Le Conseil d’État annule deux décisions du CSA réglant des différends relatifs à la numérotation des chaînes NRJ 12 et BFM TV dans l’offre commerciale de « Canalsat ».
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Le 17 décembre 2009, le Conseil supérieur de l’audiovisuel avait enjoint à la société Canal+ Distribution d’établir un nouveau plan de services de son offre par satellite et ADSL « Canalsat » attribuant en principe aux chaînes NRJ 12 et BFM TV les numéros 12 et 15. Le Conseil d’État annule les décisions du CSA pour erreur de droit.
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a classé les chaînes de la télévision numérique terrestre (TNT) diffusées en clair gratuitement selon une « numérotation logique » de 1 à 18, les numéros 1 à 7 étant réservés aux sept chaînes dites « historiques » (celles qui étaient, avant le passage au numérique, disponibles au niveau national en mode analogique).
L’offre commerciale de chaînes « Canalsat », distribuée en mode numérique par satellite ou par ADSL, si elle offre les 7 premières chaînes « historiques » selon leur numéro de diffusion en clair, présente les autres chaînes de la TNT non pas aux numéros suivants (soit de 8 à 18), mais d’une part dans divers ensembles thématiques et d’autre part dans un ensemble dédié à la « TNT gratuite » situé aux numéros 301 à 318.
Les sociétés NRJ 12 et BFM TV occupent respectivement les numéros 12 et 15 dans la « numérotation logique » de la TNT établie par le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Elles désirent conserver ces numéros sur tous les supports de diffusion. Face au refus de la société Canal+ Distribution, exploitant l’offre « Canalsat », d’accéder à cette volonté, elles ont saisi le CSA, autorité de régulation, pour obtenir le règlement de ces différends, selon la procédure de l’article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986. Le CSA, par deux décisions du 17 décembre 2009, a enjoint à la société Canal+ Distribution d’établir un nouveau plan de services de l’offre « Canalsat » attribuant en principe aux chaînes NRJ 12 et BFM TV les numéros 12 et 15 et ne distinguant pas les chaînes « historiques » des autres chaînes de la TNT. La société Canal+ Distribution a alors saisi le Conseil d’Etat selon la procédure d’urgence des référés, et obtenu la suspension de l’exécution des décisions du CSA.
Parallèlement à cette procédure de référé avait été engagé un recours au fond, demandant l’annulation de ces décisions. Le Conseil d’État les a annulées, estimant que le CSA avait commis une erreur de droit. Ces décisions étaient en effet fondées sur une interprétation de l’article 18 de la loi du 5 mars 2009, ayant modifié l’article 34-4 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, selon laquelle le législateur aurait entendu interdire aux distributeurs de structurer leur offre de services dans le respect partiel de la « numérotation logique » de 1 à 18, en ne réservant le maintien de ces numéros qu’au profit des seules chaînes « historiques ».
Or la loi se borne à prévoir qu’à défaut d’un respect de la « numérotation logique » par les distributeurs - c’est-à-dire lorsque ces derniers ne reprennent pas aux numéros 1 à 18 la séquence des chaînes de la TNT - ils ont pour obligation de réserver à ces chaînes un ensemble homogène respectant cette séquence et placé juste après un multiple de 100. Ils conservent la possibilité de les reprendre à d’autres emplacements de leur plan de services, notamment dans des ensembles thématiques, mais à condition que ces thématiques, leur ordonnancement et l’ordre des chaînes à l’intérieur de ces thématiques soient définis selon des critères équitables, transparents, homogènes et non discriminatoires.
Dès lors, le Conseil d’État a estimé que le distributeur, qui avait respecté la consigne de la numérotation logique précédée d’un multiple de 100 pour numéroter son bloc « TNT gratuite », n’avait pas l’obligation de conserver de surcroît leur numéro logique aux nouvelles chaînes de la TNT pour les créneaux 8 à 18, alors même que les chaînes « historiques » ont, elles, conservé les numéros 1 à 7.
Statuant ensuite sur les demandes subsidiaires que NRJ 12 et BFM TV avaient présentées au CSA, le Conseil d’Etat n’a pas remis en cause le rattachement de la chaîne NRJ 12 à la thématique « séries et divertissements » plutôt qu’à celle des « grandes chaînes généralistes », que cette dernière contestait. Il a en revanche enjoint à Canal+ Distribution d’attribuer à la chaîne BFM TV, à l’intérieur de la thématique « information » de son plan de services, un emplacement justifié par des critères objectifs et homogènes. Cette dernière souhaitait en effet un numéro immédiatement voisin des chaînes i-Télé et LCI, ce qu’elle n’avait pas obtenu, alors même que la nature de l’information effectivement diffusée par BFM TV ne présentait pas de différence suffisante pour justifier objectivement l’emplacement qui lui avait été attribué par Canal+ Distribution.
Conseil d’État, 9 juillet 2010, Société Canal+ Distribution, n° 335336