Tarifs d'électricité

Décision de justice
Passer la navigation de l'article pour arriver après Passer la navigation de l'article pour arriver avant
Passer le partage de l'article pour arriver après
Passer le partage de l'article pour arriver avant

Le juge des référés du Conseil d’État rejette la demande de l’ANODE de suspendre l’arrêté du 28 juillet 2014 au motif que la condition d’urgence propre à la procédure de référé n’est pas remplie.

> Lire l’ordonnance

L’essentiel

Le juge des référés du Conseil d’État a rejeté la demande, présentée par l’ANODE, tendant à la suspension de l’arrêté du 28 juillet 2014 par lequel les ministres chargés de l’énergie et de l’économie ont supprimé la prévision d’évolution moyenne de 5% du tarif réglementé « bleu », qui était mentionnée dans un précédent arrêté du 26 juillet 2013.
• Sans se prononcer sur le bien-fondé des critiques formulées contre l’arrêté du 28 juillet 2014, le juge des référés a estimé que la condition d’urgence, qui est l’une des deux conditions cumulatives auxquelles l’article L. 521-1 du code de justice administrative subordonne la suspension d’un acte administratif, n’était pas remplie.
• Il a relevé, d’une part, que l’arrêté du 28 juillet 2014 n’avait qu’une portée temporaire, dans l’attente de la mise en place, très prochaine, de nouvelles modalités de tarification de l’électricité sur la base desquelles seront ensuite fixés de nouveaux tarifs.
• Il a constaté, d’autre part, qu’il n’était pas établi que cet arrêté porterait une atteinte grave et immédiate aux intérêts des producteurs représentés par l’ANODE, alors que, à l’inverse, la suspension de cet arrêté pourrait porter atteinte à l’intérêt des consommateurs.
• Le Conseil d’État se prononcera prochainement, au fond, sur la demande d’annulation introduite par l’ANODE contre ce même arrêté.

Le cadre juridique

Les tarifs réglementés de vente d’électricité sont actuellement arrêtés par les ministres chargés de l’énergie et de l’économie, après avis de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Un décret du 12 août 2009 précise, dans le cadre tracé par la loi, les modalités de fixation de ces tarifs, qui doivent notamment répercuter les coûts moyens complets de l’électricité distribuée par Électricité de France et les entreprises locales de distribution.
Le législateur a en outre entendu organiser, d’ici au 31 décembre 2015, une convergence tarifaire entre le niveau des tarifs réglementés de l’électricité et les coûts de fourniture de l’électricité distribuée à un tarif de marché. Les ministres doivent ainsi, dans la fixation des tarifs, également tenir compte de cet objectif de convergence

Les faits et la procédure

C’est dans ce contexte que, par un arrêté du 26 juillet 2013, les ministres chargés de l’économie et de l’énergie ont fixé les barèmes des tarifs réglementés « bleu » (pour les clients résidentiels et les petites entreprises), « jaune » (pour les entreprises moyennes) et « vert » (pour les entreprises électro-intensives). Cet arrêté traçait également une perspective d’augmentation du tarif « bleu », à compter du 1er août 2014, à un rythme de 5 % en moyenne par période tarifaire, ce rythme devant être ajusté en fonction des coûts effectifs.
Par un arrêté du 28 juillet 2014, entré en vigueur au 1er août 2014, les ministres ont toutefois supprimé la référence à un rythme prédéfini d’augmentation, qui figurait dans l’arrêté du 26 juillet 2013. Le tarif bleu reste donc, pour l’instant, inchangé.
L’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE), regroupant plusieurs fournisseurs « alternatifs » d’énergie, a saisi le Conseil d’État d’une demande d’annulation de cet arrêté du 28 juillet 2014 et a, parallèlement, demandé au juge des référés du Conseil d’Etat d’en suspendre l’exécution.
La procédure de référé-suspension, prévue par l’article L. 521-1 du code de justice administrative, est une procédure d’urgence dans laquelle un juge unique statue de manière provisoire, dans l’attente du jugement du recours au fond. La suspension est prononcée lorsque deux conditions cumulatives sont remplies : une situation d’urgence et l’existence d’un doute sérieux, en l’état de l’instruction, quant à la légalité de la décision attaquée.

La décision du juge des référés du Conseil d’État

Par l’ordonnance lue ce jour, le juge des référés du Conseil d’État a estimé que la condition d’urgence prévue à l’article L. 521-1 du code de justice administrative n’était pas remplie.
L’existence d’une situation d’urgence suppose que la décision en cause porte une atteinte suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. La condition d’urgence s’apprécie de manière globale, c’est-à-dire qu’il appartient au juge de mettre en balance les arguments qui plaident en faveur du maintien des effets de la décision administrative contestée et ceux qui, au contraire, vont dans le sens de leur suspension.
En l’espèce, le juge des référés a, tout d’abord, rappelé que l’arrêté du 28 juillet 2014 n’avait qu’une portée limitée et temporaire. Cet arrêté se borne en effet à supprimer la référence à la perspective d’un rythme de hausse moyenne de 5%. Il a été pris afin de permettre la détermination des nouveaux tarifs, au plus tard le 31 décembre 2014, en fonction d’une nouvelle méthode de construction des tarifs sur le point d’être adoptée par décret et en tenant compte, à cette fin, des éléments de coût les plus récents que produira prochainement la Commission de régulation de l’énergie.
Le juge des référés a en outre constaté que, compte tenu des éléments produits par l’Anode, il n’apparaissait pas que cet arrêté entraînerait pour les producteurs alternatifs une dégradation de marge nette ou de rentabilité de nature à compromettre leur activité, ni qu’il serait susceptible d’affecter durablement la concurrence. A l’inverse, le juge des référés a relevé que la suspension demandée risquerait de perturber l’application des futurs tarifs réglementés aux consommateurs, plus particulièrement aux consommateurs résidentiels.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, et compte tenu des délais dans lesquels le Conseil d’État devrait statuer sur la requête au fond, le juge des référés a estimé qu’il n’existait pas de situation d’urgence justifiant la suspension de l’arrêté litigieux. L’une des deux conditions cumulatives prévues par la loi n’étant pas remplie, il a donc, sans se prononcer sur le sérieux des critiques formulées contre la légalité de l’arrêté attaqué, rejeté la demande de suspension.