La règle de l’anonymat des donneurs de gamètes n’est pas incompatible avec les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH), et notamment son article 8 qui garantit le droit au respect de la vie privée et familiale.
Le Conseil d’État a déclaré que la règle de l’anonymat des donneurs de gamètes, qui est inscrite dans le code de la santé publique, le code civil et le code pénal et qui figure au nombre des principes fondamentaux de la bioéthique proclamés par la loi du 29 juillet 1994 et confirmés par la loi du 7 juillet 2011, n’est pas incompatible avec les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH), et notamment son article 8 qui garantit le droit au respect de la vie privée et familiale.
- S’agissant de l’accès aux données dites « non identifiantes » de nature médicale, le Conseil d’État a relevé qu’il existait à la règle d’interdiction de communiquer des informations relatives au donneur et au receveur de gamètes des exceptions strictement encadrées par la loi. Ainsi, un médecin peut accéder aux informations médicales non identifiantes en cas de nécessité thérapeutique concernant un enfant conçu à partir de gamètes issus d’un don ou lorsqu’est diagnostiquée chez une personne qui a fait un don de gamètes ayant abouti à la conception d’un ou plusieurs enfants une anomalie génétique grave dont les conséquences sont susceptibles de mesures de prévention ou de soins.
Le Conseil d’État a estimé que la conciliation ainsi opérée par le législateur entre les intérêts en cause par rapport aux objectifs de protection de la santé, de préservation de la vie privée et de secret médical n’était pas incompatible avec les stipulations de l’article 8 de la CEDH, compte tenu de la marge d’appréciation que ces stipulations réservent au législateur national.
- S’agissant de l’accès aux données permettant d’identifier l’auteur d’un don de gamètes, le Conseil d’État a relevé que la règle de l’anonymat du donneur de gamètes répond, tout d’abord, à l’objectif de préservation de la vie privée du donneur et de sa famille. Il a estimé qu’à l’égard du receveur de gamètes, cette règle ne saurait constituer une atteinte à la vie privée au sens de l’article 8 de la CEDH. Il a précisé que, s’agissant de la personne conçue à partir du don de gamète, même si la règle de l’anonymat s’oppose à la satisfaction de certaines demandes d’information, elle n’implique par elle-même aucune atteinte à la vie privée et familiale de cette personne, d’autant qu’il appartient aux seuls parents de décider de lever ou non le secret sur la conception de cette dernière.
Il a constaté que, s’agissant de questions morales ou éthiques délicates, et en l’absence de consensus au sein des Etats membres du Conseil de l’Europe, le législateur n’avait pas outrepassé la marge d’appréciation dont il dispose en vue d’assurer un juste équilibre entre les différents intérêts en présence, à savoir ceux du donneur et de sa famille, du couple receveur, de l’enfant issu du don de gamètes et de la famille de l’enfant ainsi conçu. Il a précisé qu’il n’appartient qu’au seul législateur de porter, le cas échéant, une nouvelle appréciation sur les considérations d’intérêt général à prendre en compte et sur les conséquences à en tirer.