Le Conseil d'État suspend provisoirement, dans l'attente de l'examen au fond du pourvoi de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, l'exécution du jugement du tribunal administratif de Paris ordonnant la communication de certains documents relatifs à la campagne électorale 2007 de M. Sarkozy.
L’essentiel
• Le Conseil d’État, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, a décidé de surseoir à l’exécution du jugement du 3 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Paris a enjoint à cette Commission de communiquer à Mediapart une série de documents relatifs à la procédure d’examen du compte déposé par M. Sarkozy au titre de la campagne présidentielle de 2007.
• Le Conseil d’État a estimé que les conditions auxquelles l’article R. 821-5 du code de justice administrative subordonne l’octroi du sursis à exécution d’une décision juridictionnelle faisant l’objet d’un pourvoi en cassation étaient remplies.
• Cette décision de sursis suspend provisoirement les effets du jugement du tribunal administratif, sans préjuger de l’issue de l’examen au fond du pourvoi en cassation formé par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques contre ce même jugement, et dont le Conseil d’État reste saisi.
Les faits et la procédure
Une journaliste de Mediapart ainsi que la société d’édition de Mediapart ont demandé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) de leur communiquer un certain nombre de documents relatifs à la procédure de contrôle, par cette autorité administrative indépendante, du compte de campagne déposé par M. Nicolas Sarkozy au titre de sa candidature à l’élection présidentielle de 2007. Cette demande, après avoir fait l’objet d’un avis favorable de la Commission d’accès aux documents administratifs, a été rejetée par le président de la CNCCFP qui, par une décision du 12 juillet 2012, a refusé de communiquer les documents sollicités.
La journaliste et la société d’édition de Mediapart ont contesté ce refus devant le tribunal administratif de Paris. Dans un jugement du 3 juin 2014, rendu au vu des documents qu’il s’était fait communiquer par avant-dire-droit du 31 janvier 2014, le tribunal a estimé que la CNCCFP était tenue de faire droit à leur demande en application des dispositions de la loi du 17 juillet 1978 relatives à la communication des documents administratifs. Il a, en conséquence, annulé la décision du président de la CNCCFP et enjoint à cette autorité de procéder à la communication demandée selon des modalités qu’il a indiquées.
La CNCCFP s’est pourvue en cassation contre ce jugement et a assorti son pourvoi d’une demande de sursis à exécution.
La décision du Conseil d’État
La procédure de sursis à exécution, prévue à l’article R. 821-5 du code de justice administrative, permet à l’auteur d’un pourvoi en cassation de demander au Conseil d’État de suspendre les effets de la décision juridictionnelle faisant l’objet du pourvoi, dans l’attente de l’examen de ce pourvoi au fond par le Conseil. Le sursis est accordé à la double condition que cette décision risque d’entraîner des conséquences difficilement réparables et que les moyens invoqués par l’auteur du pourvoi paraissent, en l’état de l’instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l’annulation de la décision juridictionnelle attaquée, l’infirmation de la solution retenue par les juges du fond.
Dans la décision lue ce jour, le Conseil d’État a estimé que ces deux conditions étaient remplies et a suspendu l’exécution du jugement du tribunal administratif de Paris. Conformément à une jurisprudence constante en matière de communication des documents administratifs, il a d’abord jugé que l’exécution du jugement aurait des effets irréversibles. Le Conseil d’État a ensuite estimé que certains moyens, tenant à ce que le tribunal aurait fait une inexacte application des dispositions de la loi du 17 juillet 1978, qui impliquent d’admettre l’applicabilité au litige de cette loi, apparaissaient sérieux en l’état de l’instruction.
Cette décision de sursis, rendue en l’état de l’instruction devant le juge de cassation et revêtant un caractère provisoire, ne préjuge pas de l’issue du pourvoi de la CNCCFP, lequel sera prochainement examiné au fond par le Conseil d’État.