Le juge des référés du Conseil d’État ordonne au préfet du Var de faire usage de son pouvoir hiérarchique vis-à-vis du maire de Fréjus pour autoriser au nom de l’État, en exécution d’une précédente ordonnance de référé, l’ouverture provisoire de la mosquée de Fréjus.
En 2011, l’association musulmane El Fath a obtenu un permis de construire pour l’édification d’une mosquée dans la commune de Fréjus. A la suite de l’achèvement des travaux, elle a sollicité du maire de lui délivrer, au nom de l’État, l’autorisation d’ouverture du bâtiment (requise par le code de la construction et de l’habitation pour les établissements recevant du public). En dépit de l’avis favorable de la sous-commission départementale de sécurité, le maire a rejeté cette demande le 5 août 2015, interdisant ainsi l’ouverture de la mosquée.
L’association El Fath a alors saisi le juge des référés du tribunal administratif de Toulon d’un référé-liberté. Par une ordonnance du 17 septembre 2015, le juge des référés du tribunal administratif a relevé que le refus d’autoriser l’ouverture de la mosquée n’était fondé sur aucun motif légal ; il a donc suspendu la décision du 5 août 2015 et enjoint au maire de réexaminer la demande d’autorisation dans un délai de quinze jours. Le maire n’ayant toutefois pris aucune nouvelle décision sur cette demande d’autorisation, l’association musulmane El Fath et plusieurs fidèles ont engagé une nouvelle instance. Par une ordonnance du 9 novembre 2015, le juge des référés du Conseil d’Etat a alors enjoint au maire de Fréjus d’accorder, à titre provisoire, l’autorisation d’ouverture de la mosquée, dans un délai de huit jours et sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
En l’absence d’exécution de cette décision de justice par le maire de Fréjus, le juge des référés du Conseil d’État a, par une ordonnance du 3 décembre 2015, procédé à la liquidation de l’astreinte en condamnant la commune de Fréjus à verser la somme globale de 6 500 euros à l’association El Fath.
Le maire de Fréjus n’ayant toujours pas exécuté l’ordonnance du 9 novembre 2015, l’association a demandé au préfet du Var de faire usage des pouvoirs qu’il tient de l’article L. 2122-34 du code général des collectivités territoriales pour y procéder d’office. Cet article permet en effet au préfet, lorsque le maire refuse ou néglige de faire un des actes prescrits par la loi dans une compétence qu’il exerce au nom de l’État, de le mettre en demeure de le faire puis d’y procéder d’office par lui-même. À la suite du refus du préfet, l’association a saisi le juge du référé-liberté du tribunal administratif de Toulon. Par une ordonnance du 24 décembre 2015, celui-ci a rejeté sa demande.
Saisi en appel, le juge des référés du Conseil d’État a annulé cette ordonnance et enjoint au préfet du Var de faire usage de ses pouvoirs pour assurer l’exécution de l’ordonnance du 9 novembre 2015 dans un délai de 72 heures.
Il a rappelé que le pouvoir d’autoriser l’ouverture des établissements recevant du public est exercé par le maire au nom de l’État. Il en résulte que le préfet dispose, en cette matière, d’un pouvoir hiérarchique qui lui permet de faire usage des prérogatives de l’article L. 2122-34 du code général des collectivités territoriales.
Or les décisions d’un juge des référés sont des décisions de justice exécutoires et obligatoires : les autorités administratives doivent prendre les mesures qu’elles impliquent. Le juge des référés du Conseil d’État a donc estimé que, face au refus persistant du maire d’exécuter l’ordonnance du 9 novembre 2015, le préfet devait faire usage de son pouvoir hiérarchique en la matière. Ainsi, en refusant de le faire, il a porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit à un recours effectif, qui implique le respect des décisions de justice, ainsi que, par voie de conséquence, aux libertés fondamentales de culte et d’expression, que l’ordonnance du 9 novembre 2015 avait pour objet de sauvegarder.
Le préfet du Var est donc tenu, dans les 72 heures, de mettre en œuvre son pouvoir hiérarchique pour assurer l’exécution de l’ordonnance du juge des référés du Conseil d’État du 9 novembre 2015 en délivrant l’autorisation d’ouverture provisoire de la mosquée de Fréjus.