Le Conseil d’État annule les élections municipales de Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis) et déclare inéligible pour un an l’un des candidats têtes de liste.
> Lire la décision (CE, 17 juin 2015, élections municipales de Noisy-le-Grand, n°385713)
L’essentiel :
Le Conseil d’État juge que, lors du second tour, la liste « Pour Noisy tout simplement » a été irrégulièrement privée d’assesseurs dans une partie des bureaux de vote.
Il juge également que la liste « Noisy Bleu Marine » a été constituée irrégulièrement : l’une des personnes figurant sur cette liste y a été inscrite à la suite d’une manœuvre.
Ces irrégularités ayant porté atteinte à la sincérité du scrutin dans son ensemble, le Conseil d’État infirme le jugement du tribunal administratif et annule les élections municipales de Noisy-le-Grand.
Le Conseil d’État, en outre, déclare inéligible pour un an le candidat tête de la liste « Noisy Bleu Marine » constituée frauduleusement.
Les faits et la procédure :
A l’issue des élections municipales dans la commune de Noisy-le-Grand, qui se sont déroulées les 23 et 30 mars 2014, la liste « Rassemblés on est + forts », qui est arrivée en tête avec 8 068 voix, a obtenu 36 sièges sur 49. La liste « Pour Noisy tout simplement », la liste « Noisy Bleu Marine » et la liste « Noisy solidaire, à gauche vraiment ! » ont respectivement recueilli 7 061 voix, 2 018 voix et 1 659 voix et obtenu 9, 2 et 2 sièges.
Le candidat tête de la liste « Pour Noisy tout simplement » a contesté les résultats devant le tribunal administratif de Montreuil. Le tribunal administratif ayant rejeté sa protestation par un jugement du 14 octobre 2014, ce candidat a fait appel devant le Conseil d’État.
La décision du Conseil d’État :
Il résulte des articles L. 67 et R. 44 du code électoral que chaque liste de candidats a le droit de désigner un assesseur et son suppléant, dans chaque bureau de vote, en vue de contrôler les opérations électorales.
Avant le premier tour, la liste « Pour Noisy tout simplement » avait transmis une liste d’assesseurs qui comportait la mention « 1er tour 23 mars 2014 ». Entre les deux tours, cette liste n’avait pas indiqué renoncer à désigner des assesseurs mais n’avait pas non plus régulièrement notifié une nouvelle liste d’assesseurs. Pour le second tour de scrutin, le maire de Noisy-le-Grand avait refusé de notifier aux présidents des bureaux de vote le nom des assesseurs que la liste « Pour Noisy tout simplement » avait désignés avant le premier tour du scrutin. De ce fait, 15 des 36 bureaux de vote de la commune avaient été constitués sans les assesseurs de la liste « Pour Noisy tout simplement ».
Le Conseil d’État juge que lorsqu’une liste de candidats notifie régulièrement, avant le premier tour du scrutin, la liste de ses assesseurs, cette liste d’assesseurs reste valable pour le second tour, sauf si la liste de candidats la modifie entre les deux tours. Cela vaut même lorsque la liste des assesseurs désignés porte une mention « 1er tour ». 15 des 36 bureaux de vote ont ainsi été, en l’absence d’assesseurs de la liste « Pour Noisy tout simplement », irrégulièrement constitués. Eu égard au nombre de voix exprimées dans ces bureaux, cette irrégularité est nature à altérer les résultats d’ensemble du scrutin.
En outre, le Conseil d’État a constaté qu’une personne qui désirait s’inscrire sur la liste « Pour Noisy tout simplement » avait été inscrite sur une autre liste, la liste « Noisy Bleu Marine », à la suite d’une manœuvre qu’il a jugée frauduleuse. Eu égard aux écarts de voix entre les listes, la participation de cette liste irrégulièrement constituée a également porté atteinte à la sincérité du scrutin dans son ensemble.
Le Conseil d’État annule donc l’ensemble des opérations électorales qui se sont déroulées les 23 et 30 mars 2014 dans la commune de Noisy-le-Grand.
Enfin, le Conseil d’État juge que la manœuvre ayant conduit à la constitution irrégulière de la liste « Noisy Bleu Marine » est imputable personnellement au candidat qui conduisait cette liste. En pareil cas, l’article L. 118-4 du code électoral prévoit la possibilité pour le juge de prononcer une sanction d’inéligibilité, ce qu’il peut faire d’office, y compris en appel pour la première fois. Utilisant cette faculté, le Conseil d’Etat a déclaré inéligible à toutes les élections, pour une durée d’un an, le candidat tête de la liste « Noisy Bleu Marine ».