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Ariane Web: Conseil d'État 490744, lecture du 21 mai 2024, ECLI:FR:CECHS:2024:490744.20240521

Décision n° 490744
21 mai 2024
Conseil d'État

N° 490744
ECLI:FR:CECHS:2024:490744.20240521
Inédit au recueil Lebon
10ème chambre
M. Bertrand Dacosta, président
Mme Sophie Delaporte, rapporteur
M. Laurent Domingo, rapporteur public


Lecture du mardi 21 mai 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 janvier et 5 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... C..., M. B... D..., Mme E... et l'Union syndicale Solidaires demandent au Conseil d'Etat :

1°) à titre principal, d'annuler pour excès de pouvoir le rapport d'enquête parlementaire sur la structuration, le financement, les moyens et les modalités d'action des groupuscules auteurs de violences à l'occasion des manifestations et rassemblements intervenus les 16 mars et 3 mai 2023, ainsi que sur le déroulement de ces manifestations et rassemblements ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler pour excès de pouvoir la décision de la commission d'enquête parlementaire de convoquer et d'interroger des individus et organisations sur le déroulement de la manifestation du 25 mars 2023 et, par voie de conséquence, ce rapport d'enquête parlementaire ;

3°) à titre plus subsidiaire, d'annuler pour excès de pouvoir ce rapport d'enquête parlementaire en tant qu'il se prononce sur des faits étant l'objet de poursuites pénales ;

4°) à titre plus subsidiaire encore, d'annuler pour excès de pouvoir le refus de la commission d'enquête parlementaire de convoquer le collectif Bassines Non Merci ! et l'un de ses porte-paroles, M. C..., et, par voie de conséquence, ce rapport d'enquête parlementaire ;

5°) à titre infiniment subsidiaire, d'annuler pour excès de pouvoir la décision de publier ce rapport d'enquête parlementaire ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- la Constitution, notamment son article 611 ;
- l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Delaporte, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;



Considérant ce qui suit :

1. M. C... et autres demandent, à titre principal, l'annulation pour excès de pouvoir du rapport du 7 novembre 2023 présenté au nom de la commission d'enquête parlementaire, créée par une résolution adoptée par l'Assemblée nationale le 10 mai 2023, sur la structuration, le financement, les moyens et les modalités d'action des groupuscules auteurs de violences à l'occasion des manifestations et rassemblements intervenus entre le 16 mars et le 3 mai 2023, ainsi que sur le déroulement de ces manifestations et rassemblements. Ils demandent, à titre subsidiaire, l'annulation pour excès de pouvoir des convocations émises par cette commission d'enquête, l'annulation partielle du rapport de la commission d'enquête parlementaire, des décisions de cette commission refusant d'annuler la convocation de certaines personnes et de la décision de publier le rapport de la commission d'enquête parlementaire.

2. Le rapport d'une commission d'enquête parlementaire et les actes adoptés par cette commission pour l'exercice de sa mission ainsi que l'acte par lequel le président de l'Assemblée nationale rend public un tel rapport sont indissociables de la fonction parlementaire de contrôle dont les commissions créées par cette Assemblée et les rapports qu'elles élaborent, notamment en vue de les rendre publics, sont l'un des éléments. Il en résulte qu'en vertu de la tradition constitutionnelle française de séparation des pouvoirs, ils échappent de ce fait par nature au contrôle du juge administratif. La circonstance qu'aucune juridiction ne puisse être saisie d'un tel litige ne saurait avoir pour conséquence d'autoriser le juge administratif à se déclarer compétent.

3. Il résulte de ce qui précède que la requête de M. C... et autres ne peut, sans qu'il y ait lieu, en tout état de cause, de se prononcer sur le renvoi au Conseil Constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée, qu'être rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.



D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. C... et autres est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 2 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... C..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants.
Copie en sera adressée à la présidente de l'Assemblée nationale et au président du Conseil constitutionnel.


Délibéré à l'issue de la séance du 25 avril 2024 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat et Mme Sophie Delaporte, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 21 mai 2024.

Le président :
Signé : M. Bertrand Dacosta

La rapporteure :
Signé : Mme Sophie Delaporte

La secrétaire :
Signé : Mme Sylvie Leporcq



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