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Décision de justice
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Le Conseil d’État suspend l’arrêté préfectoral ordonnant l’abattage des deux éléphants.

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L’essentiel

  • Le 21 décembre 2012, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon avait rejeté la demande de suspension de l’arrêté préfectoral ordonnant l’abattage des deux éléphants. Les propriétaires ont saisi le Conseil d’État d’un pourvoi en cassation contre l’ordonnance du juge des référés.

  • Le Conseil d’État casse l’ordonnance du juge des référés qui avait estimé à tort que la condition d’urgence n’était pas remplie. Il s’agit d’une des deux conditions requises pour que la suspension d’un acte puisse être prononcée.

  • Après cassation, le Conseil d’État suspend l’exécution de l’arrêté en raison de doutes sérieux, en l’état de l’instruction, sur sa légalité.

  • Les deux éléphantes ne pourront donc pas être abattues dans l’attente du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon tranchera la question de savoir si l’arrêté préfectoral est légal ou non.

1. Les faits et la procédure

Le 11 décembre 2012, le préfet du Rhône a pris, sur le fondement des dispositions de l’article L. 223-8 du code rural et de la pêche maritime (possibilité d’intervenir en cas de suspicion de contamination d’un animal par certaines maladies contagieuses), un arrêté relatif à deux éléphants confiés au parc animalier de la Tête d’Or, suspectés de contamination par le bacille de la tuberculose. Cet arrêté prescrivait, dans l’immédiat, des précautions renforcées pour éviter toute contamination et, dans un délai d’un mois, l’abattage des animaux. Un arrêté modificatif avait par la suite porté à 70 jours le délai d’abattage.

La société Promogil, propriétaire des animaux, a demandé l’annulation de cet arrêté. Elle a également formé un référé tendant à la suspension de l’exécution de cet arrêté dans l’attente de l’intervention du jugement au fond. La suspension peut être accordée si le juge constate une situation d’urgence et estime qu’il existe un doute sérieux sur la légalité de la mesure.

Le 21 décembre 2012, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande de suspension en estimant que la condition d’urgence n’était pas remplie.

Le Conseil d’État était saisi d’un pourvoi en cassation contre l’ordonnance du juge des référés. La demande d’annulation de l’arrêté est toujours pendante devant le tribunal administratif de Lyon.

2. La décision du Conseil d’État

Le Conseil d’État commence par annuler l’ordonnance du juge des référés pour erreur de droit en ce qui concerne l’application de la condition d’urgence. Le juge des référés avait en effet omis de s’interroger, pour apprécier cette condition, sur l’efficacité des mesures d’isolement des animaux et de protection des soigneurs pour assurer la sécurité sanitaire dans l’attente du jugement de fond par le tribunal administratif sans abattre les éléphants.

Après cassation, le Conseil d’État estime que la condition d’urgence est remplie. Il relève en effet que l’exécution de la mesure d’abattage entraînerait pour la société Promogil des préjudices économiques et moraux irréversibles, tandis qu’il n’est pas démontré que des mesures autres que l’abattage ne seraient pas efficaces pour protéger la santé publique dans le délai relativement bref restant à attendre avant le jugement au fond.

Il estime ensuite que deux doutes sérieux pèsent, en l’état de l’instruction, sur la légalité des mesures prescrivant l’abattage des animaux.

D’abord, alors que la loi interdit en principe que de telles mesures interviennent sans que la personne intéressée ait pu au préalable faire valoir ses observations, l’arrêté litigieux aurait été pris sans procédure contradictoire avec la société Promogil.

Ensuite, si le code rural et de la pêche maritime justifie l’intervention du préfet à l’égard d’animaux qui, ayant cohabité avec d’autres animaux malades, sont présumés contaminés, il lui laisse le choix entre diverses mesures sanitaires. Or compte tenu de l’ancienneté et du caractère peu probant des tests réalisés auparavant sur les éléphants, de la possibilité technique d’effectuer des examens complémentaires, de l’efficacité des autres mesures prises, qui peuvent être maintenues ou renforcées, et à l’intérêt qui s’attache à la préservation, dans une mesure compatible avec la prévention des risques pour la santé publique, d’une espèce rare et protégée, il existe, à ce stade de la procédure, un doute sérieux quant au caractère proportionné du choix de la mesure d’abattage.

En conséquence, le Conseil d’État suspend l’exécution de la mesure d’abattage jusqu’à l’intervention du jugement au fond.

3. Les suites de la procédure

La décision du Conseil d’État est une décision provisoire, rendue dans l’urgence et en l’état de l’instruction, qui interdit l’exécution de la mesure d’abattage jusqu’à l’intervention du jugement au fond.

Il reviendra ensuite au tribunal administratif de Lyon d’examiner, au terme d’une instruction approfondie du dossier, si la mesure d’abattage est légale ou non.

Si le tribunal administratif rejette la requête de la société Promogil, la mesure d’abattage pourra être exécutée.

Si le tribunal administratif annule l’arrêté, les conséquences de cette annulation dépendront du motif de l’annulation. Si c’est un problème de procédure qui la justifie, l’administration pourra reprendre la même mesure en respectant, cette fois, la procédure légale. Si, en revanche, le tribunal administratif estime la mesure d’abattage disproportionnée, son jugement fera obstacle à ce que le préfet reprenne la même mesure.