Saisi par une association et plusieurs sociétés de jeux d’argent et de hasard, le Conseil d’État juge aujourd’hui que le monopole accordé à la Française des Jeux en 2019 sur l’exploitation de certains jeux est conforme au droit de l’Union européenne. L’attribution de droits exclusifs à une seule société permet de protéger la santé et l’ordre public en luttant, notamment, contre le risque de jeu excessif et la fraude, par un circuit contrôlé et une progression limitée du nombre de jeux proposés et de points de vente.
En 2019, une loi a autorisé le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société La Française des Jeux1. Le Gouvernement a ensuite pris plusieurs textes, dont une ordonnance2, pour préciser les conditions de ce transfert : attribution de droits exclusifs sur certains segments des jeux d’argent et de hasard, contrôle de l’État, régulation du secteur. Une association et plusieurs sociétés de jeux ont demandé au Conseil d’État l’annulation de ces textes.
Le Conseil d’État juge aujourd’hui que le Gouvernement, en accordant des droits exclusifs à une société privée soumise à un contrôle étroit des pouvoirs publics, a poursuivi un objectif d’intérêt général, consistant à protéger la santé et l’ordre public en raison des risques avérés de jeu excessif, de fraude et d’exploitation des jeux de loterie à des fins criminelles. Cet objectif justifie de limiter la libre prestation de services et la liberté d’établissement, comme l’a déjà jugé la Cour de justice de l’Union européenne.
Le Conseil d’État juge également que la durée de 25 ans des droits exclusifs accordés à La Française des Jeux n’est pas excessive. Le Gouvernement pouvait choisir une telle durée, en sachant qu’il appartient à l’État, durant cette période, de s’assurer que les mesures instituées restent proportionnées à la réalisation des objectifs fixés de protection des consommateurs de jeux et, dans le cas contraire, d’y mettre fin. Il relève à cet égard que les obligations et les restrictions qui sont imposées à La Française des Jeux, ainsi que les modalités de contrôle renforcées exercées par l’Autorité nationale des jeux, permettent d’orienter sa politique promotionnelle et de s’assurer que son offre de jeux reste quantitativement limitée et qualitativement aménagée.
Pour ces raisons, le Conseil d’État juge que le monopole octroyé à La Française des Jeux sur certains segments de jeux, même s’il restreint l’activité économique des autres acteurs du secteur, est conforme au droit de l’Union européenne. Le Conseil d’État rejette ainsi la demande des requérants.
Concernant enfin la rémunération due à l’État par La Française des Jeux en échange des droits exclusifs accordés (fixée à 380 millions d’euros), dont certains requérants estiment qu’elle constituerait une aide d’État illégale en raison de son insuffisance, le Conseil d’État se prononcera après la décision qui sera rendue prochainement par la Commission européenne sur ce sujet.
Lire les décisions nos 436434 et suivants et nos 436439 et suivants
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1 Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises
2 Ordonnance n° 2019-1015 du 2 octobre 2019 réformant la régulation des jeux d'argent et de hasard