Le Conseil d’État annule partiellement la réglementation relative à l’exposition des travailleurs de moins de 18 ans aux poussières d’amiante.
La loi interdit en principe d’employer des mineurs pour des catégories de travaux les exposant à des risques pour leur santé. Par exception, elle prévoit toutefois que, sous certaines conditions, les mineurs peuvent être employés à des catégories de travaux normalement interdites.
Par un premier décret du 11 octobre 2013, le pouvoir réglementaire a ajouté aux catégories de travaux interdits aux mineurs les opérations susceptibles de générer une exposition à un empoussièrement de fibres d’amiante de niveau 1, 2 et 3 (soit tous les niveaux d’empoussièrement). Il a cependant prévu qu’une dérogation pourrait être obtenue pour des opérations susceptibles d’exposer le mineur à un empoussièrement de niveau 1 ou 2 (le niveau 3 étant le plus élevé). Par un second décret du même jour, le pouvoir réglementaire a par ailleurs modifié les conditions d’obtention de la dérogation, en prévoyant notamment qu’elle ne serait plus accordée pour chaque travailleur mais pour chaque employeur ou établissement de formation et que sa durée de validité serait de trois ans (au lieu d’un an).
L’association nationale de défense des victimes de l’amiante a demandé au Conseil d’État d’annuler ces deux décrets.
Le Conseil d’État a rejeté la requête dirigée contre le second décret. Il a estimé que les nouvelles conditions d’obtention de la dérogation ne méconnaissaient pas le droit à la protection de la santé des mineurs.
En revanche, le Conseil d’État a partiellement annulé les dérogations permises par le premier décret. Il a jugé que, lorsqu’il fixe de telles dérogations, le pouvoir réglementaire doit vérifier qu’elles sont nécessaires pour les besoins de la formation professionnelle des mineurs et que la protection de la sécurité et de la santé de ces derniers est assurée, notamment par la surveillance d’une personne compétente sur les travaux. Ces critères sont ceux qui résultent du droit de l’Union européenne, dont le régime français assure la transposition.
En l’espèce, le Conseil d’État a relevé que le pouvoir réglementaire se bornait à justifier les dérogations en expliquant que, de manière générale, elles étaient nécessaires à la formation professionnelle des jeunes travailleurs aux activités de couverture, de restauration de bâtiments anciens et aux métiers de second œuvre du bâtiment. Le Conseil d’État a jugé que, en raison de la variété des situations dans lesquelles des travaux de second œuvre peuvent exposer aux poussières d’amiante, le pouvoir réglementaire avait pu légalement prévoir la possibilité de déroger pour une exposition à un empoussièrement de niveau 1, qui est la valeur limite d’exposition professionnelle. En revanche, il a constaté que l’administration, malgré les mesures d’instruction ordonnées, n’apportait pas de justifications de la nécessité d’une dérogation permettant une exposition à un empoussièrement de niveau 2, qui peut aller jusqu’à 60 fois la valeur limite d’exposition professionnelle et faire courir un risque important pour la santé des mineurs en cas de méconnaissance des mesures de protection. Le Conseil d’État a donc annulé les dispositions du décret qui prévoient la possibilité d’accorder une dérogation pour permettre une exposition à un empoussièrement de niveau 2.