Rejet des recours dirigés contre le décret de publication de l’accord conclu en 2008 entre la France et le Saint-Siège en matière de reconnaissance des diplômes.
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Le Conseil d'État rejette les recours introduits contre le décret de publication de l’accord du 18 décembre 2008 entre la République française et le Saint-Siège sur la reconnaissance des grades et diplômes dans l'enseignement supérieur.
La France et le Saint-Siège ont signé le 18 décembre 2008 à Paris un accord sur la reconnaissance des grades et diplômes dans l'enseignement supérieur, accompagné d’un protocole additionnel d’application. Ces stipulations organisent la reconnaissance mutuelle des périodes d'études, des grades et des diplômes de l'enseignement supérieur délivrés sous l’autorité de l’une des parties signataires, en vue de la poursuite d’études dans un établissement relevant de l’autre partie. L’accord en question n’a pas fait l’objet d’une loi autorisant sa ratification. Il a été publié au Journal officiel de la République française par un décret n° 2009-427 du 16 avril 2009. Plusieurs requérants ont demandé au Conseil d'État l’annulation de ce décret de publication. Le Conseil d'État, qui a statué dans sa formation de jugement la plus solennelle, l’Assemblée du contentieux, vient de rendre aujourd'hui sa décision.
Dans les motifs de cette décision, le Conseil d'État commence par rappeler la portée du contrôle juridictionnel qu’il exerce sur les décrets de publication des traités et accords internationaux. Conformément à une jurisprudence établie, il examine les critiques qui s’adressent au décret attaqué en propre, indépendamment du contenu du traité dont ce décret assure la publication. Il accepte aussi d’examiner la critique tirée de ce que le traité publié aurait dû faire l’objet, en application de l’article 53 de la Constitution, d’une autorisation parlementaire avant sa ratification. En revanche, le Conseil d'État juge qu’il ne lui appartient, en l’état de la Constitution, ni de contrôler la conformité d’un traité à la Constitution, – aucune disposition de celle-ci ne l’habilitant à exercer un tel contrôle – ni de vérifier la conformité d’un traité à d’autres engagements internationaux conclus par la France.
Faisant application de ces principes, le Conseil d'État refuse d’examiner la conformité de l’accord conclu entre la France et le Saint-Siège à la Constitution française. Il n’examine pas non plus sa conformité à la convention de Lisbonne du 11 avril 1997 sur la reconnaissance des qualifications. Il statue en revanche sur les critiques de forme et de procédure soulevées à l’encontre du décret de publication, pour les juger non fondées et donc les écarter.
Enfin, le Conseil d'État écarte la critique tirée de ce que l’accord litigieux aurait dû faire l’objet d’une loi autorisant sa ratification. L’argumentation des requérants au soutien de cette critique se concentrait sur deux terrains.
En premier lieu, l’accord portait atteinte, selon les requérants, aux dispositions de l’article L. 613-1 du code de l’éducation, qui confèrent à l’État le monopole de la collation – autrement dit de la délivrance – des grades et des titres universitaires. Le Conseil d'État juge toutefois que ce n’est ni l’objet ni l’effet de cet accord, qu’il interprète comme n’instituant pas un régime de reconnaissance automatique des diplômes. Ainsi, la reconnaissance d’un diplôme délivré sous l’autorité du Saint-Siège, et notamment d’un « diplôme ecclésiastique », reste de la compétence des autorités de l’établissement dans lequel le titulaire de ce diplôme souhaite s’inscrire. Les établissements d’enseignement supérieur relevant des autorités françaises doivent donc apprécier l’aptitude du candidat, titulaire d’un diplôme délivré sous l’autorité du Saint-Siège, à poursuivre des études dans le grade et la formation auxquels il postule, en particulier au regard du contenu des enseignements qu’il a reçus.
En second lieu, les requérants soutenaient que l’accord dérogeait au principe de laïcité, qui figure à l’article L. 141-6 du code de l’éducation, et à celui de la séparation des Eglises et de l’État, qui découle de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905. Mais le Conseil d'État relève que cet accord ne contient aucune stipulation qui permettrait qu’un culte soit salarié ou subventionné et, comme dit ci-dessus, qu’il ne confère aux titulaires de « diplômes ecclésiastiques » aucun droit particulier à poursuivre des études dans un établissement de l’enseignement supérieur public français.
En conséquence, le Conseil d'État rejette l’ensemble des recours dont il était saisi.
Assemblée du contentieux du Conseil d'État, 9 juillet 2010, n° 327663 et autres, Fédération nationale de la libre pensée et autres