Le Conseil d’État précise que comme le prévoit la loi, un médecin ne peut être poursuivi devant les juridictions disciplinaires à raison d’un signalement de maltraitance d’un mineur lorsqu’il a fait son signalement conformément aux termes de la loi et qu’il a agi de bonne foi. Dans l’affaire jugée aujourd’hui, le Conseil d’État estime que le médecin a signalé le comportement d’une mère de famille après l’avoir reçue en consultation avec sa fille, et qu’il a agi dans le but de protéger cet enfant. Il s’ensuit qu’il ne pouvait faire l’objet de poursuites disciplinaires à ce sujet.
En 2017, un médecin d’un centre médico-psychologique pour enfants et adolescents a alerté la cellule départementale de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes (CRIP) au sujet d’un enfant susceptible d’être l’objet de maltraitances psychologiques par sa mère. Âgé de 9 ans, cet enfant était pris en charge dans ce centre, à la suite d’une première information préoccupante transmise quelques mois plus tôt par d’autres professionnels de santé. Cet enfant a été placé par le juge des enfants, après le signalement de ce médecin.
La mère de l’enfant a décidé de porter plainte contre le médecin auprès de la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des médecins territorialement compétente pour le signalement qu’il avait effectué. La chambre disciplinaire a rejeté sa plainte en 2019, une décision confirmée en appel par la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins en 2020. La mère de l’enfant a alors saisi le Conseil d’État en cassation.
Conformément à l’article 226-14 du code pénal, le Conseil d’État juge que lorsqu’un médecin signale au procureur de la République ou à la CRIP des faits et éléments venus à sa connaissance dans le cadre de son exercice professionnel, laissant penser qu’un mineur subit des violences physiques, sexuelles ou psychiques, sa responsabilité disciplinaire ne peut être engagée, sauf s’il est démontré qu’il a agi de mauvaise foi. Le législateur, en particulier par la loi du 5 novembre 2015 tendant à clarifier la procédure de signalement de situations de maltraitance par les professionnels de santé, a en effet entendu protéger ces professionnels contre l’engagement de leur responsabilité disciplinaire –ainsi que d’ailleurs civile ou pénale–, à raison d’un signalement qu’ils ont dûment effectué.
En l’espèce, le Conseil d’État relève que la juridiction d’appel a estimé que le médecin avait procédé à un signalement à la CRIP compétente après avoir recueilli des éléments en recevant en consultation l’enfant et sa mère et qu’il avait agi de bonne foi en vue de protéger l’enfant. C’est pourquoi il confirme aujourd’hui l’analyse de la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins qui avait jugé que le praticien ne pouvait être poursuivi sur le plan disciplinaire à raison de ce signalement.