Conseil d'État
N° 498354
ECLI:FR:CEORD:2024:498354.20241018
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
Lecture du vendredi 18 octobre 2024
Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 10 octobre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association le R.A.I.D de l'Etang de Berre " Réseau d'Actions d'Initiatives Démocratiques et Citoyennes " demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'ordonner au Premier ministre de prendre immédiatement une mesure de réduction annuelle globale des rejets d'eau douce par la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas pour maintenir une salinité stable, en limitant les rejets annuels d'eau douce sur l'étang de Berre à un maximum de 250 hm3 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle est recevable à agir eu égard à son objet statuaire ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que sans réduction significative des apports d'eau douce et de limons, la stratification haline et les épisodes d'anoxie continueront de se produire, exacerbant la dégradation écologique que connaît l'étang de Berre depuis plusieurs décennies dans des conditions susceptibles d'approcher de seuils de non-retour, et que selon les évaluations récentes, l'étang de Berre est loin d'atteindre les objectifs de la directive-cadre sur l'eau pour 2027 ;
- il est porté atteinte au droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé et à la protection des droits des générations futures ;
- l'inaction des pouvoirs publics et l'insuffisance des mesures édictées portent une atteinte grave à ces libertés fondamentales en raison du caractère irréversible des dommages environnementaux subis par l'étang de Berre du fait de la station hydroélectrique si des mesures urgentes ne sont pas prescrites immédiatement, avec également des impacts économiques et sociaux considérables, ainsi que par la non-atteinte des objectifs de la directive-cadre sur l'eau pour 2027 ;
- des mesures doivent être prescrites sans délai afin d'éviter l'irréversibilité des dommages écologiques causés à l'étang de Berre, en limitant les rejets annuels d'eau douce à un maximum de 250 hm3.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment la Charte de l'environnement à laquelle renvoie son Préambule ;
- la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 ;
- le code de l'énergie ;
- le code de l'environnement ;
- la loi n° 55-6 du 5 janvier 1955 ;
- le décret du 6 avril 1972 approuvant la convention et le cahier des charges spécial des chutes de Salon et de Saint-Chamas, sur la Durance (départements des Bouches-du-Rhône, de Vaucluse et du Gard) ;
- le décret n° 2006-1557 du 8 décembre 2006 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Dans le cadre de l'aménagement de la Durance, prévu par la loi du 5 janvier 1955, une concession pour l'exploitation de l'énergie hydraulique des chutes de Salon et de Saint-Chamas a été attribuée à la société Electricité de France par une convention conclue avec l'Etat le 22 novembre 1971 et un décret du 6 avril 1972 approuvant la convention et le cahier des charges spécial des chutes de Salon et de Saint-Chamas, sur la Durance (départements des Bouches-du-Rhône, de Vaucluse et du Gard). Par un avenant n° 1 approuvé par le décret du 8 décembre 2006, l'Etat a modifié le cahier des charges spécial des installations de production d'énergie hydroélectrique des chutes de Salon et Saint-Chamas pour limiter les volumes d'eau douce rejetés par ces installations dans l'étang de Berre à 1 200 millions de m3 par an et les apports de limons à 60 000 tonnes. L'association le R.A.I.D de l'Etang de Berre demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner au Premier ministre de prendre immédiatement une mesure de réduction annuelle globale des rejets d'eau douce par la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas pour maintenir une salinité stable, en limitant les rejets annuels d'eau douce sur l'étang de Berre à un maximum de 250 hm3, soit 250 millions de m3.
3. Le requérant qui saisit le juge des référés sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative doit justifier des circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur ce fondement. La circonstance qu'une atteinte à une liberté fondamentale serait avérée n'est pas de nature à caractériser, à elle seule, l'existence d'une situation d'urgence au sens de cet article.
4. Pour justifier de l'urgence, l'association requérante se borne à faire valoir que sans réduction significative des apports d'eau douce et de limons, la stratification haline et les épisodes d'anoxie continueront de se produire, exacerbant la dégradation écologique que connaît l'étang de Berre depuis plusieurs décennies dans des conditions susceptibles d'approcher de seuils de non-retour, et que selon les évaluations récentes, l'étang de Berre est loin d'atteindre les objectifs de la directive-cadre sur l'eau pour 2027. Ce faisant, elle ne justifie pas des circonstances particulières caractérisant la nécessité de bénéficier à très bref délai d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
5. Il résulte de ce qui précède que la requête de l'association le R.A.I.D de l'Etang de Berre doit être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du même code.
O R D O N N E :
------------------
Article 1er : La requête de l'association le R.A.I.D de l'Etang de Berre est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'Association le R.A.I.D de l'Etang de Berre.
