Laïcité : l’interdiction du port de tenues de type abaya à l’école est conforme à la loi

Décision de justice
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Après deux premières décisions (1) (2) rendues en référé, le Conseil d’État juge que le ministre de l’éducation nationale a pu légalement interdire, à la rentrée scolaire de 2023, le port de tenues de type abaya par les élèves dans les établissements scolaires publics. Au regard du comportement des élèves portant ces tenues, utilisées dans une logique d’affirmation religieuse, ainsi qu’il a été rapporté dans de très nombreux signalements des rectorats, le port de telles tenues pouvait être considéré comme une manifestation ostensible d’une appartenance religieuse, interdite par la loi du 15 mars 2004.

À la rentrée scolaire 2023, le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse a publié une note de service indiquant que le port de tenues de type abaya par les élèves au sein des écoles, collèges et lycées publics constitue une manifestation ostensible d’appartenance religieuse qui est interdite par la loi. Plusieurs associations ont saisi le Conseil d’État pour en demander la suspension puis l’annulation. Les demandes de suspension ont été rejetées par le juge des référés du Conseil d’État en septembre 2023. Le Conseil d’État juge aujourd’hui, au fond, que la note de service du ministre de l’éducation nationale est conforme à la loi.

Le Conseil d’État rappelle tout d’abord que le Préambule de la Constitution de 1946, confirmé par celui de la Constitution de 1958, proclame que « l’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’État ». Il relève également que l’article 1er de la loi du 15 mars 2004 (article L. 141-5-1 du code de l’éducation) interdit le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse dans les écoles, les collèges et les lycées publics. Comme il l’avait déjà fait dans de précédentes décisions, il précise que cet article interdit ainsi les signes ou les tenues dont le port manifeste ostensiblement une appartenance religieuse, soit par lui-même, soit en raison du comportement de l’élève.

Le Conseil d’État observe que les signalements d’atteintes à la laïcité à l’école ont sensiblement augmenté : 4 710 signalements ont été effectués à ce titre au cours de l’année scolaire 2022-2023 (2 167 et 2 226 les deux années précédentes). En outre, 1 984 d’entre eux (contre 148 en 2020-2021 et 617 en 2021-2022) concernaient le port de signes ou de tenues susceptibles d’être interdits par la loi du 15 mars 2004 et majoritairement le port de tenues de type abaya. Il relève par ailleurs que le port de ces tenues s’inscrit dans une logique d’affirmation religieuse, le dialogue entre les établissements et les élèves concernées ayant fait apparaître qu’il s’accompagne d’un discours stéréotypé, inspiré d’argumentaires diffusés sur les réseaux sociaux et élaborés pour contourner l’interdiction inscrite dans la loi.

Le Conseil d’État juge donc qu’à la date de publication de la note de service contestée, le port de tenues de type abaya par les élèves dans les établissements d’enseignement publics pouvait être regardé comme manifestant ostensiblement une appartenance religieuse, et comme étant dès lors interdit par la loi du 15 mars 2004.

Pour ces raisons, le Conseil d’État rejette aujourd’hui la demande d’annulation de la note de service interdisant le port de tenues de type abaya dans les établissements d’enseignement publics.

 

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(1) Ordonnance de référé n° 487891 du 7 septembre 2023

(2) Ordonnance de référé n° 487896 du 25 septembre 2023