Le Conseil d’État rejette pour défaut d’urgence la demande de suspension de la circulaire organisant les modalités d’inscription des bacheliers dans l’enseignement supérieur.
L’Essentiel :
Par une circulaire du 24 avril 2017, adressée aux autorités académiques, le ministre chargé de l’enseignement supérieur a précisé les modalités d’inscription des bacheliers, via le portail « admission post-bac » dit APB, en première année de licence ou en première année commune aux études de santé (PACES), dans les établissements ou les filières où le nombre de candidats excède le nombre de places disponibles. Cette circulaire prévoit qu’en dernier recours, les candidats sont départagés par un tirage au sort.
Deux associations ont demandé en urgence au juge des référés du Conseil d’État la suspension de l’exécution de cette circulaire. Le Conseil d’État est par ailleurs saisi d’une demande d’annulation pour excès de pouvoir de cette circulaire.
Par l’ordonnance rendue ce jour, le juge des référés du Conseil d’État rejette la demande de suspension. Il juge que la condition d’urgence, qui est l’une des deux conditions nécessaires pour qu’il soit fait droit à la demande, n’est pas remplie.
Les faits et la procédure :
Depuis plusieurs années, le nombre de candidatures à une formation non sélective en première année de licence ou en première année commune aux études de santé excède notablement, dans quelques établissements universitaires et pour certaines filières, le nombre de places disponibles. L’article L. 612-3 du code de l’éducation, qui reconnaît le droit de tout bachelier à être inscrit, renvoie à « une réglementation établie par le ministre chargé de l’enseignement supérieur » les modalités d’inscriptions dans les cas où l’effectif des candidatures est supérieur aux capacités d’accueil de l’établissement.
Dans une circulaire du 24 avril 2017 adressée aux autorités académiques (circulaire n° 2017-077 du 24 avril 2017 prise en application des dispositions du 2ème alinéa de l’article L. 612-3 du code de l’éducation), la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche a précisé comment les candidats, qui doivent être préinscrits sur le portail « admission post-bac » dit portail APB, sont départagés en fonction des critères établis par l’article L. 612-3 du code de l’éducation (domicile, situation de famille du candidat, préférences exprimées par celui-ci). Pour départager les candidats qui auraient obtenu, par application de ces critères, le même ordre de priorité et qui ne pourraient pas être tous accueillis dans une formation donnée, il est recouru à un tirage au sort.
Les associations « SOS Education » et « Promotion et défense des étudiants », opposées en particulier au principe d’un tirage au sort, ont demandé au juge des référés du Conseil d’État la suspension de l’exécution de cette circulaire dans le cadre d’une procédure de référé-suspension.
Cette procédure, régie par l’article L. 521-1 du code de justice administrative, permet d’obtenir dans un bref délai la suspension d’un acte administratif en attendant que le juge se prononce définitivement sur sa légalité lorsque deux conditions sont simultanément réunies : il faut qu’il y ait une situation d’urgence justifiant la suspension et qu’il y ait un doute sérieux sur la légalité de la décision administrative contestée.
L’ordonnance de ce jour :
Dans l’ordonnance rendue ce jour, le juge des référés du Conseil d’État rejette la demande de suspension présentée par les associations, au motif que la condition d’urgence n’est pas remplie.
Pour apprécier l’urgence à suspendre l’exécution d’une décision administrative, le juge des référés procède toujours à une appréciation globale et objective de l’urgence. Il met ainsi en balance les éléments qui caractérisent l’urgence à exécuter l’acte litigieux avec les éléments qui au contraire caractérisent l’urgence à en paralyser l’exécution. Dans cette affaire, le juge des référés a estimé que les premiers pesaient plus lourds que les seconds.
D’une part, la capacité limitée d’accueil des établissements et la nécessité d’assurer, notamment, la sécurité des étudiants et la qualité de l’enseignement, rendent en effet indispensable l’édiction d’une réglementation permettant de départager les candidats à une inscription en premier cycle universitaire lorsqu’ils sont trop nombreux. D’autre part, dans l’hypothèse de la suspension de la circulaire, le ministre de l’enseignement supérieur serait dans l’impossibilité d’édicter en temps utile une réglementation différente. Par ailleurs, les autorités académiques, contraintes par les capacités d’accueil des établissements, seraient quant à elles tenues de limiter le nombre de candidats inscrits, ce qui conduirait à ce que tous les candidats ne voient pas leurs vœux satisfaits. Dans ces conditions, le juge des référés estime qu’il n’est pas établi que la suspension de la circulaire, à quelques jours du début de la procédure d’attribution des places aux candidats, permettrait de prévenir les atteintes aux intérêts défendus par les associations requérantes, c’est-à-dire permettrait de garantir que chaque candidat puisse être inscrit dans l’établissement et la filière universitaire de son choix.
Le Conseil d’État statuera dans les prochains mois sur la légalité de cette circulaire dans le cadre du recours pour excès de pouvoir au fond.