Copie en sera adressée au Premier ministre et à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Fait à Paris, le 18 octobre 2024
Signé : Anne Courrèges
N° 498354
ECLI:FR:CEORD:2024:498354.20241018
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
Lecture du vendredi 18 octobre 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 10 octobre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association le R.A.I.D de l'Etang de Berre " Réseau d'Actions d'Initiatives Démocratiques et Citoyennes " demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'ordonner au Premier ministre de prendre immédiatement une mesure de réduction annuelle globale des rejets d'eau douce par la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas pour maintenir une salinité stable, en limitant les rejets annuels d'eau douce sur l'étang de Berre à un maximum de 250 hm3 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle est recevable à agir eu égard à son objet statuaire ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que sans réduction significative des apports d'eau douce et de limons, la stratification haline et les épisodes d'anoxie continueront de se produire, exacerbant la dégradation écologique que connaît l'étang de Berre depuis plusieurs décennies dans des conditions susceptibles d'approcher de seuils de non-retour, et que selon les évaluations récentes, l'étang de Berre est loin d'atteindre les objectifs de la directive-cadre sur l'eau pour 2027 ;
- il est porté atteinte au droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé et à la protection des droits des générations futures ;
- l'inaction des pouvoirs publics et l'insuffisance des mesures édictées portent une atteinte grave à ces libertés fondamentales en raison du caractère irréversible des dommages environnementaux subis par l'étang de Berre du fait de la station hydroélectrique si des mesures urgentes ne sont pas prescrites immédiatement, avec également des impacts économiques et sociaux considérables, ainsi que par la non-atteinte des objectifs de la directive-cadre sur l'eau pour 2027 ;
- des mesures doivent être prescrites sans délai afin d'éviter l'irréversibilité des dommages écologiques causés à l'étang de Berre, en limitant les rejets annuels d'eau douce à un maximum de 250 hm3.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment la Charte de l'environnement à laquelle renvoie son Préambule ;
- la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 ;
- le code de l'énergie ;
- le code de l'environnement ;
- la loi n° 55-6 du 5 janvier 1955 ;
- le décret du 6 avril 1972 approuvant la convention et le cahier des charges spécial des chutes de Salon et de Saint-Chamas, sur la Durance (départements des Bouches-du-Rhône, de Vaucluse et du Gard) ;
- le décret n° 2006-1557 du 8 décembre 2006 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Dans le cadre de l'aménagement de la Durance, prévu par la loi du 5 janvier 1955, une concession pour l'exploitation de l'énergie hydraulique des chutes de Salon et de Saint-Chamas a été attribuée à la société Electricité de France par une convention conclue avec l'Etat le 22 novembre 1971 et un décret du 6 avril 1972 approuvant la convention et le cahier des charges spécial des chutes de Salon et de Saint-Chamas, sur la Durance (départements des Bouches-du-Rhône, de Vaucluse et du Gard). Par un avenant n° 1 approuvé par le décret du 8 décembre 2006, l'Etat a modifié le cahier des charges spécial des installations de production d'énergie hydroélectrique des chutes de Salon et Saint-Chamas pour limiter les volumes d'eau douce rejetés par ces installations dans l'étang de Berre à 1 200 millions de m3 par an et les apports de limons à 60 000 tonnes. L'association le R.A.I.D de l'Etang de Berre demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner au Premier ministre de prendre immédiatement une mesure de réduction annuelle globale des rejets d'eau douce par la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas pour maintenir une salinité stable, en limitant les rejets annuels d'eau douce sur l'étang de Berre à un maximum de 250 hm3, soit 250 millions de m3.
3. Le requérant qui saisit le juge des référés sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative doit justifier des circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur ce fondement. La circonstance qu'une atteinte à une liberté fondamentale serait avérée n'est pas de nature à caractériser, à elle seule, l'existence d'une situation d'urgence au sens de cet article.
4. Pour justifier de l'urgence, l'association requérante se borne à faire valoir que sans réduction significative des apports d'eau douce et de limons, la stratification haline et les épisodes d'anoxie continueront de se produire, exacerbant la dégradation écologique que connaît l'étang de Berre depuis plusieurs décennies dans des conditions susceptibles d'approcher de seuils de non-retour, et que selon les évaluations récentes, l'étang de Berre est loin d'atteindre les objectifs de la directive-cadre sur l'eau pour 2027. Ce faisant, elle ne justifie pas des circonstances particulières caractérisant la nécessité de bénéficier à très bref délai d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
5. Il résulte de ce qui précède que la requête de l'association le R.A.I.D de l'Etang de Berre doit être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du même code.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de l'association le R.A.I.D de l'Etang de Berre est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'Association le R.A.I.D de l'Etang de Berre.
Copie en sera adressée au Premier ministre et à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Fait à Paris, le 18 octobre 2024
Signé : Anne Courrèges