, et d’Orléans, la cour administrative d’appel de Versailles, présidée par Nathalie Massias, a jugé 3 195 affaires en 2024, dans un délai moyen d’1 an, 2 mois et 28 jours. Elle se compose de 29 magistrats et 41 agents de greffe et aides à la décision.
Ces derniers mois, elle a jugé plusieurs affaires emblématiques concernant par exemple la santé (pollution de l’air en Île-de-France), la laïcité (agrément pour une aumônerie étudiante à l’université), les transports et les infrastructures (projet du tramway T10, construction de la future gare de Gonesse dans le Val d’Oise de la ligne de métro 17, l’agriculture (chartes départementales d’engagements des utilisateurs agricoles de pesticides) ou encore les énergies renouvelables (projets d’installation d’éoliennes).
Retour sur six affaires emblématiques jugées par le tribunal administratif et la cour administrative d'appel de Versailles …
SANTÉ
Accouchement mal pris en charge : un hôpital reconnu responsable
Saisie par une famille, la cour administrative d’appel de Versailles a reconnu en juin 2024 la responsabilité du centre hospitalier régional d’Orléans pour des troubles neurologiques et du spectre autistique diagnostiqués chez un enfant trois ans après sa naissance. La cour a jugé que 90 % des troubles de l’enfant avaient été causés par un déclenchement prématuré des efforts de poussée et l’absence de césarienne malgré des anomalies du rythme cardio-fœtal. L’hôpital a été condamné à indemniser les parents de l’enfant.
Décision de la cour administrative d’appel de Versailles n° 22VE01442 du 18 juin 2024
LIBERTÉS FONDAMENTALES
Conditions de détention à Bois d’Arcy : l’État sommé d’agir en urgence
Saisi en urgence par la section française de l’Observatoire international des prisons, l’association des avocats pour la défense des droits des détenus et l’ordre des avocats au barreau de Paris, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a ordonné en avril 2023 à l’État de mettre en place douze mesures pour garantir la sécurité et les droits des détenus du centre pénitentiaire de Bois d’Arcy où la surpopulation carcérale atteint 152,5 %. Les mesures imposées visent notamment à renforcer la sécurité incendie, améliorer l’hygiène alimentaire et sanitaire et assurer la dignité des détenus lors des fouilles.
Décision en référé du tribunal administratif de Versailles n° 2302657 du 17 avril 2023
RESPONSABILITÉ DES ADMINISTRATIONS, FONCTIONNAIRES ET ÉLUS
Révocation d’un policier après des violences urbaines confirmée
Saisie par un fonctionnaire révoqué, la cour administrative d’appel de Versailles a confirmé en octobre 2023 la sanction qui avait été prononcée à son encontre. Le policier avait incendié son propre véhicule dans la nuit du 13 au 14 février 2017, en pleine période de violences urbaines. La cour a estimé que ces faits constituaient des manquements graves aux devoirs de dignité, d’intégrité et d’exemplarité exigés de tout fonctionnaire, portant ainsi atteinte à l’image du service public de la police nationale.
Décision de la cour administrative d’appel de Versailles n° 21VE00711 du 19 octobre 2023
GRANDS ÉVÉNEMENTS
Sécurisation du sommet « Choose France » au Château de Versailles : l’usage des drones jugé légal
Saisi en urgence le matin du 15 mai 2023 par deux Versaillais, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a jugé que l’usage de drones pour sécuriser le sommet « Choose France » au Château de Versailles était légal. Il a estimé que cette mesure ne portait pas atteinte à la liberté de réunion ni à la liberté de circulation, car elle était limitée à un périmètre restreint et justifiée par la présence du Président de la République, de membres du Gouvernement et de hautes personnalités.
Décision en référé du tribunal administratif de Versailles n° 2303901 du 15 mai 2023
AGRICULTURE
Pesticides : les chartes départementales d’engagements annulées
Saisie par des associations, la cour administrative d’appel de Versailles a annulé en novembre 2024 les chartes départementales d’engagements des utilisateurs agricoles de pesticides adoptées par cinq des six départements de la région Centre-Val de Loire. Elle a jugé que ces chartes ne garantissaient pas suffisamment que l’épandage de pesticides ne se ferait pas à proximité des habitations et que les riverains recevraient une information adéquate s’ils étaient concernés.
CONSTRUCTION DE LOGEMENTS
Projet de lotissement à Versailles : la protection de la « maison Cassandre » confirmée
Saisi par un aménageur, le tribunal administratif de Versailles a jugé légal en novembre 2024 le refus du maire d’autoriser un projet de lotissement sur la parcelle de la « maison Cassandre ». Cette maison, conçue par Auguste et Gustave Perret et inscrite partiellement au titre des monuments historiques, bénéficie d’une protection patrimoniale. Le tribunal a estimé que le projet porterait atteinte à la mise en valeur de ce patrimoine en supprimant le jardin qui met en avant l’architecture symétrique et régulière du bâtiment.
Décision du tribunal administratif de Versailles n° 2203155 du 12 novembre 2024