Le Conseil d’État juge que l’Arcom n’a pas commis d’illégalité dans son analyse qui l’a amenée à écarter C8 et NRJ12, aussi bien dans l’appréciation qu’elle a portée sur chacun des dossiers que dans la comparaison de leurs mérites. Toutefois, compte tenu du fait que le groupe Canal+ a retiré sa candidature pour 4 chaînes payantes six jours avant la décision de l’Arcom, le Conseil d’État juge que le régulateur doit, sans délai, lancer une nouvelle procédure d’étude d’impact et de consultation publique pour évaluer si un nouvel appel à candidatures doit être lancé pour attribuer ces quatre fréquences vacantes.
La loi de 1986 relative à la liberté de communication prévoit que les fréquences TNT – qui sont un bien public et en nombre limité – sont attribuées après une étude d’impact et une consultation publique, suivies d’un appel à candidatures. La loi prévoit que lorsqu’une fréquence de TNT est attribuée à l’issue de cette procédure, elle ne peut être reconduite au-delà d’une durée de 20 ans sans nouvel appel à candidatures, afin d’assurer la concurrence et le pluralisme.
C’est dans ce cadre, qu’après une étude d’impact et une consultation publique, l’Arcom a lancé un appel à candidatures le 28 février 2024. Le 24 juillet, elle a présélectionné, à titre de mesure préparatoire, quinze projets sur les vingt-cinq candidatures, dont dix chaînes gratuites et cinq payantes, avec qui elle a entamé la négociation de conventions, sans y inclure C8 et NRJ 12. Le 5 décembre, le groupe Canal+ a annoncé l’abandon des candidatures de ses quatre chaînes payantes qui figuraient parmi les chaînes présélectionnées. Les décisions de l’Arcom du 11 décembre 2024 retiennent finalement 11 candidatures, dont deux nouvelles chaînes, CMI TV (renommé depuis lors T 18) et OFTV, et rejettent les candidatures de C8 et NRJ 12.
C8 et NRJ 12 ont saisi le Conseil d’État pour annuler le rejet de leurs candidatures par l’Arcom.
L’Arcom n’a pas commis d’illégalité en écartant C8 et NRJ 12 au profit des autres candidats sur la base de son appréciation de chacun des dossiers et de la comparaison de leurs mérites respectifs
Le Conseil d’État estime que l’Arcom n’a pas commis d’illégalité dans l’appréciation qu’elle a faite des différents projets retenus par rapport à ceux qu’elle a écartés et dans l’application des critères posés par les articles 29 et 30-1 de la loi du 30 septembre 1986. Elle s’est prononcée, ainsi que la loi l’impose, sur l’ensemble des candidatures dont elle était saisie dans le but d’assurer sur la TNT une diversité de programmes et de contenus.
S’agissant de C8, qui bénéficie d’une part d’audience élevée sur la TNT, hors les chaînes historiques de la télévision hertzienne, et dont l’Arcom a relevé qu’elle propose un volume important de programmes inédits et en direct, mais que ces programmes sont peu diversifiés au regard d’offres plus variées et renouvelées de ses concurrents, le Conseil d’État estime que le régulateur était juridiquement fondé à prendre en compte les manquements réitérés commis par la chaîne au cours des dernières années à ses obligations légales et conventionnelles, notamment en matière de respect des droits de la personne, de protection des mineurs et de maîtrise de l’antenne. Ces manquements sont de nature à jeter un doute sur sa capacité à tenir ses engagements. Enfin, la chaîne n’ayant, depuis sa création il y a vingt ans, jamais atteint l’équilibre financier, le plan de croissance figurant dans son dossier de candidature contraste avec ses résultats et les perspectives d’évolution du marché publicitaire.
S’agissant de NRJ 12, l’Arcom a relevé que son projet prévoyait de consacrer la majeure partie du temps d’antenne à la diffusion de fictions audiovisuelles, pour beaucoup en rediffusion, et de divertissements, genres déjà très représentés sur la TNT, ainsi qu’au téléachat, auquel la chaîne consacre déjà plus de 1 000 heures par an. Par ailleurs, les engagements de diffusion de programmes inédits sont substantiellement inférieurs à ceux d’autres candidats. Enfin, les prévisions de croissance des recettes publicitaires de NRJ 12, qui n’a depuis sa création présenté un résultat net positif que pour un seul exercice, contrastent avec le déclin de ses parts d’audience, y compris auprès du jeune public qu’elle cible, et les perspectives d’évolution du marché publicitaire.
Le Conseil d’État juge également que l’Arcom n’a pas commis d’illégalité dans l’appréciation qu’elle a portée sur les mérites des candidatures de CMI TV, OFTV, TFX, TMC et W9, compte tenu des spécificités de chacun de ces projets, et sur la comparaison de l’ensemble des candidatures.
L’Arcom doit, sans délai, reprendre une procédure de consultation publique et d’étude d’impact afin de décider si les quatre fréquences libérées quelques jours avant sa décision doivent faire l’objet d’un nouvel appel à candidatures
Le Conseil d’État juge que l’Arcom doit, sans délai, reprendre une procédure de consultation publique et d’étude d’impact afin de décider si tout ou partie des fréquences libérées par le retrait des quatre chaînes payantes du groupe Canal+ doivent faire l’objet d’un nouvel appel à candidatures.
Il juge que l’Arcom a pu temporairement ne délivrer que onze autorisations, en laissant ainsi inchangé le nombre de chaînes gratuites, compte tenu des délais dans lesquels elle était tenue de prendre sa décision avant l’arrivée à échéance des autorisations actuelles. En effet, le retrait de quatre chaînes payantes, six jours avant sa délibération, ne permettait pas à l’Arcom d’apprécier à si brève échéance les conséquences économiques que pourrait emporter l’autorisation de chaînes gratuites supplémentaires pour l’équilibre du secteur.