Conseil d'État
N° 493825
ECLI:FR:CECHS:2024:493825.20241223
Inédit au recueil Lebon
2ème chambre
M. Nicolas Boulouis, président
M. Jérôme Goldenberg, rapporteur
M. Clément Malverti, rapporteur public
Lecture du lundi 23 décembre 2024
Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 26 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 8 février 2024 portant refus d'acquisition de la nationalité française ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande de naturalisation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article 21-2 du code civil : " L'étranger (...) qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai de quatre ans à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie tant affective que matérielle n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint français ait conservé sa nationalité (...) ". L'article 21-4 du même code prévoit toutefois que : " Le Gouvernement peut s'opposer par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation, autre que linguistique, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans un délai de deux ans à compter de la date du récépissé prévu au deuxième alinéa de l'article 26 ou, si l'enregistrement a été refusé, à compter du jour où la décision judiciaire admettant la régularité de la déclaration est passée en force de chose jugée (...) ".
2. Mme C..., ressortissante marocaine, a souscrit le 14 juin 2021 une déclaration d'acquisition de la nationalité française à raison de son mariage avec un ressortissant français. Par le décret attaqué, le Premier ministre s'est opposé à l'acquisition de la nationalité française au motif que Mme C... ne pouvait être regardée comme digne de l'acquérir.
3. En premier lieu, aux termes des deux premiers alinéas de l'article 32 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " Lorsque le Gouvernement veut s'opposer par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation autre que linguistique, à l'acquisition de la nationalité française par une personne l'ayant réclamée au titre de l'article 21-2,21-13-1 ou 21-13-2 du code civil, le ministre chargé des naturalisations notifie les motifs de fait et de droit qui justifient l'intention de faire opposition à l'intéressé qui dispose d'un délai qui ne peut être inférieur à un mois pour produire un mémoire en défense. / La notification est faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Elle peut également l'être en la forme administrative par l'autorité qui a reçu la déclaration. / Le décret d'opposition prend effet à la date de sa signature ".
4. Il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur a indiqué à Mme C... les motifs justifiant le retrait du décret ayant prononcé sa naturalisation par une lettre expédiée au nom et à l'adresse de l'intéressée avec demande d'avis de réception. Elle a été présentée à son domicile le 5 février 2023 mais n'a pas été réclamée par l'intéressée aux services postaux, qui ont retourné le pli au ministre après l'expiration du délai de mise en instance postale. Cette notification doit être regardée, faute pour l'intéressée d'avoir pris toutes les dispositions utiles pour retirer le pli qui lui avait été régulièrement adressé, comme étant intervenue à la date de première présentation du pli par les services postaux, soit le 5 février 2023. Par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait illégal faute pour l'intéressée d'avoir pu présenter ses observations en défense ne peut qu'être écarté.
5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme C... et son mari M. B... ont, à la suite de fausses déclarations sur leurs ressources et sur l'activité de ce dernier, indûment perçu, au cours des années 2018 à 2021 le revenu de solidarité active, la prime exceptionnelle de fin d'année et l'aide personnalisée au logement pour un montant total de plus de 18 000 euros. Par suite, en estimant, à la date du décret attaqué, que ces faits, eu égard à leur gravité du fait de l'atteinte portée au système de sécurité sociale, ainsi qu'à leur caractère répété et récent, rendaient Mme C... indigne d'acquérir la nationalité française, le Premier ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 21-4 du code civil.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 8 février 2024 par lequel le Premier ministre lui a refusé l'acquisition de la nationalité française. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.
N° 493825
ECLI:FR:CECHS:2024:493825.20241223
Inédit au recueil Lebon
2ème chambre
M. Nicolas Boulouis, président
M. Jérôme Goldenberg, rapporteur
M. Clément Malverti, rapporteur public
Lecture du lundi 23 décembre 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 26 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 8 février 2024 portant refus d'acquisition de la nationalité française ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande de naturalisation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article 21-2 du code civil : " L'étranger (...) qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai de quatre ans à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie tant affective que matérielle n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint français ait conservé sa nationalité (...) ". L'article 21-4 du même code prévoit toutefois que : " Le Gouvernement peut s'opposer par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation, autre que linguistique, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans un délai de deux ans à compter de la date du récépissé prévu au deuxième alinéa de l'article 26 ou, si l'enregistrement a été refusé, à compter du jour où la décision judiciaire admettant la régularité de la déclaration est passée en force de chose jugée (...) ".
2. Mme C..., ressortissante marocaine, a souscrit le 14 juin 2021 une déclaration d'acquisition de la nationalité française à raison de son mariage avec un ressortissant français. Par le décret attaqué, le Premier ministre s'est opposé à l'acquisition de la nationalité française au motif que Mme C... ne pouvait être regardée comme digne de l'acquérir.
3. En premier lieu, aux termes des deux premiers alinéas de l'article 32 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " Lorsque le Gouvernement veut s'opposer par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation autre que linguistique, à l'acquisition de la nationalité française par une personne l'ayant réclamée au titre de l'article 21-2,21-13-1 ou 21-13-2 du code civil, le ministre chargé des naturalisations notifie les motifs de fait et de droit qui justifient l'intention de faire opposition à l'intéressé qui dispose d'un délai qui ne peut être inférieur à un mois pour produire un mémoire en défense. / La notification est faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Elle peut également l'être en la forme administrative par l'autorité qui a reçu la déclaration. / Le décret d'opposition prend effet à la date de sa signature ".
4. Il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur a indiqué à Mme C... les motifs justifiant le retrait du décret ayant prononcé sa naturalisation par une lettre expédiée au nom et à l'adresse de l'intéressée avec demande d'avis de réception. Elle a été présentée à son domicile le 5 février 2023 mais n'a pas été réclamée par l'intéressée aux services postaux, qui ont retourné le pli au ministre après l'expiration du délai de mise en instance postale. Cette notification doit être regardée, faute pour l'intéressée d'avoir pris toutes les dispositions utiles pour retirer le pli qui lui avait été régulièrement adressé, comme étant intervenue à la date de première présentation du pli par les services postaux, soit le 5 février 2023. Par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait illégal faute pour l'intéressée d'avoir pu présenter ses observations en défense ne peut qu'être écarté.
5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme C... et son mari M. B... ont, à la suite de fausses déclarations sur leurs ressources et sur l'activité de ce dernier, indûment perçu, au cours des années 2018 à 2021 le revenu de solidarité active, la prime exceptionnelle de fin d'année et l'aide personnalisée au logement pour un montant total de plus de 18 000 euros. Par suite, en estimant, à la date du décret attaqué, que ces faits, eu égard à leur gravité du fait de l'atteinte portée au système de sécurité sociale, ainsi qu'à leur caractère répété et récent, rendaient Mme C... indigne d'acquérir la nationalité française, le Premier ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 21-4 du code civil.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 8 février 2024 par lequel le Premier ministre lui a refusé l'acquisition de la nationalité française. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.