Rétablissement du contrôle aux frontières intérieures de l’Union européenne : le Conseil d’État rejette le recours dont il était saisi
L’Essentiel :
• Plusieurs associations ont saisi le Conseil d’État afin d’obtenir l’annulation de la décision de réintroduire un contrôle aux frontières intérieures de l’espace Schengen, du 1er novembre 2017 au 30 avril 2018.
• Par la décision de ce jour, le Conseil d’État rejette ce recours pour excès de pouvoir après avoir admis la proportionnalité de cette mesure de police et constaté le respect des règles de durée maximale fixées, pour une telle dérogation à la libre circulation, par le « code frontières Schengen ».
Les faits et la procédure :
Par une note du 3 octobre 2017, le gouvernement français a notifié au secrétaire général du Conseil de l’Union européenne son intention, à compter du 1er novembre 2017 et jusqu’au 30 avril 2018, de réintroduire temporairement un contrôle aux frontières intérieures de l’espace Schengen, sur le fondement des articles 25 et 27 du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l’Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes, dit « code frontières Schengen ».
Plusieurs associations ont saisi le Conseil d’État d’un recours pour excès de pouvoir tendant à l’annulation de la décision révélée par cette notification. Elles avaient également saisi le Conseil d’État d’une demande de suspension de l’exécution de cette décision qui a été rejetée, pour défaut d’urgence, par une ordonnance du 21 novembre 2017.
La décision de ce jour :
Par la décision de ce jour, le Conseil d’État rejette au fond, deux mois après son introduction, le recours pour excès de pouvoir dirigé contre le rétablissement du contrôle aux frontières intérieures.
Le Conseil d’État se prononce tout d’abord sur la proportionnalité de cette mesure qui a été prise compte tenu de l’actualité de la menace terroriste. Au vu de la nature de ce risque et de la nécessité, pour le prévenir efficacement, de contrôler l’identité et la provenance des personnes désireuses d’entrer en France, le Conseil d’État juge que la décision attaquée est proportionnée à la gravité de la menace.
Faisant valoir que, depuis le 13 novembre 2015, le gouvernement français a réintroduit ou prolongé à neuf reprises consécutives le contrôle aux frontières intérieures selon des durées variables, au vu de la menace terroriste persistante et du déroulement d’événements majeurs, sportifs ou politiques, les associations requérantes contestaient également la durée de la mesure au regard des règles de durée maximale fixées, pour une telle dérogation à la libre circulation, par l’article 25 du « code frontières Schengen ». Le Conseil d’État écarte l’ensemble de leurs critiques sans poser de question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne.
Il juge, d’une part, que, dans l’hypothèse où la menace justifiant le rétablissement des contrôles aux frontières intérieures est d’une durée prévisible supérieure à trente jours sans que son terme puisse raisonnablement être fixé, l’État peut décider de rétablir d’emblée le contrôle temporaire pour la durée maximale de six mois prévu par le « code frontières Schengen ». Il juge, d’autre part, que ce code ne fait pas obstacle, en cas de nouvelle menace ou de menace renouvelée pour l’ordre public ou la sécurité intérieure, à la mise en place à nouveau d’un contrôle aux frontières pour une autre période d’une durée maximale de 6 mois. Après avoir relevé que le Premier ministre s’est fondé sur l’actualité et le niveau élevé de la menace terroriste en France, le Conseil d’État en déduit que cette menace renouvelée constitue un motif de nature à justifier à nouveau la mise en place d’un contrôle aux frontières intérieures sur le fondement de l’article 25 du « code frontières Schengen ».