Certaines périodes de pêche de l’anguille en mer sont temporairement suspendues

Décision de justice
Passer la navigation de l'article pour arriver après Passer la navigation de l'article pour arriver avant
Passer le partage de l'article pour arriver après
Passer le partage de l'article pour arriver avant

Saisi par deux associations de défense de l’environnement, le juge des référés du Conseil d’Etat suspend temporairement les dates de pêche en domaine maritime de l’anguille jaune et, dans certaines zones, de la civelle, car elles ne sont pas conformes au droit européen. En revanche les périodes de pêche de l’anguille argentée ne sont pas affectées. Cette suspension, qui tient compte à la fois de l’urgence liée la conservation de l’anguille et des effets d’une interruption sur l’équilibre des entreprises de pêche, ne prendra effet qu’à partir du 26 mai pour la pêche de la civelle. Dans l’attente de la décision « au fond » définitive du Conseil d’État, cette suspension n’empêche pas le Gouvernement d’établir des nouveaux calendriers conformes au droit européen pour permettre la poursuite de l’activité de pêche.

La pêche de l’anguille est encadrée par le règlement européen du 30 janvier 2023 établissant les possibilités de pêche pour 2023 et 2024, qui impose aux Etats membres de l’interdire pendant une durée minimale de six mois consécutifs ou non, en leur laissant une marge d’appréciation variable selon les zones concernées (Méditerranée ou façade atlantique) pour le choix de ces périodes, certaines périodes de fermeture étant imposées, et d’autres devant se situer dans des plages calendaires déterminées. 

L’association française d’étude et de protection des poissons et l’association défense des milieux aquatiques ont demandé au Conseil d’Etat de suspendre les calendriers fixant jusqu’en 2024 les périodes d’ouverture et de fermeture de la pêche de l’anguille dans le domaine maritime, en fonction de ses différents stades de développement : civelle, anguille jaune et anguille argentée.

Dans une première ordonnance, le juge des référés relève que les calendriers d’autorisation de la pêche à la civelle et de la pêche à l’anguille jaune dans certaines unités de gestion de l’anguille (UGA)* ne sont pas conformes aux périodes imposées ou aux plages calendaires fixées par le règlement européen**. 

La pêche à la civelle pour repeuplement maintenue jusqu’au 25 mai 

Le juge observe également que les quotas de pêche à la civelle pour la consommation prévus pour la campagne en cours, entre le 1er novembre 2022 et le 25 mai 2023, sont épuisés. La civelle ne peut donc plus être pêchée aujourd’hui pour la consommation. En revanche, le quota de pêche destiné au repeuplement (transfert vers des habitats favorables) n’est pas encore atteint. 

Prenant en compte à la fois l’urgence liée la conservation de l’anguille européenne, espèce dont la population a diminué de 90 % en 50 ans, et l’impact d’une suspension immédiate sur l’activité des entreprises de pêche, le juge des référés estime qu’il n’y a pas d’urgence à suspendre les périodes de pêche pour repeuplement avant le 26 mai. En revanche il juge qu’à compter de cette date, l’urgence liée à la conservation de l’espèce l’emporte sur les atteintes éventuelles à l’équilibre des entreprises de pêche. Il suspend en conséquence à partir du 26 mai les dispositions qui autorisent la pêche à la civelle dans les UGA concernées. Il faut cependant noter que les arrêtés contestés prévoyaient de toute façon une fermeture de la pêche après cette date, et une reprise à partir de l’automne, de sorte que la suspension prononcée n’affecte pas l’activité dans l’immédiat.

La pêche à l’anguille jaune est suspendue immédiatement

La pêche de l’anguille jaune, à la différence de la pêche à la civelle, n’est pas limitée par des quotas mais uniquement par le calendrier des périodes d’interdiction. L’urgence qui s’attache à la conservation de l’anguille dans les UGA concernées par la méconnaissance du règlement européen (toutes situées en Atlantique ou en Manche) justifie la suspension immédiate de l’exécution de l’arrêté, alors que l’impact économique de la suspension y sera limité, les pêches dans la Manche et sur la façade atlantique ne représentant que 7,5 % du volume des pêches d’anguille jaune. 

Dans une seconde ordonnance, le juge des référés constate que l’arrêté d’autorisation a été signé uniquement par le Secrétaire d’Etat à la Mer, alors que le code rural de de la pêche maritime prévoit qu’en ce qui concerne l’anguille jaune, il doit également être signé par le ministre chargé de la pêche en eau douce (le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires actuellement). Il suspend en conséquence la pêche de l’anguille jaune dans les autres UGA***.
Le juge des référés observe enfin que, dans l’attente de la décision définitive du Conseil d’Etat sur la demande d’annulation présentée par les deux associations, la prise d’un nouvel arrêté provisoire d’autorisation conforme au règlement européen et signé par les deux ministres pourrait permettre la poursuite ou la reprise de ces activités de pêche.

 

* Les unités de gestion de l’anguille sont des zones définies par le plan de gestion de l’anguille présenté par la France, qui correspondent à l’habitat naturel de l’anguille dans les bassins hydrographiques, dans les estuaires et dans les aires maritimes de répartition de cette espèce.
** UGA Artois-Picardie, Seine-Normandie, Loire, Côtiers vendéens et Sèvre niortaise et Garonne-Dordogne-Charente-Gironde en ce qui concerne la civelle et UGA Artois-Picardie, Seine-Normandie, Bretagne, Garonne-Dordogne-Charente-Gironde et Adour-cours d’eau côtiers en ce qui concerne l’anguille jaune.
*** UGA Loire, Côtiers vendéens et Sèvre niortaise, Corse et Rhône-Méditerranée.

Lire les décisions 472401 et 472213 

Télécharger le communiqué de presse 

Read the press release in English