Le Conseil d’État rejette le recours de deux conseillers régionaux, MM. Wallerand de Saint-Just et Nicolas Bay, contre les arrêtés préfectoraux prononçant leur démission d’office en exécution des peines d’inéligibilité prononcées à leur encontre par le juge pénal. Il n’a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité contestant la conformité à la Constitution des dispositions en cause du code électoral, telles qu’interprétées constamment par le Conseil d’État, imposant au préfet de prononcer la démission d’office de conseillers régionaux frappés par le juge pénal d’une peine d’inéligibilité avec exécution provisoire. En effet, le Conseil constitutionnel a validé dans une décision récente du 28 mars 2025 les dispositions analogues relatives aux conseillers municipaux dans la même interprétation qu’en avait faite le Conseil d’État.
Le 31 mars 2025, M. Wallerand de Saint-Just, conseiller régional d’Île-de-France, et M. Nicolas Bay, conseiller régional de Normandie, ont été condamnés par le tribunal judiciaire de Paris à des peines d’inéligibilité de trois ans avec exécution provisoire, c’est-à-dire avec application immédiate. Conformément au code électoral, le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, et le préfet de la région Normandie, préfet de la Seine-Maritime, ont, par deux arrêtés du 10 avril 2025, déclaré ces deux élus démissionnaires d’office de leurs mandats respectifs.
Par ailleurs, dans le cadre d’une autre affaire pénale, M. Wallerand de Saint-Just avait été condamné, par un arrêt de la cour d’appel de Paris du 15 mars 2023, à une peine d’inéligibilité de deux ans rendue définitive par un arrêt de la Cour de cassation du 19 juin 2024. À ce titre, le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris l’a, par un nouvel arrêté du 29 avril 2025, déclaré démissionnaire d’office de son mandat de conseiller régional d’Île-de-France.
Les deux élus déclarés démissionnaires d’office ont demandé au Conseil d’État l’annulation des différents arrêtés des préfets et la transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel mettant en cause la conformité à la Constitution des règles du code électoral qui leur ont été appliquées, telles qu’interprétées de façon constante par la jurisprudence du Conseil d’État, en application de laquelle un élu local condamné à une peine d’inéligibilité avec exécution provisoire doit être démis d’office par le préfet. Ils estimaient notamment que ces dispositions ne respectaient pas le principe d’égalité devant la loi en raison d’une différence de traitement entre conseillers régionaux et parlementaires, le Conseil constitutionnel ne prononçant la déchéance du mandat de ces derniers qu’en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité devenue définitive.
Mais le Conseil constitutionnel s’est prononcé le 28 mars dernier sur la différence de traitement entre les parlementaires et les conseillers municipaux. Il a validé les dispositions législatives applicables aux conseillers municipaux, dans l’interprétation faite par le Conseil d’État de ces dispositions, en relevant qu’ils ne se trouvaient pas dans la même situation que les parlementaires, eu égard aux prérogatives que ces derniers tiennent de la Constitution (participation à l’exercice de la souveraineté nationale, vote de la loi et contrôle de l’action du gouvernement).
Le Conseil d’État relève que les dispositions du code électoral applicables aux conseillers régionaux et leur situation sont analogues aux dispositions applicables aux conseillers municipaux et à la situation de ces derniers. C’est pourquoi il juge qu’il n’y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité mettant en cause la conformité à la Constitution de ces règles applicables aux conseillers régionaux.
Par ailleurs, le Conseil d’État relève que les dispositions du code électoral sur l’inéligibilité avec exécution provisoire prononcée par le juge pénal sont conformes au droit européen et au droit international.
Pour ces raisons, le Conseil d’État rejette le recours de M. Nicolas Bay.
S’agissant de M. Wallerand de Saint-Just, le Conseil d’État juge qu’en prenant le second arrêté le déclarant démissionnaire d’office à la suite de sa condamnation à une peine d’inéligibilité devenue définitive, le préfet a abrogé l’arrêté antérieur le déclarant démissionnaire d’office à la suite de son autre condamnation à une peine d’inéligibilité assortie de l’exécution provisoire. Le Conseil d’État prononce donc un non-lieu sur le recours de M. Wallerand de Saint-Just contre le premier arrêté du 10 avril 2025 et rejette son recours contre le second arrêté du 29 avril 2025, confirmant ainsi la démission d’office de son mandat de conseiller régional d’Île-de-France.
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