Fermeture administrative de la salle de prière d’Ecquevilly

Décision de justice
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Le juge des référés du Conseil d’État rejette la demande de suspension de la décision de fermeture de la salle de prière dite « mosquée d’Ecquevilly »

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L’essentiel :

-    sur le fondement de l’état d’urgence, le préfet des Yvelines a décidé de fermer provisoirement la salle de prière dite « mosquée d’Ecquevilly » ;

-    le juge des référés du Conseil d’État a relevé que les fidèles pouvaient fréquenter trois autres mosquées à moins de cinq kilomètres ;

-    il juge que les prêches appelant à la violence, à la discrimination des femmes et combattant les confessions chrétiennes et juives sont suffisamment établis et rejette la demande de suspension de cet arrêté.

L’article 8 de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence actuellement en vigueur permet au préfet de fermer provisoirement « des lieux de culte au sein desquels sont tenus des propos constituant une provocation à la haine ou à la violence ou une provocation à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes ». Sur le fondement de cet article, le préfet des Yvelines a, par un arrêté du 2 novembre 2016, ordonné la fermeture de la salle de prière dite « mosquée d’Ecquevilly », à Ecquevilly, jusqu’à la fin de l’état d’urgence. L’association islamique Malik Ibn Anas, qui assure la gestion de cette salle, a demandé au juge du référé-liberté du tribunal administratif de Versailles de suspendre l’exécution de cet arrêté, pour continuer à la salle de prière de fonctionner.

Le 17 novembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande. L’association a alors fait appel devant le Conseil d’État.

Le juge des référés du Conseil d’État a examiné l’atteinte portée aux libertés fondamentales invoquées par l’association et la réalité des prêches violents sur lesquels le préfet avait fondé sa décision de fermeture provisoire.

S’agissant de l’atteinte à des libertés fondamentales, le juge des référés du Conseil d’État rappelle que la liberté de culte est une liberté fondamentale mais il relève que les personnes qui fréquentaient cette salle de prière peuvent se rendre dans trois autres lieux de cultes distants de moins de cinq kilomètres. Le fait que d’autres lieux de culte salafistes seraient restés ouverts ne rend pas la mesure de fermeture provisoire de cette salle de prière illégale.

S’agissant des prêches appelant à la violence, discriminant les femmes, refusant l’autorité des institutions publiques ou combattant les confessions juives ou chrétiennes, le juge des référés a relevé que l’association soit ne les niait pas réellement, soit avançait des arguments qui n’en diminuait pas le caractère dangereux. Ainsi, a effectivement été déclaré, dans un prêche du 20 novembre 2015, que le seul reproche qu’on peut faire aux personnes commettant des attentats est de se suicider. Il a été également reconnu que les femmes sont appelées à se couvrir intégralement le corps sauf le visage et que des livres hostiles aux femmes, aux autres religions et à la démocratie sont mis à disposition des fidèles. De même, les juifs et les chrétiens sont dénoncés comme falsifiant les textes sacrés et  appelés à se convertir sur un ton menaçant. La circonstance que la substance de ces propos serait extraite du Coran ou que certaines déclarations appellent aussi à respecter ou à accueillir les fidèles d’autres confessions n’en diminue pas la violence. Enfin, les violences entre enfants en milieu scolaire et le rejet de femmes non voilées sont estimés peu fréquents par l’association mais ne sont pas démentis.

Dans ces conditions, le juge des référés du Conseil d’État estime que la décision de fermeture provisoire, qui conserve ses effets jusqu’à la fin de l’état d’urgence, ne porte pas une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Il rejette donc l’appel de l’association et la salle de prière demeure provisoirement fermée.

La procédure de référé-liberté :

La procédure du référé liberté, prévue par l’article L. 521-2 du code de justice administrative, permet au juge d’ordonner, dans un délai de quarante-huit heures, toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une administration aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Pour obtenir satisfaction, le requérant doit justifier d’une situation d’urgence qui nécessite que le juge intervienne dans les quarante-huit heures.