Le Conseil d’État rejette les recours contre le décret fixant le nom de la région Occitanie.
L’Essentiel :
Par un décret du 28 septembre 2016, le Premier ministre a donné le nom Occitanie à la région issue du regroupement des régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées. Ce décret a été pris après avis du conseil régional de la nouvelle région, qui avait proposé le nom Occitanie. Pour rendre cet avis, le conseil régional avait procédé à une consultation ouverte.
Le Conseil d’État, saisi par des associations et des particuliers, rejette les requêtes demandant l’annulation de ce décret.
Il précise pour la première fois les règles et principes encadrant le recours à des consultations ouvertes. En l’espèce, il estime que la consultation organisée par la nouvelle région n’était pas irrégulière.
Le Conseil d’État juge qu’en retenant le nom Occitanie, le Premier ministre n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.
Les faits et la procédure :
La loi du 16 janvier 2015 a substitué aux vingt-deux régions métropolitaines treize régions, dont certaines étaient constituées du regroupement de régions. Dans un tel cas, la loi a prévu que le nom définitif de la région serait fixé par décret en Conseil d’État, après avis du conseil régional de la région.
S’agissant de la région issue du regroupement entre les régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées, le conseil régional de la nouvelle région, saisi pour rendre un avis, a décidé le 11 mars 2016 d’engager un « processus de détermination du nom ». Il a, dans ce cadre, recueilli l’avis de divers institutions et organismes régionaux, et constitué un « comité du nom de la région », chargé de l’assister dans sa réflexion. Par une résolution du 4 avril 2016, ce comité a transmis au conseil régional une liste de huit propositions de nom.
Le 15 avril 2016, le conseil régional a décidé de soumettre à une consultation publique ouverte à toutes les personnes de quinze ans et plus habitant la région ou déclarant y avoir leur attache une liste de cinq propositions, issue des huit propositions du comité. Ces cinq propositions étaient : Occitanie, Languedoc-Pyrénées, Pyrénées-Méditerranée, Occitanie-Pays Catalan et Languedoc. Dans le cadre de cette consultation, les personnes intéressées ont pu, du 9 mai au 10 juin 2016, faire connaître leur ordre de préférence entre les cinq noms, en envoyant par voie postale un formulaire papier ou en répondant sur un formulaire figurant sur le site internet de la région. A l’issue de cette consultation, le nom Occitanie a été placé au premier rang par 44,90 % des avis exprimés, pourcentage plus de deux fois supérieur au nom « Languedoc-Pyrénées », arrivé en 2e position.
Par une délibération du 24 juin 2016, le conseil régional a proposé au Gouvernement de dénommer la nouvelle collectivité « Région Occitanie ». Par décret du 28 septembre 2016, le Premier ministre a décidé que la nouvelle région serait dénommée Occitanie.
Des associations et des particuliers ont demandé au Conseil d’État l’annulation de ce décret.
La décision du Conseil d’État :
Par la décision de ce jour, le Conseil d’État rejette les requêtes dont il est saisi.
1. Il juge tout d’abord qu’il n’est pas établi que le Premier ministre se serait senti tenu de suivre l’avis émis par le conseil régional et aurait ainsi abandonné son pouvoir de décision au lieu de l’exercer.
2. Le Conseil d’État juge ensuite que la région pouvait légalement, pour rendre son avis, procéder à une consultation ouverte dans le cadre défini par l’article L. 131-1 du code des relations entre le public et l’administration. Ce texte prévoit que l’administration peut décider d’associer le public à la conception d’une réforme ou à l’élaboration d’un projet ou d’un acte, selon des modalités qu’elle définit.
Le Conseil d’État précise pour la première fois les règles et principes encadrant ce type de consultation. Il juge que l’autorité administrative doit fixer les modalités de la concertation dans le respect, d’une part des règles fixées par la loi, d’autre part des principes d’égalité et d’impartialité, dont il découle que la consultation doit être sincère. Ainsi :
- elle doit mettre à disposition des personnes concernées une information claire et suffisante sur l’objet de la consultation et ses modalités ;
- elle doit leur laisser un délai raisonnable pour participer ;
- elle doit veiller à ce que les résultats ou les suites envisagées soient, au moment approprié, rendus publics ;
- elle doit définir un périmètre du public consulté qui soit pertinent au regard de l’objet de la consultation ;
- elle doit prendre les mesures de nature à empêcher que le résultat de la consultation soit vicié par des avis à répétition ou des avis émis par des personnes extérieures au périmètre ;
- elle doit enfin veiller au bon déroulement de la consultation dans le respect des modalités qu’elle a fixées.
En l’espèce, le Conseil d’État juge que la consultation organisée par la nouvelle région n’était pas irrégulière. Il estime notamment que le périmètre du public consulté n’était pas dénué de pertinence au regard de l’objet de la consultation. Il relève en outre que le conseil régional a exigé des personnes exprimant leur avis sur Internet qu’elles indiquent un numéro de portable français et une adresse électronique, dont la validité était vérifiée.
3. Enfin, le Conseil d’État estime qu’en retenant le nom Occitanie pour la région issue du regroupement entre les régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées, le Premier ministre n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation. Il relève notamment que ce nom évoque une langue et une culture historiques dont l’aire géographique et historique inclut la majeure partie du territoire de la région.
4. Le Conseil d’État écarte l’ensemble des autres critiques dirigées contre le décret. Il rejette donc les requêtes dont il était saisi.